AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,33

sur 84 notes
5
3 avis
4
4 avis
3
7 avis
2
3 avis
1
0 avis
"Ainsi tu fus à moi dans l'illusion d'un rêve ;
En dormant on est roi, au réveil tout s'achève."
(W. Shakespeare, Sonnet 87)

C'est un fameux canular littéraire, que nous a concocté Oscar Wilde !
Shakespeare nous a laissé quelques 154 sonnets, dédiés à deux énigmatiques personnes. Les 126 premiers s'adressent à un beau jeune homme, "Mr. W.H.", les autres à une certaine "Dark Lady". Et comme à chaque fois que l'évidence n'est pas servie sur le plateau, les suppositions vont bon train. le candidat le plus probable à l'identité de "W.H." est William Herbert, 3e comte de Pembroke, protecteur et mécène de Shakespeare. Quant aux prétendantes au titre de la Dark Lady, elles sont aussi nombreuses que les prétendants à l'identité de Shakespeare lui-même.
Mais ici c'est le mystérieux W.H. qui intéresse Wilde.
Sa nouvelle s'inscrit bien dans l'époque victorienne, qui a haussé le Grand Will sur le piédestal d'un demi-dieu. Mais les découvertes de documents authentiques concernant Shakespeare n'allaient pas forcément toujours avec l'image du Cygne de l'Avon créée par des bardolâtres, alors d'un côté on commence à douter des capacités littéraires de Will de Stratford, et de l'autre on se met à interpréter ses oeuvres de façon autobiographique, qui fera par la suite plus de mal que de bien à cet héritage littéraire. C'est aussi l'époque de nombreux faux documents censés "prouver" aux sceptiques que l'on peut être à la fois un négociant en malt, prêteur à crédit et l'auteur de quelque chose comme "Hamlet" ou "Jules César". Shylock et Prospero en une seule personne.

L'idée de Wilde est née des débats littéraires avec son ami Robert Ross, et l'histoire a été publiée pour la première fois en 1889 dans le Blackwood Magazine. Ce fut un scandale. La prude Angleterre victorienne s'est soulevée contre l'inacceptable idée que son barde national puisse être amoureux d'un homme, et le texte était ensuite refusé par tous les éditeurs. Pendant l'emprisonnement De Wilde à Reading, le manuscrit a mystérieusement disparu, pour ne réapparaître qu'en 1920 aux Etats-Unis.
Ce livre, où Wilde nous "dévoile" l'identité de W.H., se trouve donc quelque part entre un essai sérieux et un amusant jeu littéraire. Avec beaucoup de légèreté et d'esprit, l'auteur nous propose une admirable réflexion sur les sonnets, tout en montrant comment la frontière entre la recherche sérieuse et la fiction peut être parfois ténue.

Le narrateur (dont on ne saura jamais le nom) discute de falsifications littéraires avec son ami Erskine, et celui-ci en profite pour lui raconter une drôle d'histoire.
L'histoire de son ami Cyril Graham, qui a étudié avec acharnement les sonnets pour y découvrir la véritable identité de W.H. : ce serait un jeune acteur de la troupe de Shakespeare, Willie Hughes. Erskine explique la théorie de Graham sans pourtant la croire, car le maillon essentiel manque : une preuve palpable que ce jeune homme, Willie, eût vraiment existé.
Cyril Graham va payer cher son désir de prouver à tout prix sa vérité à Erskine : une tentative désespérée avec un faux portrait de W.H. va le mener jusqu'au suicide, quand Erskine découvrira la supercherie.
Toute cette histoire n'est qu'une curieuse et triste anecdote, mais notre narrateur succombe au charme de la théorie de Graham, et se penche à son tour sur les sonnets. Dans l'analyse textuelle détaillée (Wilde utilise en tout 36 sonnets, la dédicace et une partie de "A Lover's Complaint" ; un tel appât doit déjà être pris au sérieux !) il va trouver un grand nombre de preuves confirmant la théorie de Graham, l'affinant encore par ses propres découvertes. Il rapporte à Erskine ses conclusions, mais à la fin il commence à s'en méfier lui-même. Trop tard. Maintenant, c'est Erskine qui est à nouveau ensorcelé par la théorie, entreprend de trouver la preuve définitive de l'existence de W.H., et l'histoire glisse doucement vers sa fin surprenante...

Wilde ne travaille pas vraiment ses personnages, son but est de saisir l'interprétation d'une oeuvre de fiction. Comme si la langue de l'interprétation était le véritable héros de sa nouvelle. le procédé est toujours identique : la théorie d'abord, qu'on va ensuite astucieusement imbriquer dans l'ensemble des sonnets, pour que cela "colle". Et cela colle tellement que l'on se laisserait facilement séduire à notre tour ; c'est d'ailleurs le dangereux principe de toute théorie complotiste.
Sur quelques pages, Wilde fait passer tous les "pour" et les "contre" du langage de l'interprétation, en tendant deux irrésistibles pièges au lecteur.
Le premier nous fait réaliser que quoi qu'on puisse dire ou penser de sa nouvelle, on arrive toujours aux mêmes figures rhétoriques dont Wilde se moque. Comme si le "portrait" devenait un miroir au lecteur.
Et le deuxième, moins subtil mais d'autant plus drôle, est la fin. L'histoire insinue clairement que les jours de celui qui connait en détail la théorie de Cyril Graham sont comptés.

Voilà pourquoi je n'ai d'autre choix que de vous déconseiller fermement cette lecture, ce qui est fort dommage, car on apprend un tas de choses bien intéressantes sur les sonnets et les coulisses du théâtre élisabéthain. 4,5/5 pour l'agréable moment en compagnie De Wilde, hélas, si cher payé, et me voilà heureuse de pouvoir finir au moins cette cr
Commenter  J’apprécie          7220
« Vous ne voulez quand même pas dire que vous croyez en Willie Hughes ? »

J'y crois ! Convaincue que Mr W. H. est Willie Hughes. Que l'hypothèse avancée est la bonne. Tout simplement parce qu'Oscar Wilde écrit « Les paroles ont sur l'âme un pouvoir mystique ». Et c'est tellement bien écrit par Wilde qui peut se permettre de citer du Shakespeare tout en le ponctuant de sa prose, sans donner signe de hiérarchie entre les deux génies mais en entretenant le pouvoir de nous bercer dans le meilleur des songes. Une toute petite nouvelle qui m'a appris beaucoup sur Shakespeare et sur le théâtre élisabéthain.

« (...) grâce aux passions feinte et aux simulations de la scène, révéla le lien intime, vital, qui unit la vie et la littérature. »

J'ai apprécié la construction lente au début pour finir dans un bouquet final qui cloue le lecteur, lui donnant des envies de porter de grandes choses, de croire à ses idées et les porter loin. C'est tellement vrai que l'art nous donne à nous connaître en profondeur.

« Dans quelque minuscule cellule d'ivoire, le cerveau conserve les impressions les plus délicates et les plus fugaces. »
Commenter  J’apprécie          270
On se croirait dans un cours magistral! On repasse les sonnets de Shakespeare au peigne fin, des sonnets aux mots forts , aux pensées alléchantes que Shakespeare a martelé pour apposer son éternité...en fait l'éternité de son âme troublée, l'éternité de son amour pour un certain Mr W.H dont l'identité est joliment énigmatique. Qui est monsieur Mr W H? Répondre à cette question, c'est s'imprégner l'univers de Shakespeare, ce qui conduit inévitablement à l'envoutement au trouble du syndrome Shakespearien...parfois on en meurt!!!
Commenter  J’apprécie          230
Réflexion, analyse et thème sur une poésie d'un des plus grands auteurs théâtral de son siècle.
A connaître et lire avec curiosité et interrogations.
La beauté de l'art poétique d'un seizième siècle de certitudes et d'autorités, se dévoile et y trouve ses réponses.
Commenter  J’apprécie          131
"Heureux donc suis-je, moi qui aime et suis aimé

Où je ne puis changer, non plus qu'être changé."

Le narrateur apprend par son ami Erskine la terrible histoire de Cyril, jeune aristocrate qui est mort, choisissant le suicide.
Cet homme, jeune encore à qui la vie réservait tout, s'était pris de passion depuis toujours pour l'oeuvre de Shakespeare et particulièrement, ses fameux Sonnets.
Dans ses Sonnets, Shakespeare déclare son amour à un homme que l'on croyait être son protecteur, Lord Pembroke.
Pour Cyril, il ne s'agit en aucun cas de cet aristocrate mais d'un acteur méconnu, Willie Hugues. Il cherche alors tout ce qu'il possible de trouver comme élément pour étayer sa thèse, il va même jusqu'à produire un faux pour convaincre son ami Erskine et se donne la mort de désespoir.
Le narrateur est tout de suite fasciné par cette histoire et il se plonge dans la lecture des Sonnets, trouvant au détour de chaque vers des preuves de l'existence de Willie Hugues.
Ce mystérieux homme, susceptible de faire naitre une telle passion et une telle dévotion au si fameux barde, serait un acteur, de basse extraction qui pourvu d'une telle beauté, aurait l'habitude de jouer les personnages féminins dans les pièces de Shakespeare.
Cet essai romancé nous emmène à la découverte du théâtre Elisabéthain, théâtre dans lequel, les hommes devaient prendre la place des femmes, proscrites de ces lieux de perdition.
Surtout il nous permet de comprendre et de partager la passion qu'éprouve Wilde envers Shakespeare et plus généralement envers la beauté et sa présence dans tout art.
Ces Sonnets furent pour moi une découverte, le style précis et recherché De Wilde a permis de me les rendre accessibles.


Lien : http://l-ivresque-des-livres..
Commenter  J’apprécie          120
Le portrait de Mr. W.H a été une surprise car je pensais qu'il s'agissait d'un pur roman de fiction et pas d'un essai déguisé en roman.

Oscar Wilde se questionne sur le fameux W.H à qui Shakespeare a dédié ses Sonnets. de nombreuses théories ont vu le jour et Wilde apporte sa pierre à l'édifice sous couvert d'une conversation qu'il aurait eu avec un certain Erskine.

L'idée est plaisante sauf que je n'ai pas lu les Sonnets et que je ne suis pas une fanatique des analyses de textes - ça me vient de l'école.
Aussi, je n'ai pas pris autant de plaisir que je l'escomptais. Je me suis même ennuyée par instant.

Heureusement, Wilde est un fabuleux écrivain qui parsème son récit d'aphorismes brillants.

En outre, il est intéressant de voir l'auteur chercher à s'exprimer sur la prétendue homosexualité du Barde tout en évitant de se montrer trop clair à ce sujet. Il tourne autour du pot mais il est impossible de ne pas comprendre le fond du discours. Après tout, l'époque victorienne n'était pas la plus ouverte concernant l'homosexualité et tenter d'exprimer cette théorie était en soi culotté.

Même si ce n'est pas mon texte préféré De Wilde, je suis heureuse d'avoir fait l'effort de le lire, ne serait-ce que pour la beauté de certaines tournures de phrases.
Commenter  J’apprécie          70
Amusant livret, porteur d'un sens profond, que celui-ci. Wilde exploite l'inépuisable légende de Shakespeare (qui était-il, a-t-il seulement existé ? qui se cache sous ce nom ? et dans les Sonnets, qui est l'amant ? l'aimé ? l'aimée ? etc). On a ici deux récits d'impostures et de "forgeries" merveilleuses, à base de rêveries homosexuelles, de faux documents, et de vraies interrogations. le troisième essai est consacré à un artiste criminel, figure qui renouvelle celle du faussaire dans les deux récits précédents. Ces jeux de miroirs et d'ironies, ces parodies et auto-parodies, ce mélange savant de romanesque et d'essai, sont brillamment commentés et élucidés par Pascal Aquien dans son indispensable introduction.
Commenter  J’apprécie          60
Qui est le mystérieux W. H. à qui Shakespeare dédit ses Sonnets? Voilà la trame de l'enquête dans laquelle se lance Oscar Wilde. Sous couvert de la fiction, il nous emmène dans sa théorie. Et si ce W. H. était en réalité Willie Hugues, un jeune acteur appartenant à la troupe de Shakespeare? L'auteur se lance dans une grande analyse des Sonnets pour étayer son hypothèse.

Etant une vraie novice en ce qui concerne le théâtre et Shakespeare, ce fut une découverte tant au niveau de l'époque élisabéthaine qu'au niveau de la prose de Shakespeare (qui m'a paru à certains moments un peu indigeste).
Wilde nous balade dans cette époque où de jeunes hommes jouaient les rôles de Juliette, Desdémone, Ophélie, ... où le théâtre était vu comme un lieu de perdition et de débauche, où de jeunes garçons étaient parfois enlevés à leur famille sous prétexte de servir la Reine mais pour être en réalité enrolés dans une compagnie théâtrale :O, ...

Puis il y a l'enquête à proprement dite qui bien qu'intéressante pourrait se révéler être complètement fausse. Nulle trace de Willie Hugues nulle part sauf dans l'imagination du narrateur; Ce qui est troublant, c'est que les Sonnets pourraient être adressés à ce fameux Willie car avec l'explication De Wilde, toutes les pièces forment un tout cohérent. Cependant cela reste une hypothèse, certes logique, bien construite et plausible mais sans preuves, elle ne peut être promue au rang de vérité.

Ce court essai vaut la peine d'être lu même si j'ai dû m'accrocher à certains moments entre l'enquête sur W. H., les moeurs du théâtre élisabéthain, les pensées de l'auteur sur la beauté et les Sonnets de Shakespeare.
Mais je suis contente d'avoir fait l'effort :).
Commenter  J’apprécie          60
Quand Wilde se voit montré un tableau qui représenterait le très mystérieux "Mr. W. H." de Shakespeare à qui ce dernier aurait dédié ses "Sonnets", il n'en faut pas plus pour le titiller et le lancer dans l'étude de l'oeuvre du Barde afin de répondre à l'une des plus grosses énigmes littéraires...

Construit sur la base d'une fiction, cet ouvrage n'en est pas moins un essai, une réflexion sur l'art, le faux, et bien évidemment sur l'identité de l'homme qui aurait fait battre le coeur du fameux dramaturge et poète. Et c'est ce qui m'a franchement déroutée, moi qui m'attendais à de la pure fiction, ignare comme je suis des arcanes shakespeariennes et surtout relativement vaccinée par les études stylistiques dont j'ai dû m'empiffrer pendant 9 ans.
Alors ce fut une lecture à la fois intéressante et barbante, instructive et rébarbative, parsemée d'extraits de sonnets importuns, sauf si on ne fait pas l'erreur, comme moi, de ne pas comprendre la quatrième de couverture.
La théorie défendue par Wilde (ou plutôt par son personnage) n'est pas celle retenue par la majorité des érudits. Ainsi, tout se contruit sur un faux, pour finir sur une fin certes fictive mais qui par son statut encense le faux, décridibilise la théorie pré-développée. C'est finalement cet aspect-là, ce jeu, qui est le plus intéressant.
Cet ouvrage - étrange concours de circonstances - fait écho à l'une de mes récentes lectures sur le même thème du faux avec l'oeuvre de Shakespeare. Quand, p80, Wilde mentionne une pièce de Thomas Hews intitulée "Les Malheurs d'Arthur", mon sang ne fait qu'un tour et me renvoie au magistral roman du faux d'Arthur Phillips "La Tragédie d'Arthur".
En définitive, ce livre est une curiosité relativement facultative.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
Commenter  J’apprécie          60
Qui est donc le fameux Mr W.H. à qui Shakespeare dédicace la première version de ses Sonnets ? Passionné par ce mystère, Oscar Wilde mène l'enquête. Les célèbres initiales de celui qui inspira l'un des plus éminents dramaturges anglais de l'ère élisabéthaine, appartiennent-elles à Henry Wriothesley (troisième comte de Southampton, protecteur de Shakespeare) ? Sont-elles celles de William Hall, libraire et begetter des Sonnets), William Hathaway (frère d'Anne Hathaway, épouse de Shakespeare) ou celles de William Shakespeare lui-même ? D'après la théorie De Wilde, il s'agirait de Willie Hugues, acteur spécialisé dans les rôles féminins qui inspira le Barde. Mais comment Wilde en est-il arrivé à ces conclusions ? C'est ce que traite ce petit roman, extrait des Oeuvres d'Oscar Wilde de la Bibliothèque de la Pléiade.

Plongé dans la peau de l'enquêteur, Wilde rencontre un certain Monsieur Erskine qui l'entretient au sujet de la théorie de Cyril Graham : ce dernier, croit fermement que derrière W.H. se cache Willie Hughes. Pour convaincre Erskine de sa thèse, Graham n'hésite pas à commander un faux portrait du comédien. Seulement, Erskine découvre par hasard le pot aux roses et refuse de prêter foi à ses convictions. Déçu, Graham se suicide et laisse une lettre à Erskine dans laquelle il charge ce dernier de partager son idée au monde. Intrigué, Oscar Wilde part en quête de la vérité sur cette affaire...

L'argumentaire de Wilde fourmille de références aux Sonnets. Misant sur une logique imparable, l'auteur confirme la connaissance qu'il a de l'oeuvre de Shakespeare et l'on découvre au fil de ses hypothèses une interprétation séduisante et érudite. Affirmant son idée que l'esthétique et l'éthique sont dissociables, Wilde signe grâce à ce roman une enquête fictive et littéraire digne des plus belles plumes de son époque. C'est un exercice de style dans lequel Wilde excelle et j'ai beaucoup apprécié cette facette qui m'était méconnue de l'auteur. Au fond, ce qui me plait le plus dans ce roman, c'est la part de mystère qui entoure W.H. Malgré la savante démonstration De Wilde à propos de l'identité véritable de W.H., il me plait à moi de croire que cet inconnu ne soit pas identifié. Ce qui importe, c'est finalement que l'oeuvre de Shakespeare est toujours vive dans l'esprit des nouvelles générations.
Lien : http://livresacentalheure-al..
Commenter  J’apprécie          60




Lecteurs (239) Voir plus



Quiz Voir plus

Quiz sur Oscar Wilde

De quelle nationalité est Oscar Wilde ?

écossaise
irlandaise
anglaise
galloise

10 questions
253 lecteurs ont répondu
Thème : Oscar WildeCréer un quiz sur ce livre

{* *}