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Loïc Chotard (Préfacier, etc.)Graham Robb (Collaborateur)
EAN : 9782070380558
480 pages
Gallimard (29/02/1988)
3.8/5   33 notes
Résumé :
Tout le monde a pleuré aux amours de Rodolphe et de Mimi.
Mais peu de gens ont lu le roman de Murger, dont le buste trône mélancoliquement dans l'un des coins les plus délaissés du Luxembourg et qui a pourtant laissé avec les Scènes de la vie de Bohème, une sorte de testament du romantisme, à la fois ironique et désespéré.

De la bohème, les romantiques ont fait un long usage depuis Nodier, Nerval et Musset jusqu'à Baudelaire ou même Hugo. Aux ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Épris(e) d'admiration pour les films d'Aki Kaurismäki, je me suis accordé(e) une petite cure en chambre obscure. le générique de "La Vie de bohème", film franco-finlandais sorti en 1992, a attiré mon attention, surtout par l'indication de Laika interprétant le rôle de Baudelaire, car je savais déjà que Laika était le chien du réalisateur, mais visiblement j'ai dans un premier temps raté l'indication de l'adaptation (toujours libre ou devrais-je dire originale) d'après Murger. Il m'aura fallu l'amusement d'un incorrigible bohème vivant, Mihai Neagu Basarab, qui cite généreusement dans "La dernière bohème bucarestoise" des maîtres bohèmes français, pour rétablir le lien entre le film (que je vous conseille d'ailleurs vivement aussi) et le texte de Murger. Voilà comment de film en livre et de livre en livre, j'en arrive à confirmer que c'est un livre qui mérite en effet d'être sorti de l'oubli. L'absurde germe déjà dans certaines mises en abîme de la création de l'artiste sans le sou mais en quête de soûlerie. On a reproché à Murger de s'être enrichi en écrivant sur la bohème, en la trahissant par la même occasion. Que ce forfait lui soit pardonné pour notre plus grand amusement. L'interprétation d'Aki Kaurismäki qui se sert de diverses nationalités (Albanais, Bulgares, Roumains si ma mémoire est bonne) pour incarner les "marginaux" nous apparaît presque comme une métaphore d'un intemporel Paris bourgeois.
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Voici un bouquin aurait sombré dans un oubli absolument total s'il n'avait pas été adapté en opéra ! le mot « Bohème » désignerait-il autre chose qu'une obscure voisine de la Moravie, sans Puccini et Pavarotti chantant son amour pour Mimi ? Et plus grave que tout, comment surnommerait-on les parisiens brunchant dans des restaurants post-industriels bios ?

Ce que je sais, c'est que voici un livre qu'il serait bon de déterrer. le sieur Murger possède une excellente plume et un humour ravageur, et c'est plaisir que de suivre Rodolphe, ses comparses et leurs maitresses respectives dans leurs vies on ne peut plus chaotiques. La misère est là, dans l'existence de tous les jours, le drame pas bien loin, mais il s'agit de profiter avec superbe de ce qu'on a ou pas à l'instant présent, et de faire contre mauvaise fortune grand rire. Les tragédies sont bonnes à allumer le feu, les tableaux à servir d'enseignes à des estaminets, qu'importe !

Au fond, tout ce petit monde est bien gentil et bien brave. Il fait beaucoup de bruit, ne paye pas ses dettes, mais il ne leur viendrait pas à l'esprit de faire une méchanceté, et on peut compter sur eux dans la détresse. Ils pardonnent aussi vite qu'ils s'offusquent, oublient vite les infidélités de leurs maitresse –qu'y faire si de temps en temps elles ont le désir de fréquenter un homme fortuné qui les remplumera un peu ?

D'ailleurs ces dernières ne sont pas en reste. Que faire quand l'huissier a saisi votre mobilier et l'a fait descendre dans la cour ? Déroulez les tapis sur le pavé, disposez vos meuble, et recevez vos amis comme si de rien n'était. La fête n'en sera que plus gaie !

A lire pour redécouvrir un talent oublié, et constater que la jeunesse d'aujourd'hui n'a pas grand-chose à envier à celle d'hier – à part peut-être son art du calembour.
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On imagine souvent l'artiste ou le poète comme une sorte de chauve-souris : une personne sombre, mystérieuse, recluse sur elle-même.

Ce n'est pas le cas de ces artistes auto-proclamés dans ce roman, des « bohèmes », de joyeux festifs à l'esprit fraternel, goutant à tous les petits plaisirs que la société parisienne offre.

Ce ne sont pas des bohèmes bourgeois, et cela a toute son importance dans le roman. La misère les rend attachants. Plus séduisant encore, ce sont leurs manières de réagir à la misère. Chaque problème à sa fausse solution. Emprunteur davantage pour rembourser une dette, fuir le propriétaire qui réclame des impayés, ou l'amadouer quand il faut, réparer un chagrin amoureux par la première amourette venue, faire des orgies plutôt qu'épargner quand l'argent vient… Chaque bohème fait consciemment toutes ces maladresses, dans l'insouciance et la gaieté la plus totale et rien n'est fait dans l'intention de nuire.

Les premiers chapitres décrivent à merveille ces bohèmes vivant de hasard et d'esprit. Puis ce groupe de bohèmes, que l'aléa à formé, se resserre et semble murir tout le long du roman, en bien et en mal.

Le principal défaut de ce groupe est d'être une sorte d'association ou de club très fermé : il y a un parti pris d'isolement clairement affirmé. Ils perdent ainsi nécessairement l'avantage de se renouveler et de se rafraîchir par de nouveaux membres. Tout se concentre alors sur 4 artistes, un poète, un musicien, un philosophe et un peintre, petit cercle agrémenté de bohèmes féminines qui sont artistes dans l'âme, des électrons libres, vivant de liberté et de caprices.

L'autre défaut est que l'auteur n'a pas suffisamment développé le caractère de ces 4 artistes, ils se ressemblent un peu tous : mêmes goûts, habitudes, amours, mêmes sentiments et esprits. Seul le philosophe se démarque un peu dans le lot par ses extravagances.

C'est un peu la même chose pour les filles du cercle, ce ne sont que des courtisanes amoureuses, et variant peu, sauf à la fin du roman.

Bien dommage également, ce sont quelques digressions ratées à mon sens, en ce qu'elles sont trop détachées du roman. Quelques-unes sont toutefois suffisamment originales et touchantes pour marquer l'esprit.

Mais ce qui distingue formidablement ce roman, c'est ce va et vient amoureux entre Mimi et Rodolphe et Musette et Marcel. Les couples de bohèmes sont complexes, hauts en couleurs, un jour attaché, le lendemain détaché, ces couples créent des refrains d'amour frais et spontané mêlés avec des refrains de caprices, de disputes… Musette et Mimi sont tiraillées par les séductions de la haute société à laquelle elles ont un ticket d'entrée et Rodolphe et Marcel ont parfois cette dureté d'artiste égoïstes qui n'incitent pas à la réconciliation. Parfois l'extrême misère des uns attire la compassion des autres et renoue les liens, parfois l'irrésistible charme d'un poème suffit à déraciner une des filles du milieu aristocratique et aussi parfois l'état de santé critique d'une personne rebat les cartes de toute une relation.

La fin est sublime d'émotions sauf le tout dernier chapitre qui est un peu décevant et se veut maladroitement moralisant. Pour résumé grossièrement, être bohème ça va un temps, mais après il faut grandir… Une fin qui détonne et ressemble trop peu à l'auteur, la fin est brève, cela ressemble à une morale nécessaire pour éviter les critiques pour atteinte aux bonnes moeurs et éviter des remarques comme « ce roman va corrompre l'esprit de mon jeune fils ».

Le style ressemble aux bohèmes du roman, en ce que le style est léger, comique, quelques métaphores audacieuses. Les chapitres sont rapides, attachants, complets, les larmes s'y glissent sous le rire, les détails sont à leur place et l'on trouve des mots charmants de naïveté, de sentiment, de vérité ou de fantaisie.

Si vous n'avez pas l'humeur à vous consacrer à des lectures romantiques, certes attachantes, mais d'une solennité froide, car comme disait Balzac « tous ces poètes ont peu ce sentiment du comique » alors vous apprécierez grandement cette succession de récits brefs, attachants, où le comique se mêle à toutes les émotions, le tout sous un ton humble et décontracté sans pour autant tomber dans la vulgarité ni la facilité d'esprit.
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Publiées en feuilleton, comme cela se faisait beaucoup à l'époque, de 1845 à 1849, ces Scènes de la vie de bohème sont un véritable petit trésor littéraire qu'il ne faut pas manquer de découvrir.
Bien moins connu que les oeuvres De Musset, De Balzac, ou plus tard Baudelaire, qui dirent à leur façon la difficulté de créer dans un monde où l'argent devenait souverain et où la bourgeoisie la plus conformiste triomphait, ce recueil mérite pourtant d'être sauvé de l'oubli.
A travers quelques personnages récurrents, Rodolphe, Mimi, Musette, Schaunard - grisettes et artistes en devenir - c'est tout une époque que l'on découvre : celle de la première moitié du XIXe siècle, celle de jeunes gens vivant au jour le jour sous les toits de Paris, croyant en leur génie, ne souffrant aucun compromis et brandissant tout à la fois leur jeunesse et leur expérience la plus intime comme des flambeaux.
C'est aussi la fin d'une époque que nous narre Murger, l'apogée du romantisme, alors qu'au lendemain de la révolution de 1848, une nouvelle génération allait se faire jour, une génération désabusée qui prônerait un art ancré dans le réel, montrant celui-ci jusque dans ses aspects les plus crus et les plus triviaux.
Enfin, c'est aussi le chant de la jeunesse, quelle qu'en soit l'époque, le moment de l'entrée dans la vie, lorsque tout paraît possible, lorsque l'insouciance donne des ailes alors même que la difficulté du quotidien pourrait interdire toute espérance. Une histoire intemporelle, donc, une histoire "que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître".

Lien : http://delphine-olympe.blogs..
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Un classique peu connu, mais qu'il est intéressant de découvrir !
Ce recueil est composé de nouvelles publiées en feuilleton, sauf les premières et les dernières, écrites spécialement pour la sortie du livre en 1851, les trois premières racontant par exemple la rencontre des quatre amis. En effet, les héros de ces nouvelles sont quatre artistes (enfin, selon eux !), Alexandre Schaunard, musicien, Gustave Colline, philosophe, Marcel, peintre, et Rodolphe, poète. Ils mènent une vie de "bohème", dans la misère, et dépensant sans compter et sans se soucier de l'avenir le peu d'argent qu'ils ont. Trois d'entre eux ont une maîtresse avec qui ils entretiennent des relations tumultueuses, dont Mimi, dont les amours avec Rodolphe ont inspiré Puccini.
Un recueil agréable à lire, avec des personnages et des situations comiques voire grotesques, et qui restitue bien l'esprit de la vie de ces artistes désargentés au XIXe siècle.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
M. Bernard, qui en d’autres moments aurait sévèrement blâmé cette infraction aux lois de la hiérarchie sociale, ne parut pas s’en apercevoir. Il mit ses lunettes, rompit l’enveloppe avec l’émotion respectueuse d’un vizir qui reçoit un firman du sultan, et commença la lecture de la dépêche. Aux premières lignes, une grimace épouvantable creusa des plis cramoisis dans la graisse de ses joues monacales, et ses petits yeux lancèrent des étincelles qui faillirent mettre le feu aux mèches de sa perruque en broussailles.
Enfin tous ses traits étaient tellement bouleversés qu’on eût dit que sa figure venait d’éprouver un tremblement de terre.
Voici quel était le contenu de la missive écrite sur papier à tête du ministère de la guerre, apportée à franc étrier par un dragon, et de laquelle M. Durand avait donné un reçu au gouvernement.
"Monsieur et propriétaire,
La politesse qui, si l’on en croit la mythologie, est l’aïeule des belles manières, m’oblige à vous faire savoir que je me trouve dans la cruelle nécessité de ne pouvoir point satisfaire à l’usage qu’on a de payer son terme, quand on doit surtout. Jusqu’à ce matin, j’avais caressé l’espérance de pouvoir célébrer ce beau jour, en acquittant les trois quittances de mon loyer. Chimère, illusion, idéal ! Tandis que je sommeillais sur l’oreiller de la sécurité, le guignon, anankè en grec, le guignon dispersait mes espérances. Les rentrées sur lesquelles je comptais, Dieu que le commerce va mal ! ! ! ne se sont pas opérées ; et sur les sommes considérables que je devais toucher, je n’ai encore reçu que trois francs, qu’on m’a prêtés, je ne vous les offre pas. Des jours meilleurs viendront pour notre belle France et pour moi, n’en doutez pas, monsieur. Dès qu’ils auront lui, je prendrai des ailes pour aller vous en avertir et retirer de votre immeuble les choses précieuses que j’y ai laissées, et que je mets sous votre protection et celle de la loi qui, avant un an, vous en interdit le négoce, au cas où vous voudriez le tenter afin de rentrer dans les sommes pour lesquelles vous êtes crédité sur le registre de ma probité. Je vous recommande spécialement mon piano, et le grand cadre dans lequel se trouvent soixante boucles de cheveux dont les couleurs différentes parcourent toute la gamme des nuances capillaires, et qui ont été enlevées sur le front des grâces par le scalpel de l’amour.
"Vous pouvez donc, monsieur et propriétaire, disposer des lambris sous lesquels j’ai habité. Je vous en octroie ma permission ici-bas revêtue de mon seing.
"Alexandre Schaunard."
Lorsqu’il eut achevé cette épître que l’artiste avait écrite dans le bureau d’un de ses amis, employé au ministère de la guerre, M. Bernard la froissa avec indignation.
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De sept à huit heures, il fut en proie à la fièvre aiguë de l'attente. Supplice lent qui lui rappela ses jours anciens, et les anciennes amours qui les avaient charmés. Puis, suivant son habitude, il rêva déjà d'une grande passion, un amour en dix volumes, un véritable poème lyrique avec clairs de lune, soleils couchants, rendez-vous sous les saules, jalousies, soupirs, et le reste. Et il en était ainsi chaque fois que le hasard amenait une femme à sa porte, et pas une ne l'avait quitté sans emporter au front une auréole et au cou un collier de larmes.
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Le premier usage que Rodolphe fit de cette tranche du Pérou, qui venait de tomber dans sa poche, fut de ne point payer ses dettes ; attendu qu'il s'était juré à lui-même d'aller à l'économie et de ne faire aucun extra. Il avait d'ailleurs à ce sujet des idées extrêmement arrêtées, et disait qu'avant de songer au superflu, il fallait s'occuper du nécessaire ; c'est pourquoi il ne paya point ses créanciers, et acheta une pipe turque, qu'il convoitait depuis longtemps.
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s'il l'avait tant aimée, c'est qu'elle avait su être pour lui une femme et une maîtresse, un sentiment dans une forme.
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Musette avait ce jour-là une ravissante toilette; jamais reliure plus séductrice n'avait enveloppé le poème de sa jeunesse et de sa beauté.
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La Bohême, mise en scène de 2010 à Düsseldorf
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