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Citations sur Le Monde d'hier : Souvenirs d'un Européen (289)

En 1938, après les événements d'Autriche, notre monde s'était déjà accoutumé à l'inhumanité, à l'injustice et à la brutalité comme jamais il ne l'avait fait auparavant pendant des centaines d'années. Tandis qu'autrefois ce qui s'est produit dans cette malheureuse ville de Vienne aurait suffi à faire mettre les criminels au ban de l'humanité, la conscience universelle se tut, en cette année 1938, ou se borna à murmurer un peu, avant d'oublier et de pardonner.
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Des innombrables énigmes insolubles de l'univers, c'est quand même le mystère de la création qui demeure la plus insondable et la plus mystérieuse.
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A l'instant où le train franchit la frontière, à l'instar de Lot, le père archaïque de la Bible, que derrière moi tout n'était plus que poussière et cendres, passé pétrifié en sel amer. [p.524-525]
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Dans ce chaos insensé, la situation se faisait de semaine en semaine plus absurde et immorale. Qui avait économisé pendant quarante ans et, en outre, patriotiquement placé son argent dans les emprunts de guerre était réduit à la mendicité. Qui avait contracté des dettes en était déchargé. Qui s'en tenait correctement à la répartition des vivres mourait de faim; seul celui qui transgressait effrontément mangeait son soûl. Qui savait corrompre faisait de bonnes affaires; qui spéculait profitait.
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Je m'amuse toujours de l'étonnement des jeunes, quand je leur raconte qu'avant 1914 je voyageais en Inde et en Amérique sans posséder de passeport, sans même en avoir jamais vu un.

On montait dans le train, on en descendait sans rien demander, sans qu'on vous demandât rien, on n'avait pas à remplir une seule de ces mille formules et déclarations qui sont aujourd'hui exigées. Il n'y avait pas de permis, pas de visas, pas de mesures tracassières, ces mêmes frontières qui, avec leurs douaniers, leur police, leurs postes de gendarmerie, sont transformées en un système d'obstacles ne représentaient rien que des lignes symboliques qu'on traversait avec autant d'insouciance que le méridien de Greenwich.

C'est seulement après la guerre que le national-socialisme se mit à bouleverser le monde, et le premier phénomène visible par lequel se manifesta cette épidémie morale de notre siècle fut la xénophobie : la haine ou, tout au moins, la crainte de l'autre.

Partout on se défendait contre l'étranger, partout on l'écartait.

Toutes les humiliations qu'autrefois on n'avait inventées que pour les criminels on les infligeait maintenant à tous les voyageurs, avant et pendant leur voyage.

Il fallait se faire photographier de droite et de gauche, de profil et de face, les cheveux coupés assez court pour qu'on pût voir l'oreille, il fallait donner ses empreintes digitales, d'abord celle du pouce seulement, plus tard celles des dix doigts, il fallait en outre présenter des certificats, des certificats de santé, des certificats de vaccination,…

Constamment, nous étions interrogés, enregistrés, numérotés, examinés, estampillés, et pour moi, incorrigible survivant d'une époque plus libre et citoyen d'une république mondiale rêvée, chacun de ces timbres imprimés sur mon passeport reste aujourd'hui encore comme une flétrissure, chacune de ces questions et de ces fouilles comme une humiliation.

Ce sont de petites choses, je le sais, de petites choses à une époque où la valeur de la vie humaine s'avilit encore plus rapidement que celle de toute monnaie. Mais c'est seulement si l'on fixe ces petits symptômes, qu'une époque à venir pourra déterminer avec exactitude l'état clinique des conditions et des perturbations qu'a imposées à l'esprit notre monde d'entre les deux guerres.
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Même de l’abime de terreur où nous allons aujourd’hui à tâtons, à demi aveugles, l’âme bouleversée et brisée, je ne cesse de relever les yeux vers ces anciennes constellations qui resplendissaient sur ma jeunesse et me console avec la confiance héritée de mes pères qu’un jour cette rechute ne paraîtra qu’un intervalle dans le rythme éternel d’une irrésistible progression
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Jamais une génération n'est tombée comme la nôtre d'une telle élévation spirituelle dans une telle décadence morale.
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Car le génie de Vienne — génie proprement musical — a toujours été d’harmoniser en soi tous les contrastes ethniques et linguistiques, sa culture est une synthèse de toutes les cultures occidentales ; celui qui vivait et travaillait là se sentait libre de toute étroitesse et de tout préjugé. Nulle part il n’était plus facile d’être un Européen, et je sais que je dois principalement à cette ville, qui déjà au temps de Marc Aurèle avait défendu l’esprit romain d’universalisme, d’avoir de bonne heure appris à aimer l’idée de la communauté comme la plus noble que mon cœur eût en lui.
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Quoi d'étonnant, dès lors, si ce siècles chauffait complaisamment au soleil de ses réussites et ne considérait la fin d'une décennie que comme le prélude à une autre, meillure encore? On croyait aussi peu à des rechutes vers la barbarie, telles que des guerres entre les peuples d'Europe, qu'aux spectres et aux sorciers; nos pères étaient tout pénétrés de leur confiance opiniâtre dans le pouvoir infaillible de ces forces de liaison qu'étaient la tolérance et l'esprit de conciliation. Ils pensaient sincèrement que les frontières des divergences entre nations et confessions se fondraient peu à peu dans une humanité commune et qu'ainsi la paix et la sécurité, les plus précieux des biens, seraient imparties à tout le genre humain.
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Le destin sait toujours trouver une voie pour aller chercher l'homme dont il a besoin pour ses desseins secrets, même quand cet homme désire se cacher.
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