AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,16

sur 112 notes
5
9 avis
4
6 avis
3
2 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'ai beaucoup aimé cette nouvelle, car l'auteur nous entraîne encore dans une de ces monomanies dont il a le secret.

Ici, Stefan Zweig se penche sur l'amour inconditionnel, virant à l'obsession pour la personne aimée. On n'est pas dans l'érotomanie, car notre inconnue ne s'imagine pas que l'écrivain est amoureux d'elle et ne lui demande rien. C'est un amour absolu sur lequel elle va construire toute sa vie, lisant beaucoup car il est écrivain, s'intéressant à la musique pour l'apercevoir lors d'un concert, allant sur son terrain mais restant incognito, sans le harceler…

L'amour de l'enfant de treize ans au départ ne semble pas pathologique, elle pense qu'elle est amoureuse avec un grand A (ça existe encore de nos jours, cf. les ados qui hurlent en voyant Justin Bieber ou Brad Pitt selon les générations) mais, peu à peu, il y a une dérive, une fixation, une obsession qui envahit toute sa vie. « J'étais en deuil et je voulais être en deuil ; je m'enivrais de chaque privation que j'ajoutais encore à la privation de ta vus. Bref, je ne voulais pas me laisser distraire de ma passion : vivre pour toi. »


Même lorsqu'elle le revoit des années plus tard, elle ne lui dit pas qui elle est. Elle se contente de quelques jours passés avec lui et va construire toute sa vie la dessus. Elle a un enfant de cet homme, mais ne le lui dira jamais, acceptant de vivre en marge de la société bien pensante de l'époque. Elle reporte sur l'enfant les sentiments qu'elle éprouve pour le père et n'existera que pour lui. On sait tout de suite qu'elle écrit cette lettre parce que l'enfant est mort. On imagine ce qu'aurait pu provoquer cet amour, presque idolâtrie, sur l'enfant…

Elle l'appelle « mon bien-aimé » chaque fois qu'elle lui raconte quelque chose de nouveau, et cette expression revient de façon itérative, comme l'est une obsession.

Elle est amoureuse de l'homme, de l'écrivain (celui qui raconte des histoires, les invente), de l'amour. On est plus dans le registre de la passion, de l'excès que de l'amour, car il y a une véritable fixation sur l'objet aimé. On retrouve de ce fait le thème des monomanies, cher à Stefan Zweig avec les échecs dans « le joueur d'échecs », ou le jeu dans « Vingt-quatre heures de la vie d'une femme », entre autres.

On trouve une phrase importante dans « le joueur d'échecs », où l'auteur écrit : « les tortures psychologiques de la Gestapo ont annihilé son être tout entier, et comment le jeu d'échecs lui a permis de survivre, à moins que justement il ne l'ait fait basculer dans la folie. » qui peut s'appliquer aussi à « Lettre d'une inconnue »

On retrouve enfin dans ce texte la notion de confession, la parole qui libère, le secret qui tombe, devenant ainsi la propriété de l'écrivain, objet d'adoration.

Zweig était contemporain de Freud dont il a publié une biographie et la maladie mentale l'intéressait. On peut noter également que, pour Freud, les auteurs de biographies devenaient habités par la personne dont ils étudiaient la vie au point que cela pouvait devenir obsessionnel et flirter ainsi avec la monomanie.

Bref, j'ai beaucoup aimé, comme toujours avec Stefan Zweig et cet auteur me plaît tellement que cela me rend peut-être indulgente. Je suis très perméable à sa sensibilité à fleur de peau, à son style, cette « nouvelle enchâssée comme il les aime, avec un court passage nous expliquant les circonstances de l'écriture de la lettre, puis le texte lui-même pour finir avec un épilogue où il développe les réactions de celui qui la reçoit.

La façon dont il aborde le fonctionnement mental m'intéresse beaucoup. Il flirte en permanence avec la persécution, le délire, l'obsession, la perversité ou l'autodestruction car l'amour de notre inconnue ne ressemble en rien à l'amour du Romantisme.

Dans ce livre, figure une autre nouvelle, très courte mais dense, « La ruelle au clair de lune » qui traite également d'un amour pathologique, celui d'un homme jaloux et radin qui va mendier l'amour de la femme qu'il a perdu, n'hésitant pas à s'humilier devant elle, dérivant ainsi dans une relation sadomasochiste, où les rôles s'inversent, le persécuteur devenant persécuté. L'auteur choisit, dans cette nouvelle, d'insérer le récit dans le cadre de deux promenades nocturnes que fait le narrateur dans les ruelles d'un port.

J'ai envie de « tester » ses biographies. Je crois que je vais demander au Père Noël ses oeuvres dans la Pléiade »….

Note : 9,2/10
Lien : http://eveyeshe.canalblog.co..
Commenter  J’apprécie          484
Plus je lis Zweig, plus je l'apprécie, pourtant ma première lecture de cet auteur m'avait laissé peu convaincue. J'ai bien fait de poursuivre, un livre de tant à autre.
Ici, l'intensité de la passion amoureuse est telle qu'on se sent porter par une vague immense qui n'en finit pas de grossir et nous emporter pour se fracasser sur les rochers.
C'est fort, puissant, passionnant, et on se sent tellement impuissant face à ce malheur, à cette douleur portée tout le long d'une vie.
Comment le béguin d'une petite fille finit par devenir une folie amoureuse, c'est impensable et pourtant c'est bien là l'histoire de cette lettre reçue par cet écrivain.
Court mais fort.
Commenter  J’apprécie          341
Il y a quelque chose qui tourne la tête, voire qui vous remue dans cette confession à bout de souffle d'une femme inconnue à l'homme dont elle est depuis toujours follement éprise à son insu.
Est-ce le style si fin de Zweig, est-ce les effets de perspective autour desquels ce texte est construit ? On a le sentiment de passer d'un personnage à l'autre, tantôt on est la femme qui jette avant de mourir ses derniers mots sur le papier, tantôt on est l'homme, séducteur innocent qui les reçoit, on est dans ses yeux à elle qui encore enfant essaie d'apercevoir l'aimé par le judas de la porte, on est lui quand il la croise, par deux fois sera son amant mais ne la reconnaîtra pas, on est elle, absente toujours, morte déjà, dans le vase vide qu'elle ne garnira plus clandestinement et qu'il regarde en frissonnant en reposant la lettre de cette inconnue…
Commenter  J’apprécie          340
La passion compulsive est le thème de "Lettre d'une inconnue" suivie de "La Ruelle au clair de lune". Jusqu'où un être humain peut aller lorsque l'irrationnel du feu brûlant de l'amour est dépassé ? Les amours non partagées, destructrices de vies, sont au coeur des deux récits.
Quelle prouesse d'écriture ! C'est majestueux ! Un petit bijou littéraire !
Commenter  J’apprécie          330
L'amour de l'adolescente est décrit avec une telle précision que chacun peut se reconnaître dans cet amour de jeunesse. L'attente de voir l'homme aimé s'approcher, l'espoir d'être remarqué et d'attirer un regard, tous les ingrédients sont réunis, dans cette nouvelle, pour nous replonger dans l'insouciance de l'amour. Puis, vient la déception de cette femme, qui, à aucun moment, ne sera reconnue par l'homme qu'elle aime depuis tant d'années.
Nous vivons avec elle les derniers instants de sa souffrance dans cette lettre adressée au seul homme qui a compté dans sa vie.

Stefan Zweig est un génie littéraire
Commenter  J’apprécie          50
Pour moi, c'est un peu le Graal.
Arriver à écrire une lettre, a fortiori à un(e) inconnu(e).
Quoique, me direz-vous sans doute à raison. C'est peut-être plus simple avec une inconnue. Moins voué à l'échec. A la déception, tout du moins.
Loin de moi l'idée de minimiser la réussite de Zweig, c'est une simple réflexion qui peine à se trouver une conclusion ferme.
Reste que c'est un chef-d'oeuvre. D'autant plus marquant, frappant, attendrissant et déroutant que, de nos jours, on peut toujours courir en attendant le facteur.
Commenter  J’apprécie          30
Un homme de 41 ans rentre chez lui et ouvre une lettre épaisse de deux douzaines de pages écrites à la hâte.

Une femme de 25 ans lui a écrit et lui raconte leur première rencontre alors qu'elle était âgée de 13 ans et lui de 25 ans.

15-16 ans après, elle a franchi le pas et lui avoue tout ce qu'il doit savoir, en commençant sa lettre par : A toi qui ne m'as jamais connue…

Emouvant,
attachant,
intense,
juste magnifique !

Toute la beauté de l'écriture féminine est écrite par Stefan Zweig dans ce court roman que vous ne pourrez jamais plus oublier après votre lecture !
Commenter  J’apprécie          30
Je me suis dit que j'allais partager ici le message que j'ai envoyé à l'amie qui m'a offert ce livre:
Je t'écris car à l'instant je viens de finir « lettre à une inconnue » de Stefan Zweig que tu m'as offert il a quelques temps mais je choisis toujours mes livres au hasard. Je voulais te dire merci. Ce livre m'a retourner dans tout les sens. Il est si beau, si bien écrit.
Si triste et si jolie en même temps. Ce livre m'a donnée envie d'être amoureuse tu vois ? Ça la rappellé la beauté et parfois la cruauté de l'amour cette choses si forte. Chaque mot écrit dans ce livre est si bien pesé. 
Merci pour ce cadeau

Commenter  J’apprécie          00
Une nouvelle émotionnellement très forte qui m a bouleversée.
Une jeune femme écrit à un jeune écrivain tout l amour qu elle lui porte depuis son adolescence. Un amour inconditionnel et pourtant il "ne la reconnait pas "...
A découvrir et surtout à se laisser envahir par cette écriture qui vous frappe au coeur...
Commenter  J’apprécie          00


Lecteurs (207) Voir plus



Quiz Voir plus

Le joueur d'échec de Zweig

Quel est le nom du champion du monde d'échecs ?

Santovik
Czentovick
Czentovic
Zenovic

9 questions
1882 lecteurs ont répondu
Thème : Le Joueur d'échecs de Stefan ZweigCréer un quiz sur ce livre

{* *}