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EAN : 9782070403271
308 pages
Gallimard (15/05/1998)
4.09/5   141 notes
Résumé :
Le voyage à Saint-Hélène

Perdue au milieu de l'Atlantique Sud, Sainte-Hélène, l'île d'où on ne s'échappe jamais. Un rocher lugubre battu par les flots et le vent. Déporté par les Anglais après Waterloo, Bonaparte s'efforcera, pendant cinq ans et demi, de rester Napoléon en dépit des humiliations.

Amoureux des îles, Jean-Paul Kauffmann s'est embarqué un jour à bord du seul bateau qui dessert Sainte-Hélène. Il découvre ses falaises noire... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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« Il y a une énigme de Sainte-Hélène, Napoléon a tout dit sur sa vie passée mais n'a rien vraiment révélé sur sa souffrance de prisonnier. « Il passait la plus grande partie du jour seul dans sa chambre, occupé à feuilleter quelques livres ou plutôt ne faisait rien (…) Il était aisé de s'apercevoir qu'il n'y avait plus en lui ni préoccupation de l'avenir, ni méditation du passé, ni souciance du présent. » Ce genre de remarque consignée par Las Cases en juillet 1816 se retrouve presque à chaque page chez les autres compagnons de l'exil, Gourgaud, Bertrand et son médecin O'Meara.


Imaginez une île perdue, dans l'océan atlantique, petit point à mi-chemin des côtes africaines et de celles de l'Amérique du Sud. Une ile battue par les vents violents, aride, dont la vision frappe par sa banalité. Curieuse apparition que cette ile volcanique. La petite capitale de Jamestown apparaît étranglée entre deux montagnes comme un couloir étroit. Sa vision suscite une angoisse devant cette île britannique qui fut le tombeau de Napoléon, un immense amas de rochers sur lesquels les vagues viennent se fracasser. L'apparition de l'île étreint par la sensation d'être confronté subitement au poids de l'Histoire.

Quelle belle découverte que ce livre chroniqué par @Bobo1001 ! Babelio est une vraie mine d'or.

Merci monsieur Kauffmann d'avoir su si bien nous transmettre vos émotions, votre compassion pour cet empereur déchu. J'avais quelques appréhensions à vous lire, peut-être la crainte d'un style trop savant, trop érudit qui ne m'eut pas autorisée le plaisir que j'ai eu à vous lire.

Seul, un homme tel que Jean-Paul Kauffmann qui a vécu la réclusion dans sa chair, dans son coeur, qui s'est retrouvé otage en 1985 au Liban avec feu Michel Seurat, pouvait à ce point nous faire ressentir ce que peut représenter cette prison à ciel ouvert que fut Sainte-Hélène.

« Je n'ai jamais pris au sérieux l'aventure des deux Anglaises qui, visitant Versailles en 1901, affirmèrent avoir été transportées en l'an 1789. Et pourtant, j'ai l'impression à cet instant de subir une hallucination. La sensation confuse du passé se cristallise soudain en une vision absolument nette comme si devant moi venait de s'opérer un phénomène inconcevable : la réversibilité du temps. Son ruissellement s'est répandu dans une autre direction ». Quel trouble n'est-ce pas et pourtant …..il est des lieux où les murs nous parlent !

J'ai mis mes pas dans les pas de Jean-Paul Kauffmann. Reçu par le consul de France, Michel Martineau, pour une découverte - enquête sur neuf jours, notre guide a pu tranquillement découvrir Longwood, en saisir toute la portée concrète, mais aussi communier avec l'indicible, l'ineffable que seul l'esprit peut percevoir. "La chambre noire de Longwood" : ce titre interpelle, j'ai pensé à la "camera obscura" celle qui a conduit à l'invention de la photographie ou bien noire, couleur du deuil en Occident, de la mort.

Longwood est devenu territoire français en 1858 à la suite de longs pourparlers entre Napoléon III et les autorités britanniques. de l'empereur Napoléon 1er, notre guide préfère l'homme Bonaparte. Kauffmann s'est énormément documenté, à travers ses réflexions, ses lectures des mémoires des compagnons de captivité de l'empereur et ses entretiens avec Michel Martineau, nous plongeons dans le quotidien de la maison de Longwood. Cette immersion permet d'envisager ce qu'a pu représenter, pour l'égo de l'homme qui a été le plus puissant à un moment donné de l'Histoire, la solitude, la réclusion, les conditions de détention. Il faut aussi compter avec la détestation de son geôlier Sir Hudson Lowe. Ce dernier, sous la pression de Lord Barthurst, est obsédé par le risque d'un complot ou d'une évasion, ce qui le rend insupportable aux yeux de son prisonnier mais que lui-même déteste. le récit rappelle la dureté de la cohabitation avec ses compagnons, les batailles d'égo, le sentiment pesant et dévalorisant de l'inutilité qui pousse le prisonnier à dicter ses mémoires, à vivre dans le passé sans perspective d'avenir, le néant tout simplement.

« Je suis assis dans la petite chambre de Napoléon, où il s'enfermait pendant des journées, voire des semaines, quand il était cafardeux. Je calcule la dimension de la cellule : pas plus de seize mètres carrés. Il me semble mieux comprendre, à présent, la tristesse et la solitude du prisonnier. Toujours cet aspect étriqué, une manière insipide, à la limite de l'indigence, de sauver les apparences, de tenir son rang. A cette mesquinerie s'ajoute une fadeur tropicale qui donne à l'ensemble un air morne, une sorte de saisissement gris et mou. « Il faudrait pouvoir s'endormir et ne se réveiller que dans un an ou deux » déclare-t-il Gourgaud.

Tout au long de la lecture, on sent à quel point la captivité a marqué l'auteur. Une partie de lui-même est restée otage au Liban. le traumatisme de la détention guide ses pas jusqu'à Hauteville House de Guernesey, chez Victor Hugo. Il évoque les sensations qu'il ressent entre les murs de ces hauts lieux de réclusion. Ses pas et sa quête le mènent jusqu'à Eylau, aujourd'hui Bagrationovsk. Accompagné d'un professeur d'histoire russe, d'un guide-interprète et d'une reproduction au format de carte postale du tableau du baron Gros, les trois hommes nous font revivre la bataille d'Eylau. C'est un moment de grande solennité, celui qui m'a le plus bouleversée.

Ce récit est pétri de générosité, d'empathie, un véritable concentré d'humanités. Jean-Paul Kauffmann arrive à la conclusion que c'est la mélancolie qui a empoisonné l'empereur.

Je me suis tellement imprégnée de ce récit que je n'ai pu m'empêcher de me rendre aux Invalides, voir le tombeau de Napoléon

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Jean-Paul Kauffmann - La chambre noire de Longwood - 1997 : Journal de bords d'un voyage fait dans les années 90 sur les trace de Napoléon 1er à Sainte-Hélène, ce livre balançait entre le roman historique, l'étude de caractères et une simple correspondance que l'auteur se faisait à lui-même. Tout le monde sait la tragédie qu'a vécu Jean-Paul Kauffmann en tant qu'otage au Liban et fort de cette expérience il était sans doute plus facile pour lui de comprendre ce que cet homme renommé pour son hyper activité avait pu ressentir dans l'ennuyeux décompte du temps que représentait cet exil. S'imprégner des lieux et des personnes qui sur place continuaient de faire vivre son souvenir permit à l'écrivain d'aborder l'intimité de Napoléon, de ses proches et de ses geôliers avec un surplus d'authenticité qu'il n'aurait sans doute pas connu s'il était resté en France. Que dire de cet homme habitué à régner sur des territoires immenses et qui du garder l'illusion d'une étiquette pour ne pas sombrer dans la neurasthénie et le désespoir. Lui qui avait porté si haut l'aigle impérial se retrouvait l'objet d'intrigues initiées par les quelques fidèles l'ayant suivi en captivité. Car en dehors des humiliations subies de la part de ses gardiens anglais, c'était la guerre perpétuelle que se livrèrent les Las Cases, Monthoulon et autre Gourgaud pour obtenir ses faveurs qui rendirent son séjour de plus en plus pénible. Comme le disait si bien l'auteur, l'ex-empereur profita de son inactivité pour dicter sa légende en tentant de justifier la tuerie d'Eylau, la folle campagne de Russie ou l'anéantissement de Waterloo. Jean-Paul Kauffmann agissait, même s'il s'en défendait, en passionné que la rencontre de quelques personnages pittoresques (deux vielles dames anglaises, le père du consul de France) rendait finalement plus curieux que sentencieux. les neufs chapitres, un par journée passée sur place, étaient passionnants. Ils rendaient caduque nombres d'ouvrages qui brillaient plus souvent par la morgue intellectuelle de leurs auteurs que par leur intérêt eux même... réjouissant
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Dès les premières pages , Jean Paul Kauffmann avoue " un faible pour Bonaparte" , mais se défend d'avoir "jamais éprouvé d'inclination pour Napoléon" . Alors, demande le lecteur lambda un peu au fait de la production littéraire de Jean Paul, pourquoi ces deux livres ouvertement "napoléoniens" :" Outre-Terre" , qui est consacré à la bataille d'Eylau, et "La chambre noire de Longwood" dont le propos est de nous faire partager la vie de l'Empereur à Saint-Hélène.
Résumer un livre de Jean Paul Kauffmann est difficile. J'avais expérimenté l'enjeu à la fin d' Outre-Terre , lu en 2017. Ecrire un compte-rendu du livre sur Babelio m'avait couté pas mal d'échauffement neuronal...
Le mieux est peut-être, simplement , d'entendre Jean Paul Kauffmann dans un passage de " La chambre noire...". Il dialogue avec la vieille Lady rencontrée sur le bateau . Ces paroles peuvent servir de profession de foi à l'auteur.

" Je ne comprends pas chez vous, comment dire...ce fétichisme du lieu, cette obsession que vous avez pour les vestiges. Je vous ai étudié depuis le début ! Quelle prétention ! Mais pour qui vous prenez- vous ? Une sorte d'Hercule Poirot, qui remonte le temps ?
- Pour le fétichisme du lieu, vous avez raison. Mais pour Hercule Poirot, vous avez tort. Ce qui m'excite justement, c'est le passé que je n'atteindrai jamais , le pittoresque que je ne pourrai jamais reconstituer. Comprenez- vous que c'est ce" jamais", définitif, irréparable, sans retour qui m'exalte ? D'ailleurs, vous vous trompez, ce n'est pas l'indice que je recherche mais l'imprégnation.
Absorber les bruits, les odeurs, les images. C'est le dépôt qui se forme sur le passé qui me passionne . La coloration, le vernis qui recouvrent les objets et les lieux. La patine du passé on ne peut l'enlever. Cette impossibilité matérielle me fascine. "

Jean Paul Kauffmann a passé dix jours sur l'île de Saint-Hélène. Juste le temps d'une escale, pour "s'imprégner ", comme il le dit.
Son livre tient à la fois du livre d'histoire, du guide touristique, de l'autobiographie aussi, même s'il n'aborde jamais ses trois années de captivité au Liban. le fait de s'intéresser à ce grand reclus que fût Napoléon n'est peut-être pas anodin. Sa démarche est inimitable. A travers sa prose l'on sent l'homme : pudique et réservé , mais pugnace aussi quand il a une idée fixe . Tout au long des 360 pages de l'édition de poche Folio, le lecteur accompagne Jean Paul Kauffmann dans sa découverte de l'île. Les lieux bien sûr, cette demeure improbable de Longwood située dans la partie la plus déshéritée de Sainte-Hélène, mais aussi les hommes qui l'habitent aujourd'hui : Michel Martineau , consul honoraire de France, et son père Gilbert dont Kauffmann pourrait faire le sujet d'un livre, tant le personnage est haut en couleur.
Avec de nombreuses échappées dans le passé, l'auteur nous fait revivre l'épopée napoléonienne pour la mettre aussitôt en résonance avec ce qu'il en reste sur ce rocher perdu de l'Atlantique sud. Il scrute les portraits de l'Empereur pour y déceler quelques signes qui pourraient expliquer l'inexplicable : comment en est-on arrivé là ?
Cornaqué par Michel Martineau, le consul honoraire de France , dans sa visite des appartement de Napoléon, Kauffmann profite d'une absence de son guide pour s'allonger sur le lit de camp de l'Empereur. Toujours l'imprégnation. Et l'auteur ne vous fera pas grâce des commentaires souvent sarcastiques des "évangélistes" , à savoir les quatre généraux (Las Cases,Montholon,Bertrand, Gourgaud ) , chargés de compiler la bonne parole pour la gloire future de l'Empereur.
Mais le grand propos du livre est plus d'ordre...métaphysique : c'est une méditation , alimentée par les digressions Kauffmanniennes ,sur la solitude, la déchéance, la déréliction,la mort, et le dérisoire de toute chose. Sur l'ennui aussi . Ennui qu'éprouvent les habitants de l'île et qu' a dû éprouver Napoléon et sa suite. La géographie et le climat de l'île s'accordant parfaitement avec ce propos.
Un livre passionnant .











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C'est un livre très singulier et très subtil que nous donne à lire Jean-Paul Kauffmann avec "La chambre noire de Longwood". Cette chambre noire est celle de Napoléon à Sainte-Hélène dans la demeure de Longwood qui lui a été assigné et où il mourra le 5 mai 1821 après six années de captivité. L'auteur nous fait le récit du séjour qu'il a effectué sur cette île dans les années 90, au bout d'un voyage de plusieurs jours en bateau, le seul moyen de s'y rendre à cette époque. Chacun des neuf chapitres correspond à une journée de ce séjour. On le suivra ainsi presque pas à pas sur ce "caillou" perdu dans l'Atlantique Sud, île-prison d'où toute tentative d'évasion était impensable (même si JPK nous raconte qu'un prisonnier, un hollandais, réussit à s'en échapper à la fin du siècle dernier). Les découvertes sur place de l'auteur s'enrichissent des récits qu'ont fait les principaux témoins de la captivité de l'Empereur, qu'il s'agisse de ses aides de camp, de ses domestiques ou bien de ses geôliers anglais. Pour éclairer la déchéance de Napoléon et ses états d'âmes, l'auteur remonte à l'histoire de la campagne de Russie et notamment la bataille d'Eylau qui a ses yeux constitue le tournant de cette épopée - cette bataille où le "Colonel Chabert" De Balzac fut laissé pour mort après la charge héroïque de son bataillon de cavalerie. JPK est aussi très attentif à tous les détails qui permettent de faire resurgir le passé : tableaux, paysages, flore, odeurs, météorologie, lumières ... tout est convoqué dans ce travail de mémoire. Travail rendu d'autant plus difficile que le climat qui règne sur cet île et tout particulièrement sur Longwood est très humide et que tout pourri très vite quand ce n'est pas la proie des termites. L'auteur rencontre aussi sur place les "gardiens du temple" : le consul de France à Sainte-Hélène ainsi que son père, ancien consul et personnage très singulier, qui habitent tout deux Longwood, dans le "domaine français" de Saint-Hélène (racheté aux anglais en 1858) ainsi que l'actuel gouverneur (anglais) de l'île. L'auteur trace de Gilbert Martineau, le père de l'actuel consul, un portrait saisissant, qui pourrait aisément figurer dans un roman De Balzac. Enfin JPK fait aussi la connaissance sur cette île de deux touristes anglaises assez âgées, qu'il croise à plusieurs reprises au cours de ses pérégrinations et les brefs dialogues qu'il a avec elles pourraient cette fois être tirés d'un roman d'Agatha Christie.
Ce livre est pour moi une totale réussite en étant tout-à-la fois un passionnant livre d'Histoire, un récit de voyage insolite, une vibrante leçon d'observation et d'imprégnation et un traité (involontaire) de sagesse. Sensibilité, acuité du regard, modestie et intelligence se conjuguent ici de façon merveilleuse. Je reste sous le charme.
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Comment Napoléon a-t-il vécu son exil sur l'île de Sainte-Hélène ? Jean-Paul Kauffman découvre cette île dans les années 90 et nous partage son périple. Il nous traduit l'importance qu'il donne au lieu ou au matériel pour ressentir l'authenticité historique d'un personnage célèbre. Après une vie à cent à l'heure, l'empereur passera sur cette île ses six dernières années de bannissement dans l'ennui, la nostalgie et la mélancolie. L'auteur réussit habilement, en parcourant Sainte-Hélène, à nous faire ressentir la rudesse du climat, l'inhospitalité de cette contrée isolée, l'apprentissage du temps qui passe, la captivité d'une prison sans barreaux, ... Les nombreux témoignages de l'entourage de Napoléon, lors de cet exil, agrémente le ressenti personnel de l'auteur. À lire.
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Citations et extraits (23) Voir plus Ajouter une citation
C'est ce qui m'a attiré à Longwood : la révélation de l'homme désarmé au milieu d'un décor immuable. Longwood est un lieu vivant. Les fantômes de la captivité sortent des murs et repeuplent cette maison compliquée, embarrassée de corridors et d'appentis. Pourquoi cette étrange construction laissée à l'abandon a-t-elle l'air si vraie alors que le plancher, les menuiseries mangées par les termites ont été plusieurs fois remplacés ? Parce qu'elle est conforme à l'idée que l'on se fait de l'ennui, de l'exil et de la mort. Le passé n'y est pas aboli. On le sent accompagné d'idées fixes, de manies. La démence rôde dans ce décor absurde. Ce surgissement des temps anciens a quelque chose de terrifiant. L'histoire s'est déposée à la manière de particules solides en suspension. Ce précipité, phénomène chimique bien connu, est visible dans chaque pièce. Un secret se cache tel un corps insoluble dans la moiteur de Longwood. Les murs recèlent le mystère de la relation qui nous unit au passé.

page 21 - prologue
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- "Le cimetière d'Eylau" par Antoine-Jean Gros

C'est à 10 h 30 du matin que se produira la catastrophe. Pour soulager Davout, Napoléon fait donner le corps d'Augereau déployé au sud du cimetière. A cet instant, une soudaine tempête de neige soulève la plaine. Les soldats d'Augereau qui par vent d'est reçoivent de plein fouet les flocons dans les yeux, sont aveuglés. Déviée dans sa trajectoire, la masse des fantassins se présente devant l'artillerie russe. Les six mille cinq cents Français reçoivent à bout portant la mitraille des soixante-douze canons ennemis. Une brèche énorme s'est ouverte dans le dispositif ....

Lors de la Débâcle en 1940, tous les tableaux du Louvre furent évacués. Les convois s'immobilisaient parfois au milieu du flot des réfugiés. "Le cimetière d'Eylau" effrayait. L'immense toile avait été roulée et dépassait d'un camion comme un long tube. Les gens croyaient que c'était un canon de DCA destiné à répliquer à l'aviation allemande (voir Le front de l'art de Rose Valland). Ils se représentaient l'objet comme une menace.


page 158 - NdL : cette bataille d'Eylau donne la chair de poule
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Première rencontre avec Hudson Lowe

Les deux hommes se font face. Pas de témoins. Comme à son habitude, Napoléon tâte le terrain, passe d'un sujet à l'autre, pose des questions en apparence incongrues. Savoir à qui on a affaire. A l'ancien chef des Corsican Rangers, il demande ce qu'il a pensé des habitants de son île. Est-il marié? Quels sont ses états de service? Et l'Egypte? Toujours cette nervosité, cette fébrilité de l'intelligence à la recherche d'un indice. Sentir l'adversaire à partir d'un regard, d'une repartie, peut-être d'une odeur - les odeurs donnent des avertissements. A-t-il flairé quelque chose de suspect chez Hudson Lowe ? Lui qui voit si vite sous la surface humaine la vraie nature des êtres a du mal à mesurer le "tirant d'eau" du personnage. Le "tirant d'eau" : une expression qu'il affectionne. Premier chef moderne, il a besoin de quantifier, de jauger, de passer son monde à la toise. Après le départ de Hudson Lowe, il se contente d'affirmer : "Ce nouveau gouverneur parle peu mais il paraît poli."

page 109
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Napoléon fataliste:

"Napoléon a toujours été fataliste. Le 2 septembre 1816, évoquant l'apogée du règne, il fait cet aveu à Las Cases: "Je voyais clairement arriver l'heure décisive. L'étoile pâlissait, je sentais les rennes m'échapper, et je n'y pouvais rien." Prescience de la catastrophe à laquelle il faut opposer l'admirable phrase du début, quand il était à vingt-cinq ans général de l'armée d'Italie: "Je voyais déjà le monde fuir sous moi, comme si j'étais emporté dans les airs." La confidence faite une fois de plus à Gourgaud date de 1817. Instantané qu'on pourrait presque qualifier de stendhalien, tant la fusion de la lucidité et du rêve répand une traînée lumineuse. Éclair qui traverse les mornes journées et irradie soudain la lourde opacité de Longwood. Tout y est. L'acceptation du risque, le bonheur déployé à perte de vue, la grande chevauchée de l'aventure. Pégase s'envole, il prend le mors aux dents, le destin s'emballe..."Je sentais les rênes m'échapper et je n'y pouvais rien."N'avait-il pas avoué un jour à las cases:"On peut donner une première impulsion aux affaires; elles vous entraînent.p.138/139
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[dialogue entre l'auteur (JPK) et Amy (A), une touriste anglaise arrivée par le même bateau que l'auteur et qu'il croisera à plusieurs reprises au cours de son séjour]
A - Je ne comprends pas chez vous ce fétichisme du lieu, cette obsession que vous avez pour les vestiges. Je vous ai étudié depuis le début, ah oui ! Quelle prétention ! Mais pour qui vous prenez-vous ? Une sorte d'Hercule Poirot qui remonte le temps ?
JPK - Pour le fétichisme du lieu, vous avez raison. Mais pour Hercule Poirot, vous avez tort. Ce qui m'excite justement, c'est ce passé que je n'atteindrai jamais, le pittoresque que je ne pourrai jamais reconstituer. Comprenez-vous que c'est ce "jamais", définitif, irréparable, sans retour qui m'exalte ? D'ailleurs vous vous trompez, ce ,'est pas l'indice que je recherche mais l’imprégnation. Connaissez-vous le commissaire Maigret ?
Elle acquiesce.
JPK - Eh bien ! je serai plutôt de son école. Sentir, humer. Absorber, les bruits, les odeurs, les images. C'est le dépôt qui se forme sur le passé qui me passionne. La coloration, le vernis qui recouvrent les objets et les lieux. Mais la patine du passé, on ne peut l'enlever. Cette impossibilité matérielle me fascine. Saisissez-vous cette contradiction ?
A - Non. Mais j'aime bien votre commissaire Maigret. Il est si français ! Ce que vous me racontez aussi est très français. Il vous faut à tout pris heurter le bon sens. Votre passion pour le paradoxe... C'est votre manière à vous, Français, de vous croire intelligents.
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Videos de Jean-Paul Kauffmann (57) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Paul Kauffmann
Jean-Paul Kauffmann vous présente son ouvrage "Zones limites" aux éditions Bouquins.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2678916/jean-paul-kauffmann-zones-limites
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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