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Maurice Dernelle (Éditeur scientifique)
EAN : 9782715222137
680 pages
Le Mercure de France (07/06/2000)
3.73/5   13 notes
Résumé :
Napoléon n'a jamais cessé d'être un objet de fascination. On parle de lui ; on le fait parler ; on interprète les énigmes de sa vie, où les faits éclatants ne sont pas toujours moins mystérieux que les points réputés obscurs. On sait tout de lui - et à peu près rien ; d'où, transparent et insaisissable, son mythe. C'est qu'il parle peu. Entendre sa voix, vivre au jour le jour dans l'intimité de l'empereur, assister à son lever, à ses colères, à son divorce, percevoi... >Voir plus
Que lire après Mémoires intimes de Napoléon Ier, par Constant son valet de chambre, tome 1Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
J'avais jusqu'à maintenant prêté peu d'attention au personnage de Napoléon Bonaparte, si ce n'est que je ne pouvais rester indifférente au mythe tel qu'il est relaté par Hugo, Balzac, Stendhal... Un monstre politique, un homme d'une envergure publique plus grande que nature. A vrai dire, je n'ai pas choisi ce livre, il m'a tapé dans l'oeil, sur les étagères de la bibliothèque chez ma mère, avec ses deux tomes, sa couverture en vieux tissu, ses gravures d'époque. le livre n'a même pas de date - le genre d'objet auquel je ne résiste pas !

La lecture est plaisante : ou Constant lui-même écrivait bien, un bon français classique sans effets particuliers, mais qui tient bien, ou il avait de bons correcteurs. Nous suivons son entrée dans ce métier exigeant de valet de chambre dès son jeune âge, alors que Napoléon n'est encore que Premier Consul, jusqu'au voyage à Erfurt en 1808. Il est à noter que des voyages, Napoléon en fera un grand nombre, qui sont souvent racontés, car ils sont aisément la source d'anecdotes folkloriques, alors que Constant ne s'appesantit pas sur les campagnes militaires, sinon celle de Boulogne. On peut reconnaître au valet de chambre une certaine modestie, une discrétion : d'une part, il ne cherche pas à raconter ce qu'il ne connaît pas, et quand il fait appel à des témoignages de seconde main il en donne la source ; d'autre part, il ne règle pas, ou peu, de comptes avec des ennemis politiques de Napoléon. Il est même parfois un peu critique envers son maître, néanmoins ce sera peu fréquent dans tout l'ouvrage.

Car il est évident que nous assistons à un portrait considérablement orienté, embelli : c'est le mythe de Napoléon qui se construit sous nos yeux, et d'une certaine manière ce témoignage est bien la réponse à ma question. Comment cet homme suscitait-il autant d'engouement, de confiance aveugle, d'admiration ? C'est tout de même peu commun qu'un homme d'Etat atteigne à cette stature. Comment ses soldats, les "vieux grognards", envers qui il ne ménageait pas les honneurs, étaient-ils aussi prêts à mourir pour lui, et l'idée de la France qu'il incarnait ? Napoléon est un homme en marche, en route pour une ascension fulgurante, et il entraîne un pays dans son sillage - voici de quelle manière il nous est dépeint.

Nous voyons bien dans ce récit le Napoléon stratège sur les champs de bataille, mais aussi l'immense travailleur qu'il était, un passionné qui prenait peu de repos. Nous apprenons à connaître le Napoléon féru de monuments, passionné par l'embellissement de Paris et des villes de ses conquêtes (mais aussi un Napoléon que cela n'embarrassait guère de rapporter dans ses valises le fronton d'une église, ou des statues antiques). Nous sommes souvent placés face au Napoléon généreux, à l'écoute de son peuple, toujours prêt à faire verser une pension à un vieux soldat, un prêtre, une veuve... le Napoléon qui aimait à se promener incognito et interroger les gens sans révéler son identité, croyant en la sagesse populaire (à peu de frais pour son égo, puisque le peuple l'idolâtrait).

Mais le despote que fut l'empereur tient peu de place dans ces Mémoires : on peut certes lire entre les lignes, remarquer qu'il plaçait toute sa famille à des postes de royauté, ou encore les maréchaux de l'Empire, qu'il n'hésitait pas à profiter de "rencontres" arrangées avec de belles jeunes filles moyennant finances ; on ne peut manquer sa sévérité à l'égard de conspirateurs ou d'opposants (ce que Constant semblait réprouver du reste, sans doute aurait-il attendu plus de clémence). Parfois, il semble agir sur un coup de tête, un caprice, et met son entourage en danger, ou encore tout lui est dû, il faut que ses ordres soient exécutés à la seconde près. Bien qu'il paraisse un homme enjoué et intéressé par son entourage, y compris ses serviteurs, jusqu'à leur frictionner les oreilles de bon coeur, il devait être extrêmement stressant de travailler sous ses ordres.

Enfin, il y a aussi la "petite histoire", et il faut avouer que Constant sait y faire : les mariages, les liaisons de ce beau monde y sont évoqués, on se prend aussi d'affection pour l'Impératrice Joséphine, aussi généreuse et bonne qu'étourdie et tête folle. J'ai du mal à comprendre que Napoléon puisse envisager de la répudier, même si cela n'est pas encore arrivé dans le tome 1, Constant fournit quelques pistes. Récit est fait de somptueuses fêtes, de bals costumés, de revues militaires, il semble que ce soit dans cette proximité, ces petits détails du quotidien que Constant excelle, qu'il ait simplement bonne mémoire ou qu'il recrée la Cour de l'Empire a posteriori. Il sait également narrer des scènes : ainsi nous voyons l'Empereur visiter l'atelier du peintre David, ou encore prenons connaissance des précautions prises pour la sécurité de Napoléon, dès le moment où il fut Premier Consul.

C'est donc d'une lecture divertissante qu'il s'agit, avec ce qu'il faut d'anecdotique pour se sentir proche des personnages. Il ne faut bien sûr rien y chercher de politique ou encore de critique. Je mettrai 4/5 parce que c'est bien écrit, varié, et qu'il a su à distance me donner de l'intérêt pour le personnage, fût-il à dimension mythique, de l'Empereur Napoléon Bonaparte.
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Mémoires de Constant, premier valet de chambre de l'Empereur, sur la vie de Napoléon, sa famille et sa cur.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Avant de livrer une bataille, l'Empereur recommandait toujours que dans le cas où il serait blessé, on prît toutes les précautions pour en dérober la connaissance aux troupes. "Qui sait, disait-il, quelle horrible confusion ne produirait pas sur une semblable nouvelle ? A ma vie se rattachent les destinées d'un grand empire. Souvenez-vous-en, Messieurs, et si je suis blessé, que personne ne le sache, si c'est possible. Si je suis tué, qu'on tâche de gagner la bataille sans moi ; il sera temps de le dire après."

Page 503.
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Je me souviens d'une autre chasse qui eut lieu vers la même époque, dans la forêt de Saint-Germain, et à laquelle l'Empereur avait invité un ambassadeur de la sublime Porte*, tout nouvellement arrivé à Paris. Son Excellence turque suivit la chasse avec ardeur, mais sans déranger un seul muscle de son austère visage. La bête ayant été forcée, Sa Majesté fit apporter un fusil à l'ambassadeur turc pour qu'il eût l'honneur de tirer le premier coup ; mais il s'y refusa, ne concevant pas sans doute quel plaisir on peut trouver à tuer à bout portant un pauvre animal épuisé, et qui n'a même plus la fuite pour se défendre.

(Page 311)

*porte d'honneur monumentale du grand vizir à Constantinople, siège du gouvernement du sultan de l'Empire ottoman.
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On a beaucoup parlé de la maladresse de leurs premiers courtisans, très peu habitués au service que leur imposaient leurs nouvelles charges, et aux cérémonies de l'étiquette ; mais on a beaucoup exagéré là-dessus, comme sur tout le reste. Il y eut bien, dans le commencement, quelque chose de cet embarras que les gens du service particulier de l'Empereur avaient éprouvé, comme je l'ai dit plus haut. Pourtant cela ne dura que fort peu, et messieurs les chambellans et grands officiers se façonnèrent presque aussi vite que nous autres valets de chambre. D'ailleurs il se présenta pour leur donner des leçons une nuée d'hommes de l'ancienne cour, qui avaient obtenu de la bonté de l'Empereur d'être rayés de la liste des émigrés, et qui sollicitèrent ardemment, pour eux et pour leurs femmes, les charges de la naissante cour impériale.
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La chasse dura près de deux heures, pendant lesquelles environ soixante cerfs et chevreuils furent tués. L'espace que ces pauvres animaux avaient à parcourir était fermé par des toiles, de sorte que les monarques pouvaient les tirer à plaisir, sans se déranger assis aux croisées du pavillon. Je n'ai jamais rien trouvé en ma vie de plus absurde que ces sortes de chasse qui donnent pourtant à ceux qui les font la réputation de tireurs habiles. La grande adresse, en effet, que de tuer un animal que des piqueurs vont, pour ainsi dire, prendre par les oreilles, pour le placer en face du coup de fusil !

Page 480.
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L'Empereur se plaisait à le [Corvisart] taquiner en parlant de la médecine, dont il disait que ce n'était qu'un art conjectural, que les médecins étaient des charlatans, et il citait ses preuves à l'appui, surtout sa propre expérience. Le docteur ne cédait jamais quand il croyait avoir raison. (...) M. Ivan, chirurgien ordinaire, avait, aussi bien que M. Corvisart, sa bonne part de critiques et de médisances contre son art. Ces discussions étaient fort amusantes ; l'Empereur y était très gai et très causeur, et je crois que quand il n'avait pas d'exemples sous la main à citer à l'appui de ses raisons, il ne se faisait pas scrupule d'en inventer. Aussi ces messieurs ne le croyaient-ils pas toujours sur parole.

(page 214)
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