« In vino veritas », le booktrailer. Un roman de Magali Collet & Isabelle Villain.
Lors d'un vernissage, une galeriste est assassinée.
Secrets, mensonges et trahisons vont secouer la quiétude d'une petite commune en plein coeur du vignoble bordelais.
Et lorsque deux frères se retrouvent après des années de séparation, la liberté de l'un va dépendre de la détermination de l'autre.
Un thriller psychologique délicieusement machiavélique.
Roman disponible le 11 mai 2023 (papier & numérique).
Infos & précommande ici https://www.taurnada.fr/ivvmciv/
+ Lire la suite
Mais moi, j'avais pas peur. Je savais bien qu'il allait me rosser ou essayer de m'étrangler une fois de plus, mais ça ne m'effrayait pas. Je lui avais dit que j'avais l'habitude et que j'arrivais à sortir de mon corps pour pas avoir trop mal, il suffirait que je le fasse encore une fois.
La classe, c’est une meute, comme les loups. Quand un enfant est à l’écart du groupe, il ne peut plus y revenir.
Il n’y a pas pire aveugle que celui qui refuse d’ouvrir les yeux.
- C'est une psychopathe.
- Tu ne peux pas dire ça. D'ailleurs, on ne parle pas de psychopathie avant l'âge adulte.
- Alors quoi ? On le devient subitement à la majorité ?
Si écrire, c'est se dévoiler un peu, être lue, c'est exister.
D’ordinaire, il y avait une fille par cellule. Les filles, elles étaient choyées : elles avaient une chemise de nuit que je changeais tous les deux jours et une culotte quotidienne. Je leur brossais les cheveux au début et puis après, je leur laissais une brosse sur le lavabo, à côté du dentifrice. Sur la table de chevet, il y avait aussi la télécommande pour la télé qui se trouvait dans le couloir, accrochée au plafond près du mur. Le Père, il l’avait placée de telle façon qu’elles pouvaient la voir de leur lit. Il aimait que les filles puissent regarder la télé surtout au début quand elles arrivaient. Elles guettaient la moindre info qui parlait d’elles et elles voyaient que, plus les jours passaient, moins elles y étaient présentes… Ça suffisait à les adoucir. Une fois par semaine, je m’occupais de leurs poils. Les bras, les jambes et tout le corps. Le Père, il achetait des bombes « Spécial Épilation ». Y avait juste à vaporiser, à attendre que le boulot se fasse pis à rincer à la douche. Au début, j’étais obligée de les attacher pour le faire parce qu’elles se débattaient comme des diablesses, mais après quelques jours elles se laissaient faire sans broncher. Quand elles étaient sèches, je leur mettais de la crème, celle qui sent bon, qu’on met pour les bébés. J’aimais cette odeur… Le Père, lui, il aimait juste que les filles soient propres.
« Je n’aime pas le changement, je ne l’ai jamais aimé. Alors, je cache ce que je suis vraiment. Je m’arrange pour glisser quelques erreurs de temps en temps dans mon travail, j’essaie de poser des questions dont je connais la réponse, parce que j’ai vite compris qu’il ne fallait pas être à l’écart d’un groupe. La classe, c’est une meute, comme les loups. »
Je pose mon verre sur la table en Formica qui avait dû être rouge en son temps.
C’est un soir de semaine et le PSG vient de marquer son premier but. La tension qui montait depuis quelques minutes a laissé la place à des cris de joie. Les clients sont des hommes en grande majorité, d’âges et d’origines différents. Une assemblée disparate composée de maris ayant fui leur foyer quelques heures, histoire d’échapper à La France a un incroyable talent et de pouvoir regarder PSG – Manchester tranquillement. Les nombreuses pubs pour la Française des Jeux collées sur la vitrine les protègent des curieux. J’ignore qui pourrait avoir l’idée de se balader un jeudi, à 21 h 45, à Cormeilles-en-Parisis, et en fait je m’en fous, je ne suis pas là pour ça. Je ne me planque pas, je n’essaie même pas de passer inaperçu, non, je suis à l’affût.
Je suis restée parce que je suis déjà morte. Je suis morte le 24 janvier 2012 peu après minuit dans le souterrain d'une gare. C'est pour ça que j'ai rompu. Tu es vivante, contrairement à moi. Ce que mon corps subit ne m'atteint plus. Une morte ne souffre pas, une morte ne ressent rien.
J'ai toujours été obligée de faire ça : trier les mots quand j'étais petite, je ne le savais pas. Mes parents racontaient souvent que je disais des bêtises alors qu'en fait, j'étais honnête. J'ai compris que l'honnêteté, ce n'était bon que dans les livres. Dans la vie, il vaut mieux cacher ce qu'on ressent (non) ce que l'on ressent ou ce que l'on ne ressent pas. On ne peut rien me reprocher : je suis polie, gentille, serviable et je travaille bien. Personne ne me connaît, pourtant. Ni mes parents ni mes amnies, Le seul qui me cerne un peu, c'est Andy, mais lui je m'en moque. Il peut penser ou dire ce qu'il veut, personne ne le croira.