Ah Fellag ! Fellag ! Fellag ! Fellag ! Fellag !
C'est la troisième fois que je lis un livre signé de la plume de cet humoriste aux multiples facettes , et c'est toujours le même plaisir. Pour le moment, je peux même dire que Le dernier chameau et autres histoires est le meilleur de ceux que j'ai lu jusqu'ici. Et confirme par la même occasion l'impression que j'avais eu, selon laquelle l'art de Fellag s'épanouit mieux dans les nouvelles que dans les romans.
Les cinq nouvelles de ce recueil commence par une histoire drôle - si la plupart le sont, ce n'est pas le cas de toutes "La Rentrée des classes" étant la plus tragique.
"Un coing en hiver" et "Le dernier chameau" sont deux pures délices, où on a littéralement l'impression de lire des scriptes de sketches plutôt que des nouvelles. Mais qu'on ne s'y trompe pas, car l'humour sert à "mieux accepter" les tragédies de la guerre civile algérienne - survenue après le coup d'Etat.
Ici, Fellag fait la part belle à ce divertissement très occidental qu'est le cinéma mais à la mode blédarde ! Que dire ? Que ceux qui n'en sont pas familiers ou n'ont pas de maghrébins dans leur cercle proche ne pourrons sans doute pas comprendre. Tout comme la moquerie typique des Maghrébins vis-à-vis des Occidentaux qui parlent à leurs animaux domestiques. C'est la culture ! Mais là, j'ai particulièrement aimé la façon dont la nouvelle "Le Syndrome de la page 12" se moque des clichés du cinéma classique hollywoodien.
De l'humour, des souvenirs d'enfance, des émotions, de la nostalgie face à l'absurdité de l'Histoire : du grand Fellag !
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Un sondage réalisé il y a quelques années, qui reste d'actualité, affirme que le plat préféré des Français , c'est le couscous. C'est le mien également.
A partir de cette constatation, Fellag avec son humour jouissif, narquois, un brin caustique, se livre à un commentaire socio-philosophique, décodant, à sa manière ce que cette préférence suggère, il nous plonge plus avant dans la culture maghrébine où le mektoub est un art de vivre. Puis il raconte longuement le couscous, commente l'histoire de ce plat national en Afrique du Nord. C'est goûteux, épicé, savoureux , on déguste ce texte avec force appétit.
« Un manuel bref et concis des relations franco-algériennes » clôture ce libretto.
Michel et son épouse Zoubida algérienne, viennent, pour la première fois, passer quelques jours de vacances dans la famille à Alger. Zoubida, femme libérée en France, va devoir expliquer à son gaulois de mari les règles incontournables du savoir vivre et du savoir-être en Algérie pour respecter les ancestrales traditions familiales : aucun geste affectueux en public, pas de mot choquant...
Fellag démontre par ces textes , de véritables scénettes pleines d'esprit, tout son humour, à la fois subtil, moins léger quelque fois. Il joue avec les mots jubilatoires qu'il faut décrypter pour plus de plaisir. Un texte qui date de 2003 mais qui n'a en rien perdu de sa cocasserie , de son réalisme
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L'allumeur de rêves berbères : mais qu'est-ce qui peut bien se cacher derrière un titre comme celui-ci ?
Je ne dévoilerai pas ce qu'est le rêve berbère, la réponse se trouvant à la fin du livre, j'aime autant ne pas gâcher le mystère.
Ce que je peux dire par contre, c'est que ce roman raconte l'histoire de Salim Zakaria, un écrivain officiel qui tombe dans l'opprobre et perd petit à petit tout ce qui lui est cher. Ce nouveau statut de pestiféré le plonge dans une grande angoisse, il décide donc de se cloîtrer et d'écrire sur le quotidien de ses voisins (belle mise en abîme ! ) Comme dans son recueil C'est à Alger, Fellag parle des atrocités commises par le régime islamiste des années 1990 en Algérie. L'auteur évoque des situations parfois ubuesques, mais toujours sur le ton de la dérision. Mais qu'on ne s'y trompe pas, Fellag est un clown triste , car s'il est vrai qu'il a recours à l'humour, on sent tout de même beaucoup de colère et un ton grave face à un déchaînement de violence gratuite (tant armée qu'administrative).
Une fois de plus, j'ai aimé l'écriture fluide et la verve à la Raymond Devos (avec à la fois un humour très maghrébin! ) de Fellag et tous les procédés humoristiques qu'il utilise me surprennent à chaque fois. Mais je pense quand même que Fellag est meilleur dans les formes brèves : j'ai été bien plus émue par ses nouvelles que par ce roman. Bien que j'ai aimé les portraits des personnages et que j'ai été émue par certaines situations, il m'a semblé que mon attention de lectrice a été plus difficilement captée.
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2 nouvelles assez savoureuses de Fellag. Dans aucune des deux nouvelles il n'est question de guerre à proprement parler.
Dans la première : Comment réussir un bon petit couscous , l'humoriste fait le bilan des relations des Français et des Algériens en France à travers le prisme … du couscous ! Pourquoi pas ! Déjà c'est très bon, même si en toute objectivité je vais devoir contredire Fellag pour affirmer que c'est le couscous marocain qui est le meilleur.
Ceci dit, une fois dit ce genre de banalités, Fellag parle du racisme latent qui existe - et a toujours existé si j'en crois les "ancêtres" à ceci près qu'il était plus assumé "dans le temps" - en France du type "naaaan c'est bien qu'ils soient là. La preuve on aime bien l'Arabe en bas de la rue. Mais juste, on les aime mieux quand ils sont pas trop près."
Comptez en plus que ces "Arabes du coin" sont souvent des Berbères, Kabyles ou des Turcs. Donc on repassera point de vue exactitude anthropologique et géographique.
Bref, j'ai bien apprécié l'humour si particulier de Fellag, avec sa verve à la Raymond Devos (qu'il utilise pour tordre le coup à la langue française) avec des petites phrases drôles où tout le monde en prend pour son grade !
Mais, j'ai été étonnée par le ton de la seconde nouvelle, " Manuel bref et circoncis des relations franco-algériennes ". Ma préférée des deux je pense
Ici, Fellag décrit un jeune couple mixte : lui est Français, elle est Algérienne. Ils sont venus rendre visite à sa famille à Alger, dans le quartier de Bab-el-Oued. Et ils crèvent de chaud, ce qui bizarrement délie les langues !
Cette nouvelle pleine de tendresse met en avant les "petits trucs" culturels sur lesquels les Maghrébins (les Algériens) et les Français ont du mal à se comprendre. Les Français avec leur délicatesse et leur ethnocentrisme national aimeraient faire comme chez eux même chez les autres. Sauf que chez les autres… il y a des choses qu'on aime mieux ne pas voir, et ne pas entendre.
Le tout avec humour bien sûr !
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Après le petit village kabyle de Mouloud Feraoun, c'est à Alger que ça se passe.
Je connaissais Fellag pour ses sketches (à prendre au second degré… ), ses rôles au cinéma et parce qu'il a prêté sa voix au cheikh dans l'adaptation cinématographique du Chat du rabbin. Et là … Quelle surprise ! Quelle découverte que celle de sa plume !
Bien sûr, on retrouve son humour made in jurassic bled parfois avec des jeux sur les sonorités notamment et une ironie assez féroce envers ceux qui ont permis à ce système de commettre de tels actes.
Dans ces cinq nouvelles, avec des mots simples, il raconte les tragédies quotidiennes de la guerre civile ou des abus du régime des militaires : enlèvements et arrestations arbitraires, enfermement pour des motifs absurdes, passages à tabac, attentats, famille tuées…
Avec, pour ma part, un coup de coeur pour la nouvelle "La Balle", qui est aussi la plus courte du recueil. En moins de 10pages, Fellag illustre le côté fratricide de ces affrontements, qui séparent deux jeunes qui ont grandi ensemble, dans la même misère.
Dans toutes les nouvelles, on sent bien que l'auteur se sent particulièrement touché par ce sujet ; et ce constat est encore plus saillant dans " Alger - New York" ou Hocine perd peu à peu tout ce qu'il a en commençant par sa liberté, puis ses amis, sa fiancée, sa terre,…
Ce livre, il l'a dédié " A l'ami Hakim, assassiné en janvier 1997 dans son fauteuil de paraplégique. Au peuple algérien." Le moins qu'on puisse dire c'est que l'écriture de ces nouvelle constitue un bel acte de mémoire en même temps qu'un hommage à la souffrance de ceux qui ont vécu cette période. Et comme l'avais dit Camus à un indépendantiste algérien, on peut raisonnablement penser que Fellag (et les Algériens) ont eu "mal à l'Algérie" pendant ces tristes décennies qui ont suivi l'indépendance.
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Fellag fait partie de ceux qu'on pourrait qualifier de "magiciens de la langue" , le parler et la culture algérienne n'est sans doute pas étrangère à ce talent, mais qu'importe, le tout est de l'apprécier !
Ayant déjà lu plusieurs de ses oeuvres, c'est avec empressement que je me suis jetée sur ce roman qui nous offre les portraits de plusieurs habitants d'une rue d'un quartier populaire de Paris où se côtoie des hommes et des femmes de diverses origines et aux parcours plus ou moins brisés mais dont la cohabitation donne un savoureux mélange qu'on appelle la vie moderne.
Si comme avec ses autres ouvrages j'ai beaucoup apprécié le maniement de la langue française avec l'humour à la Fellag, j'ai été bien moins emballée par la forme du roman que je trouve trop "expédiée". C'est davantage une suite de courts spéctacles qu'à un roman. Si j'ai été émue ou ai souri par moment je n'ai pas réussi à m'attacher aux personnages ou à me les représenter comme c'est habituellement le cas avec les romans.
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En 2007, Fellag, humoriste, comédien d'origine algérienne, propose un nouveau voyage au coeur de son pays natal avec L'allumeur de rêves berbères se déroulant en Algérie sous la terreur.
En plein coeur d'un village, on découvre la vie au quotidien d'un quartier autour du personnage de Zakaria. Politique puis écrivain menacé de mort, il ne vit que la nuit pour éviter ceux qui le menace de mort. L'ambiance est tendu dans le village en plus du rationnement d'eau. A la suite de la décolonisation, le pays essaie de se relever mais va se faire dans la douleur et la souffrance. Les politiques au pouvoir veulent s'affirmer et use de leur pouvoir. Les ultras-religieux et les terroristes sèment la peur au sein de la population.
Zakaria veut écrire des histoires. On découvre celles des gens qui l'entourent. On rencontre son voisin Nasser, technicien du gaz qu'il apprécie sincèrement et qui a reçu tout comme lui une menace de mort. Malika, à l'étage du dessous, qui est la prostituée au grand coeur amoureuse de Nasser. Rose dite Madame, accoucheuse d'origine juive qui se veut athée. Aziz, bricoleur très ingénieux qui répare et invente de nombreuses choses. Mokrane, le patron du bar qui est ouvert uniquement pendant les heures du couvre-feu.
De sublimes portraits de gens qui font une ville avec douceur, subtilité, vérité et imaginaire. Je me suis attachée à chacun d'entre eux, rêvant peut-être de les rencontrer. J'aurais voulu aller dans le foudouk, déguster cette alambique fruitée et discuter poésie et littérature. Des personnes qui essaient de vivre et survivre afin d'affronter la vie avec le blanc et le noir tout en savourant le gris. Une belle lecture, magnifiquement écrit qui nous touche même si on n'a pas connu cette période historique.
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4 nouvelles que j'ai trouvé très bonnes, où l'on croise
- dans une Algérie confrontée aux assassins religieux, un cognassier sauvé et sauveur (une histoire qui mêle tendresse, ironie, et violence - ma préférée) puis une psychiatre confrontée à la brutalité (in)humaine (âme sensible s'abstenir).
- en France, un homme qui s'oppose à des agresseurs de fille dans un train de banlieue (la poésie face à la violence... qui gagne ?)
- aux États-Unis, un écrivain maudit (une histoire drôle)
Et une dernière nouvelle, qui donne son titre au recueil, qui est l'histoire de l'Algérie en quelques souvenirs, et qui fait baisser ma note parce que ça dévie en quelque chose de plus réaliste - politique, intéressant mais qui a fait bifurquer ma lecture dans une direction où je n'avais pas envie d'aller. Comme une sortie de route contrainte.
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Alger, dans le début des années 1990, rythmée par les distributions d'eau, le couvre-feu, les lettres de menaces, la surveillance, la débrouillardise, la montée de l'intégrisme et un état policier corrompu. Un écrivain regarde ses voisins et boit, après que sa vie familiale et professionnelle s'effrite. L'histoire commence légère, prend parfois des airs de farce, tourne violente et grave sans y toucher. Un roman pour connaitre un peu mieux les algériens.
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D'emblée, l'auteur nous prévient "ne vous amusez pas à la [la rue des petites daurades] chercher sur une carte. Elle n'existe pas. Si elle existait, je ne me serais pas amusé à l'inventer".
Et pourtant, on aimerait, nous, qu'elle existe cette rue; comme un résumé de la cosmopolité de Paris, comme un témoin vivant de la bonne entente entre les cultures, comme un souffle d'air frais dans un monde qui part en vrille.
La rue des petites daurades, c'est surtout la résidence des cerisiers, ses habitants hauts en couleurs et son concierge et c'est aussi les Chants Alizés, le bistro du coin où on refait le monde autour d'une bière.
Fellag, avec son humour grinçant et sans complexe, nous propose une brochettes de personnages, pas loin de la caricature mais tellement vivants. Et il en profite pour asséner quelques vérités bien senties sur l'immigration, le racisme, les dogmes culturels,... le tout avec un humour qui détend tout de suite l'atmosphère. Une vraie belle découverte pour ma part.
Je ne connaissais pas cet auteur et maintenant, il est certain que je vais me plonger dans sa bibliographie.
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Né en Kabylie en 1950, Mohand Fellag nous plonge dans l’histoire sanglante de l’Algérie des années 90, alors baignée de violence et d’intolérance.
Zakaria, journaliste de talent qui s’est un temps fourvoyé en devenant écrivain officiel, cherche à retrouver sa verve d’antan, étouffée par le pouvoir dont il vient de s’affranchir. Ainsi cherche-t-il à renouer avec lui-même et écrire le grand roman de sa vie. Pour cela, il puise matière dans le coeur même de son pays. Il observe, scrute, écoute, épie et retranscrit du haut de son balcon, le quotidien d’un peuple haut en couleur, obligé d'avoir recours au système D pour continuer à vivre. Avec simplicité et authenticité, le narrateur décrit une palette de personnages et de situations qui, mieux que tout, parviennent à peindre une Algérie plus complexe qu’il n’y paraît, ainsi qu’un peuple terrifié, mais riche de cette aptitude salvatrice à transformer les pleurs en rires, à faire renaître la vie de la mort, en toutes circonstances. Un livre tout en sensibilité, écrit par un fin humoriste.
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Il s'agit là de deux petites nouvelles sur les relations franco algeriennes. C'est léger, ça se déguste rapidement. Un thème abordé avec beaucoup d'humour.
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0/5 pour la retranscription du spectacle : mettre un texte fait pour un spectacle dans un livre ne me semble pas une bonne idée...
4/5 pour la 2° partie l'abécédaire de Fellag, drôle, de cet humour si particulier aux Algériens de la rue, aux "hittistes",.. et à Fellag
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Fellag raconte avec beaucoup d'humour des situations dramatiques à Alger et les difficultés que connaissent ses habitants :le ravitaillement, le manque d'eau qui n'arrive que deux nuits par semaine.
Quelle force de pouvoir parler ainsi avec drôlerie et tendresse de ces gens qui vivent avec beaucoup d'imagination et d'entraide, une période aussi noire!
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