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Critiques de Gess (180)
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La Brigade Chimérique, tome 1

Idée géniale : comment des super héros sont nés en Europe (avant les américains) dans les tranchées de la guerre 14 18. Marie Curie qui travaillait sur l'arriere, va aider ces soldats gravement blessés par les armes nouvelles et les gaz,qui vont développer des super pouvoirs qu'ils ne savent pas maitriser. Psychoses diverses et variées, ces hommes soldats sont profondément perturbés. Marie et quelques scientifiques connus vont les aider et aussi en profiter pour faire des expériences pour faire avancer la science. Pour une Marie Curie en France, il y a aussi un docteur Mabuse en Allemagne. Dans ces histo ires nous allons suivre Severac, en coma dépassé pendant quelques années avant de se réveiller en 1934 et de s'apercevoir que son super pouvoir est d'avoir rendu physique des entitées psychiques sorti tout droit de son imagination et du blason de sa bague familiale.

Marie puis le Nyctalope, chargé de la protection de la France, ainsi que quelques surhommes se sont chargés de protéger l'Europe. Mais ils doivent faire face aux nazis et leur allié le docteur Mabuse tandis que les russes promeuvent le groupe sans pouvoirs et les robots. Ceci est un rapide résumé de la situation en 1939 quand commence le premier tome. Les nazis se préparent à la guerre. En face, c'est la désunion. Frédéric et Iréne Jolliot Curie décident avec Severac de tenter une opération de la dernière chance. Intrigue follement intéressante mais parfois très confuse (trop) qui alterne les séquences sans qu'il y ait une cohérence immédiate. Il faut persister pour comprendre ce qu'il se passe. Un personnage surnage, Severac, perturbé, candide découvrant son nouveau physique, scientifique mais moins fou (malgré ses problèmes psychiques) que ses collègues qui n'hésitent pas à utiliser les hommes comme cobayes. Avis mitigé sur ces 6 tomes, foisonnant mais pas tout à fait abouti (les suites ou préquels seront d'un nettement meilleur niveau).
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Un récit des contes de la Pieuvre : Célestin et..

Je suis conquise par l’ambiance, la dimension romantique de l’intrigue. Qui donc est la fameuse Vendrezanne ? Ce sombre conte a pour cadre les bas-fonds populaires parisiens du 19ème. Je ne vais pas m’étendre là où d’autres l’ont déjà fait avec brio. Oser pénétrer dans un Paris du banditisme où les super héros sont utilisés à contre emploi. Ils occupent le devant de la scène parmi les vapeurs de la fée verte et les odeurs nauséabondes des égouts. Si la colorisation des planches peut surprendre, elle participe à la dimension fantastique de l’histoire. J’y ai vu également un bel hommage à Tardi. Je cours lire les deux premiers volumes des contes de l’auberge de la Pieuvre, même pas peur !
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L'oeil de la nuit, tome 1 : Ami du mystère

Un génial retour aux sources du fantastique du début du XXème siècle



Si vous êtes déjà amateurs de la brigade chimérique, ou d'Adèle Blanc Sec, vous pouvez arrêter de lire cet avis et vous précipiter sur cette excellente bande dessinée.

S'il en faut un peu plus pour vous convaincre, je citerais la science mystérieuse telle qu'on l'envisageait au début du siècle dernier, avec notamment un disciple du docteur Frankenstein, un vaisseau volant, une momie de martien. Mais on y trouve aussi de l'exotisme, un fakir indien, Arsène lupin, de l'hypnose, et bien sur des bolchéviques et peut être une créature que Lovecraft n'aurait pas reniée. C'est un joyeux fourre-tout remarquablement scénarisé qui mène le lecteur dans une folle course poursuite qui ressemble autant à une fuite en avant qu'à une enquête policière. Plus centré que la Brigade chimérique du même auteur, le scénario est plus clair, plus dirigé, plus facile à suivre tout en gardant ce côté de mystère fascinant.

Quand au dessin, il est parfaitement au service du scénario avec un style délicieusement rétro où la modernité se manifeste par touches délicates, alternant les plans fixes sur les visages saisissants de vérité, et les vues plus larges sur un monde uchronique et fascinant. Les clairs obscurs sont particulièrement réussis et donnent une ambiance spectrale à certaines scènes. Ambiance garantie!!

A recommander à tous les amateurs de fantastique qui veulent découvrir de nouveaux horizons, et bien sur aux amateurs de steampunk et de science étrange.
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Jour J, tome 7 : Vive l'empereur !

Quel imaginaire!!! Cette dystopie est excellente!!

Je me suis totalement pris à cette France irréelle bien différente de ce qu'il s'est passé. Un des meilleurs tomes de cette série qui commence avec le classique "et si..." On imagine, on adapte et on retrouve des figures dans d'autres situations, d'autres postures mais avec la même énergie derrière tout ça.

Celle là est un must qui réinvente l'Histoire européenne et les relations franco-anglaises
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La Brigade Chimérique, tome 1

Pour une introduction c'est très engageant.

Ce qui est cool quand on s'attaque à une "Ligue des Gentlemen Extraordinaires" de la vieille Europe, c'est que les références et la littérature dans laquelle on peut piocher sont assez folles.



Une uchronie avec super-héros atomisés, super Nazis et méca-Communistes, Paris culturel en pleine ébullition surréaliste, base secrète sous Montmartre... Argh ! N'en jetez plus !



Le décorum est tout de même sacrément plaisant et la patine plus "smart" que le récit de super-héros classique. Un petit côté suranné et intellectuel du meilleur effet, mais à voir si cela tient dans le temps ou n'est que décors pour s'acheter une légitimé.



J'ai hâte de lire la suite
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Conan le Cimmérien, tome 9 : Les Mangeurs d'h..

Bon voilà, je crois ne pas être pas être fan définitivement de la série Conan. Il y a quelques opus réussis graçe à de trés bons dessinateurs. Ici c'est...bof. Avis totalement subjectif je le reconnais. Scénario est assez limité.

Le fait que la playmate passe la totalité de l'histoire presque nue ne m'a pas aidé. Dans le style c'est pas mal. Mais ce n'est pas mon style
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La malédiction de Gustave Babel

Uchronie dans le sens où cela se déroule dans le Paris du début du XXeme siecle sans trop de différences historiques si ce n'est que certaines personnes ont des talents, ou des pouvoirs. Ici nous avons Gustave Babel qui nous raconte sa vie à sa façon, avec une balle dans le cœur, à l'heure de sa mort. Il est capable de parler n'importe quelle langue et il est devenu tueur pour la Pieuvre (sorte de maffia française sise à Paris) sans se rappeler comment. Il a longtemps souffert d'amnésie concernant sa jeunesse et ses années de formation. A la suite d'un contrat non réussi (le futur mort était déjà mort quand il est arrivé chez lui), il va commencer à faire des rêves étranges où apparait un personnage à tête de mort ainsi que des angoisses liées à une date. Foisonnant de pleins de détails, de digressions, on finit par coller les différents morceaux de la vie de notre héros. Une rencontre avec l'hypnotiseur a finalement décidé de sa trajectoire.

Un roman d'aventures épiques, comme Alexandre Dumas aurait pu le faire.

Un trait particulier mais qui colle parfaitement à cette histoire bizarre.

Une vraie réussite dans un style très particulier.
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Un destin de trouveur

une bonne uchronie est celle qui sait modifier juste ce qu’il faut la réalité pour paraître le plus crédible possible ; Joli tour de force de Gess qui, une fois encore, parvient à proposer un récit empreint de fantastique sans pour autant qu’il en devienne science fictionnesque. Ses protagonistes dotés de pouvoirs – les talents- sont tellement bien écrits et ancrés dans un background réaliste, qu’à aucun moment le récit n’est gâché par une impression de surréalisme comme ça peut être le cas dans la BD de super héros par exemple.







Les Contes de la Pieuvre c’est une peu Peaky Blinders revu sauce E.A . Poe, ou Les Brigades du Tigre version Lovecraft; ce second opus, qui est un des meilleurs albums que j’ai lu depuis le début de cette année, avec son scénario feuilletonesque à souhaits, ses rebondissements à foison, sa description détaillée d’un univers riche, et, last but not least, son graphisme toujours aussi atypique et moins rough qu'aux héroïques débuts, enfonce le clou et fait espérer que le succès public sera au rendez-vous afin que l’on ait encore droit à un nouveau « Conte » dans le futur !
Lien : http://bobd.over-blog.com/20..
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La Brigade chimérique : Intégrale

Je n'ai pas passé un bon moment, les dessins des décors sont plutôt bons mais en ce qui concerne les personnages il y a trop d’aplat et pas assez de nuances alors que dans les croquis il y a du volume. L'histoire pour moi était sans grand intérêt. A vous de vous faire votre opinion.

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La malédiction de Gustave Babel

"Les choses de la vie" d'un tueur à gages qui se raconte pendant que la mort lui accorde une pause. Vie bizarre pour un polyglotte surdoué mais maudit et malheureusement tombé dans les mains de l'hypnotiseur et sous la coupe la pègre. Seul la compagnie de Baudelaire l'empêche de sombrer dans ses cauchemars.

Un album splendide pas facile à lire au début mais tellement prenant..
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La malédiction de Gustave Babel

Un roman graphique hors norme autant dans le dessin que dans l’histoire



C'est l'histoire...



Argentine 1925, Gustave Babel est assassiné par un enfant. Pendant qu’il agonise, on découvre la vie de cet homme; assassin pour la Mafia « La pieuvre », qui possède le don de parler toutes les langues.



Alors que la Bouche lui confie une nouvelle mission, la victime meurt avant qu’il n’intervienne… puis cela se réitère avec une deuxième, puis avec une troisième exécution programmée…



Mais que se passe t’il soudainement ? Gustave se met alors à faire d’étranges rêves , où cohabitent ses victimes manquées et dans lesquels petit à petit remonte son histoire et celle de l’hypnotiseur, personnage mystérieux.



Tout se met alors en place et on découvre son histoire personnelle…



Un ovni graphique dont il ne faut absolument pas passer à coté
Lien : https://justelire.wordpress...
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La Brigade chimérique : Intégrale

Des super heros francais, vraiment epoustouflants, une superbe histoire, je n ai qu un seul regret c est que pour l instant il n y ait pas de suite prevue, car c est vraiment tres bien ecrit, et aussi tres bien dessiné
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L'oeil de la nuit, tome 1 : Ami du mystère

Au fil de ses séries (La saison de la coulœuvre, Brigade chimérique, Masqué, Metropolis), Serge Lehman a su s’imposer comme une valeur sure du neuvième art, mais également comme amateur de récits super-héroïques français.



L’auteur se penche ici sur l’un des personnages de « La Brigade chimérique » et livre une sorte de préquelle, destinée à narrer les premières aventures de ce personnage imaginé en 1911 par le romancier Jean de La Hire. Suite à un différent sur les droits, Léo Saint-Clair est néanmoins rebaptisé Théo Sinclair, tandis que son nom super-héroïque est dorénavant L’Oeil de la Nuit au lieu du Nyctalope.



Mais peu importe son nom, ce sont bel et bien les débuts du justicier qui nous sont narrés, au sein d’un univers que les amateurs de « La Brigade chimérique » prendront grand plaisir à retrouver. Outre un univers d’une grande richesse qui multiplie les références historiques, notamment en intégrant de nombreux personnages connus, tels que Georges Clémenceau ou Arsène Lupin, cette mise en place s’avère également déjà très riche en rebondissements. En envoyant son héros à la poursuite de bijoux volés, Serge Lehman propose en effet une course-poursuite dynamique, mêlant savants fous, machines volantes et créatures hybrides.



Au niveau du graphisme, on retrouve Gess, le dessinateur de « Carmen Mc Callum » et de « La Brigade chimérique », dans un style très réussi, qui n’est pas sans rappeler celui du célèbre Mike « Hellboy » Mignola. Son dessin restitue avec brio l’ambiance de l’époque et invite à découvrir un monde fourmillant de détails et d’éléments insolites.



Une mise en place très prometteuse !
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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La Brigade Chimérique, tome 6

Ce tome fait suite à Le Club de l'hypermonde - TOLA (épisodes 8 & 9) qu'il faut avoir lu avant. Il contient l'épisode 10 et l'épilogue, initialement parus ensemble sous la forme d'un album catonné en 2010, coécrits par Serge Lehman & Fabrice Colin, dessinés et encrés par Gess, avec une mise en couleurs réalisée par Céline Bessonneau. Cette histoire a bénéficié d'une réédition en intégrale La Brigade Chimérique, Intégrale agrémentée de précieuses et volumineuses notes de Serge Lehman.



La tête arrive - À Prague, George Spad et la personne quelle est venue sauver sont attaquées par l'homme élastique (Lebon), puis encerclées par les crânes. Claude (le pilote de leur aéronef) ne peut pas faire grand-chose. À Metropolis, la Brigade Chimérique est à pied d'œuvre pour débiter du crâne, constater les horreurs commises au nom du nazisme et parvenir jusqu'à l'architecte de ce mouvement.



Épilogue : Le Grand Nocturne - Qu'advient-il de Jean Séverac ? Du docteur Mabuse ? Que contient cette énorme caisse que les européens se sont fait un devoir d'envoyer à Londres ? Théo Saint-Clair a-t-il atteint ses objectifs ?



Dans un premier temps, le lecteur découvre avec surprise que les aventures de la Brigade Chimérique s'arrêtent là. En effet, Serge Lehman et Fabrice Colin ont réservé une fin en bonne et due forme qui n'appellent pas de suite. Ils réussissent à tout résoudre, qu'il s'agisse du devenir de la Brigade Chimérique, du sort des personnages principaux (Jean Séverac, George Spad, Théo Saint-Clair, du docteur Mabuse), des métaphores politiques, de l'Holocauste à venir. Ils réservent de nombreuses surprises au lecteur, y compris l'apparition d'autres héros de la culture populaire, des plus récents, comme un plus ancien. Du point de vue de l'intrigue, le lecteur est comblé au-delà de ses espérances.



Gess reste dans une grande forme, ne semblant pas avoir souffert de la cadence de parution. Ces 2 derniers épisodes lui permettent de donner toute sa mesure dans les 2 grandes scènes d'action. L'homme élastique est imposant dans sa stature de géant d'au moins 20 mètres. Comme dans les tomes précédents, il n'est pas représenté comme un superhéros ou un supercriminel de comics, pas de vêtement à base de molécules instables, par de muscles surnuméraires ou hypertrophiés. En pleine scène d'affrontement physique, le lecteur apprécie l'humour discret du dessinateur quand il peut voir George Spad au travers d'un crâne dont l'arrière a été défoncé par une balle, par le biais de ses orbites. La Brigade Chimérique a également l'occasion de se lâcher contre ses ennemis, là encore dans des visuels sachant éviter les clichés visuels des comics. Le lecteur constate avec surprise que visiblement ses 4 membres sont dotés de capacité de vol autonome, ce qui ne semblait une évidence dans les épisodes précédents.



Comme dans les tomes précédents, ces épisodes ne se limitent pas à une succession de scène d'affrontements. Gess continue de détourer les formes avec des traits qui peuvent sembler manquer de précision, parfois un peu pâteux, parfois appliqués grossièrement. Quelques visages donnent l'impression d'avoir été esquissés (pour ne pas dire gribouillés) à la va-vite. Comme dans les tomes précédents, il s'agit d'un parti pris graphique de l'artiste. Il suffit de contempler le dessin pleine page qui ouvre l'épilogue. Il s'agit d'un gros plan sur le visage de Jean Séverac. En le contemplant, il ne fait aucun doute que Gess est capable de dessiner le visage humain dans les détails, avec une expressivité développant une empathie irrésistible. La majeure partie des expressions des visages donnent une indication claire de l'état d'esprit du personnage représenté.



Ces 2 épisodes sont constitués de scènes ambitieuses, assez complexes d'un point de vue de visuel. Gess se sort avec les honneurs de tous les défis, de l'intervention de ce géant dans une grande place (ce qui lui donne l'espace nécessaire pour bouger) à un étrange monologue plein de pathos dans une pièce plongée dans le noir. Lors de l'intervention de la Brigade Chimérique, le docteur Mabuse se lance dans un long monologue occupant plus d'une page. A priori le lecteur se dit qu'il va assister à une scène très artificielle au cours de laquelle le criminel révèle tous ses plans et s'écoute parler en s'auto-congratulant. Il y a bien sûr un peu de ça (et encore les scénaristes savent rendre ce monologue réaliste), mais l'artiste a conçu une mise en page qui insuffle une grande tension dramatique à ce moment. Il n'aligne pas une série de cases uniquement avec la tête du docteur Mabuse en train de parler. Il le montre en train de gesticuler comme un acteur de théâtre (ce qui est justifié par la nature de son soliloque), en alternant ces cases avec la réaction ou un geste de ses auditeurs. Le résultat apparaît totalement naturel.



Parmi les autres défis graphiques, le scénario nécessite de donner une forme conceptuelle à l'un des instruments de la solution finale, tout en préservant la surprise. Gess conçoit une image symbolique qui remplit cette fonction à merveille, incitant le lecteur à s'interroger sur le sens de cet étrange image, décuplant l'impact émotionnel accompagnant la compréhension de ce qui est représenté (une dernière séquence terrifiante). Comme dans les tomes précédents, le lecteur apprécie le travail d'équipe entre Gess et Céline Bessonneau. Pour ce symbole, ils ont choisi une couleur (avec dégradés et effets spéciaux) laissant planer le doute quant à sa nature, établissant un point de repère visuel pour le lecteur qui identifie immédiatement le symbole grâce à cette couleur. De la même manière, ils ont établi dans les précédents tomes, une composition chromatique spécifique pour la Brigade Chimérique, comme une sorte de halo accompagnant leurs manifestations. Dans l'épilogue, le lecteur découvre un usage fort efficace de ce halo pour renforcer de manière visuelle ce qui est montré à l'image.



Pour une dernière fois (dans cette série), le lecteur prend plaisir à voir les façades d'immeuble dessinées par Gess. Avec un angle de vue un peu compliqué, il rend compte de l'architecture, de l'implantation dans une rue, de l'aspect monumental, de l'intégration dans un tissu urbain.



Si le lecteur ne connaît pas la fin de l'histoire, il va au-devant de plusieurs grosses surprises qu'il n'est pas question de révéler. Les coauteurs ne changent pas leur fusil d'épaule, et le récit ne verse pas dans un comics de superhéros à l'américaine, il garde son identité française. Depuis le début, ils ont créé un récit à la structure complexe, mêlant les héros de fiction à la grande Histoire, comme s'ils avaient réellement existé, rencontrant des personnages réels, des hommes politiques ou des artistes de l'époque. Ils ont positionné leurs personnages entre 2 niveaux de réalité, à la fois comme existant dans une reconstitution historique, à la fois comme métaphore d'un mouvement politique (le communisme pour Nous Autres, ou le nazisme pour le docteur Mabuse). En entamant ce dernier tome, le lecteur se rend compte que ce dispositif narratif laisse la latitude aux auteurs de choisir entre respecter le cours de l'Histoire, ou au contraire diverger vers une réalité alternative, conservant le potentiel de surprise intact.



Le cœur de ce tome et le nœud du récit réside dans le monologue du docteur Mabuse (sur une page et demi), face à la Brigade Chimérique. À travers lui, les auteurs se livrent à une déconstruction du superhéros, dans un discours personnel. Ils ont patiemment établi le parallèle entre ces surhommes et plusieurs courants politiques de l'époque, ce qui leur permet de conclure leur exposé sur ce thème, avec une conséquence directe sur les personnages. Ils filent leur métaphore jusqu'à son terme, jusqu'à la conclusion. Tout aussi élégamment, ils achèvent leur récit en reprenant l'image des cafards présents à la première page du premier tome.



Dans les textes en fin de l'édition intégrale, Serge Lehman évoque son intention première : mettre en scène la disparition des surhommes européens en en donnant une explication. Il a atteint son objectif avec panache, par le biais d'une déconstruction dont les fondations prennent leurs assises dans l'Histoire (c'est ce qui rend son approche personnelle, par comparaison avec les multiples déconstructions opérées dans les comics depuis les années 1980). Ce n'est pas un exercice générique, mais une analyse portant sur les surhommes européens de l'entre-deux guerres. Ayant découvert la raison de la disparition de surhommes du continent européen, le lecteur transpose cette explication aux États-Unis (et même à l'Angleterre puisque John l'étrange, l'homme cosmique est toujours présent). Il se demande bien comment elle peut s'y appliquer, quelle lecture politique il doit en donner.



En refermant ce dernier tome, il apparaît que les créateurs ont tenu leur pari. Gess a réussi à dessiner les 12 épisodes sans perdre en qualité, au contraire en s'améliorant de tome en tome. La mise en couleurs de Céline Bessonneau a également gagné en sophistication et en complémentarité avec les dessins. Serge Lehman et Fabrice Colin ont présenté toute une génération de héros jusqu'alors majoritairement oubliés, tout en conservant leur identité européenne en se tenant à l'écart des conventions des comics de superhéros américain, en conservant leur lien avec le contexte historique dans lequel ils sont apparus. Ils ont donné à leur récit la forme d'un roman noir, référençant l'Histoire avec sensibilité. À ce titre la dernière séquence rend hommage aux déportés de la seconde guerre mondiale avec une imagerie risquée mais portant l'émotion avec respect, sans voyeurisme.
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La Brigade Chimérique, tome 5

Ce tome fait suite à Politique internationale + HAV-Russe (épisodes 6 & 7) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 8 & 9, initialement parus ensemble sous la forme d'un album catonné en 2010, coécrits par Serge Lehman & Fabrice Colin, dessinés et encrés par Gess, avec une mise en couleurs réalisée par Céline Bessonneau. Cette histoire a bénéficié d'une réédition en intégrale La Brigade Chimérique, Intégrale agrémentée de précieuses et volumineuses notes de Serge Lehman.



Le Club de l'hypermonde - Le 20 juillet 19398, à l'institut du radium à Paris, Irène Joliot-Curie, George Spad, et Jean Séverac s'interrogent sur les révélations de Gregor Samsa, et en particulier sur la signification de HAV-russe. Au cours de la discussion, Michel Joubert évoque ses trouvailles sur les personnages impliqués, tirées des feuilletons qu'il lit et collectionne. Jean Séverac reprend son travail à l'hôpital. Quelques jours après, George Spad l'invite à le rejoindre à une réunion du club de l'hypermonde.



TOLA - Le 9 août 1939, les hommes du Comité d'Information et de Défense (CID) investissent l'institut du radium. Pendant ce temps-là, Jean Séverac effectue un voyage en avion de la plus haute importance, en compagnie de Claude qui a financé le vol. Avant une mission qu'elle sait périlleuse, la femme appelé George Spad écrit une lettre à Jean Séverac, dans laquelle elle évoque ses origines.



C'est déjà l'avant dernier tome et le lecteur s'interroge sur la finalité du récit. Il voit s'entremêler de manière plus serrée les fils de l'intrigue relatifs aux personnages principaux (Jean Séverac, Irène Joliot-Curie, George Spad, et Théo Saint-Clair), avec ceux de la grande Histoire. Les coauteurs se servent de certains personnages comme d'une métaphore politique, en particulier pour évoquer la signature du pacte germano-soviétique du 23 août 1939. Ils se servent d'un en particulier pour évoquer l'extermination des juifs. Certains des personnages principaux prennent conscience du jeu des alliances fluctuantes entre nations, bafouant toute valeur morale, ou tout code de l'honneur.



Les auteurs font apparaître l'ambivalence de la perception du mouvement communiste, à la fois gouvernance par le peuple, mais aussi dictature coupable d'épuration. Sont également évoqués le ghetto de Varsovie, ainsi que la guerre civile en Espagne, et la rancune subsistant entre la France et l'Allemagne. Ce dernier point est incarné par le mystère se cachant derrière les dernières paroles de Gregor Samsa (HAV-russe). Le lecteur éprouve des difficultés à gober ce lien qui unit 2 personnages issus de la littérature d'une manière bien artificielle, malgré les justifications de Serge Lehman dans les notes de l'édition intégrale.



Gess apporte sa pierre à l'édifice pour cette dimension historique. Le lecteur retrouve avec plaisir ses représentations légèrement râpeuses des façades parisiennes, ainsi que celles des intérieurs (la pièce de travail d'Irène Joliot-Curie, ou le salon du Club de l'hypermonde). L'artiste utilise des traits légèrement tremblés, pas exactement jointifs pour détourer les reliefs des façades, et le résultat représente avec justesse le milieu urbain, en donnant une impression très détaillée, intelligente (c’est-à-dire une représentation de la réalité cohérente avec les techniques d'urbanisme) et juste. Le lecteur apprécie encore plus ces cases dans la mesure où Gess a trouvé des solutions graphiques pour éviter l'impression d'un sol lisse, plan, uniforme et propre, sans substance.



Le dessinateur utilise différente technique pour pouvoir donner une patine historique aux séquences. Lors de la projection des actualités dans un cinéma, c'est Céline Bessonneau qui applique une couche bleutée pour évoquer le noir et blanc (et gris) tressautant des images d'archives. Dans l'épisode 9, elle et Gess travaillent de concert pour une approche conceptuelle de la mise en couleurs, afin de rendre compte des émotions du personnage qui évoque sa jeunesse en Espagne, lors de la montée de l'extrême droite. D'une manière générale, la mise en scène et le découpage des pages apparaissent plus élaborés que dans les tomes précédents. Il y a évidemment la scène d'ouverture de l'épisode 9 où le scénario juxtapose 2 fils narratifs (la fouille de l'institut Curie et le souvenir d'une conversation entre Théo Saint-Clair et Irène Joliot-Curie), avec un très beau contraste visuel (noir et vert pour un fil, ocre et sépia pour l'autre). Gess gère avec une grande habileté l'espace confiné dans le salon du Club de l'hypermonde, en utilisant la profondeur de champ pour rester lisible, sans que les nombreux personnages ne se marchent sur les pieds.



Évidemment une certaine familiarité a fini par s'installer entre le lecteur et l'apparence des personnages, créant un plaisir par anticipation de retrouver cette familiarité : la silhouette menue de George Spad, le visage bourru de Jean Séverac, l'entrain dénué de malice de Michel Joubert, ou encore le visage désabusé et las de Théo Saint-Clair. Cette impression rassurante de retrouver des personnes connues n'empêche pas que Gess soit capable de surprendre le lecteur. Il en va ainsi de l'intensité du regard de Jean Séverac comprenant la manipulation criminelle à laquelle se livre le gouvernement français, quand il regarde les actualités au cinéma. En voyant les expressions franches et taquines de Palmyre au Club de l'hypermonde, le lecteur se surprend à rêver d'une série, ou au moins d'un tome lui donnant le premier rôle, réalisé par les mêmes auteurs (une héroïne métafictionnelle, tératophile et lesbienne, dixit Lheman). George Spad est magnifique de bout en bout, dans toutes situations, très attirante dans toute sa complexité de femme d'apparence fragile, d'individu tourmenté par des voix, d'être humain décidé et courageux.



Ces 2 épisodes sont à nouveau l'occasion pour Gess de dessiner des scènes d'action, avec des êtres humains normaux, ou des personnages dotés de capacités extraordinaires. Cet artiste réussit à concilier le concept loufoque de Palmyre se faisant obéir d'une créature du dehors avec moult tentacules et de la présence de la Brigade Chimérique, tout ça dans un salon cossu avec des grandes bibliothèques. Lorsque le moment vient pour Jean Séverac de sauteur d'un aéronef, sans parachute, sur une ville, il réalise un dessin pleine page alliant le corps massif du personnage, à un arrière-plan rendu indistinct par la pluie et les nuages, pour effet plein de puissance aussi singulier que saisissant. Il apparaît que Gess gagne en aisance d'épisode en épisode, concevant chaque séquence comme une prise de vue spécifique, adaptant son découpage pour le meilleur effet, d'un dessin pleine page à 16 cases pour une même page.



La représentation du salon du Club de l'hypermonde évoque avec conviction une époque révolue, celle des clubs masculins où les hommes venaient se détendre en fumant le cigare, en savourant un bon alcool de choix, ou en entretenant des conversations feutrées avec leur semblable. La représentation de cette pièce et des personnages présents transcrit à merveille le confort et la détente. C'est également l'occasion pour les auteurs de recommencer à rendre hommage aux feuilletonistes et autres auteurs de l'époque, avec le retour de Jacques Spitz et René Daumal, et l'apparition d'autres plus ou moins connus (dont l'auteur des aventures d'Harry Dickson). La plupart bénéficie d'une présentation et d'une contextualisation dans les notes de la version intégrale, à l'exception d'un dénommé Claude qui a mis à disposition un avion pour Jean Séverac. Du fait du contexte et de 2 phrases sibyllines, le lecteur suppute qu'il s'agit vraisemblablement de Claude Lévi-Strauss.



Avec ces 2 épisodes, les coauteurs s'offrent également une demi-page d'ironie tournant en dérision la tendance obsessionnelle du fan de lecture de divertissement. Michel Joubert (le jeune garçon passeur de messages secrets) se lance dans un exposé enflammé sur la continuité des apparitions du docteur Mabuse, bourré de détails dérisoires. Le lecteur est un peu déstabilisé par le fait que les adultes présents éprouvent un moment de surprise, se transformant en gène et ignorent ces informations à la consistance farfelue. Dans un premier temps, il y voit comme une moquerie adressée à lui-même qui s'investit dans cet ouvrage célébrant les œuvres d'auteurs oubliés et de personnages tellement échevelés qu'ils jettent le discrédit sur toute valeur littéraire de leurs aventures. Mais cette moquerie s'applique également aux auteurs de la Brigade Chimérique, générant une forme de dérision, en décalage avec l'investissement des auteurs dans leur œuvre.



Par contraste, certaines scènes apparaissent plus sérieuses, et plus littéraires. Il en va ainsi de l'opposition entre Théo Saint-Clair vieux, cynique, uniquement préoccupé de sa personne, et Irène Joliot-Curie, jeune et idéaliste. Les auteurs parachèvent leur métaphore des individus dotés de pouvoirs extraordinaires représentant une aristocratie vouée à la disparition, face au peuple (Nous Autres). Ils exposent de manière astucieuse leur conviction que les auteurs se doivent d'être des citoyens actifs, qu'ils ne peuvent pas se contenter de rêver à des utopies (le Club de l'hypermonde) et qu'ils doivent avoir une action concrète dans la société (le sauvetage dans lequel se lance George Spad).



Avec cet avant dernier tome, le lecteur se fait une meilleure idée du thème général de la série : la montée des tensions politiques avant le conflit de la seconde guerre mondiale, ainsi que l'évocation d'auteurs de l'imaginaire laissés de côté par les autorités littéraires. Il observe avec plaisir la prise d'assurance du dessinateur de plus en plus inventif dans sa mise en scène et sa manière de rendre visuelle les concepts du récit. Il apprécie la manière dont les auteurs ont patiemment construit et développé leurs thématiques pour s'insérer dans la réalité historique et filer la métaphore des individus dotés de pouvoirs.
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La Brigade Chimérique, tome 4

Ce tome fait suite à L'homme cassé - Bon anniversaire docteur Séverac (épisodes 4 & 5) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 6 & 7, initialement parus ensemble sous la forme d'un album catonné en 2010, coécrits par Serge Lehman & Fabrice Colin, dessinés et encrés par Gess, avec une mise en couleurs réalisée par Céline Bessonneau. Cette histoire a bénéficié d'une réédition en intégrale La Brigade Chimérique, Intégrale agrémentée de précieuses et volumineuses notes de Serge Lehman.



Politique internationale - Jean Séverac est de retour dans le laboratoire d'Irène Joliot-Curie avec une morphologie et une psyché qui ont un peu évolué. Irène Joliot-Curie lui explique ce qu'elle a fait avec sa chevalière et la chambre ardente. Félifax rencontre le président du conseil Édouard Daladier qui l'envoie en mission à l'étranger. Le Nyctalope et l'Accélérateur sont arrivés à Moscou pour essayer de négocier avec Nous Autres.



HAV-Russe - À Metropolis, Werewolf et l'Ange Bleu s'apprêtent à assister à une démonstration de superscience organisée par le docteur Mabuse, au bénéfice d'un plénipotentiaire d'une nation souveraine. George Spad et Jean Séverac ont décidé d'accéder à la requête d'Irène Joliot-Curie et de se rendre au quartier général du Nyctalope pour essayer de trouver son captif.



Ayant installé le personnage de Jean Séverac dans le tome précédent, les coauteurs peuvent revenir à la toile de fond de leur récit, c’est-à-dire les prémices de la seconde guerre mondiale. Ils emmènent leurs personnages en Russie et à Metropolis. Ils établissent de manière manifeste que le docteur Mabuse incarne bel et bien le nazisme. Il y a là un choix de structure du récit qui déconcerte de prime abord. Le prologue avait établi l'existence de la présence d'individus dotés de superpouvoirs dans différentes nations. Conformément aux conventions du genre superhéros, certains s'emploient à faire le bien, à lutter contre des criminels. D'autres utilisent leur force supérieure pour imposer leur volonté, que ce soit en s'emparant de richesses par le biais de vol et crimes, soit en s'érigeant dictateur de leur communauté. Les coscénaristes avaient laissé planer l'imprécision quant aux conséquences réelles de l'existence de tels individus dotés de pouvoirs, à l'échelle de l'échiquier politique mondial.



Ici le docteur Mabuse devient l'incarnation et peut-être la source du mouvement nazi. L'explication de son pouvoir intervient dans le deuxième épisode qui l'établit comme une métaphore. Serge Lehman et Fabrice Colin boucle leur usage de la métaphore. Le docteur Mabuse est utilisé comme métaphore d'une idéologie totalitaire, et cette même idéologie impacte la population, devenant concrète par ses effets. Ils utilisent le même dispositif de manière plus directe, avec la manifestation de superpouvoirs dans le peuple russe, la manifestation des pouvoirs physiques de Nous Autres.



Après un tome consacré aux origines secrètes d'un personnage, le lecteur apprécie que les auteurs reviennent à leur intrigue globale. Cela ne veut pas dire qu'ils sacrifient les autres composantes de leur récit pour autant. Ils continuent d'introduire des références historiques, qu'elles soient politiques ou culturelles. Ainsi le lecteur voit passer Joseph Staline. Sergei Eisenstein est mentionné par le biais d'une œuvre fictive (Spartaker). Le personnage de l'Ange Bleu provient du film de Josef von Sternberg. Leur intégration est plus naturelle, et leur nombre est plus réduit que dans le premier tome, ce qui laisse de la place pour que les personnages puissent exister. Le lecteur retrouve avec plaisir Jean Séverac, il en suit son évolution, sa transformation, avec un grand plaisir (tout en se demandant quelle tendance politique il peut représenter).



George Spad reste un personnage secondaire et mystérieux, avec juste ce qu'il faut de personnalité pour dépasser le stade de faire-valoir, ou de dispositif narratif. Par comparaison, Felifax (l'homme tigre) ou l'Accélérateur (Andrew Gibberne) ne sont présents que pour donner la réplique, ou accomplir une action, sans réelle personnalité. Il en va tout autrement de Théo Saint-Clair, dont le lecteur découvre la nature des motivations, avec incrédulité (on est bien loin de la version ultérieure dans la série du Nyctalope, à commencer par Ami du mystère des mêmes auteurs). Les notes en fin de la version intégrale permettent de comprendre que Serge Lehman a souhaité rester fidèle au destin de papier de ce personnage.



Globalement, les auteurs réussissent à gérer l'ampleur de leur œuvre. Arrivé à la moitié de l'histoire, le lecteur se fait une meilleure idée de leur ambition et des difficultés d'une telle entreprise. En 12 épisodes d'une vingtaine de pages, ils souhaitent rendre hommage à tout un pan disparu de la culture populaire, ils veulent donner corps à des personnages, pour la plupart nouveaux pour le lecteur. Ils évoquent les forces géopolitiques en présence avant la seconde guerre mondiale, en incorporant une ou deux idées de leur dogme. Ils développent également le concept de superhéros européens.



C'est une entreprise d'équilibriste que d'essayer de légitimer le concept de superhéros à la française, ou même européen. Serge Lehman et Fabrice Colin prouvent avec de nombreux exemples que les États-Unis n'ont pas le monopole de la création de personnages dotés de pouvoirs extraordinaires. Ce n'est pas une grande surprise pour le lecteur quand il repense par exemple à Hercule, ou à de nombreux héros dotés d'une force supérieure à la moyenne, ou de capacités proches du surnaturel (les multiples talents de Sherlock Holmes). L'apparition incongrue de John l'étrange, l'homme cosmique (et de son chien Sirus, en fin d'épisode 4) avait permis de visualiser les différences entre ce superhéros oublié, et les surhommes de la Brigade Chimérique.



Effectivement, Gess continue de réaliser des images qui évitent les codes des comics de superhéros américain. L'apparence des membres de la Brigade Chimérique est éloignée de l'esthétisme des superhéros bon teint. Pour commencer, il y a ces traits de contours semblant un peu imprécis et un peu tremblé, différents de l'encrage clair et un peu arrondi de l'ordinaire des superhéros. Ensuite il y a cette façon d'éviter d'en faire des personnages romanesques. Ils restent étrangers à l'humanité (pour la Brigade ou Felifax), ou alors au contraire ils sont très ordinaires comme l'Accélérateur, ou encore plus le petit monsieur un peu empâté qu'est Théo Saint-Clair. L'artiste se tient également à l'écart des morphologies exagérées que ce soient les muscles surnuméraires pour les hommes, ou les rondeurs défiant les lois de la gravité pour les femmes.



Même quand le scénario embrasse les manifestations de superpouvoirs, les images les présentent différemment de leur homologue outre atlantique. Cela commence dès la première séquence, avec la bague de Jean Séverac. Le lecteur amateur de superhéros ne peut pas y voir celle de Green Lantern, du fait d'un dessin qui n'idéalise par l'objet. Le Soldat Inconnu n'évoque pas Angel (Warren Worthington) parce que les dessins le montrent de manière prosaïque, sans volonté d'en faire un ange romantique (choix déjà présent avec la plume tenue par Irène Joliot-Curie dans le tome précédent). Le docteur Sérum évoque plus un pantin désarticulé que l'un des nombreux supercriminels construits sur la base d'un squelette. En outre les auteurs veillent à limiter les manifestations de ces superpouvoirs.



Ayant accepté les idiosyncrasies des dessins de Gess (soit comme une fatalité, soit pour leurs qualités dans le contexte de ce récit), le lecteur en retrouve les bons côtés et relèvent les visuels inattendus. Le trait un peu dur et sans fioriture de Gess dresse un portrait sévère et sérieux de Jean Séverac, tout en jouant sur le langage corporel pour montrer qu'il ne maîtrise par sa situation et qu'il éprouve des difficultés à s'habituer à l'évolution de sa physiologie. L'artiste continue de réaliser des reconstitutions historiques substantielles. En particulier l'appartement parisien de George Spad exhale l'authenticité, et la mise en scène est parfaite pour rendre l'étrangeté de ces milliers de feuilles griffonnées. Felifax est magnifique, bondissant dans une forêt. Le détenu de la cellule jouxtant celle de Gregor Samsa dégage une aura malsain palpable. La mort d'un personnage au milieu d'un parterre de coquelicots est d'une grande force visuelle (même si le lecteur s'interroge sur le sens à donner au symbole de ces fleurs qui sont souvent associées au souvenir des soldats anglais morts au front). Gess sait retranscrire toute l'horreur de l'épuration expérimentée le docteur Mabuse, dans toute son horreur, sans recourir à un voyeurisme simpliste.



Malgré l'ampleur de leur trame narrative, les auteurs ont réussi à faire décoller leur récit, à installer leurs personnages principaux, à leur donner des motivations propres et à brosser une toile de fond complexe. Gess progresse d'épisode en épisode (il ne lui reste plus qu'à réussir à trouver une solution graphique pour donner de la consistance aux différents sols), donnant une forte identité graphique aux surhommes européens, distinctes de celle de leurs confrères américains. En toute discrétion, Céline Bessonneau renforce la lisibilité des dessins, sans pour autant que les couleurs passent au premier plan (sauf dans la séquence dans un parc de Montmartre, avec des couleurs plus vives annonçant l'été).
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La Brigade Chimérique, tome 2

Ce tome fait suite à Mécanoïde Curie - La dernière mission du Passe-Muraille (prologue et épisode 1) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 2 & 3, initialement parus ensemble sous la forme d'un album catonné en 2009, coécrits par Serge Lehman & Fabrice Colin, dessinés et encrés par Gess, avec une mise en couleurs réalisée par Céline Bessonneau. Cette histoire a bénéficié d'une réédition en intégrale La Brigade Chimérique, Intégrale agrémentée de précieuses et volumineuses notes de Serge Lehman.



Chapitre 2 : Cagliostro - Jean Séverac est tiré de son sommeil par toujours le même cauchemar, 4 entités indistinctes qui se répondent dans son esprit. Le 18 mars 1939, Théo Sinclair (Le Nyctalope / l'Œil de la nuit) intervient sur l'esplanade de Vincennes, avec ses agents du CID, pour capturer l'homme élastique (créé par le docteur Flohr). De son côté, George Spad se rend à l'hôpital américain pour rencontrer le docteur Séverac. Comme le titre l'indique, Giuseppe Balsamo (comte de Cagliostro) fait une apparition.



Chapitre 3 : la chambre ardente - À l'institut du radium, Irène Joliot-Curie montre quelques vieilleries à son frère Frédéric Joliot. Ils sont interrompus par la visite de Jean Séverac. Ce dernier leur montre une peinture représentant la Brigade Chimérique. Ils évoquent des légendes de la Grande Guerre : les anges de Mons, le dirigeable noir, la vierge des barbelés, un ours (le Baron Brun), un archange (le soldat inconnu), une infirmière fantôme (Matricia) un homme squelette (le docteur Sérum).



Après la lecture du premier tome, le lecteur a bien assimilé le principe de la narration : évoquer une multitude de héros populaires (pour la plupart oubliés, ou au mieux méconnus), dans une intrigue de grande ampleur inscrite dans l'Histoire, et plus particulièrement l'approche de la seconde guerre mondiale. Avec ce deuxième tome, il commence par constater que les coauteurs continuent de parsemer leur récit de ces personnages qui ont laissé une empreinte durable dans l'inconscient collectif, même si le grand public n'a pas retenu leur nom. C'est ainsi qu'il voit surgir Cagliostro et qu'il voit revenir l'homme élastique. En fonction de son inclination, il les approche comme des personnages prêts à l'emploi piochés pour les besoins de l'intrigue. Il apprécie leurs particularités et leur diversité. Il peut aussi concevoir leurs apparitions comme une occasion facilitée pour se renseigner à leur sujet, soit grâce aux présentations fournies, incluses dans l'édition intégrale, soit en se renseignant, par exemple, dans une encyclopédie en ligne.



Le récit tient sa promesse de montrer des surhommes en action. Le lecteur éprouve le plaisir de voir le Nyctalope entrer en action avec son organisation le Comité d'Information et de Défense (CID). Il est enfin possible de voir pourquoi ce monsieur d'une taille inférieur à la moyenne est considéré par les autres personnages, comme un individu avec qui il faut compter. C'est également l'occasion d'avoir quelques aperçus de la super-science à l'œuvre, en particulier le halo supernoir. Lehman & Colin piochent donc dans la littérature populaire et ramènent des trésors d'inventivité débridée. Un lecteur rationnel n'y verra peut-être qu'une forme d'imagination enfantine. Le lecteur amateur de littérature de l'imaginaire fond devant Palmyre (une héroïne métafictionnelle, tératophile et lesbienne, dixit Lheman) et la forme de la manifestation de ses pouvoirs.



Ce deuxième tome apparaît très dense en matière d'intrigue. La Brigade Chimérique est évoquée, ses membres sont nommés, et son historique est partiellement dévoilé. La position du docteur Mabuse sur l'échiquier politique est précisée. La nature des relations entre les Curie et Théo Sinclair devient plus claire. Le groupe Nous Autres est à nouveau mentionné. Avec ces 2 épisodes supplémentaires, le lecteur commence à discerner qui sont les principaux personnages, à savoir ceux dont les apparitions sont récurrentes d'un tome à l'autre : Jean Séverac, George Spad, Irène & Frédéric Curie, Théo Saint-Clair, Michel Joubert (le jeune garçon qui apportait un livre à signer à Irène Joliot-Curie dans le premier tome). Comme dans le tome précédent, ces personnages sont plus définis par leurs actions, que par leurs sentiments. Cette forme de narration maintient une distance entre eux et le lecteur, puisque ce dernier ne peut pas ressentir d'empathie pour des individus qu'il ne voit que de l'extérieur.



De la même manière, le lecteur a observé les particularités graphiques des dessins de Gess et il sait à quoi s'attendre. Les traits restent parfois un peu imprécis. Certains semblent un peu tremblés, un peu baveux, comme si le papier avait absorbé un peu trop d'encre, en rendant le contour imprécis. La gestion des arrière-plans s'est améliorée, c'est à dire que quand ils sont vides, cet état de fait est justifié par la nature de la séquence. Une fois acceptés ces traits hésitant entre la délimitation précise, et le coup de pinceau un peu pâteux, le lecteur apprécie mieux les autres particularités des dessins. Cela commence avec les personnages qu'il reconnaît au premier coup d'œil et qui disposent d'une forte identité graphique, sans être caricaturaux. Gess s'en tient à la description du Nyctalope dans les romans, ce qui lui donne une allure peu héroïque, et qui souligne son côté inquiétant, vu le respect dont bénéficie ce petit monsieur un peu empâté. Il retrouve avec grand plaisir George Spad avec sa silhouette élancée, et sa coupe garçonne.



L'apparence de Palmyre est très singulière avec sa grande tunique large. Gess la représente de telle sorte qu'elle constitue le trait d'union entre les personnages normaux, et l'apparence plus exagérée de Cagliostro. Jean Séverac présente une carrure impressionnante, sans être impossible. Il a des gestes et des comportements très normaux, avec une belle présence dans chaque page où il apparaît, même si les traits de contour un peu baveux aboutissent parfois à un modelé un peu imprécis de son crâne. Gess utilise à nouveau le dispositif consistant à ne pas dessiner de traits sur le visage des personnages éloignés, avec plus de pertinence que dans le premier tome. Les différents protagonistes évoluent sous les yeux du lecteur avec une apparence assez forte pour qu'ils en deviennent substantiels.



Le lecteur remarque que Céline Bessonneau maîtrise mieux ses techniques de mise en couleurs, ce qui aboutit à des dessins plus étoffés. Il remarque par exemple le bel éclairage bleuté de la pénombre de la chambre de Jean Séverac, ou encore la variation de nuances de la pelouse de Vincennes, le halo entourant les runes se manifestant autour de la grosse bestiole avec des tentacules, ou encore le discret motif imprimé sur le tissu du fauteuil du Nyctalope (à la dernière page de l'histoire).



Comme dans le tome précédent, Gess fait feu de tout bois pour adapter sa narration visuelle à chaque séquence. Le découpage de chaque page est taillé sur mesure pour ce qui est représenté, d'un dessin pleine page, à 14 cases sur la même page. Au choix le lecteur peut éprouver une forme d'irritation à ces changements incessants de mise en page, ou au contraire les percevoir comme une manière de donner une identité graphique pertinente à chaque scène. L'artiste modifie également sa façon de dessiner en fonction du sujet de la scène. Il peut s'agir de dessins traditionnels avec des contours tracés à l'encre, ou de cases peintes (pour l'évocation de la Brigade Chimérique, soulignant ainsi qu'il s'agit d'événements inscrits dans l'Histoire). À de rares occasions, le lecteur décèle aussi des photographies retouchées pour des éléments historiques.



Le scénario contient aussi bien des scènes de dialogue, que des scènes d'action. À chaque fois, Gess conçoit une mise en scène adaptée. La scène de réveil de Jean Séverac est calme et contemplative. La scène d'intervention du Nyctalope et du CID contre l'homme élastique fait bien ressortir l'étrangeté du halo supernoir. La page où George Spad se plonge dans le dossier de Jean Séverac présente une structure originale qui permet aux coscénaristes d'insérer toutes les nombreuses informations, tout en gardant un attrait visuel à la page qui montre bien plus que ce que raconte le texte. L'évocation de la Brigade Chimérique sait lui conférer un aspect mythologique et légendaire, avec une conviction charmante.



En prenant un peu de recul, le lecteur s'aperçoit également que les coscénaristes font plus que manier une intrigue ambitieuse, avec des personnages hauts en couleurs. En repensant à Palmyre, il constate qu'ils ont bien repris sa dimension métafictionnelle puisque cette femme intervient pour apporter son aide à George Spad (Renée Dunan) qui est sa créatrice, la romancière qui a créé ce personnage fiction. Le lecteur peut y voir l'auteur sauvé par son personnage, c'est-à-dire comme Lehman et Colin sont mis en avant auprès du lecteur en tant qu'intermédiaires mettant en valeur une ribambelle de personnages. Ce sont ces derniers qui fournissent matière aux auteurs pour réaliser un ouvrage leur permettant d'exister aux yeux du public.



En tout état de cause, ce deuxième tome confirme la très bonne impression du premier, avec une prise d'envergure de l'intrigue bien menée, des évocations savoureuses de personnages oubliés, et une narration graphique qui gagne en qualité.
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L'oeil de la nuit, tome 2 : Les grandes pro..

Les Grandes Profondeurs continuent de montrer que L'Oeil de la Nuit est une excellente série où l'aventure vous entraine vers de nouveaux univers ! ,Un grand feuilleton à ne pas manquer !
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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La Brigade Chimerique, Encyclopédie et Jeu de..

Bizarre de ma part de parler d'un ouvrage dont je n'ai que feuilleté le tome 1 de la série.



C'est riche, dense et ça fait son petit poids ce livre. Un truc bien dense pour vous émerveiller pendant un certain temps...

On rentre ici dans un monde de l'étrange et du bizarre. Une splendide vision obscure du monde "après guerre 14/18". Tout est à émerveillement: les personnages connus et inconnus, les mondes secrets et mystérieux, les références historiques... un coté cinéma à la Fritz Lang.

Lehman et Gess savent nous décrire et surtout dessiner les choses. Une magnifique vision créatrice d'un monde imaginaire avec plein de référence à l'histoire.



Splendide. Je vais me remettre à jouer, moi...
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La Brigade chimérique : Intégrale

La disparition des super-héros européens en fable mytho-politique des années 30.



Désormais sur mon blog : http://charybde2.wordpress.com/2014/06/17/lecture-bd-la-brigade-chimerique-serge-lehman-fabrice-colin-gess/

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