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Citations de Tacite (79)


Déjà le peuple entier, pêle-mêle avec les esclaves, remplissait le palais, demandant par des cris confus la mort d'Othon et le supplice des conjurés, comme ils auraient demandé au cirque ou au théâtre un spectacle de leur goût. Et ce n'était chez eux ni choix ni conviction (ils allaient, avant la fin du jour, exprimer avec la même chaleur des vœux tout opposés); mais ils suivaient l'usage reçu de flatter indistinctement tous les princes par des acclamations effrénées et de vains empressements. Galba cependant flottait entre deux avis. Celui de Titus Vinius était de rester au palais, d'y armer les esclaves, d'en fortifier les points d'accès, de ne pas affronter des courages irrités. Il voulait qu'on laissât du temps au repentir des méchants, au concert des bons. Le crime a besoin de se hâter; la sagesse prépare lentement ses triomphes. Enfin, si, plus tard, il faut se hasarder, on le pourra toujours; mais le retour, si l'on s'est trop engagé, c'est d'autrui qu'il dépend.
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La bonne foi, la franchise, l'amitié, ces premiers biens de l'homme, tu les cultiveras sans doute avec une constance inaltérable; mais d'autres les étoufferont sous de vains respects. À leur place pénétreront de toutes parts l'adulation, les feintes caresses, et ce mortel ennemi de tout sentiment vrai, l'intérêt personnel. Aujourd'hui même nous nous parlons l'un à l'autre avec simplicité; tout le reste s'adresse à notre fortune plus volontiers qu'à nous. Il faut le dire aussi: donner à un prince de bons conseils est une tâche pénible; être le servile approbateur de tous les princes, on le peut sans que le coeur s'en mêle.
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La Germanie est séparée des Gaules, de la Rhétie et de la Pannonie par le Rhin et le Danube, des Sarmates et des Daces par une crainte mutuelle ou des chaînes de montagnes. Le reste est environné de l’Océan, dont les rivages forment de grandes sinuosités, et qui enferme des îles spacieuses, séjour nouvellement découvert de nations et de rois que la guerre nous a révélés. Le Rhin, tombant d’un sommet rapide et inaccessible des Alpes rhétiques, fait un léger détour vers l’occident, puis va se mêler à l’océan Septentrional. Le Danube, versé par la pente doucement inclinée du mont Abnoba , visite un plus grand nombre de peuples, et se décharge enfin par six bouches dans la mer du Pont : un septième bras se perd dans des marais.
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Le monde entier est leur proie. Ces Romains, qui veulent tout, ne trouvent plus de terre à ruiner. Alors, c'est la mer qu'ils fouillent !
Riche, leur ennemi déchaîne leur cupidité, pauvre, il subit leur tyrannie. L'Orient, pas plus que l'Occident, n'a calmé leurs appétits. Ils sont les seuls au monde qui convoitent avec la même passion les terres d'abondance et d'indigence.
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"Transmettre à la postérité les actions et le caractère des hommes célèbres est une pratique ancienne, à laquelle même à notre époque, si peu soucieuse qu'elle soit des siens, n'a pas renoncé, chaque fois que quelque mérite de taille, digne d'être connu, a vaincu et surmonté ce vice commun à toutes les cités, grandes ou petites : l'ignorance du bien ou l'hostilité à son égard."
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Luxure

XXXVII. Pour accréditer l'opinion que le séjour de Rome faisait ses délices, Néron donnait des festins dans les lieux publics, et il semblait que la ville entière fût son palais. De tous ces repas, aucun n'égala en luxe et en célébrité celui qu'ordonna Tigellin, et que je citerai pour exemple, afin de n'avoir pas à raconter cent fois les mêmes profusions. On construisit sur l'étang d'Agrippa un radeau qui, traîné par d'autres bâtiments, portait le mobile banquet. Les navires étaient enrichis d'or et d'ivoire ; de jeunes infâmes, rangés selon leur âge et leurs lubriques talents, servaient de rameurs. On avait réuni des oiseaux rares, des animaux de tous les pays, et jusqu'à des poissons de l'Océan. Sur les bords du lac s'élevaient des maisons de débauche remplies de femmes du premier rang, et, vis-à-vis, l'on voyait des prostituées toutes nues. Ce furent d'abord des gestes et des danses obscènes ; puis, à mesure que le jour disparut, tout le bois voisin, toutes les maisons d'alentour, retentirent de chants, étincelèrent de lumières. Néron, souillé de toutes les voluptés que tolère ou que proscrit la nature, semblait avoir atteint le dernier terme de la corruption, si, quelques jours après, il n'eut choisi, dans cet impur troupeau, un certain Pythagoras auquel il se maria comme une femme, avec toutes les solennités de noces véritables. Le voile des épouses fut mis sur la tête de l'empereur : auspices, dot, lit nuptial, flambeaux de l'hymen, rien ne fut oublié. Enfin, on eut en spectacle tout ce que, même avec l'autre sexe, la nuit cache de son ombre.

L'incendie de Rome

XXXVIII. Le hasard, ou peut-être un coup secret du prince (car l'une et l'autre opinion a ses autorités), causa le plus grand et le plus horrible désastre que Rome eût jamais éprouvé de la violence des flammes. Le feu prit d'abord à la partie du Cirque qui tient au mont Palatin et au mont Célius. Là, des boutiques remplies de marchandises combustibles lui fournirent un aliment, et l'incendie, violent dès sa naissance et chassé par le vent, eut bientôt enveloppé toute la longueur du Cirque ; car cet espace ne contenait ni maisons protégées par un enclos, ni temples ceints de murs, ni rien enfin qui pût en retarder les progrès. Le feu vole et s'étend, ravageant d'abord les lieux bas, puis s'élançant sur les hauteurs, puis redescendant, si rapide que le mal devançait tous les remèdes, et favorisé d'ailleurs par les chemins étroits et tortueux, les rues sans alignement de la Rome d'autrefois. De plus, les lamentations des femmes éperdues, l'âge qui ôte la force aux vieillards et la refuse à l'enfance, cette foule où chacun s'agite pour se sauver soi-même ou en sauver d'autres, où les plus forts entraînent ou attendent les plus faibles, où les uns s'arrêtent, les autres se précipitent, tout met obstacle aux secours. Souvent, en regardant derrière soi, on était assailli par devant ou par les côtés : on se réfugiait dans le voisinage, et il était envahi par la flamme ; on fuyait encore, et les lieux qu'on en croyait le plus loin s'y trouvaient également en proie. Enfin, ne sachant plus ce qu'il fallait ou éviter ou chercher, toute la population remplissait les rues, gisait dans les campagnes. Quelques-uns, n'ayant pas sauvé de toute leur fortune de quoi suffire aux premiers besoins de la vie, d'autres, désespérés de n'avoir pu arracher à la mort les objets de leur tendresse, périrent quoiqu'ils pussent échapper. Et personne n'osait combattre l'incendie : des voix menaçantes défendaient de l'éteindre ; des inconnus lançaient publiquement des torches, en criant qu'ils étaient autorisés ; soit qu'ils voulussent piller avec plus de licence, soit qu'en effet ils agissent par ordre.

XXXIX. Pendant ce temps, Néron était à Antium et n'en revint que quand le feu approcha de la maison qu'il avait bâtie pour joindre le palais des Césars aux jardins de Mécène. Toutefois on ne put empêcher l'embrasement de dévorer et le palais, et la maison, et tous les édifices d'alentour. Néron, pour consoler le peuple fugitif et sans asile, ouvrit le Champ de Mars, les monuments d'Agrippa et jusqu'à ses propres jardins. Il fit construire à la hâte des abris pour la multitude indigente ; des meubles furent apportés d'Ortie et des municipes voisins, et le prix du blé fut baissé jusqu'à trois sesterces (1). Mais toute cette popularité manqua son effet, car c'était un bruit général qu'au moment où la ville était en flammes il était monté sur son théâtre domestique et avait déclamé la ruine de Troie, cherchant, dans les calamités des vieux âges, des allusions au désastre présent.
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(Mort d'Auguste). Cependant à Rome tous se ruaient à la servitude : consuls, sénateurs, chevaliers. Plus était grande la splendeur de leur rang, plus ils étaient faux et empressés ; composant leur visage pour ne pas avoir l'air joyeux au décès d'un prince, ni trop triste à l'avènement d'uin autre, ils mêlaient les larmes, la joie, les plaintes, l'adulation.

At Romae ruere in servitium consules, patres, eques. Quanto sit illustrior, tanto magis falsi ac festinantes, vultuque composito, ne laeti excessu principis neu tristiores primordio, lacrimas, gaudium, questus, adulationem miscebant.

I-7.
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Les changements de gouvernement se prêtent aux grandes entreprises et il n'y a pas lieu de terroriser quand l'inaction est plus nuisible que la témérité.
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[...] la réussite a, pour éprouver les âmes, des aiguillons plus acérés : en effet, si les misères se supportent, la félicité nous corrompt.
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 Tacite
Les bienfaits ne sont agréables que tant que l'on peut s'acquitter.
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(...) Il y a une douceur dans l'inertie et nous en arrivons à chérir la paresse qui nous avait tout d'abord paru odieuse. [ III ]
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Nous occupons les confins du monde, la terre des derniers hommes libres.
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Les historiens ont toujours distingué la Rome républicaine et la Rome impériale.
Quand il s'agit de celle-ci, tout naturellement ils suivent le pointillé que dessinent les dynasties.
Suétone écrit l'histoire des douze Césars, d'autres font celle des Antonins, des Sévère.
Mais Tacite, lui, commence son histoire à l’avènement de Tibère ; et il se proposait de la continuer jusqu'à Trajan.
Il omet César et Auguste. C'est peut-être que son génie austère et sombre, qui triomphe dans le clair obscur, était plus attiré vers les empereurs monstrueux que vers le sage Auguste....
(extrait de la préface, signée Emmanuel Berl et insérée en début de l'édition de poche parue en 1963)
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celui-là est orateur, qui peut sur toute question parler d’une manière élégante, ornée, persuasive, en ayant égard à la dignité du sujet, à la convenance des temps, au plaisir des auditeurs.
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 Tacite
On impose, à distance, plus de respect.
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Sa lecture de Tacite restituait toutes les dimensions de l’œuvre; non seulement politique, mais aussi stylistique, historique et morale : le maître de constance qui enseigne à répondre par la fermeté de l'âme à l'instabilité des choses humaines et aux malheurs du temps. (Note sur la présente édition)
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Le dégoût de l'avenir leur donna le goût du présent.
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De l'adversité naquit la discorde.
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Le tirage au sort et l'urne ne prononcent pas sur la moralité.
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Même pour les sages la passion de la gloire est la dernière dont on se dépouille.
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