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Citations de Adélaïde Bon (98)


Elle a le cœur chaviré par sa tendresse, sa sensibilité.
Il est amoureux et ses mains peu à peu l'apprivoisent, la rassurent.
p 55
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Je suis ce qu’il reste d’une femme après qu’on l’a violée. Et de l’écrire me renoue, me relie, me répare.
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Sourire, dissimuler, s’épuiser. Passer chaque journée en dehors de soi. Se vivre déportée, sans que nul ne sache. Elle rit toujours, peut-être un peu plus qu’avant, c’est qu’elle a le cœur si lourd que quand la joie lui vient, elle s’y jette.
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Les agresseurs sont des lâches. Je ne comprends pas notre fascination pour les coupables. Plutôt que d'écrire des romans, des séries, des émissions à sensation sur le parcours des criminels, plutôt que d'en faire des monstres pour nous rassurer sur notre propre humanité, on devrait élever des statues à chaque pas de porte, écrire des biographies, des scénarios, faire des cortèges, des chansons, des fêtes, des jours fériés pour célébrer le courage de centaines de millions de victimes que personne n'a jamais écoutées et qui chaque soir parviennent encore vivantes au terme de leur journée, abandonnées, abattues et si terriblement seules.
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Adélaïde Bon
Les mots dessinent l'horizon de nos pensées, alors quand les mots mentent, quand on remplace ennemi par ami, violence par plaisir, viol par attouchement, pédocriminel par pédophile et victime par coupable, l'horizon est une ligne de barbelés qui interdit toute sortie du camp.
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Le juge lui demande quelles conséquences les faits ont eues sur sa vie. Elle énumère quelques méduses, mais elle n'a pas de mots pour raconter ce que c'est, ce que ça vous fait, année après année, vivre à l'envers. Ne rien confier à ses parents, à ses frères et soeurs, à ses amies. Se couper des autres. Sourire. Dissimuler. S'épuiser. Passer chaque journée en dehors de soi. Se vivre déportée, sans que nul le sache.
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Elle est vive et enjouée en compagnie et des qu' elle échappe aux regards elle mange. Elle rit toujours, peut être même plus qu' avant, c est qu' elle a le coeur si lourd que quand la joie lui vient, elle s y jette.
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Elle ne collectionne plus les mots, en cours de grec ancien, elle apprend à les décortiquer, à suivre leurs racines qui s'enchevêtrent à l'histoire des hommes.
Un jour, elle comprend, stupéfaite, "pédophile". Quelqu'un qui a de l'amitié pour un enfant. Une phrase lui revient brutalement en mémoire, une phrase comme une gifle, une phrase à l'envers, une phrase du monsieur de l'escalier.
"Je suis ton ami". [...]
Si elle découvre alors que certains mots signifient l'inverse de ce qu'ils prétendent, elle ne se demande pas encore pourquoi on a choisit d'utiliser précisément ceux-là.
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Est-ce qu'elle s'est essuyé la bouche du revers de la main,passé la langue sur les dents ,recoiffėe un peu? Est-ce elle où lui qui a remonté la culotte,remis un semblantvd'ordre dans la robe-tablier rouge ,tiré sur le chemisier blanc?Elle le regarde en opinant du menton,comme les petits chiens qui hochent la tête sur les plages arrière des voitures.Je suis gentille,je suis jolie,j'aime ça, tu es mon ami,tu aimes mes grosses fesses,tu me fais du bien ,je suis gourmande ,je ne dirai rien,c'est notre secret,je te promets ,je ne dirai rien.Des mots qu'il lui a dits et dont elle ne se souvient pas,pas plus qu'elle ne se souvient de ce qu'il lui a fait.
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Elle note les mots dissociation, conduites à risques, conduites d'évitement, attaques de panique, violences que l'on s'inflige à son corps défendant, cauchemars répétitifs, sensations de pénétration, elle note, À tous ces symptômes, les victimes ne comprennent rien. Plus on a été agressé jeune, plus on a de mal à voir le rapport entre la crise de panique au présent et l'agression du passé.
Elle note avec avidité mais elle non plus, elle ne voit pas le rapport.
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Elle dit, "Il m'a fait prendre son sexe avec ma main, il m'a fait faire des mouvements dessus." Le capitaine, "Des caresses ?" Non, pas du tout, ce n'est pas cela les caresses. Mais il faut bien se résoudre à dévoyer ce mot faute d'un autre, faute d'un mot qui sache contenir toute la laideur du va-et-vient d'une petite main d'enfant sur le pénis raide d'un adulte.
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Le lendemain du jour où tu nous as piégées, nous nous sommes toutes réveillées dans notre jolie chambre d'enfant et nous avons continué, à aller à l'école, à sourire à la dame, à dire merci beaucoup. Nous avons fait avec, nous avions eu de la chance, nous étions vivantes, cela aurait pu être pire. Nous n'en avons plus parlé, ou si peu. Nous avons construit chacune nos existences. Nous avons taché tant bien que mal que cela tienne, nous avons empilé les expériences difficiles et les belles rencontres au-dessus de cette journée-là, elle, nous l'avons laissée dans la cave, nous l'avons oubliée, nous avons dressé des cloisons, des couloirs, ouvert des fenêtres, nous avons bâti de nos mains la charpente, et si nous sentions confusément que l'édifice avait une malfaçon, nous ne savions pas laquelle, alors nous avons appris a colmater les brèches, les paniques, à circonscrire l'angoisse dans les combles. Nous avons invité des convives, nous avions l'impression d'habiter enfin chez nous.
Après le coup de fil de la brigade des mineurs, de petits points noirs sont apparus sur nos murs, nous avons appuyé dessus du bout des doigts, le mur s'est effrité.
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« Elle rit toujours, peut-être même plus qu'avant, c'est qu'elle a le coeur si lourd que quand la joie lui vient, elle s'y jette. »
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Avoir subi des violences sexuelles dans l'enfance demeure le déterminant principal de la santé cinquante ans après et peut faire perdre jusqu'à vingt ans d'espérance de vie. Comment se fait-il que dans notre société surinformée ces informations-là circulent si peu ?
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En France, on peut détruire la vie d'une femme pour le prix d'une voiture d'occasion.
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Est-ce qu’elle s’est essuyé la bouche du revers de la main, passé la langue sur les dents, recoiffée un peu ? Est-ce elle ou lui qui a remonté la culotte, remis un semblant d’ordre dans la robe-tablier rouge, tiré sur le chemisier blanc ? Elle le regarde en opinant du menton, comme les petits chiens qui hochent la tête sur les plages arrière des voitures. Je suis gentille, je suis jolie, j’aime ça, tu es mon ami, tu aimes mes grosses fesses, tu me fais du bien, je suis gourmande, je ne dirai rien, c’est notre secret, je te promets, je ne dirai rien. Des mots qu’il lui a dits et dont elle ne se souvient pas, pas plus qu’elle ne se souvient de ce qu’il lui a fait. Elle reprend le sachet en papier blanc des carambars et le pot de flocons pour poissons rouges qu’elle avait posé sur le coin nu d’une marche. Quelque chose s’est renversé, elle ne sait pas si c’est le sol ou si c’est elle, elle se concentre pour gravir l’escalier. Sur le palier, elle se retourne quand il l’appelle, promet encore en hochant la tête.
Elle est allongée sur son lit, elle essaye d’attraper une larme du bout de la langue. Les lattes du couloir grincent, elle saisit son livre. Sans famille, Hector Malot.
— C’est ton livre qui te fait pleurer ? demande son père, alarmé peut- être qu’elle se soit glissée comme une ombre de l’entrée de l’appartement à sa chambre, sans le rituel tonitruant du Bonjour ma chère famille que j’aime et que j’adore, sans claquer la porte d’entrée, sans venir rien leur raconter. Sa tête se déplace. Gauche. Droite. Droite. Gauche.
— Il s’est passé quelque chose ? Sa tête se déplace. Haut. Bas. Bas. Haut.
Elle est assise entre ses parents sur le canapé bordeaux du salon, son frère et ses sœurs ont disparu. Elle regarde les murs tendus de tissu, elle ne les reconnaît pas, comme elle ne reconnaît pas ses propres parents. Tout est soudain changé sans qu’elle puisse saisir quoi. Ils lui parlent, elle a du mal
à les entendre, à les comprendre. Elle flotte.
Elle est assise à l’arrière de la voiture de police, à côté de son père. Les policiers mettent les gyrophares pour la faire sourire. Elle sourit. Elle est gentille. Elle n’est plus là. Elle est morte. Personne ne semble s’en rendre compte.
Au commissariat, une policière lui pose des questions, elle doit répondre par oui ou par non, elle hoche ou elle secoue la tête, selon. Elle ne ressent rien. La policière note, Il m’a touché mon zizi : devant et derrière. Il a saisi ma main gauche qu’il a posée sur son sexe. On lui dit qu’elle porte plainte pour attouchement sexuel et que le monsieur de la cage d’escalier, c’est un pédophile. Elle hoche la tête.
Elle ne sent pas les méduses s’immiscer en elle ce jour-là, elle ne sent pas les longs tentacules transparents la pénétrer, elle ne sait pas que leurs filaments vont l’entraîner peu à peu dans une histoire qui n’est pas la sienne, qui ne la concerne pas. Elle ne sait pas qu’ils vont la déporter de sa route, l’attirer vers des profondeurs désertes et inhospitalières, entraver jusqu’au moindre de ses pas, la faire douter de ses poings, rétrécir année après année le monde qui l’entoure à une petite poche d’air sans issue. Elle ne sait pas que désormais elle est en guerre et que l’armée ennemie habite en elle. Personne ne la prévient, personne ne lui explique, le monde s’est tu.
Les années passeront. Ils oublieront ce dimanche ensoleillé du mois de mai, ou plutôt, ils n’en parleront pas. Elle non plus, elle n’y pensera plus.
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Plus on a été agressé jeune, plus a de mal à voir le rapport entre la crise de panique au présent et l’agression du passé.
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Personne ne la prévient, personne ne lui explique, le monde s’est tu.
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Peut-être faut-il être très malheureux pour être profondément joyeux, peut-être que la joie est l'autre versant des larmes.
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Une autre fois, une fois parmi tant d'autres, une crise brutale en pleine rue et pas d'église, pas de toilettes, nul lieu clos où se contenir, elle ne parvient pas à faire un pas de plus, elle se gifle de toutes ses forces pour revenir à elle, retourner au présent, reprendre son souffle, elle s'accroche à un porche, elle suffoque, elle glisse, elle a horriblement mal ; elle va crever, le visage collé à une marche de pierre qui pue l'urine. Puis peu à peu et comme à chaque fois, ça passe, elle se relève, se recoiffe, se frotte les joues et reprend son rang dans la file des passants.
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