Interview d'Alexandra Varrin.
Alexandra Varrin a reçu le prix Claude Milan, créé par Eric Naulleau, pour son roman "C'est maman qui a tué le père noël" aux éditions Léo Scheer.
Interview réalisé par Bruno Boucard avec le soutien de la Tonnellerie DOREAU.
Stephen King n'est ni mon ami ni mon père de substitution. Il est quelqu'un pour qui aucun mot n'existe. Le lien qui m'unit à lui est pareil à son univers: vraisemblable mais pas réaliste. Il n'est pas fait pour exister, il est fait pour être vécu.
Je jubile en constatant que sa venue en France lui aura valu de rallier à sa cause les amoureux des lettres, ceux mêmes qui tendent à négliger les bonnes histoires au profit des mots du dimanche.
La ligne est parfois mince entre l'admiration et la folie, et je crois que c'est le respect pour l'artiste qui détermine de quel coté on se place.
Ils ne savent pas ce que c'est, ces gens qui reçoivent les livres en service de presse, de racheter des nouvelles éditions car on a déchiré les originales de les avoir trop lues. Ils ne savent pas ce que c'est de passer plus de dix ans à cheminer vers la Tour Sombre en compagnie du pistolero Roland de Gilead. Ils ignorent ce que ça veut dire de grandir avec des modèles faits d'encre et de papier, d'aimer à ce point un univers imaginaire qu'il vous donne un sentiment d'appartenance bien plus vrai et plus intense que n'importe quelle ville, pays, emploi, relation amicale ou amoureuse.
Si j’avais été au bout de mes rêves d’enfance et d’adolescence, je serais, aujourd’hui, propriétaire d’un duplex ultra-design payé cash avec mon salaire d’astronaute, mais que je n’occuperais jamais, car je serais perpétuellement en vacances, probablement dans un équivalent des Maldives sur Jupiter. J’aurais terrorisé tous les gamins qui m’enquiquinaient au collège en signant un pacte avec Grippe-sous, le clown cabriolant de Stephen King, je serais la petite amie de Marilyn Manson et mon animal domestique serait Nagini, l’anaconda de Harry Potter.
Au lieu de ça, je suis locataire d’un appartement insalubre, à peu près aussi riche que Job, persécutée par mes employeurs, et je ne m’amourache que de gros cons auxquels je préfère souvent la seule compagnie de ma grenouille en peluche.
Bref, ma vie c’est de la merde, mais comme je ne peux pas l’échanger contre celle du roi du Maroc, j’ai pris le parti de m’en foutre.
Depuis, j’ai toujours autant la lose. »
De toute façon le monde entier est perpétuellement lancé dans une course au malheur.
Sans cesse il faut confronter ses malheurs à ceux des autres, comme si avoir morflé était devenu un gage d’appréciation de la valeur des gens. Pourquoi ? Pourquoi est-ce qu’être debout ne suffit pas et qu’il nous faut un malgré sur lequel s’appuyer pour justifier notre présence ? Est-ce que les gens se sentent si médiocres, si passables et si peu intéressants au point qu’ils ne peuvent plus se faire remarquer que par leur résistance à des coups ordinaires et anodins ?
Ce qu’on est ne sera jamais assez bien, ni à nos yeux ni à ceux des autres, mais n’en soyons surtout pas malheureux ou déçus parce qu’en une volée de bois vert on nous reprochera aussitôt notre égocentrisme : il y a pire que nous, nous voilà contraints d’être satisfaits, mais rappelons-nous bien que nous n’avons surtout pas de quoi l’être.
La meilleure façon de connaitre un écrivain n'est-elle pas de lire ses livre?
L'amour c'est quand on se demande si les gens vont bien et ce qu'on pourrait faire pour qu'ils aillent encore mieux, quand on sait ce qu'il faut faire pour ça et qu'on le fait sans attendre qu'ils demandent quoi que ce soit.
Le reste c'est de la merde. De l'égocentrisme, du narcissisme, de l'auto-destructionisme, des choses dont il faut se foutre parce qu'elles ne valent pas un clou. C'est comme accorder de la valeur aux larmes alors que ca ne vaut rien, les larmes ça n'est jamais que de l'eau.
Les libraires sont des gens austères, aigris et méchants qui n'ont pas d'amis mais juste leurs livres- et encore ce ne sont pas vraiment les leurs, ce qu'ils déplorent à longueur de journée car le propre du libraire est d'être un écrivain frustré, un puceau quadragénaire qui se meurt de n'avoir jamais couché avec les groupies qu'il fantasme.
Toujours à critiquer tout le monde alors que ce sont quand même les seuls à se faire de la thune dans la chaine du livre sans avoir rien créé, ni investi.
Salauds de libraires, puisque c'est la guerre que vous voulez, eh bien défendez-la tant que ca vous chante: moi je continuerai à acheter des livres sur Amazon, en imaginant, quand je remplirai mon panier, que chacun de mes clics est une flèche que je vous plante dans le cul; que non seulement vous fassiez faillite mais qu'en plus vous en chopiez des hémorroïdes.
Les imbéciles sont les seuls sur Terre à pouvoir espérer récolter exactement tout ce qu'ils sèment.