Alix GARIN. Ne m’oublie pas.
Un roman graphique de très bonne facture. Une histoire comme nous les aimons. Oui de la tendresse, de l’amour, de la pudeur mais une tragédie. Et cette histoire, aujourd’hui, nous sommes spectateurs, demain, nous serons acteurs. Malheureusement c’est la vie et sa chaîne infernale qui se déroule inexorablement.
Tous nous sommes un jour où l’autre mis sur les rails de notre destinée…. Nous naissons, nous grandissons, faisons notre vie du mieux possible. Les jours, les nuits, les semaines, les mois, les années passent et tous nous vieillissons. De tout mon cœur, au cours de mon adolescence, je me projetais dans mon futur : je serai « maîtresse d’école » et je prendrais avec moi ma grand-mère. Le fil de sa vie s’est brisée et je n’ai pu réaliser mon rêve !
Nos parents, atteints de cette terrible maladie d’Alzheimer, ne peuvent plus rester à leur domicile. Nous les déracinons, ne pouvant nous-mêmes assumer leur destinée. Nous les confions et les plaçons dans des foyers, des institutions spécialisées. Nous leurs rendons visite, quand nous le pouvons, en fonction de notre travail, de l’éloignement imposé, de notre disponibilité… En un mot, nous les abandonnons à leur triste sort dans ces mouroirs. Nous nous réfugions dans des faux semblants de vérité. Et nos chers ancêtres vivent leurs derniers instants dans ces EHPAD. Combien d’idées trottent dans leur subconscient. Certains comme la grand-mère de Clémence, l’héroïne de ce magnifique roman graphique fugue, une fois, deux fois et plus. Les personnel soignant est contraint d’augmenter les doses de médicaments afin de les clouer dans leurs fauteuils, leurs lits et les avoir toujours sous leurs yeux. Quelle misère, quelle tristesse… De plus, il y a un tel manque de personnel pour les encadrer, les surveiller...
Clémence va prendre une initiative : enlevée purement et simplement Marie-Louise, Mamycha, sa grand-mère adorée, de l’institution qui en a la garde…. Ensemble elles vont parcourir des kilomètres et des kilomètres pour tenter de rejoindre la maison familiale dans laquelle la grand-mère a vécu ces merveilleuses années d’enfance, de jeunesse et dont elle se souvient… Mais le parcours est semé d’embûches et l’issue heureuse n’est pas assurée… Que vont donc rencontrer nos deux fugueuses sur leur parcours… C’est loin, très loin et Clémence est une jeune conductrice et elle ignore la localisation de cette demeure avec précision…
Ce roman graphique relate les sentiments très forts qui unissent ces deux femmes : l’une en fin de vie, l’autre en pleine possession de sa force physique et mentale et qui a osé braver tous les interdits pour plaire à celle qui a bercée son enfance… Elles ont vécu en osmose lors de la petite enfance de Clémence : ce sont ses grands-parents qui l’ont élevée lorsqu’elle était enfant. Beaucoup d’amour. Les vignettes sont superbes et traduisent bien les sentiments, les situations dramatiques à laquelle ce mal nous condamne ! L’absence de texte fait froid dans le dos mais c’est la triste vérité, la réalité. Les dessins expriment bien le mal-être ressenti : les longs discours sont inutiles. La première de couverture témoigne de l’attachement entre cette grand-mère et sa petite fille. Merci à Alix de nous dépeindre, en images, la fin de vie, vraisemblablement d’un membre de sa famille. Cet album nous plonge dans une grande tristesse. Je me permets de recommander cette lecture qui offre une approche originale de la maladie d’Alzheimer et du placement en institution de nos « vieux ». Cette lecture est émouvante et les larmes affleurent les paupières. Bonne lecture.
( 16/08/2023)
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