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Citations de André Soubiran (63)


"Au Quartier, il n'y a qu'une façon d'avoir raison. C'est d'en sortir."
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J'ai découvert ainsi, dans mes gardiens du Quartier III, une nouvelle espèce humaine. La comprendre a exigé un long déchiffrement et je ne suis pas très sûr d'avoir réussi, car amour de ces êtres, comme autour des fous, rien n'avait sa forme authentique : de même que, pour le "reflet d'en dessous", ce qu'ils voyaient était toujours autre chose que ce qu'ils avaient sous les yeux et qu'auraient perçu ceux qui n'étaient ni gardiens ni fous.
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Mais, attention ! Devant le médecin-chef ou les infirmiers, pas de blague ! Quand vous aurez envie de prendre l'air, annoncez : "Je vais dans la "cour", ou, mieux : "Je vais dehors." "La cour", ça fait encore un peu prison, tandis que "dehors" n'est pas trop suspect d'être mal interprété. Chacun sait que "dehors", au Quartier, ça veut toujours dire "dedans", mais cet euphémisme fait plaisir à tout le monde. Au fond, le médecin-chef a de la veine. pour des aliénés "difficiles", nous sommes plutôt conciliants."
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Maintenant, je voyais clairement les nouveaux dangers qui m'attendaient. En me taisant obstinément devant le juge, en me taisant devant les experts, j'avais pu devenir un cas. L'interrogatoire du jeune psychiatre de l'Infirmerie spéciale venait de me faire comprendre que mon silence, après m'avoir servi d'arme et avoir armé mon avocat, n'offtait plus désormais que des risques.
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Pour la première fois, j’avais l’exacte notion que, pendant toute ma vie de médecin, le malheur des autres serait l’intarissable et unique source de mon expérience, mon meilleur facteur d’enrichissement et de progrès, et que toutes mes connaissances ne pourraient ainsi sortir, une à une, que de leurs douleurs. Je venais aussi d’apprendre le vrai sens médical de ces mots : « Un beau cas », ou bien : « Une belle plaie », qui ont toujours l’air de vouloir parler d’une fleur.
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« Guérir quelquefois, soulager souvent, consoler toujours », je connaissais le vieil adage qui résume toute la médecine. Entre les mains mêmes du plus humble des médecins, quand il ne peut plus rien, je compris qu’il reste toujours, à donner, l’espérance.
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Un dingue en rogne est toujours moins dangereux qu’un gardien. Le dingue, lui, ne peut pas faire de rapport…
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Délaissé, Caca se consolait sur son banc, en se masturbant quatre ou cinq fois par jour. C’étaient les seuls moments où s’arrêtait, au-dessous d’un front bas, un tic convulsif des paupières qui rendait exaspérante à voir sa face de dégénéré, mais la jouissance lui donnait un masque plus bestial encore ; alors il haletait et jappait de plaisir, comme un chien.
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Je n’avais ni fourchette, ni couteau, seulement une cuillère, de même qu’à l’Infirmerie spéciale et à Sainte-Anne, elle était en bois. Rien d’étonnant, car j’avais appris, à Fresnes, qu’une cuillère en fer patiemment usée contre le ciment peut se transformer en couteau à pain ou encore en poignard. J’attrapai donc la saucisse avec mes doigts et en mâchai lentement une bouchée. Très bonne ! Avec la cuillère, je pris des choux, puis je trempai un morceau de pain dans le jus à la couleur appétissante. Très agréable ! Je m’étirai et manquai de renverser mon assiette. Je me sentais tout à fait bien. « Je suis vraiment ignoble », pensai-je.
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Je savais désormais qu’il ne peut exister de détresse plus affreuse que celle du dévouement de la pitié, tendant des mains vainement chargées d’offrandes.
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Vous apprendrez peu à peu que la reconnaissance, lorsqu’elle existe, est basée, le plus souvent, moins sur ce que vous aurez fait que sur ce que le malade vous croira susceptible de faire à nouveau pour lui dans l’avenir.
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Le grand art du médecin, où doit entrer autant de bonté que de savoir-faire, c’est de laisser croire à chaque malade qu’on en soigne beaucoup d’autres, mais qu’on ne s’occupe que de lui seul ; votre efficacité et vos succès sont à ce prix.
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De moi, aussi, quand je suis arrivé dans le pays, ils exigeaient des miracles. Je les soignais de mon mieux ; eux, ils voulaient à tous les coups être guéris. Simple malentendu entre le médecin et ses malades, mais e'est un malentendu qui vient de très loin. À croire qu'ils se souviennent encore des temps mythiques où Esculape avait le pouvoir de ressusciter ceux qu’il avait eu l’étourderie de laisser mourir. Bien entendu, à I'usage, les malades ont cessé de me prendre pour le Bon Dieu depuis longtemps ; ils me pardonnent mes échecs. Mais, à chaque nouveau médecin, ils se redisent « Sait-on jamais? Et leur antique appétit de miracle recommence. Heureux celul qui, pour ses débuts, a la chance, comme vous, de les satisfaire ! Sinon, il lui faut quelquefois changer de canton.
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Vous le verrez à l’usage. Déjà toute maladie est surtout une crise d’égoïsme tyrannique, mais parmi les malades, il n’y en a pas de plus égoïstes, plus difficiles, plus méfiants, plus tatillons, plus décevants que les vieillards ; le type même de patients qu’un médecin débutant doit redouter pour l’avenir de sa réputation. Il ne les guérira jamais et il n’en aura que des déboires : on ne fait pas du neuf avec du vieux. Pour les séduire, je vous recommande deux petites ruses innocentes : écouter avec patience le récit, entremêlé de détails oiseux et de radotages, de leurs petites misères, et paraître tenir compte toujours de leurs avis.
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Il les avait intéressés tant qu'il offrait le spectacle alléchant d'un homme acharné à se noyer ; ils essaient d'y penser, maintenant qu'ils ne pouvaient plus espérer s'amuser de ses grimaces d'asphyxie ou, s'il se ravisait à la dernière minute, lui maintenir la tête sous l'eau.
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Les gardiens ne se rendaient pas compte qu'en leur répétant sans trêve qu'ils avaient à surveiller des hommes réputés particulièrement dangereux, capables à chaque instant, de les attaquer ou de les tuer, on voulait surtout frapper leur esprit et ls tenir en alerte ; sinon, au bout de quelques journées sans incidents, ils eussent abandonnés naïvement leurs clefs sur un coin de table pour faire une partie de cartes avec leurs captifs. En tous cas, à force de les mettre sur une perpétuelle défensive, on finissait par les rendre agressifs. Ils se jugeaient en état permanent de légitime défense. Chaque coup de poing donné sans raison à un interné n'était-il pas, dans leur pensée, préventif d'une agression imminente ? on eût bien étonné nos infirmiers si on leur avait expliqué qu'ils commettaient chaque fois un abus.
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"Si on me dit que j'ai perdu la raison, combien de temps me faudra-t-il attendre, puisqu'on ne me soigne pas, pour apprendre que j'ai perdu ma folie ?"
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Il est un degré d'écoeurement où le soleil le plus radieux vous devient un lumignon dérisoire.
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Pour eux tous, c'était clair : je faisais partie de la salle, j'étais devenu un fou parmi d'autres fous. Et si l'on me regardait encore, c'était apparemment pour avoir quelle allait être la première manifestation, irritante ou supportable, de ma propre vésanie.
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Ainsi ce vide absolu, cette solitude de cadavre au fond de sa tombe, cette absence glaciale d'émotions, de sensations, d'existence, ce rythme de silence inhumain et d'ennui, étaient voulus par mes psychiatres. C'était une thérapeutique et non pas une manière de se débarrasser des malades comme on faisait autrefois des prisonniers jetés dans les ténèbres de quelque in-pace ! L'isolement obligeant peu à peu le rythme de la folie à se détendre, quelle conception la fois apaisante et effroyable !...
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