Citations de Annalisa Mari Pegrum (22)
et donc jeunes femmes
voici le dilemme
qui est en soi une solution :
J'ai toujours été à la fois
suffisamment femme
pour être émue aux larmes
et suffisamment homme
pour conduire ma voiture
dans n'importe quelle direction.
(Hettie Jones)
La fissure dans le monde
extrait 3
C’est la vie qui poursuit la fissure dans le monde
Entre les mondes
Entre les pensées
Un souffle vide
Les mots ne suffisent pas
Ovule non fertilisé
L’homme ne l’a pas fait
Je me couvre de tous les imprévus
la méchante
ou la puritaine qui marche dans un monde fécond
Les mots me chantent l’effondrement de l’endomètre
Les mots descendent dans mon ventre
Mon dos se gonfle, pour rendre mon corps à la terre
C’est périodique
Ça arrive à la pleine lune
Laisse-moi hurler dans la nuit
Aucun homme ne doit me toucher
Ne sonde pas mon cœur ce soir, homme
Personne ne veut être près de cette usine,
de cette magnifique machine,
mais j’évite ta compagnie de toute façon
…
// Anna Waldman (1945 -)
/ Traduit de l’anglais par Annalisa Mari Pegrum et Sébastien Gavignet
La fissure dans le monde
extrait 2
Je vois la fissure dans le monde
Les pensées se croisent dans le corps
Il ne doit pas me réprimer
Laisse-moi aller seule de mon côté ce soir
Aucun homme ne doit me toucher
Une entaille en moi, je vois l’entaille dans le monde ce soir
Elle me garde entière, mais me divise à présent
Dehors, sur la terre, pour saigner
Dans la rue, pour saigner,
Dans la neige, du sang
C’est une chanson sud-américaine
Parfum de laurier-rose
ou c’est une chanson de cactus
Chantez une fleur de sang une rose dans l’entrejambe
Ô jambes qui se dérobent !
Mon corps m’a charmée
Mon corps m’a rendu folle
C’est l’endomètre qui mue
Je suis compressée sous la pression de mon cœur
…
// Anna Waldman (1945 -)
/ Traduit de l’anglais par Annalisa Mari Pegrum et Sébastien Gavignet
Regarde l'oiseau fait des projets
il parle aux hommes dans la pièce à l'étage
picore les miettes dans la cuisine
il utilise nos toilettes
& je m'inquiète de ses droits
Garde la maison
Moi je vais partir oiseau tu peux rester ici
(Joanne Kyger 1934-2017)
She Said She Said
[...]
we are aliens come through
a hole in the sky
to make holes in the trees to make
holes in the earth
__________________________________
Dit-elle dit-elle
[...]
nous sommes des extraterrestres venus à travers
un trou dans le ciel
pour faire des trous dans les arbres pour faire
des trous dans la terre
Ici avant ce bleu d'aurore …
Ici avant ce bleu d'aurore & dans cette solitude
à toi : rentre à la maison. La lune est pleine sur les immeubles
matinaux, l'ombre de la solitude est sur ma main :
Rentre à la maison. Dans ce loft vide aux grandes fenêtres
l'ombre des stores s'estompe, et les gens sont arrivés ;
À toi : dans ce précoce silence entre nous qui EST,
profondément plié dans la nuit & le puits noir des sources
ici-bas est sorti pour rencontrer là-dedans, &
nous SOMMES liés par un son ou un geste ;
sous la distance, avant le temps, au pied de la
forêt silencieuse, retrouve-moi ici, je t'aime.
Un feu crépite, je me suis levé tôt
avant l'aube – amour combien j'ai
besoin de toi en tout ce que je ressens ; j'ignore
où tu es ou ce qui t'arrive, mais
c'est sûr les étoiles du matin éclaireront de leur lumière
des endroits désolés, et cela vient de moi
à la première heure du matin, amour.
paris, 18/ 1/ 65
p.141
//Texte de Janine Pommy Vega (1942-2010).
La fissure dans le monde
extrait 4
Mon corps flexible imagine la fissure
Un corps avec des vents
Vois la fissure dans l’univers
La malédiction glorieuse est sur moi
Ne viens pas chez moi
Ne m’attends pas à ta porte
Je porte mes fringues de célibat
Mon cœur anthropocentrique dit qu’il y a
une fissure dans le monde ce soir
C’est le corps d’une âme étirée
C’est une pause dans le cycle de la naissance & de la mort
C’est la prolifération rapide des cellules
qui montent en puissance pour mourir
Je construis le monde & je le tue encore & encore
J’offre mes entrailles à la lune
Ovule non fertilisé
L’architecture me hante
Jambes qui vous dérobez vous devez porter le monde
Toi éloigne-toi de moi
Toi garde tes distances
Je te maîtriserai avec mon parfum
de vie & de mort
Toi qui est arrivé à travers la fissure de mon monde
Vous autres les hommes qui êtes sortis de moi, arrière
Les mots sortent du ventre
Gémissant comme le monde est démoli
Le corps charmé pour ça
Le corps conçu comme ça
Le corps a pris la mesure de la femme
pour expliquer la férocité de ce temps
marchant sur la périphérie du monde.
// Anna Waldman (1945 -)
/ Traduit de l’anglais par Annalisa Mari Pegrum et Sébastien Gavignet
La fissure dans le monde
extrait 1
Je vois la fissure dans le monde
Mon corps la pense, il voit la fissure qui s’élargit dans le monde
Mon corps le fait pour que je voie
Le sang couler par la fissure du corps
Corps, envoie-moi tes rivières à la lune
Corps tord-moi vers la source de la lune
Ça me tord sous une vague
Ca installe la structure pour faire un bébé, pour après
la démolir encore
L’architecture du corps-utérus me hante
Il y a toujours quelqu’un qui regarde le flux ancestral
Il plie mon esprit en deux
Ovule non fertilisé
…
// Anna Waldman (1945 -)
/ Traduit de l’anglais par Annalisa Mari Pegrum et Sébastien Gavignet
I get my period, September 1964
How can I forgive you this blood ?
Which was not to flow again, but to cling joyously to my womb
To grow, and become a son ?
When I turn to you in the night, you sigh, and turn over
When I trn to you in the afternoon, in our bed,
Where you lie reading, you put me off, saying only
It is hot, you are tired.
You picket, you talk of violence, you draw blood
But only from me, unseeded & hungry blood
Which meant to be something else.
Diane Di Prima
Le mal du mariage, Denise Levertov
Le mal du mariage :
cuisse et langue, mon amour,
en sont lourdes
ça palpite dans les dents
Nous cherchons la communion
et sommes refoulés, mon amour,
l'un et l'autre
C'est le léviathan et nous
dans son ventre
nous recherchons la joie, une joie
inconnue en dehors de lui
deux par deux dans l'arche
de son mal
Crack in the World
[...]
Body took the measure of the woman
to explain the fierceness of this time
walking on the periphery of the world.
__________________________________
La fissure dans le monde
[...]
Le corps a pris la mesure de la femme
pour expliquer la férocité de ce temps
marchant sur la périphérie du monde.
Poem Against Endless Mass Poetry Readings
[...]
O pay yr dues before ye lord it over
me,
Poets!
in silence/ the angels are breathing.
__________________________________
Poème contre les interminables récitals de poésie de masse
[...]
Ô faites vos preuves avant de me prendre
de haut,
Poètes!
en silence/ les anges respirent.
Hard Core Love
[...]
accept the being that you are and illuminate yourself
by your own clear light
__________________________________
Amour hardcore
[...]
accepte l'être que tu es et illumine-toi
de ta propre clarté
The Elves
[...]
Their beauty sets them aside
from other men and from women
unless a woman has that cold fire in her
called poet: with that
she may see them and by its light
they know her and are not afraid
and silver tongues of love
flicker between them.
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Les elfes
[...]
Leur beauté les sépare
des autres hommes et des femmes
à moins qu'une femme ait en elle ce feu froid
qu'on appelle poète: avec ça
elle peut les voir et par sa lumière
ils la reconnaissent et n'en ont pas peur
et des langues d'amour argentées
dansent entre eux.
Cérémonie au peyotl pour Billy *
Un peu de magie compatissante
pour la vie de William Burroughs.Jr.
(mort le 3 mars 1981)
ne t’arrête pas, Billy il y a du mouvement
nous faisons la danse des sabots pour toi,
assiégés ou exaltés frondes en mouvement
ce système d’assistance respiratoire ces rivières qui chutent &
te traversent
qui loin d’ici loin loin loin loin pas assez d’espace pour les jambes pas possible
de s’asseoir ni de chuchoter
dans ton oreille Billy pas de nova Billy plus d’aliments
Billy nous t’envoyons ces étoiles brodées au point suisse
un gris exquis pour les sens voilà Billy prends-les Billy
prends ces étoiles Billy voilà Billy prends la fumée de bois
(bouge Billy bouge Billy bouge Billy ne t’arrête pas)
nous t’envoyons ces odeurs & le plaisir d’installer sa tente
une tente pour les nomades pour une âme nomade ton ombre perdue
voici un corps où tu pourras renaître Billy
& pour ton bien nous nous allongeons
sur un amas de nuages & pour toi nous mangeons cette médecine qui guérit
& la dégueulons encore j’ai vomi pour toi Billy & les 3 dernières années
me reviennent pour toi Billy ça me remue tu es toujours là pour nous Billy
nous trois moi Steven Reed
dans la nuit calme je ne peux pas rester calme je saute pour toi Billy
bouge bouge-toi ne t’arrête pas Bill
liqueur de maïs pour faire redescendre la magie
démodulation Billy
démon hypodermique Billy
corrigible Billy
le sceau de Salomon Billy
ça vacille Billy
corrélation Billy
immobile
indélébile
sang de jacinthe Billy
cartes sur table Billy
intensité dramatique et tu nous manques Billy
où t’étais p’tit Billy
on t’a cherché Billy
nous étudions ton jarret Billy
universalité Billy
laisse-toi aller
fais-le tourner
bouge ne t’arrête pas Billy ne t’arrête pas Billy bouge
ne t’arrête pas Billy Billy bouge ne t’arrête pas Billy
bouge ne t’arrête pas Billy bouge garde-le Bill
1978
// Anna Waldman (1945 -)
/ Traduit de l’anglais par Annalisa Mari Pegrum et Sébastien Gavignet
* William Seward Burroughs III (21 juillet 1947 - 3 mars 1981) est un romancier américain, également connu sous les noms de William S. Burroughs Jr. et Billy Burroughs.
Burroughs Jr. a subi une greffe du foie en 1976 après avoir développé une cirrhose. Il meurt en 1981, à l’âge de 33 ans, d’alcoolisme et d’insuffisance hépatique.
Hard Drive
[...]
I have always been at the same time
woman enough to be moved to tears
and man enough
to drive my car in any direction
__________________________________
Conduite téméraire
[...]
J'ai toujours été à la fois
suffisamment femme pour être émue aux larmes
et suffisamment homme
pour conduire ma voiture dans n'importe quelle direction
Aftertune
[...]
Will the press of this music
warp my soul
Till I'm wrinkled and gnarled and
old and small
A crone in the marshes singing
and singing
A crone in the marshes singing
and singing
and singing
and singing
and singing
and singing
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Chanson d'après
[...]
La pression de cette musique
gondolera-t-elle mon âme
jusqu'à ce que je sois froissée et tordue
et vieille et petite
Une vieille bique dans les marais qui chante
et chante
Une vieille bique dans les marais qui chante
et chante
et chante
et chante
et chante
et chante
I get my period, September 1964
How can I forgive you this blood ?
Which was not to flow again, but to cling joyously to my womb
To grow, and become a son?
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J'ai mes règles, septembre 1964
Comment puis-je te pardonner ce sang?
Qui n'était pas censé couler encore, mais s'ancrer avec bonheur
dans mon ventre
Pour grandir, et devenir un fils?
Easy to love...
Easy to love
the POETS
Their
SPLENDOUR
Falling all over the pages
Extorting atomic rainbows
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Facile d'aimer...
Facile d'aimer
les POÈTES
Leur
SPLENDEUR
Qui se répand sur toutes les pages
Qui extorque des arcs-en-ciel atomiques
Eros/Poem
Praise to be young Eros who fucks all the girls!
Only the gods love with such generosity
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Éros/Poème
Loué soit le jeune Éros qui baise toutes les filles!
Seuls les dieux aiment avec tant de générosité