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Critiques de Anne Brontë (318)
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Agnès Grey

Anna Brontë décrit la condition peu enviable de bien des femmes qui ne peuvent être que gouvernantes, situation sentimentale d’une sécheresse triste. La modestie, les bonnes manières, l’éducation sont mises en avant comme étant des valeurs fort protestantes. Enfin, l’innocence enfantine est ici bien vite réfutée : impossible d’y croire après.
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Agnès Grey

S'il existe un dénominateur commun aux romans écrits par des femmes de lettres anglaises entre la fin du XVIIIème siècle et le milieu du XIXème siècle - les fameuses périodes géorgienne et victorienne - c'est bien la qualité d'écriture. Le style en est si caractéristique qu'on pourrait presque les croire tous issus de la même plume mais ce ne serait pas leur rendre justice car ils sont vraiment tous différents les uns des autres. Ce qui les différencie ainsi, c'est la subtile combinaison de la sensibilité et du talent de leurs auteurs.



Pour le cas très particulier de la fratrie Brontë, il existe un autre facteur de différenciation, c'est l'approche dramatique. Ainsi, si Charlotte et Emily ont respectivement donné dans le drame noir ("Jane Eyre") voire très noir ("Les Hauts de Hurle-Vent"), Anne, quant à elle, a préféré préserver son héroïne des pires "souffrances", lesquelles ne s’avéreront ni insurmontables ni de nature à dénaturer sa personnalité.



Et pourtant, la célèbre famille Brontë semble avoir eu le drame dans la peau !

Si nous nous penchons quelques instants sur la destinée de ses membres, nous constatons qu'aucun des enfants Brontë n'a fait de vieux os. Les aînées, Maria et Elizabeth, sont décédées avant l'adolescence, Charlotte n'a pas atteint la quarantaine, Branwell - le seul petit gars - a cassé sa pipe tout juste passé les trente ans, Emily l'a imité au même âge et quant à Anne, notre auteur, elle ne les aura jamais atteints !



Intéressons-nous de près à "Agnès Grey", un roman conçu comme le journal intime d'une gouvernante, fille de pasteur, placée dans différentes riches maisons, parvenues ou aristocratiques. Ses divers postes lui fournissent d'innombrables exemples de la piètre qualité des mœurs et des vertus des classes aisées de la société britannique de l'époque et, de ce fait, son récit est une source sociologique précieuse.



J'ai déjà mentionné en introduction que l'écriture était très belle et, en effet, on sent que l'auteur est bel et bien issue d'une famille de lettrés. Née la benjamine et ne souhaitant sans doute pas déroger à la tradition, Anne a donc pris la plume à son tour et s'est plu à témoigner de l'existence souvent rude et toujours ingrate des gouvernantes, de ces femmes qui sans faire partie de la classe des domestiques n'en étaient pas moins considérées comme des "gens de maison", c'est-à-dire que leur statut n'était pas digne d'intérêt pour la société qu'elles fréquentaient. Aujourd'hui, on dirait pour faire court qu'elles avaient "le cul entre deux chaises".



Anne Grey ayant elle-même exercé l'emploi de gouvernante, elle peut donc en parler avec justesse et précision. Son lecteur devient alors le spectateur privilégié du quotidien d'Agnès, son héroïne, malmenée par ses élèves, méprisée par ses employeurs, humiliée par le cercle de leurs familiers, etc. Même sans connaître sur le bout des doigts la biographie d'Anne Brontë, on peut facilement comprendre qu'une grande part du récit d'Agnès fait écho à sa propre expérience. Mais, rassurez-vous, notre auteur est une femme au cœur d'artichaut et les jours sombres d'Agnès pourraient bien finir par virer au rose...



Je n'ai pas été transportée par ma lecture. Le tempérament d'Agnès, sa morale, sa bigoterie, ses choix, son impuissance et ses mines de chien battu m'ont souvent tapé sur le système et quoiqu'elle mette en lumière avec réalisme le quotidien des gouvernantes, l'attitude de notre héroïne m'a plutôt ennuyée. De plus, le récit n'est jamais illuminé par quelques notes d'humour ou par quelques considérations intellectuelles - éléments qui font toute la supériorité de Jane Austen, soit dit en passant.



Dans l'ensemble, le récit d'Agnès reste très prosaïque, moralisateur et mortifiant. Il n'en aurait pas fallu beaucoup plus pour transformer son journal en "évangile selon Agnès Grey" or, sans en espérer cinquante, quelques nuances auraient été appréciables...
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Agnès Grey

Anne est la moins connue des trois sœurs Brontë. Elle était la plus jeune, il s'en fallut de quelque mois qu'elle ne soit aussi la première à mourir. Elle ne connut guère sa mère, morte quand elle avait un an, ni ses deux sœurs ainées Maria et Elizabeth, morte quand elle en avait cinq. Elle ne connut pas non plus les internats où faillirent succomber les deux autres. Mais la tuberculose finit par faire son œuvre également sur elle, alors qu'elle n'avait encore écrit que deux romans.



‘Agnès Grey' est le premier des deux. Très autobiographique, il raconte ses douloureuses expériences de (très) jeune gouvernante dans diverses familles de la bonne société anglaise. La fin heureuse en revanche, relève hélas de la fiction…



D’emblée, on constate que son style littéraire n'a strictement rien à envier à celui de ses deux sœurs. Elles sont passées par le même creuset. Des esprits fins, subtiles, délicats, brillants. Et, dans le cas de la pauvre Anne, ou Agnès comme elle a préféré se désigner, condamnée par la pauvreté à évoluer dans un milieu rustre et grossier. Malgré leur fortune, ses employeurs sont des brutes à peine patinées d'un verni de courtoisie. Tout le monde la tient pour quantité négligeable, y comprit les domestiques – qu'elle est pourtant la seule à considérer comme des êtres humains et pas des machines à servir.



Quand aux enfants dont elle s'occupe, on pourra constater qu'hier comme aujourd'hui l'absence d'éducation produit les mêmes résultats. Seul changement notable, les petites brutes modernes ne sont Dieu merci plus assez dégourdies pour dénicher les oisillons. S'ils l'étaient, ils leur arracheraient sans doute les ailes avec autant de plaisir.



S'y ajoute, bien sûr, une solide morale victorienne. Anne Brontë se fait visiblement une haute idée du métier d'éducateur, mais guère si différente d'aujourd'hui. Certaines leçons morales ont changées (une fille ne doit pas trainer avec les palefreniers et les piqueurs) d'autres sont toujours valables (ne pas épouser un homme uniquement pour son argent). La religion est son principale refuge et soutien moral – ce qu'on peut comprendre, pour quelqu'un qui a grandi au milieu des deuils.



On reconnait bien le talent des soeurs Brontë quand bien même le récit, plus autobiographique, voir cathartique, n'a pas la fulgurance des ‘Hauts de Hurlevent' ou la puissance de ‘Jane Eyre'.
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La recluse de Wildfell Hall

Je me souviens d'avoir fait pleurer des petits coeurs de guimauve sur SensCritique lorsque j'avais asséné ma note de 6/10 à Lettre d'une inconnue de Zweig. Là, j'ai bien peur que les pleurs ne se transforment en cris outrés. Car, non, je n'ai pas aimé La Recluse de Wildfell Hall, ou quel que soit le titre français qu'on lui donne.





À vrai dire, je n'imaginais même pas ne pas aimer ce livre. C'est idiot, et certainement dû au fait qu'on ne peut s'empêcher de comparer les trois soeurs Brontë, ce qui ne me paraît pas très pertinent avec du recul. C'est différent avec les poèmes et tout ce qui tient aux jeux d'enfance ; j'ai d'ailleurs aimé les poèmes d'Anne que j'ai pu lire, et je les ai trouvés à mille lieues de ce roman ennuyeux, moralisateur, nunuche. Voilà ce que j'appellerai une lecture poussive.





On nous fiche une jeune femme soi-disant mystérieuse qui s'installe avec son fils dans un village, et dont s'entiche un jeune niais. Bon, et après ? Faut-il être spécialement malin pour deviner qui est le voisin qui veille sur elle ? Nan. Sauf pour un jeune niais, évidemment. le jeune niais est censé être l'exemple de l'homme avec qui n'importe quelle femme rêverait de se marier. Ouais. Faut être nunuche, quand même, pour s'intéresser à un niais pareil. Forcément, la jeune femme cache en outre un passé obscur ; enfin, comme on devine vite de quoi il retourne en gros, bonjour le mystère ! Et la voilà qui raconte sa vie, en long et en large, pour revenir toujours aux mêmes situations. Ah, la pauvre, qu'elle a souffert, ah la pauvre, qu'elle a été brave, ah la pauvre, qu'elle a été exemplaire de garder sa foi en Dieu après toutes les épreuves qu'elle a traversées, ah la pauvre, ah la pauvre, ah la pauvre !





Bien entendu, si on veut aller chercher du côté de la biographie des Brontë, on va pouvoir mettre en relation la déchéance de Branwell, le frère d'Anne, avec l'histoire d'un des personnages du roman. Oui, on va aussi se dire que c'est relativement osé pour l'époque de montrer une femme qui cherche à s'émanciper... Enfin, c'est tout juste s'il ne faut pas qu'on l'y oblige, on ne peut pas dire qu'elle y mette beaucoup du sien, tout de même ! Et de toute façon, est-ce que tout ça fait un bon roman ? Non, pas selon moi. Est-ce que c'est pour autant un mauvais roman ? Non plus. C'est juste que 170 ans après sa parution, il ne conserve que difficilement sa charge critique, déjà bien entamée par les constantes exhortations à faire ses prières et ce genre de choses. Je ne suis pourtant pas du genre à dire "Ouh, c'est vieillot !" dès qu'un livre est daté du XIXème siècle (ou bien pire, qui daterait d'avant le XIXème siècle !!!) Celui-là m'a fait l'effet d'avoir, pour le coup, très mal vieilli.





Tout ce que j'ai retenu, ce sont donc des personnages pour la plupart falots, ainsi que pleurs et lamentations incessants agrémentés de leçons de morale. Argh !!!

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Agnès Grey

J'ai découvert Anne Brontë avec "Agnes Grey" et j'ai bien fait car c'est un livre magnifique.

J'adore le personnage d'Agnès Grey voulant aider sa famille en se proposant d'exercer le métier d'institutrice dans plusieurs familles.

Mais cela se révélera plus compliqué que ce qu'elle avait pu imaginer...

En effet, la première famille concernée, les Bloomfield, se montre très désagréable envers Agnès.

Ainsi elle est renvoyée après plusieurs mois de travail.

Malgré cela, Agnès veut continuer à donner des leçons et rentre finalement chez les Murray, plus polis mais tout aussi stupides que les Bloomfield.

Ici, elle croisera la personne de Mr. Weston, le nouveau pasteur du village qui s'avère être très généreux et aimable envers les plus pauvres comme Agnès...

J'aime beaucoup le style d'Anne et j'ai dévoré ce livre...

A lire pour Anne Brontë (qui est aussi douée que ses deux soeurs), et pour cette belle histoire d'amour) !
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La recluse de Wildfell Hall

Que dire de La dame du manoir de Wildfell Hall si ce n'est que J'ai ADORE ! Wouah... Ce roman m'a bien confirmé une chose, c'est qu'Anne était aussi talentueuse que ses deux sœurs aînées et qu'elle mérite amplement qu'on parle un peu plus d'elle ! On l'associe surtout à Agnès Grey, ce qui la dessert car ce n'est pas son oeuvre la plus aboutie ni la plus intéressante (je crois qu'on est à peu près tous d'accord la-dessus ! ) Dans ce second roman, publié en 1848, la jeune femme nous offre une très belle histoire, très plaisante à lire et très critique sur la place de la femme dans la société victorienne.



Plusieurs thèmes sont abordés comme le danger d'une conduite libertine, violente et excessive. L'alcool représente le pilier de la descente aux enfers pour plusieurs personnages. Comme avec Hindley dans les Hauts de Hurlevent, le personnage d'Arthur n’est pas sans rappeler par sa conduite le triste sort de Branwell. Et celle qui en fait les frais, c'est la jeune et belle Helen, sorte de reflet d’Anne, d’Emily et de Charlotte dans leur impuissance face à la déroute de leur frère dont la violence et les addictions sont irrécupérables. D'ailleurs c'est encore un personnage masculin torturé et blessé que nous offre l'une des sœurs Bronte, s'ajoutant aux célèbres Heathcliff et Mr Rochester.



Il y a de nombreux éléments qui ont du choquer l'opinion publique à l'époque dans ce récit : les conduites irrévérencieuses et violentes, la rébellion d'une femme, le réalisme saisissant des vices et de la boisson, la décision d’Helen de etc. L'auteur critique le mariage et ses conséquences parfois désastreuses : comment par exemple une femme peut-elle s'extirper de la vie conjugale dont elle dépend lorsqu'elle est faite d'abus et de violences ? Je crois qu'à ce sujet elles n'avaient même pas le droit de porter plainte. C'est dire...



J'ai beaucoup aimé le personnage d'Helen. Elle est très attachante, prête à aider, à pardonner, à soutenir. Elle est pleine d’abnégation, de courage, de douceur et de volonté.. Son amour est et j'ai eu mal pour elle car on devine assez vite que son époux est



Le style est très agréable. J’aime beaucoup l’alternance des points de vue entre les lettres de Gilbert et le journal d’Helen. Le personnage de Gilbert m'a bien plus même s'il dépasse parfois un peu les limites vis à vis de certains personnages (pour Lawrence n'est-ce pas...) et qu'il rappelle un peu l'exaspérant Hargrave dans l'ardeur de ses sentiments.



En résumé, une très très belle découverte ! J'ai passé un excellent moment de lecture et je vais maintenant me pencher sur l’adaptation cinématographique de 1996 pour redécouvrir avec plaisir Toby Stephens (Quoi ? Arrêtez de me regarder comme ça ! ), le Mr Rochester de 2006 cette fois-ci dans le rôle de Gilbert Markham. Comme vous l'aurez compris, je ne peux que vous conseiller la lecture de La dame du manoir de Wildfell Hall...



COUP DE COEUR.

Challenge PAVES 2015-2016
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Agnès Grey

La famille Grey se compose du père, curé (anglican), de la mère, et de deux filles dont Agnès, la cadette. le père fait de mauvaises affaires et se retrouve ruiné. L'aînée des filles se marie. Pour aider ses parents et ne pas leur être à charge, Agnès décide de se trouver une place de gouvernante, c'est-à-dire de préceptrice, alors qu'elle n'a aucune expérience et est encore elle-même très jeune. Par relations familiales, elle parvient à trouver cet emploi dans une famille de la riche bourgeoisie commerçante, mais il n'est pas certain qu'elle s'y épanouisse… ● On retrouve dans ce roman le beau style des soeurs d'Anne ou de Jane Austen, c'est très agréable à lire. Voici un exemple de bonheur d'écriture, qu'on trouve à foison : « j'aurais été assez à mon aise, si elle n'avait pris tant de peine pour m'y mettre. » ● C'est une dénonciation des moeurs des riches Anglais du XIXe siècle, de leur égoïsme, de leur fatuité, de leur goût des apparences, et même de leur méchanceté, voire de leur sadisme. ● La pauvre gouvernante a fort à faire avec les enfants : « si un homme civilisé était condamné à passer une douzaine d'années au milieu d'une race d'intraitables sauvages, à moins qu'il n'ait le pouvoir de les civiliser, je ne serais pas étonnée qu'à la fin de cette période il ne fut devenu quelque peu barbare lui-même. Ne pouvant donc rendre mes jeunes compagnons meilleurs, je redoutais fort qu'ils ne me rendissent pire, qu'ils n'amenassent peu à peu mes sentiments, mes habitudes, mes capacités, au niveau des leurs, sans me donner leur insouciance et leur joyeuse vivacité. » ● Mais elle a aussi beaucoup de mal avec les parents, qui la méprisent, la tiennent pour quantité négligeable, lui reprochent des défauts qu'ils inventent avec une mauvaise foi déconcertante, souhaitent qu'elle éduque leurs enfants sans lui donner aucun moyen de le faire, bien au contraire, puisqu'ils prennent toujours le parti des enfants contre celui de la gouvernante. ● On trouve de beaux portraits à charge, comme : « c'était l'oncle Robson, le frère de mistress Bloomfield ; un grand garçon plein de suffisance, aux cheveux noirs et au teint jaune comme sa soeur, avec un nez qui avait l'air de mépriser la terre, et de petits yeux gris fréquemment demi-fermés, avec un mélange de stupidité réelle et de dédain affecté pour tout ce qui l'environnait. » ● le roman a bien sûr des côtés moralisateurs et est dépourvu d'humour (contrairement à ceux de Jane Austen), et la narratrice, Agnès Grey elle-même, semble n'avoir aucun défaut. Les maximes raisonnables parsèment le récit : « on n'apprend rien sans travail et sans peine. » « Hélas ! combien l'espoir de posséder l'emporte quelquefois sur le plaisir de la possession ! » ● La richesse paraît être le plus sûr moyen de corruption de l'âme ; Agnès Grey est une véritable adepte des préceptes évangéliques tandis que tous ceux qui l'entourent, sauf sa famille, sont pénétrés d'un pharisaïsme odieux. ● L'intrigue est assez simple et linéaire, et même si on voit paraître la fin bien avant d'y être, elle n'est pas dépourvue de tension narrative faisant tourner les pages à bonne allure, mais le livre vaut surtout par son style, par son témoignage historique et, du moins à l'époque, par son contenu moral. ● J'ai trouvé fort intéressant de lire le premier roman de la moins connue des soeurs Brontë et je le recommande, d'autant qu'on peut le trouver en Kindle gratuit.
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La recluse de Wildfell Hall

Outre une couverture magnifique pour l'édition de poche de "La dame du manoir de Wildfell Hall" d'Anne Brontë, il faut bien souligner que la cadette de la famille Brontë s'en sort très bien dans son écriture.

Certes on a droit à un roman noir, les thèmes abordés sont révélateurs d'une existence vécue par l'auteure comme l'alcoolisme (pour son frère qui avait ce vice) le caractère de l'héroïne est beaucoup plus marqué chez Anne que par exemple chez Charlotte pour Jane Eyre ou Shirley. Par contre, on sent bien qu'elle a voulu montré que c'était très dur à l'époque victorienne de faire valoir ses droits sociaux en tant que femme et l'on pouvait se marier pour le meilleur et pour le pire...Ici c'était le pire! Cela dit, avec toute sa détermination, car chez les Brontë, le courage chez la Femme est la principale qualité, l'héroïne, Helen Huntington fait preuve dans son journal et tout au long de l'histoire d'une réélle envie de vivre sa vie coûte que coûte... Bref, Anne aussi mérite d'être lue tout autant qu' Emily ou Charlotte.
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Agnès Grey

Mes lectures d'autrices du XIXème siècle se suivent et ne se ressemblent pas... Après Jane Austen, me voici chez Anne Brontë, oui vous savez la benjamine de la fameuse fratrie.

L'univers littéraire des seules soeurs Brontë que je connaissais jusqu'à présent, - Charlotte et Emily, m'ont entrainé dans des territoires romanesques où se côtoient le sombre, le gothique, le morbide...

Anne Brontë est sans doute moins connue que ses deux autres soeurs, elle partage cependant deux points communs avec ses aînées : elle fut à son tour une femme de lettres et elle connut un destin tragique, la mort la fauchant elle aussi à la fleur de l'âge.

Agnès Grey est son premier roman. Il est pour une large part autobiographique, le roman étant fondé sur la propre expérience de l'autrice comme gouvernante et préceptrice.

Ici on est très éloigné de la dramaturgie noire qu'on peut rencontrer dans Jane Eyre ou encore dans Les Hauts de Hurlevent.

J'ai abordé ce roman avec l'attention qu'on porte lorsqu'on est autorisé à ouvrir un journal intime.

Agnes Grey est la fille du pasteur d'un village du nord de l'Angleterre, entouré de landes à perte de vue. Ses parents ayant subi un revers de fortune, Agnes Grey décide de les aider financièrement. Elle quitte le presbytère familial pour confier ses services à une riche famille aristocratique, les Bloomfield.

Elle va occuper l'un des rares emplois permis aux femmes respectables au début de l'ère victorienne : gouvernante d'enfants de riches. Dès les premiers jours, elle doit faire face non seulement à l'indiscipline d'enfants gâtés plus passionnés à chaparder les nids, à étrangler les oiseaux dans leurs si douces mains qu'à apprendre leurs leçons, mais aussi aux humiliations des parents qui prennent systématiquement la défense de leurs « adorables » petits chérubins.

Ah ! Ces sales gosses ! À sa place, moi je les aurais... Pardon, je m'emballe... Mais qui voudra encore croire après cela à l'innocence éperdue de l'enfance...

L'écriture, simple, fluide, certes très académique, est d'une très belle tenue.

Le roman vaut surtout pour la peinture, brossée par petites touches mais sans concession, de cette riche bourgeoisie terrienne de l'ère victorienne qui écrase la condition de femmes modestes, société dont les principes fondés sur le rang et l'argent se heurtent à toutes valeurs sociales et morales.

Ce roman avait tout pour égayer mes pensées, j'avais posé mes pas dans la douceur de la narratrice, dans la beauté de ses joues qui rosissent de confusion, son esprit oscillant entre volontarisme et résignation, mais le récit très conventionnel offre finalement peu de nuances d'Agnes Grey, de sorte que l'ennui est venu rapidement au gré de ma lecture.

Dieu aussi est venu s'en mêler, le bougre. Un des personnages a beau rétorquer à notre héroïne que « Dieu est amour », la belle affaire ! je vous avoue que j'ai une autre opinion de ce sentiment exalté...

J'étais pourtant tout émoustillé lorsque j'ai lu cette citation de la narratrice qui commençait pourtant bien :

« J'ai commencé ce livre avec l'intention de ne rien cacher, afin que ceux qui le voudraient pussent lire dans le coeur d'une de leurs semblables ; mais nous avons des pensées que nous ne voudrions laisser voir qu'aux anges du ciel, et non à nos frères les hommes, pas même aux meilleurs et aux plus bienveillants d'entre eux. »

Alors je l'ai laissée folâtrer vers les anges du ciel et de la terre.

J'ai poursuivi ma lecture avec ce bel ennui traversant ce ciel pâle d'automne au-dessus de la campagne anglaise. J'ai tenté d'effleurer les pages, cherchant à éveiller la sensation mutine d'un battement d'ailes, mais leur mélancolie délicieusement désuète ne concédait rien.

Il n'en demeure pas moins un roman de qualité, méconnu tout comme son autrice, méritant d'être déplacé vers la lumière parce qu'il a des choses à nous dire sur les vicissitudes de la condition féminine, bien davantage que sur les états d'âme et les sentiments de sa narratrice.

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Agnès Grey

Quelle étrange fée a frappé les soeurs Brontë de sa baguette ? Car c est toujours un enchantement d entendre la voix d une de ces sirènes.Ah si elles avaient pu vivre et écrire encore et encore !

Pourtant Anne est différente de ses soeurs. Plus réaliste, moins névrosée que Charlotte, et tellement moins rebelle que la sauvage Emily. Et pourtant on se retrouve en paysages connus, nature sombre et splendide, souffles du vent, sentiments bruts sans mélange. Pas de compromis, pas de soumission, résister, mais ici, avec Agnès, dans l'apparente douceur et le silence.

Gouvernante impuissante et humiliée par des familles déliquescentes dont elle dresse un portrait sans concession et toujours d actualité, Agnès fait l expérience de l échec d un bon sens qu elle croyait partagé par tous et assiste, non sans une certaine cruauté, à la chute de ses pupilles ingouvernables et mal élevés. Ce faisant elle se met à rechercher dans ce monde des âmes honnêtes et fortes qui lui seraient soeurs.

Curieux mélange d analyse sociologique et de romantisme débridé, absolument moderne au style translucide et envoûtant, on quitte toujours ces chefs d oeuvre avec un sentiment de manque, de deuil, et le désir compulsif de replonger dans le deuxième roman de la troisième mais non la moindre des génies de Haworth, la locataire de Wildfeld Hall.
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La recluse de Wildfell Hall

Un excellent roman dans la veine romantique que j'aime particulièrement pour son charme envoûtant qui paraît étrangement si lointain avec le ton des oeuvres d'aujourd'hui.

On retrouve la finesse dans l'analyse psychologique et le caractère tourmenté des personnages de ce genre. Anne Brontë n'a rien à envier à ses soeurs à qui elle ressemble fortement également par le choix de son inspiration : une nouvelle histoire d'amour qui replace le mystère au coeur des rapports entre personnages. Or il existe deux différences notables :



L'ambiance est moins marquée dans ce roman que dans celui des "Hauts-de Hurlevent" ou "Jane Eyre" qui, sans être lu, a été vu en film. Même si toutes les trois nous replongent dans un paysage de lande dominé par la présence d'un manoir (ou château), Emily et Charlotte intégraient davantage le surnaturel en rappelant l'atmosphère des rêves ou l'évocation de fantôme à travers leur récit. C'est un peu dommage que leur soeur n'ait pas mieux exercé sa plume pour accentuer cet aspect là qui est pourtant un des traits majeurs de l'oeuvre romantique. Mais l'on ne peut nier qu' il y a décrites plusieurs scènes qui relèvent de cette esthétique comme celle où Helen se trouve au sommet d'un promontoire avec une mer agitée à ses pieds, ou encore le dialogue nocturne dans le manoir près d'un feu, l'accident à cheval dans la lande sous un ciel venteux. Surtout le mystère plane dans cette histoire autour du portrait de l'héroïne que l'on perçoit d'abord à travers le regard de Gilbert Markham. Helen, à peine installée à Wildfell Hall, suscite la curiosité et l'interrogation de ses voisins par sa position insolite : il s'agit d'une jeune femme qui vit seule avec son fils, ce qui en ce temps là était peu courant. Il faudra attendre la seconde partie pour que l'on nous dévoile son parcours à travers son journal intime car l'auteure ménage le suspense tout au long de la première.



C'est donc à partir de là qu'intervient l'aspect le plus important du roman : la peinture sur la condition de la femme. Helen est une jeune femme qui vit sous la coupe d'un mari mondain et volage. Un choix malheureux dont elle se rend compte assez vite sans savoir quelle décision prendre en dépit d'un ressenti marqué. On suit donc page après page les tourments de cette conscience qui décrit aussi avec précision les souvenirs de sa vie de couple. Pour Anne Brontë, il s'agit de dénoncer par son entremise les ravages de l'alcool chez l'homme que doit subir son épouse, la blessure de l'adultère dont elle est victime ainsi que les disputes, les rancoeurs qui peuvent naître de cette situation entre deux personnes au mode de vie et aux goûts opposés. Face à cet échec conjugal, Helen toutefois trouve la force de fuir, un exil en retrait d'où s'ensuivra sa rencontre avec Gilbert Graham avec qui elle partagera une tout autre expérience. Anne Brontë met ainsi en perspective par ce dualisme la distinction entre le faux et le vrai amour. Il s'agit aussi de rappeler la pratique du commérage qui entretenait la vie des villageois, en proie si facilement à l'ennui dans les campagnes et qui ciblait plus les femmes que les hommes. Or, même si l'auteure mène la vie dure aux rumeurs en brisant les mensonges, j'ai trouvé qu'elle ne rapportait pas des propos si médisants que cela, juste quelques bruits qui courent sur une éventuelle liaison (on est loin des accusations de sorcellerie quand même). Il faut dire qu'Helen fait figure de marginale en ce XIX siècle, étant une femme indépendante qui a fait le choix de se séparer de son époux avant même que la société n'ait légiféré en ce sens.



C'est pourquoi, je vous conseille la lecture de "La recluse de Wildfell Hall". Peut-être est-ce d'ailleurs à cause de ce portrait douloureux d'une épouse maltraitée qu'Anne a aussi été reléguée au second plan ? de toute évidence, elle portait un regard plus critique qui a dû déranger la société anglaise du XIX siècle dont la vie conjugale était la plupart du temps dominée par la seule autorité de l'époux. Un choix plus courageux que ses soeurs que, pour ma part, je salue car elle donne ainsi un peu voix au chapitre aux si nombreuses épouses bafouées qui n'avaient pu jusqu'à lors publiquement s'exprimer. de ce point de vue, on ne peut pas dire qu'Emily ait donné cette dimension éthique à son histoire alors que si Charlotte le développe aussi, il est encore plus manifeste dans ce roman qui est considéré comme le premier chef d'oeuvre féministe. Il faut dire enfin que sur cette question, les Anglais ont été plus sensibles que leurs homologues européens en donnant davantage de place aux femmes dans leur société avec la renommée de grandes reines qui ont gouverné dès le XVIè siècle et avec l'accès à la célébrité à un nombre plus diversifié d'artistes féminins : les soeurs Brontë, Jane Austeen, Virginia Woolf, Ann Radcliff, Agatha Christie, Joan Kate Rowling...
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La recluse de Wildfell Hall

La recluse de Wildfell Hall, ou également nommé La dame du manoir de Wildfell Hall, est sans doute le roman le moins connu des soeurs Brontë. Et pour cause, jugé en total désaccord avec le tempérament doux et inexpérimenté de son auteure, sa soeur aînée Charlotte en empêcha le republication, un an après la mort d'Anne.



D'Anne Brontë, on ne retiendra alors que le très sage et pédagogue roman Agnès Grey et cela est bien dommage !

Il faut lire La recluse de Wildfell Hall pour appréhender ce que fut la vie des Brontë entre les murs bien sévères du presbytère paternel.

Ce roman réaliste qui décrit la déchéance d'un homme charmant et drôle dans l'alcool et les turpitudes et la volonté d'une épouse aimante et résignée de finalement s'y dérober avait de quoi choquer la société bien pensante de cette époque victorienne.

Ce roman, comme le définit Isabelle Viéville Dégeorges dans la préface, est la réponse d'Anne à son frère Branwell. Ce dernier, si prometteur et si intelligent, mais porté par le goût des plaisirs, fera vivre un enfer à ses soeurs. Alternant entre crise de delirium tremens et crises de repentir, Branwell déçoit, tourmente et trahit ses soeurs aimantes et bienveillantes.

C'est tout cela qu'Anne cristallise dans le personnage d'Huntington, époux charmant mais narcissique, drôle mais cynique, aimant mais infidèle et surtout autodestructeur comme l'était Branwell.



Mais,ce roman est aussi précurseur du féminisme.

Défiant toutes les conventions sociales et la loi anglaise qui ne donne aucune existence indépendante aux épouses, Helen, l'héroïne, représente la rébellion des femmes et annonce le mouvement des suffragettes.



Ce roman se lit vraiment très bien.Il est composé de deux parties, dont l'une enchâssée dans l'autre. La première correspond au récit épistolaire de Gilbert Markham, un agriculteur et la deuxième au journal intime d'Helen. C'est surtout le récit d'Helen qui m'a passionnée. Markham m'a souvent agacée de par son romantisme trop exacerbé. J'ai nettement préféré le personnage d'Helen qui s'étoffe et s'endurcit au fur et à mesure du temps. Elle est "l'héroïne" de ce roman, dans tous les sens du terme !



Si ce n'est déjà fait, je vous conseille vivement la lecture de ce livre qui donne un éclairage différent sur l'oeuvre des célèbres soeurs Brontë.
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Agnès Grey

Agnès Grey menait une vie heureuse mais simple chez ses parents aimants en compagnie de sa soeur aînée. Mais un revers de fortune et des problèmes de santé du père poussèrent la jeune fille à devenir gouvernante.

Chez les Bloomfield, la tâche est rude auprès d'enfants cruels qui ne lui obéissent pas et la méprisent et des parents tout aussi méprisants et détestables. Agnès n'a aucun pouvoir sur les enfants et se contente de subir. le petit garçon étant de loin le plus terrible ayant pour passion de torturer les oiseaux. Après quelques mois de calvaires où elle se sent rabaissée, humiliée, elle est remerciée. Elle s'engage ensuite chez les Murray où les enfants sont plus grands. La famille n'est guère mieux, égoïste, méprisante, stupide. Toutefois, la rencontre avec Mr Weston un pasteur adoucira ses jours.

Si l'écriture est belle, je n'ai pas été passionnée par l'histoire. J'ai connu un passage à vide au chapitre 11 où je me suis vraiment ennuyée, l'héroïne très bigote, s'interrogeait sur sa foi, était en proie aux doutes.

j'aurais aimé une héroïne passionnée alors qu'Agnès semble subir et passe son temps à se plaindre. La romance est également longue à se mettre en place.

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Agnès Grey

Anne, la plus jeune des sœurs Brontë, écrit ce premier roman à 27 ans.

S'il n'a pas la passion tragique et l'exaltation des sentiments de Jane Eyre ou encore des Hauts de Hurlevent, ce roman mérite qu'on s'y intéresse de près.



A travers la narration d'Agnès Grey, l'héroïne de ce roman, c'est sa propre histoire et son propre ressenti qu'Anne dévoile à ses lecteurs. Dans la préface, Isabelle Viéville Degeorges présente Agnès comme l'alter ego de sa créatrice. Comme elle, elle devint gouvernante au service, tour à tour, de deux familles riches et peu respectueuses des valeurs éducatives.



Sa narration simple et transparente ne peut rendre indifférent. Comme je comprends le désarroi qu'Agnès / Anne a pu ressentir face à ces enfants égoïstes et turbulents, face à ces jeunes filles coquettes dont le seul souci était de plaire à la gente masculine sans se soucier des sentiments d'autrui.



Ce roman est à la fois moderne et universel. Même si les méthodes éducatives ont évolué , bien heureusement, il n'en reste pas moins un plaidoyer pour une éducation basée sur l'honnêteté, la bienveillance, le respect de la nature et des animaux , et surtout la nécessité d'un cadre bien défini.



Bien sûr, le côté biblique du discours de l'héroïne peut paraître un brin moralisateur mais il convient de ne pas oublier qu'Anne Brontë était elle même fille de pasteur.



Ce roman m'a fait penser à la prose de la Comtesse de Ségur, dont la littérature a bercé mon enfance , par son côté moralisateur justement, et par la fin heureuse pour l'héroïne.



On trouve aussi dans ce roman de l'amour. Beaucoup moins ravageur que dans les romans de ses sœurs. Mais les tourments d'Agnès ne m'ont pas laissée indifférente.



Une jolie découverte que la prose de la troisième des sœurs Brontë que je compte bien prolonger avec la lecture de son second roman.



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La recluse de Wildfell Hall

Je n'ai encore rien écrit sur ce roman ? Je répare ça : Au 19ème siècle, dans un petit village anglais, une mystérieuse dame vient de louer un manoir jusque-là abandonné. Contrariant les usages, elle se prête mal aux traditions des visites et invitations, refuse de se livrer sur elle-même ou sa venue ici et, plus intriguant encore, elle semble avoir un fils mais pas de mari… Il n'en faut pas plus pour intriguer les familles environnantes, nourrir les cancans aux soirées où elle brille par son absence, où bien à l'heure du thé ; et susciter quelques élans amoureux qu'elle s'empresse de rejeter apparemment sans raison. le narrateur, fermier de son état, sera-t-il assez sincèrement intéressé pour faire tomber les barrières qui emmurent la recluse, et enfin percer le secret qui l'entoure, pour le lecteur déjà happé par son aura…?





« S'il ne se montre jamais capable de prendre la vie au sérieux, que ferais-je de ce qu'il y a de grave en moi ? »





*****



C'est dans la langue immédiatement séduisante et confortable de son époque que cette histoire nous est contée, ce qui participe grandement au plaisir de lecture. le narrateur parvient assez bien à nous intéresser au récit à travers les lettres qu'il adresse à son ami pour lui raconter cette histoire. Puis, lorsqu'il gagne la confiance de la recluse, celle-ci lui confie la lecture de son journal intime pour qu'il comprenne l'enjeu de sa discrétion, son comportement ainsi que son inquiétude. le narrateur lui laisse alors la plume toute une partie du roman, avant de nous retrouver pour le fin mot de l'histoire. le procédé épistolaire répartit bien la part de mystère et de découvertes et nous tient plutôt bien en haleine ; la langue parfaitement maîtrisée et signée, ainsi que les messages sous-jacents de ce roman font le reste, et constituent un texte qui peut raisonner en nous encore aujourd'hui.





C'est en effet un roman étonnamment féministe pour l'époque me semble-t-il, avec des dialogues dans lesquels les femmes expriment leurs réflexions sur la perception masculine des femmes, mais aussi sur la condition féminine qu'elles perçoivent comme discriminatoire, idée que l'héroïne n'hésite pas à exprimer en public pour en débattre et faire changer d'avis les hommes : Pourquoi les femmes doivent-elles sacrifier leurs propres goûts devant ceux de leurs maris, leur propre bonheur pour s'occuper du leur, leurs idées pour se conformer à celle des hommes en société, etc…? Et pourtant, la soumission féminine est une vertu même si elle est moquée dans le même temps par ceux qui la réclament.





Alors, quel secret cache « la recluse de Wildfell Hall » (parfois intitulée aussi "La dame du manoir de Wildfell Hall" ) …? J'ai passé un bon moment de lecture à le découvrir, j'y ai particulièrement apprécié l'intelligence et la tournure des répliques ; mais, malgré le voile de mystère entourant l'héroïne, j'ai trouvé l'ambiance moins prenante et unique que dans les magnifiques « Hauts de Hurlevant », d'Emily, ou même que dans « Jane Eyre », de Charlotte. On a le côté cottage anglais mais moins le côté gothique.

J'ai souffert également d'un certain manque d'attachement aux personnages (dû notamment à la distance que la recluse met entre elle et le monde, qu'elle semble s'attacher à prendre de haut - même si l'explication vient en lisant) et d'un soupçon de lenteur dans l'évolution des relations entre les personnages (il faut le temps que la confiance s'installe avant de se livrer, surtout eut égard aux us de l'époque, certes), tandis qu'aucun réel événement ne vient opportunément nous en distraire. Cela dit, quelle plume ! Ca fait du bien !

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Agnès Grey

Anne Brontë, alias Acton Bell, souffre aujourd'hui de l'ombre que lui font ses aînées Emily et Charlotte. Ce qui s'avère bien dommage car la cadette de cette trinité littéraire n'est pas moins douée que ses comparses Ellis et Currer. Force est de constater néanmoins que Agnès Grey ou La châtelaine de Widfell Hall pâtissent de la renommée écrasante des Hauts de Hurlevent et de Jane Eyre.



Ceci dit, je reviens à Agnès Grey. Comme sa soeur de livre Jane Eyre, et comme elle-même, elle est fille de pasteur et a grandi avec des ressources financières restreintes. Sa condition la destine au métier de gouvernante. Elle entre ainsi dans des familles. Qu'il s'agisse de parvenus de la société britannique ou de rejetons de l'aristocratie séculaire, Agnès Grey dépeint avec minutie leur quotidien, leurs défauts et le mépris vis-à-vis de leurs inférieurs. En ce sens, la gouvernante est une des plus mal placées car son éducation la rapproche de ses maîtres tout en l'excluant de la domesticité. Ainsi rejetée des deux parties, elle souffre de solitude en plus de toutes les avanies possibles de sa profession. Pas de sympathique Adèle comme pour Jane Eyre ici. Les élèves peuvent se montrer durs et Agnès Grey doit ravaler nombre de mortifications.



Anne Brontë a mis beaucoup de ses principes et de sa morale dans son personnage. Une morale souvent moralisatrice qui alourdit parfois le propos. En revanche, sa plume, elle, ne souffre pas de surcharge pondérale. Comme ses soeurs, elle écrit fort bien et sait instiller sa sensibilité et sa délicatesse à sa prose.



Le nom de son héroïne donne la couleur générale du roman. Si la vie de Miss Grey n'est effectivement pas rose, on reste loin des drames inventés par Charlotte ou Emily (surtout Emily... difficile de faire plus terrible et noir que son Hurlevent).

Agnès Grey a de quoi ravir tous les férus de cette littérature anglaise georgienne et victorienne si caractéristique. Et si fascinante.
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La recluse de Wildfell Hall

Superbe roman, qui égale au moins ceux de Charlotte, à mes yeux en tout cas.

On sent l'ambiance Brontë dans le texte, manoirs, landes désolées, hommes brutaux et diaboliques, enchantement de l'écriture... Mais Anne Brontë se différencie de ses soeurs par son réalisme et la dimension politique de son livre. Car c'est un réquisitoire violent et magnifique contre la situation des femmes au XIXeme siècle, leur education, leur destin.

On rencontre d'abord la mystérieuse Mrs. Graham par les yeux de Gilbert Markham, jeune gentleman farmer du village où cette dame a trouvé refuge. Très vite, sa beauté, sa solitude et la présence de son fils sans celle de son père, délient les langues autour d'elle quoiqu'elle se déclare veuve...Impossible pour une femme de rester tranquille et anonyme...et les pires colporteurs de ragots sont ces mêmes femmes qui devraient être solidaires...Mais leur éducation et leur oisiveté les poussent à condamner tout ce qui semble un peu étrange.

Puis, suite à diverses péripéties, le lecteur découvre le journal intime de Mrs. Graham (Helen). Et c'est une plongée dans l'enfer que peut devenir un mariage à cette époque. D'abord, la jeune fille est littéralement lancée sur le marché du mariage, où ces messieurs se pressent pour voir la marchandise. Il y a quelque chose de profondément obscène dans ces scènes de bals hypocrites où les jeunes filles innocentes se pavanent la bouche en coeur au milieu des hommes avertis et pervertis. Ils cherchent laquelle sera la plus riche, la plus soumise...Alors qu'elles se croient dans Cendrillon. Helen, pourtant futée, se laisse littéralement embobiner par Arthur Hundington, un bellâtre qui cache sous son abondante chevelure et ses yeux moqueurs une âme faible et égoïste...Car, on constate sans peine que, si l'éducation des filles est scandaleuse, celle des garçons est une catastrophe...On ne leur met, pour parler comme aujourd'hui, aucune limite.On leur inculque l'idée que les femmes sont au monde pour les servir...et qui les éduque ainsi ? Les femmes elles-mêmes, créant leur propre enfer et celui de leurs filles. Mais condamnant aussi leurs fils à la souffrance s'ils n'ont pas la force de caractère de s'imposer eux-mêmes quelques ornières. C'est ainsi que des fortunes sont dilapidées, des familles ruinées, des dépendances mortelles à l'alcool, à l'opium, au jeu créées. L'éducation comme fondement essentiel de la société était déjà le grand thème d'Agnès Grey, l'autre grand roman d'Anne Brontë.

Donc Helen plonge avec son Arthur...Les lois l'empêchant de se libérer de cet esclavage sont aussi mises en évidence. L'Etat joue un grand rôle dans l'asservissement des épouses.

Bref, n'en disons pas plus. L'ensemble est absolument passionnant et génial.

La peste soit de cette p*** de tuberculose qui a emporté à 25 ans les plus grandes auteures du XIXeme siècle anglais.
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Agnès Grey

J'apprécie vivement le plaisir que peuvent nous procurer les plumes féminines du XIXe s. La musicalité des mots, même traduits, me transporte à chaque fois.



Ici nous avons la première oeuvre d'Anne Brontë, qui montre sensiblement une maturité différente si on la compare avec la Dame du manoir de Wildfell Hall. Il n'en reste pas moins que ce fut un plaisir pour moi de découvrir la vie d'Agnès Grey, gouvernante de son état et dernier roman des soeurs Brontë que je n'avais pas lu. C'est chose faite à présent et j'y reconnais une tendance très autobiographique.



Agnès Grey, gouvernante de son état, n'est pas sans me rappeler mes propres débuts d'enseignante. Elle est surtout un témoin critique de la société de son époque, dépeignant l'aristocratie dans tout son égoïsme, sa vanité, sa fatuité et sa superficialité. En comparaison, notre héroïne est drapée dans une moralité à toute épreuve : bonté, souci d'aller au-delà des apparences, modestie et générosité, autant de valeurs que l'on peut attendre d'une fille d'un clerc ayant vécu pauvrement, que ce soit notre protagoniste comme notre autrice. Alors oui, il y a un certaine lecture manichéenne, prévisible lorsqu'on est si portée sur la religion, mais on y retrouve aussi un peu d'humour et une histoire qui nous fait palpiter le cœur, tellement on trouve notre chère petite Agnès méritante.
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Agnès Grey

Chez les Brontë, demandez Anne! Elle a écrit ici un roman des plus agréables, issu de ses propres expériences de "préceptrice", fait de comportements observés avec subtilité et de caractères finement décrits. Un petit bijou de fraîcheur, plus profond qu'il n'en a l'air, servi par un style léger et efficace. A découvrir.
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Agnès Grey

Si je n'avais pas dans ma bibliothèque un volume de la Pochothèque (Le livre de poche) rassemblant les trois premiers romans publiés des sœurs Brontë, j'avoue humblement que je n'aurais pas eu connaissance de celui-ci. Il est placé à la fin du volume, c'est aussi le plus court, après le pavé roboratif de Charlotte (Jane Eyre) et les envolées sombres et passionnées d'Emily (Les hauts de Hurlevent), pourtant, c'est celui qui a été écrit en premier par la plus jeune des sœurs, Anne. Totale découverte pour moi et, dès les premiers mots, je me suis coulée avec bonheur dans les phrases élégantes de cette toute jeune femme au style sobre mais non dénué de rythme ; un style et une façon de croquer ses personnages qui rappellent beaucoup Jane Austen.



Agnes Grey est une toute jeune femme issue d'une famille aimante mais pauvre, sa mère n'ayant pas hésité à renoncer au confort matériel pour épouser un pasteur, provoquant ainsi la rupture avec sa famille. Alors que la santé de son père faiblit, Agnes décide de se faire engager comme gouvernante afin d'apporter sa contribution à l'entretien de la maison. Et ce sont donc ses expériences, a priori inspirées de celles vécues par Anne Brontë qui figurent le contexte du roman publié en 1847. A la lecture de cette présentation on peut froncer les sourcils et soupirer en se disant que ça doit être bien ennuyeux... On aurait tort, c'est passionnant. Anne Brontë a le sens du portrait psychologique et l'intelligence joliment aiguisée. Son récit est addictif, grâce à un bel équilibre entre le traitement romanesque et le propos engagé (oui, engagé) qui vient pimenter la narration faussement sage.



Cette position de gouvernante permet de montrer toute la complexité d'existence pour une jeune fille pauvre dans cette Angleterre victorienne. La comparaison avec Miss Murray, l'aînée des jeunes filles dont elle s'occupera jusqu'au mariage de cette dernière est particulièrement révélatrice et le contraste est mis en scène avec une pointe de férocité qui n'en fait jamais trop. Agnes Grey est cultivée, ouverte aux autres, curieuse, bienveillante sans toutefois se priver de remarquer les injustices même si les moyens de les combattre sont quasiment inexistants. Ses remarques sur l'exercice de sa profession "Je ne saurais guère concevoir de situation plus tourmentée que celle où, malgré le plus grand désir de réussir, malgré toute la peine qu'on se donne pour accomplir son devoir, on voit ses efforts contrariés et anéantis par ceux qu'on a en-dessous de soi, et en même temps blâmés à tort et mésestimés par ceux qui sont au-dessus" parleront à bien des travailleurs encore aujourd'hui. Quant à la tirade de Mrs Murray lui expliquant ce qui à ses yeux fait une bonne gouvernante, elle est tout simplement savoureuse. On notera également un plaidoyer en faveur du respect des animaux comme étant des "créatures sensibles" où l'on voit Agnes Grey s'opposer aux jeux cruels des enfants gâtés dont elle a la charge, auxquels on a toujours expliqué que les animaux ont été créés au service de l'homme. Défense des travailleurs et défense des animaux, pas mal pour une jeune fille de dix-neuf ans !



Ce roman est joliment maitrisé, d'une facture assez classique et pourtant jamais ennuyeuse, bien au contraire. Personnellement, je préfère ce style à la noirceur essoufflée des Hauts de Hurlevent lu l'an dernier pour la première fois ; j'ai passé un délicieux moment auprès de personnages que je gardais en tête et avais toujours envie de retrouver. Une petite pépite.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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