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Citations de Annie Ernaux (2907)


Il me semble maintenant que j'écris sur ma mère pour, à mon tour, la mettre au monde.
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Connaissant tous les gestes qui accommodent la pauvreté. Ce savoir, transmis de mère en fille pendant des siècles, s'arrête à moi qui n'en suis plus que l'archiviste.
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Je ne suis pas culturelle, il n'y a qu'une chose qui compte pour moi, saisir la vie, le temps, comprendre et jouir.
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Quand elle est étendue les yeux fermés sur sa serviette de bain, la fille de la photo se sent, comme je l'écrirai dans une lettre « à mille lieues de mon ancien moi ». Je l'imagine traversée par les images de son enfance. Car c'est à Londres que le bruit d'un avion dans le ciel l'a ramenée, un après-midi, aux bombardements de la guerre, aux alertes affolées dans la rue, avec une sorte de douceur. Elles voit ses parents au loin, vieux, un peu ridicules et gentils dans leur petit commerce, dans une sorte d'amour séparé. C'est comme si la réalité se mettait d'elle-même à distance.
J'ai commencé à faire de moi-même un être littéraire, quelqu'un qui vit les choses comme si elles devaient être écrites un jour.
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Le début de mon texte me paraît très loin. Il y a une homologie entre la vie et l'écriture : je me sens aussi loin du récit de la première nuit avec H que je devais me sentir, à Finchley, loin de la réalité de celle-ci. Ces deux durées, à y réfléchir, ne sont pas si différentes : il y a treize mois que j'ai fini d'écrire la nuit d'août 1958 et, quand j'étais à Finchley, cette nuit-là avait eu lieu une vingtaine de mois auparavant. L'une et l'autre de ces durées sont également vécues et imaginaires.
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Comment saisir l'état psychologique, la vision de la vie, sa vie, de celle que je vois affalée au troisième rang, rongée par son obsession de manger, entre R et Michèle L – ou encore au gymnase, en survêtement et baskets, dispensant sa première leçon de gym aux élèves de l'« école d'application » voisine en n'ayant qu'un désir, celui que ce soit fini – quand il est encore impossible pour elle de se dire qu'elle s'est trompée d'avenir ?
Qu'elle refoule cette perception effrayante, inavouable, qu'elle est inapte à l'enseignement primaire, qu'elle se sent très loin, très au-dessous de la perfection éducative dont l'École normale entretient le désir, comme si l'institutrice devait prendre la décision morale de la société entière ? Comment mesurer sa désespérance ? Sinon avec ce souvenir précis : avoir désiré être la fille de cuisine qui poussait le chariot au réfectoire et distribuait les plats sur chacune des tables.
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Comment sommes-nous présents dans l'existence des autres, leur mémoire, leurs façons d'être, leurs actes même ? Disproportion inouïe entre l'influence sur ma vie de deux nuits avec cet homme et le néant de ma présence dans la sienne.
Je ne l'envie pas, c'est moi qui écris.
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Le 20 juillet 1958, Violette Leduc rencontre René Gallet, trente-cinq ans, coffreur dans le bâtiment : « C'était mon premier orgasme à cinquante ans, celui qui me ramenait irrésistiblement parmi les hommes et les femmes qui jouissent l'un de l'autre », écrit-elle dans La chasse à l'amour. En septembre, elle emmène René à Honfleur et à Étretat. Le 21 octobre, elle écrit à Simone de Beauvoir « René Gallet n'a pas écrit, il n'est pas venu, ce qui m'avait été donné m'a été repris tout de suite. Je désire mourir ». Elle s'enfonce de plus en plus dans la douleur. Toujours à Simone de Beauvoir, en décembre « C'est lui que je souhaite et je souhaite l'impossible » et « je vais abandonner la littérature ». La relation se délite, jusqu'à sa fin totale au printemps 1959.

Lire ces choses me bouleverse. Comme si la fille de dix-huit ans, qui remontait le boulevard de l'Yser dans le hurlement de la foire Saint-Romain à l'automne 58, seule et désespérée, l'était moins – presque sauvée même – parce que ces femmes – dont elle ignorait alors jusqu'au nom – étaient plongées au même moment dans la déréliction. Étrange douceur de la consolation rétrospective d'un imaginaire qui vient réconforter la mémoire, briser la singularité et la solitude de ce qu'on a vécu par la ressemblance, plus ou moins juste, avec ce que d'autres ont vécu au même moment.
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Plus je fixe la fille de la photo, plus il me semble que c'est elle qui me regarde. Est-ce qu'elle est moi, cette fille ? Suis-je elle ? Pour que je sois elle, il faudrait que
je sois capable de résoudre un problème de physique et une équation du second degré
je lise le roman complet inséré dans les pages des Bonnes soirées toutes les semaines
je rêve d'aller enfin en « sur-pat »
je sois pour le maintien de l'Algérie française
je sente les yeux gris de ma mère me suivre partout
je n'aie lu ni Beauvoir ni Proust ni Virginia Woolf ni etc.
je m'appelle Annie Duchesne.
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Elle est perdue, une fille de chiffon. Tout lui est égal. Elle se laisse emmener avec la docilité de qui ne sent plus rien par le petit groupe excité.
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Durant plusieurs mois, nous ferons ménage à trois, la mort, A., et moi..
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Je me rends compte que j'attends la même chose de l'écriture. Je voudrais que les mots soient comme des tâches auxquelles on ne parvient pas à s'arracher.
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Je ne sais plus s’il lui vient déjà à la pensée que c’est « une nuit d’amour », sa première.
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Explorer le gouffre entre l'effarante réalité de ce qui arrive, au moment où ça arrive et l'étrange irréalité que revêt, des années après, ce qui est arrivé.
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J'ai commencé à faire de moi-même un être littéraire, quelqu'un qui vit les choses comme si elles devaient être écrites un jour.
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Comment faire pour retrouver l'imaginaire de l'acte sexuel tel qu'il flotte dans ce moi au seuil de la colonie ? Comment ressusciter cette ignorance absolue et cette attente de ce qui est alors tout l'inconnu et le merveilleux de l'existence - le grand secret chuchoté depuis l'enfance mais qui n'est alors ni décrit ni montré nulle part ? Cet acte mystérieux qui introduit au banquet de la vie, à l'essentiel - mon Dieu, ne pas mourir avant - et sur lequel pèsent l'interdit et l'effroi des conséquences en ces années Ogino, les pires en ce qu'elles font miroiter la tentation de huit jours de "liberté" par mois juste avant les règles.
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De revendiquer ce moi impavide dont j'ai pourtant eu, ensuite, la hantise qu'il reprenne la direction de mon existence et me conduise à ma perte, sans que je puisse définir celle-ci.
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Faire absolument quelque chose et le faire tout de suite, sans pouvoir supporter le moindre délai.Cette loi de l'urgence qui caractérise les états de folie et de souffrance, je l'éprouvais constamment. (...) Comme si cette vérité pouvait cesser d'en être une au fur et à mesure que les jours passaient.
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On n’a pas le sentiment de voler face à une machine.
(p. 23)
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Toujours bien aimé que j'aie des copines à condition de "rester sous ses yeux". J'y pensais en la voyant nous coller. Voulait me mélanger aux autres petites filles au jardin public rue Césarine, joue donc avec elles, va leur dire bonjour, puisque tu vas à l'école avec, pas une raison, atroce, il fallait serrer la main d'une gamine alors qu'on se dit jamais bonjour étant gosses, on se regarde, ça suffit bien, t'es là moi aussi, point. Elle m'obligeait, je serais rentrée sous terre de honte. Et Alberte. En nous voyant toutes les deux, elle disait, si c'était un garçon et une fille ça ferait un mariage. Elle n'a jamais dû penser aux vilaines choses, la pauvre femme, c'est vrai qu'on se taisait devant elle, gênées comme des fiancés, attendant qu'elle se sente de trop et qu'elle s'attelle à son repassage. On s'est éloignées sans hâte, pour ne pas donner de soupçons, avec Gabrielle, dans le jardin, près des groseilliers et on s'est installées sur des serviettes de bain. Toutes les saletés qu'on se chuchotait, Alberte et moi, on nous aurait mises en maison de correction sur le coup, ne rien faire que votre maman ne puisse le voir, disait la maîtresse du cours élémentaire.
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