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Citations de Anton Holban (161)


L'arbre est de plus en plus dégarni : sa transformation dévoile jour après jour le temps qui passe. Jusqu'à le trouver, comme en ce moment, nu, les doigts écartés, effrayé, dirigé vers le ciel.

Glorieuse journée à Cernica.
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Qu’on dépose près de ma tombe un phonographe, qui chante sans cesse, pendant que la lune évolue sur le ciel étoilé. Des chansons joyeuses et d’autres tristes, d’autres dynamiques et d’autres encore à peine audibles. Les sons se rassembleraient autour de moi de tous les recoins du monde et formeraient ensemble un linceul au flottement éternel, à l’instar de la mer,

dont je me suis jadis senti si proche. Bach formerait les vagues noires, fortes, au rythme constant et aux résonances profondes. Beethoven, les frémissements et les cataclysmes. Mozart, l’eau calme, qui clapote délicatement, espiègle et en même temps mélancolique sous les étincelles du soleil. Wagner, les tourmentes. Chopin, le bruit de la pelle qui charge des rayons de lune et Debussy, les délicates et capricieuses valeurs, parfois roses, parfois argentées, qui glissent vers les rivages et dans lesquelles les nymphes trempent leurs doigts de velours. Le phonographe et son diaphragme50 — sa tête au long cou — palpiteraient, comme un cygne bercé par les eaux.
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Elle fit un signe du visage : elle ferma les yeux à moitié, entrouvrit déjà légèrement ses lèvres, puis doucement, transparent et pourtant visible, flottant dans l’air et tombant sur mes yeux, détacha un sourire. Il comprenait presque tous les sens : tragique, mais plein d’espoir, indulgent et révolté, protestataire et résigné tout à la fois. Je l’ai senti me caresser.

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Grand-père était grand et droit , comme une bougie , avec une barbe blanche de patriarche et sur son front la vieillesse n'avait pas pu creuser la moindre ride . Telle était sa constitution physique , tel fut son caractère , à l'instar des sapins devant la maison .
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Et le concerto pour piano et orchestre de Brahms , qui chante sur la mer alors que l'embarcation se balance à peine .
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Une fois qu’elle en a fini avec les journaux, Grand-mère passe aux romans, et, tandis que nous, les autres générations, nous passons notre temps si souvent de manière ridicule, avec des futilités, elle reste immobile près de la fenêtre à tourner les pages du livre avec la plus grande attention.

(p.55)
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Vous souvenez-vous d’un jeune Roumain dont vous ne reteniez pas le nom et qui vous tenait toujours compagnie ? Pour l’avoir vu des centaines de fois, n’avez-vous pas remarqué son absence ? Il ne vous reste vraiment plus de temps pour la moindre pensée en dehors de la musique ? Ou bien peut-être vous êtes-vous dit en hâte entre deux mélodies : « il est certainement mort ».
(p. 95)
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Humble oiseau, Boris ne connaît pas le chaos dont nous avons surgi, pas plus que le chaos qui nous attend. Il ignore tout de la mort qui rôde et qui transforme les êtres vivants en fantômes ; de la succession des petits et des grands, qui aspirent à prendre la place les uns des autres. Alors que toi, l’homme, tu sais tout cela. Sous tes propres yeux disparaît l’être qui t’est le plus cher au monde, comme s’il n’avait jamais existé. Dans le miroir, tu constates tous les jours la transformation et le dépérissement.
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Il y a une différence entre aimer la musique et la comprendre, comme entre construire un vers et le savourer (p. 89)
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Châteaux sur le sable

On dirait que les hommes ont cessé toute pensée, qu'ils n'éprouvent que des sensations.
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Je détiens plusieurs centaines de disques de la meilleure qualité, rassemblés avec d’infinis efforts, et il n’y en a pas un seul qui n’ait connu ses propres péripéties et dont je ne sache l’historique tout entier, tel un aristocrate dont j’aurais minutieusement découvert toutes les branches de l’arbre généalogique.
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- Je voudrais qu'on abatte ce pommier.
Je me révolte :
- Pourquoi faire abattre un si bel arbre ?
- Mais il ne donne plus aucun fruit !
- Quelle importance ? C'est un bijou du jardin.
- Et puis c'est insupportable, toutes ces feuilles qu'il laisse tomber. je ne puis les souffrir. Je les fais balayer le soir et le matin j'en trouve tout autant par terre.
Et moi qui avais remarqué aujourd'hui la première feuille jaune se gondoler gracieusement dans l'air et qui croyais que c'était la première cet été !

Grand-mère se prépare à mourir.
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En hiver, le monastère semblait irréel : un épais manteau de neige recouvrait tout d’un blanc étincelant, toile de fond sur laquelle se glissait parfois un noir fantôme qui claquait des savates.
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De retour au pays, comme lot de consolation : les disques de phonographe. Il n’y a peut-être dans toute la littérature qu’une seule description plus ample (pour une brève, Huxley) de la félicité que prodiguent ces disques : Zauberberg de Thomas Mann. Fins et identiques, ces disques contiennent pourtant les concerts les plus variés et les plus parfaits. Comment décrire une multitude de gestes insignifiants et néanmoins miraculeux pour celui qui en tombe amoureux : quelle dextérité dans leur maniement pour toi, qui dans la vie civile est si souvent maladroit, afin de ne pas les importuner, ne serait-ce qu’en les touchant ; le titre au milieu, avec tous ses détails ; l’estimation prolongée des moindres qualités et défauts et la satisfaction ou la désolation que l’on tire de cette recherche ; les controverses sur les aiguilles du phonographe (combien de fois n’as-tu pas craint en jetant une aiguille de pouvoir l’utiliser encore une fois !) ; cette façon d’épier en permanence les traits du visage du voisin, qui lui aussi écoute, et la vanité que son plaisir t’inspire.
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Qu’il est étrange de regarder une bouche figée par la mort en sachant qu’elle fut jadis chaude et qu’elle embrassait…

(p.44)
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Antonia fonctionnait comme un chien qui brillait par ses grâces et son intelligence, son regard humain, avec lequel on s’entendait parfaitement d’égal à égal à l’intérieur, mais qui, une fois dans la rue, redevient un animal, aboie et se bagarre avec tous ses semblables — imbéciles et sales.
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(Glorieuse journée à Cernica)
Tandis que j’explique Dieu sait quelle règle qui ne m’intéresse guère ou que je lis un passage que je répète depuis tant d’années, je fige mon regard sur la carte accrochée au mur… La Sicile, chaude, avec ses orangers… La Russie tout entière, où dans chaque village, une balalaïka vibre, bouleversant le ciel… Paris, le long de la Seine où j’ai promené tant de pensées et puis Erzurum… C’est comment Erzurum… Et l’Inde, pourquoi Eliade y est-il retourné ?…
— Qui peut me dire l’imparfait du verbe tenir ?
Devant moi, des yeux pleins de mystère. Et parfois, il me semble apercevoir des profondeurs qui m’effrayent ! Pauvres de vous !
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Simion a combattu pendant la guerre sur le front russe et, un beau jour, au détour d’une de nos conversations imbéciles, qui nous permettent de tuer le temps, il nous a dit qu’il était arrivé jusqu’à Irkoutsk. Ces paroles ont ravivé toute la nostalgie de mon âme voyageuse et la révolte de vivre une époque miséreuse qui nous rattache à la terre comme un arbre et j’ai donc demandé des détails sur la ville auréolée du prestige de l’éloignement. Il ne m’a cependant rien dit d’autre que : « Là-bas, le pain est encore plus cher qu’ici ! »
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Et lorsque Grand-mère a intimé à la domestique l’ordre de la rallumer :
— Laisse cela, j’en aurai assez, du noir, dans la tombe.
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Ela a le teint cuivré et les yeux comme des eaux profondes. Son corps tout juste épanoui ; une ligne sinueuse en découle et ses seins ronds lui soulèvent harmonieusement le chemisier telle une coupe qui renferme tous les instincts en attente de délivrance. La chair d’Ela désire presque la main qui va la pétrir. Et maintenant, au contact de l’histoire d’amour de Racine, ses nerfs l’enserrent comme dans un filet, la bercent et l’étourdissent…
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