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Citations de Arlette Cousture (148)


La vie fait de tous des comédiens.
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« Jerzy, redoutant un refus, soutint d'un regard à la fois suppliant et craintif celui d'Anna. Il lui avait tendu un piège, sachant pertinemment qu'elle refuserait la Pologne. Mais il s'était dit qu'il devait commencer à la préparer à ce départ qui se ferait certainement avant la fin de la décennie. Anna marchait d'un bon pas et il s'efforçait de la suivre. Elle n'était dupe de rien, il en était convaincu. »
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Écoute-moi bien, Ovila Pronovost. Je jure sur la tête de Rose pis sur celle de Marie-Ange que ma fille va lire, écrire pis compter. Fie-toi à moi. Ça prendra le temps que ça prendra, mais Rose va être comme les autres. Rose va grandir en beauté pis un jour elle va se marier! As-tu compris ça, Ovila Pronovost?
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Caleb revint de l’étable. La vache avait mis bas, mais il avait dû passer plusieurs heures à l’aider. Une taure vêlait habituellement assez rapidement. Grazillia, elle, avait semblé décider qu’elle prendrait tout son temps, au grand dam de Caleb qui, malgré la chaleur qui régnait dans le bâtiment, avait commencé à sentir l’humidité lui ronger les os.Il referma rapidement la porte de la cuisine d’été de crainte que le vent ne s’y engouffre, enleva ses caoutchoucs et se contenta de délacer ses mitons. Il soupira d’aise. Il entra dans la cuisine principale sans dire un mot, se dirigea vers la pompe, fit couler l’eau dans le bassin de métal et se savonna les mains. Célina lui jeta un coup d’œil inquiet, prête à répondre à son regard dès qu’il remarquerait sa présence. Son mari avait l’air préoccupé. Elle ressentait toujours un pincement au cœur lorsqu’il affichait cet air annonciateur d’une saute d’humeur, ou d’une déception, ou d’un grand trouble. Ce soir, elle ne voyait pas comment le vêlage de Grazillia avait pu le mettre dans un pareil état.

Caleb s’essuya méthodiquement les mains comme il le faisait toujours avant de se mettre à table, passant la serviette entre chaque doigt, frottant deux fois chacune des paumes et chacun des dessus de main. Émilie, l’aînée des enfants, fit comprendre à ses frères et sœurs qu’ils avaient avantage à baisser le ton. Elle sentait que c’était une de ces soirées où chacun devait être le plus discret possible.
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La guerre c'est dormir d'un œil le jour et marcher la nuit,
la guerre c'est avoir peur sans arrêts
la guerre c'est mourir par amour en voulant cueillir des fraises pour sa femme
la guerre c'est avoir tellement mal qu'on en perd la notion du jour et de le nuit,
du temps et de la vie.
La guerre c'est vouloir mourir parce qu'on se sent coupable d'avoir survécu.
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Les historiens ne sont jamais là où se passe l’action. Ils arrivent un siècle plus tard.
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La guerre lui avait bouché la vue sur le présent, mais avait laissé une petite brèche ouverte sur l’avenir.
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Il aimait bien le chant des ponts de bois. Les sabots de sa jument résonnaient comme si dans chacun il y avait eu un vallon permettant un écho.
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Un enfant, c’était la seule véritable garantie d’éternité.
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Notre vie tournait autour de la maison paternelle puis de l’église. On se posait pas de questions. C’était pas nécessaire. Le curé nous donnait toutes les réponses.

(p. 95-6)
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– Bonjour, garde. Vous m’avez l’air bien p’tite, aujourd’hui, pour être toute seule comme ça dans le bois ! J’espère que vous avez quelque chose de plus chaud à vous mettre parce que le chauffage, là-dedans, c’est pas un chauffage central.

Blanche montra son manteau et M. Simard approuva. Émilien monta les bagages et aida finalement sa sœur à pénétrer dans l’habitacle.

– Aussitôt que toute la neige va être fondue, tu vas me voir arriver. C’est une colonie, Blanche. J’espère que tu t’attends pas à trouver le confort de Montréal.

Blanche répondit en souriant que si elle avait espéré autant de confort, elle serait restée en ville. M. Simard, visiblement satisfait de sa réponse, ferma la porte et Blanche essaya de distinguer la route qu’ils prenaient à travers une vitre givrée que, malgré les rayons du soleil, l’essuie-glace ne parvenait pas à éclaircir.

Blanche regarda l’hiver printanier et essaya de ne pas s’étonner. Les sept années qu’elle avait vécues à Montréal lui avaient tellement caché les saisons qu’elle devait renouer avec celles-ci. Ils passèrent à travers des sentiers presque inexistants. Blanche aperçut une maison minuscule, faite de bois équarri à la hache, dont la cheminée dégageait une fumée qui noircissait, avant qu’elle ne touche le sol, la neige qui l’affrontait, soulevée par des tourbillons de vent.

– Un relais de bûcherons ?

– Non. Une maison de colons. Dans celle-là, je pense qu’ils ont huit ou neuf enfants.

Blanche ravala péniblement sa salive, ne quittant pas la petite maison des yeux. Elle venait de comprendre l’énormité de la responsabilité qu’elle avait acceptée.
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- Et alors, Émilie, est-ce que les enfants ont attrapé des chardonnerets ?
La distraction était bienvenue. Elle pensa rapidement au lendemain de l'arrivée des cages. A l’excitation des enfants qui étaient partis seuls pour le Bourdais. A leur retour. Au fait qu'elle avait dû sévir parce que dans chacune des cages il y avait plus d'un oiseau. Chaque enfant avait libéré un, deux ou trois oiseaux, pour n'en garder qu'un. A la scène que Blanche avait faite.
"Oui, trop. Ils ont dû en relâcher. Mais Blanche , elle, a jamais voulu choisir. Elle a pleuré en regardant voler ceux que le hasard avait désignés et quand son tour est arrivé, elle a pas voulu choisir.
- Choisir quoi ?
- L'oiseau qu'elle libérerait. Blanche pleurait comme une vraie Madeleine, en me disant qu'elle avait pas le droit de choisir. Que peut-être que l'oiseau qu'elle garderait était celui qui pouvait mourir d'ennui. Que peut-être que l'oiseau qu'elle libérerait était celui qui aurait le plus besoin d'elle pour le nourrir. Faut vous dire que Blanche avait pas voulu attraper plus de deux oiseaux. Une "paire d'amis", qu'elle disait."
Émilie termina son histoire en riant mais, le curé Grenier ne riant pas, elle cessa, consciente qu'elle ricanait nerveusement. Ce qu'elle venait de raconter n’était pas tellement drôle. Elle venait de lui dévoiler un grand drame, un grand chagrin d'enfant.
"Et qu'est-ce qu'elle a fait, votre Blanche ?
- A sa tête, monsieur le curé. Étant donné qu'elle pouvait pas garder les deux, elle en a pas gardé du tout."
Le curé Grenier hocha la tête, tristement pensa Émilie. Il la regarda puis lui sourit d'un sourire faible.
"Elle est bien sage, votre Blanche. Elle vient de nous donner une grande leçon...."
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Un garçon d’une douzaine d’années sortit sur le marchepied du wagon qui allait être raccordé, une enveloppe à la main. Il cria à la ronde qu’il rapportait un télégramme pour un certain M. Gratton. Élise chercha l’homme en question et reconnut celui dont la femme accouchait qui se frayait un chemin pour prendre l’enveloppe, puis elle vit le jeune se précipiter à sa rencontre, trébucher et tomber sur la voie, à quelques pieds de la mâchoire d’attelage. Clovis n’hésita pas une seconde: il s’avança, agrippa le jeune par un bras et eut tout juste le temps de le lancer dans les bras de M. Gratton, qui tomba à la renverse. Les mâchoires d’attelage se refermèrent en silence et tous les voyageurs se figèrent, horrifiés. On s’était attendu à un claquement métallique, pas à ce son étouffé. Élise, elle, avait entendu son père faire «| hoah|!| » et elle vit qu’il s’était empalé sur les mâchoires. Pendant quelques secondes, seul M. Gratton parla, prenant tout le monde à témoin du geste héroïque de Clovis.

— Il a sauvé la vie du petit gars! Vous avez vu? S’il l’avait pas attrapé, c’est le petit gars qui serait là sur la voie à vomir du sang.

Puis on entendit des cris. On appelait le contrôleur, le conducteur, un médecin, les porteurs. Les femmes appelaient les hommes, qui criaient le nom de leur femme. Elles pour qu’ils aident, eux pour qu’elles ne regardent pas.

Élise n’entendait que le râle de son père. Les joues inondées de larmes, elle s’agenouilla à côté de lui, hypnotisée par ses yeux grands ouverts.

— Qu’est-ce que t’as fait, papa?

Il eut un air contrit et grimaça, plus de regret que de douleur.

— Je pense que je viens de me tuer, Élise, parvint-il à dire péniblement.

Wilson, le fils de M. Philippe, s’approcha d’eux et regarda les dégâts causés par les mâchoires. Il hocha la tête, tant d’incrédulité que d’impuissance. Il se pencha ensuite pour parler doucement à Clovis, qui n’attendait qu’une confirmation de son propre diagnostic.

— Si seulement vous pouviez vous évanouir, monsieur Lauzé, avant que les hommes rouvrent les mâchoires...

— Je sais... C’est ce qui va m’achever...

Imitant Élise, le jeune homme lui baisa les mains.

— Va-t’en, Élise. Toi, Wilson, reste là, au cas où...

— Au cas où quoi, papa...?

— Au cas où je mettrais trop de temps à mourir. Au cas où ma mort serait pas digne.
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Élise s’endormit heureusement sans difficulté, après avoir suivi son rituel habituel. Elle allait dans la chambre jaune pour écouter la boîte musicale du mobile. Elle se plantait ensuite devant la fenêtre et décrivait tout ce qu’elle y voyait, après quoi elle retournait dans sa chambre et s’allongeait. Elle racontait alors sa journée au bébé, puis lui parlait du lendemain.

– Demain, le Premier ministre Trudeau se marie à Vancouver. Dommage ! À Montréal, il y aurait eu de la belle neige blanche sur les épaules de la mariée… Ta tante Micheline se dit sûrement que c’est tant pis pour lui. Ta tante Micheline le porte pas dans son cœur, parce que…

Élise était profondément endormie lorsqu’un heurtoir lui frappa le ventre. Elle s’éveilla en sursaut et se frotta autour du nombril. Encore une contraction, mais beaucoup plus forte. Elle alluma et regarda l’heure. Il restait beaucoup de nuit avant que le jour ne paraisse derrière le rideau. Inconfortable, elle se retourna.

Le heurtoir frappa de nouveau. Élise ouvrit grands les yeux et regarda son réveil. Cinq minutes seulement s’étaient écoulées. Si les coups n’avaient pas été aussi désagréables, elle aurait ri, mais elle préféra jouer à saute-mouton avec les contractions. Tantôt elles se produisaient aux cinq minutes, ou aux sept minutes, tantôt elles disparaissaient, ce qui la rassurait. Côme n’était pas encore arrivé. Elle regarda sa montre et vit qu’il était trois heures.

Il était impossible que ce fût déjà l’accouchement, mais la persistance des contractions la rendait perplexe. Elle eut envie de réveiller sa mère, mais elle n’en fit rien. Le silence de la nuit l’angoissa. Elle se leva et tira le rideau. Le ciel était si opaque que la lune avait disparu ainsi que les lumières des lampadaires. Côme ! Elle souhaita qu’il fût à l’abri et non enlisé dans l’épaisse neige qui ne cessait de tomber. Une crampe en plein ventre lui coupa soudain le souffle, suivi d’une seconde, aussi violent. Puis ce qu’elle redoutait se produisit. Elle perdit les eaux, là, sur le plancher, devant la fenêtre.

Marcel arriva à reculons au volant du tracteur, la souffleuse étant installée à l’arrière. Blanche émit un gémissement d’incrédulité.

– C’est pas vrai, Marcel… On peut pas se rendre à Drummondville à reculons… Il y a pas moyen d’installer le chasse-neige devant ?

– Non. Je suis d’accord avec vous. Si on n’a pas de motoneige…

– Misère !

La tempête était diabolique. À toutes les minutes ou presque, on annonçait la quantité de neige tombée. Excités, les animateurs de radio rigolaient, et les météorologues appelés en renfort parlaient de blizzard.

– Il faut voir. C’est peut-être une tempête aussi importante que celle du quatre mars soixante-six à Winnipeg. Et peut-être même plus. En tout cas, pour une bordée, c’est toute une bordée !

Blanche réussit à joindre l’hôpital, où on était dépassé.
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Il avait déjà entendu raconter de ces histoires où un homme devait devenir Dieu et décider de la mort d'une personne. Il savait que l’Église demandait de sauver l'enfant. Il pleura, dos tourné.
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Émilie ne ferma qu'un œil durant sa première nuit. Elle se tourna et se retourna, se demandant si un jour elle s'habituerait aux bruits incessants de cette ville. Elle se sentit bien loin de son Bourdais, là où seuls le beuglement des vaches, le hennissement occasionnel d'un cheval, le cri des oiseaux nocturnes, le chant des criquets et le coassement des grenouilles se permettaient de troubler le silence de la nuit. Elle pensa que cette symphonie de la nature avait toujours bercé ses rêves. Ce n'était pas comme ce grondement lointain des usines de pâtes et papier, ces éclats de voix ponctués de cris qui entraient par sa fenêtre, ce bruit des machines qui roulaient sans arrêt, ces portes qu'elle entendait claquer si fort qu'à deux reprises elle avait eu l'impression qu'il s'était agi de la porte de sa chambre, ce gargouillis de tuyauterie qui envahissait la maison chaque fois que les voisins du dessus ouvraient un robinet dans la cuisine ou tiraient la chasse de la toilette.
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La guerre crée toujours des héros. Il y a ceux dont on parle dans les journaux et les livres et qui sont immortalisés par des plaques vissées aux édifices ou par des noms de rues, et il y a les autres, les petits, que personne ne connaît, mais qui, à eux seuls, donnent un sens au sacrifice de tant de vies.
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À son grand étonnement, Célina lui répondit qu’il n’en était pas question. Qu’Émilie avait besoin de l’école comme lui, Caleb, avait besoin de regarder le soleil et d’écouter la pluie. Caleb essaya de lui faire comprendre qu’il y avait toute une différence entre la terre et les livres. Célina demeura intraitable. Émilie devait continuer de fréquenter l’école. Émilie, il le savait, voulait être institutrice.
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Il eut un pincement au cœur. Émilie n’avait-elle pas essayé de lui démontrer que lui, Caleb, ne traitait pas tous ses enfants de la même façon? Il avait été convaincu qu’elle exagérait jusqu’à ce qu’il se mette à table. Le souper, froid, lui avait semblé infect. En voyant ses filles manger sans s’en formaliser, il avait compris qu’Émilie n’avait peut-être pas exagéré. Ces pensées l’agaçaient. Caleb n’aimait pas remettre en question des choses établies depuis toujours. Il aimait encore moins se remettre en question. Comment se faisait-il qu’aucune de ses sœurs à lui ne se fût jamais plainte? Émilie lisait trop. Elle était devenue trop savante. Elle prenait trop d’idées dans les livres. Malgré ses treize ans, elle était la plus grande de tous les élèves de son école. Elle ne cessait pas de pousser. Émilie lisait trop. Mais son esprit, pensa-t-il, n’était pas assez grand pour saisir toutes les nuances de la vie. Il comprit qu’il n’avait qu’une chose à faire: retirer Émilie de l’école. L’obliger à apprendre à être une bonne femme de maison. Une femme heureuse de satisfaire sa famille. Il fallait qu’elle soit comme sa mère. De toute façon, que lui donneraient toutes ses connaissances quand, dans cinq ou six ans, elle serait mariée, établie? Les livres ne lui apprendraient jamais le langage de la terre.
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J’ai aimé cet homme à la folie, mais à y repenser, je ne crois pas que nos folies se soient fréquemment rencontrées. Je dirais qu’elles se sont à peine croisées. Je m’interroge maintenant sur les misons qu’il avait de me demander en mariage si ce n’est pour m’enlever à quelque soupirant.
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