Ayant profondément goûté
aux étamines de pivoine
l'abeille s'envole à regret
Herbes du souvenir
autour du mausolée
de quelles souffrances vous souvenez-vous ?
Rosée goutte à goutte --
Pourrais-je y laver
les poussières de ce monde ?
Poètes émus par les cris des singes,
entendez-vous l'enfant abandonné
dans le vent d'automne ?
Que les couvertures superposées sont lourdes !
Il doit neiger ce soir
dans un lointain pays de montagne
Pour rêver de mochi
j'attache à mon oreiller d'herbes
des fougères pliées
L'automne est venu --
sur l'oreiller
le vent me salue
Oh tous ces iris !
Et pareil à s'y méprendre
Leur reflet dans l'eau.
Un chien boit dans la mare.
Les cloches tintent dans le soir.
L’image des fleurs dans l’eau.
Chose curieuse,
je vois un gotokou de pierre :
La rosée d’une glycine tombe, goutte à goutte
Un chien boit dans la mare.
Les cloches tintent dans le soir.
L’image des fleurs dans l’eau.
Chose curieuse,
je vois un gotokou de pierre :
La rosée d’une glycine tombe, goutte à goutte
Sans cesse, admirant la neige,
Je marcherai longtemps, longtemps,
jusqu’à perdre haleine
Dans ces beaux paysages de montagnes, de plaines, de mer et de rivages je contemple l’œuvre de la nature créatrice. Je suis les traces d'hommes libérés de toutes attaches, en quête de sentiments poétiques qu'ils éprouvent. Plus je suis loin de mon nid, moins j'ai besoin d'objet. Comme j'ai les mains vides, sur la route je n'ai rien à craindre. A l'aise, je marche à pied plutôt que d'emprunter un palanquin. Un repas frugal le soir est plus savoureux qu'un repas de viande. Aucune étape n'est obligée, le départ du matin sans heure fixée. Chaque jour je ne souhaite que deux choses : un bon gîte pour le soir et des sandales en paille convenant à mes pieds. Ce sont là des demandes modestes. D'heure en heure mon humeur change, de jour en jour mon sentiment se renouvelle. Si par hasard, je rencontre un homme au goût raffiné, ma joie est sans limite. D'un individu archaïque et borné que d'ordinaire je détesterais et fuirais, en des régions éloignées je fais un compagnon de route avec qui deviser. Si parmi les graterons je découvre une hutte, c'est comme si je ramassais du jade au milieu de débris et trouvais de l'or au milieu de la boue. Les choses dont je prends note j'aime les rapporter à autrui. C'est là un des agréments du voyage.
Le soleil déjà était proche du méridien. Louant une barque, je voguai vers Matsushima. Après une traversée d'un peu plus de deux lieues, j'accostai la grève d'Ojima.
Or, encore que ce soit un lieu commun, Matsushima est bien le plus beau site du Japon et n'a rien à envier à Dôtei ou Seiko. La mer le pénètre par le sud-est, la baie est profonde de trois lieues, le flux s'y étale comme
dans la baie de Sekkô. Les îles sont innombrables et diverses, il en est de verticales, doigts dressés vers le ciel, d'horizontales qui rampent sur les flots. Certaines sont doubles, d'autres pliées en trois, séparées à gauche, reliées à droite. Il en est qui se portent, il en est qui s'embrassent, comme qui cajole un enfant. Les pins sont d'un vert profond, leur ramure est tordue par le vent du large, leur mouvement naturel paraît dû aux soins du jardinier. Tout ce paysage est d'une beauté distante, comme la physionomie apprêtée d'une belle. Serait-ce là l'ouvrage, aux temps jadis où régnaient les dieux impétueux, d'Ôyama-zumi ? Le génie du Céleste Artisan, quel homme pourrait le rendre par le pinceau, le cerner par la parole?
La grève d'Ojima est une langue de terre qui s'enfonce dans la mer. Vestige de la retraite du Maître de Zen Ungo, il reste notamment la pierre siège de méditation. D'ailleurs, sous le couvert des pins, j'ai aperçu, ci et
là, quelques ermites ; dans leurs chaumières qu'enfument les feux de paille ou de rameaux de pin, ils coulent des jours paisibles ; bien qu'ignorant quelle sorte de gens ils étaient, un peu envieux, j'allai vers eux et c'est alors que la lune se refléta sur les flots, renouvelant le spectacle diurne. Je revins au fond de la baie et gagnai mon gîte : c'était une maison à étage à fenêtres ouvrantes ; dormir en voyage au sein des vents et des nuages, quelle sensation indiciblement merveilleuse !
Ah Matsushima
à la grue emprunte sa robe
ô coucou
Sora
Estimant que des bagages trop nombreux me seraient une gêne pour
la route, je me suis débarrassé de tout, mais je porte sur mon dos, emballés
dans une toile, une robe de papier pour la nuit, une sorte de cape, une écritoire,
des pinceaux, du papier, des médicaments, une boîte à provisions, si bien
qu'avec mes jambes débiles et mon corps sans forces, je me sens comme tiré
en arrière, et je n'avance point. Des peines sans nombre m'accablent.
Rompu de fatigue
à l'heure de chercher asile
fleurs de glycine
Neige étincelante poursuivons notre chemin trébuchant jusqu'à l'ultime chute