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3.9/5 (sur 101 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Carine Fernandez est née en 1955 à Givors, Rhône. Elle vit dans le Rhône

Née dans la région lyonnaise d'un père républicain espagnol, réfugié politique. Épouse à seize ans un étudiant saoudien et s'enfuit avec lui au Moyen-Orient : Liban, Égypte, Arabie saoudite. Passe son baccalauréat au Caire en candidate libre et poursuit des études de Lettres à distance avec l'Université Lyon II jusqu'au doctorat : une thèse sur le "Voyage en Orient" de Nerval soutenue en 1983.
Après une vingtaine d'années en Orient et trois aux États-Unis, elle rentre en France et commence à publier des textes : critique universitaire et textes littéraires. Auteur de nouvelles, de chroniques et de poèmes parus sous son nom marital, Carine Alamoudi, ou sous le pseudonyme de Catarina Sol, elle collabore aux revues "La Main de Singe" et "La Polygraphe" des éditions Comp'Act. A publié également un recueil de poèmes "Les Idiomes de l'Ouest" en anthologie aux éditions Tarabuste. Avec son premier roman, "La Servante abyssine", paru en 2003 chez Actes Sud, peinture sans concessions de la société saoudienne, elle consomme la rupture définitive avec ce pays et une partie de sa vie. Elle est actuellement enseignante.
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Source : EVENE et http://auteurs.arald.org
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Bibliographie de Carine Fernandez   (8)Voir plus

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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Justement, répondit Mounir, le voile intégral, c’est là le coup de génie. Les femmes peuvent entrer chez les khawajas célibataires sans être reconnues, les adultères vont tranquillement à leur rendez‑vous sans crainte du mari. Quant aux « professionnelles », pour elles, c’est carrément Las Vegas ! Elles n’ont jamais fait autant de chiffre d’affaires, depuis qu’elles montent incognito dans les appartements du centre‑ville transformés en bordel. En fait, tout le pays est devenu un immense boxon ! Chacun s’arrange avec Dieu ou avec sa conscience. On ment à tous et à soi‑même.
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Tous dorment, sauf Zinesh, qui n'a jamais eu l'esprit si vibrant. Quel âge as-tu Zinesh ? Trente ans, pas plus, l'âge de ton arrivée au royaume des morts. C'est la nuit du souvenir. Tu te souviens de la princesse Kalthoum et des cuisines et des coups de fouet. Tu te souviens de l'homme ivre qui cherchait son amour. A lui tu avais donné quelque chose. Quoi ? Quoi ? Ah ! tu cherches éperdument. Quelque chose d'impossible à reprendre, quelque chose qui lui conféra tout pouvoir sur toi, comme le soleil aux tournesols.
Il faut qu'en une nuit tu cherches et te souviennes. Tu sors d'un sommeil de vingt ans. Comment dormir ? Quand tu sais que tu pars avec lui, il est là couché dans sa boîte de planches en dessous de l'allée, que voilà qu'il t'emmène dans son pays. Qu'il t'emmène, que tu l'emmènes, tu ne sais plus. Horacio ! Horacio ! Le rose écume à l'est, coupé d'un trait sanguinolent, le monde ouvre un œil, l'œil du serpent python, l'œil du hublot qui s'irradie le temps d'un virage. Un jour de plus s'est levé en Orient tandis que l'appareil pique droit sur Rome. Dans la nuit.
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Il faut dire qu’un numéro comme Turki on préférait ne pas trop l’exhiber en dehors du royaume*. Mais cette année‑là, il avait dû aller aux États‑Unis pour rendre visite à son fils, hospitalisé pour une opération de la hanche. Il était resté un mois à Manhattan qui en avait vu d’autres, des maboules et des déjantés de toutes sortes, mais de l’acabit de Turki, pas sûr ! Il s’était mis en tête de remonter la Fifth Avenue, le derrière entortillé dans son pagne à carreaux yéménite, parce qu’il avait vu un reportage sur les soldats écossais portant le kilt et qu’il se considérait, lui, Turki Samara, rien de moins que comme un soldat arabe missionné en territoire ennemi. Quand, de retour chez lui, on lui demanda ce qui l’avait le plus surpris à l’étranger, il déclara que c’était un pays de débauche où il n’avait pas rencontré une seule femme qui ne se livrât à la prostitution, en d’autres termes une femme non voilée.
*L'Arabie Saoudite
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Je suis amoureux de Madiah, de l'être profond de Madiah, de l'âme de Madiah et cette âme n'a pas de corps. A peine un visage que je reconstitue, que je redessine, trait à trait dans l'atelier de mon imagination. Ses deux fossettes sémillantes dès qu'elle sourit et que ses yeux pailletés d'or brillent sous les sourcils arqués. On dirait les couvercles pointus des encensoirs qui lui donnent toujours l'air étonné. Je ne revois que des détails en gros plan, un grain de beauté au milieu de la joue, un lobe d'oreille où s'enroule un frisottis, mais l'ensemble m'échappe. C'est là où la vue d'Omar, le frère de ma bien-aimée, m'est particulièrement utile. Ces deux-là n'ont que deux ans de différence et ils se ressemblaient petits, c'est pourquoi je m'efforce à traduire en version féminine l'adolescent frimeur que je vois chaque jour garer la voiture dans l'allée. Beau comme il est, ses sœurs ne resteront pas sans prétendants. Voilà comment s'établissent les réputations. Qui a vu le frère imagine la sœur. Le visage d'un frère, c'est plus fiable que les éloges menteurs de cent voisines prêtes à tous les parjures pour faire l'article.
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Elle lui dit qu'elle détestait l'Arabie. Elle n'avait pas réalisé qu'elle appartenait à un pays qui avait aboli l'esclavage des Noirs en 1969, mais jamais celui de ses femmes, jusqu'à son retour d'Amérique à l'âge de seize ans. A l'étranger, elle avait vécu comme n'importe quelle lycéenne qui s'habillait court, jouait au tennis, partait en camp de vacances et fréquentaient les garçons…
Brutalement le monde se déroba. Elle eut la sensation qu'on l'enterrait toute vivante, là, avec ses jambes de seize ans habituées aux coups de pédales alertes à travers les pelouses de Washington et qui voulaient galoper, ses cheveux qui voulaient flotter dans l'eau salée de la mer Rouge. Dès le retour à Djeddah on la força à porter l'abbaya et même à se voiler le visage. Ses parents étaient des gens ouverts, conciliants, sa mère s'était vêtue à l'occidentale pendant des années en Amérique, mais l'Arabie, s'efforçaient-ils de lui faire comprendre, n'était plus ce qu'elle était. Tout était bien plus répressif que quand ils étaient partis, seulement cinq ans plus tôt. La révolution iranienne était passée par là et avait fait souffler un vent de puritanisme sur l'Islam. L'Arabie, gardienne des lieux saints, s'était sentie obligée de surenchérir. Encore une fois, les femmes avaient payé ! La liste des prohibitions avait désormais été fixée, codifiée. On savait maintenant ce qu'il était interdit de faire : à peu près tout. L'espace où les femmes avaient le droit de se mouvoir était désormais strictement délimité : zones réservées dans tous les lieux publics, guichets pour femmes, grilles et paravents. Il ne leur restait plus qu'à respirer leur propre haleine humide sous la couche de gaze noire par cinquante degrés à l'ombre.
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Carine Fernandez
Voleurs de nuit


Coulant des tombereaux
Des grappes lourdes d’hommes
Dévoient les cités noires
Le crieur de journaux
Passe frôlant les femmes
Les pince en tapinois
Et s’enfuit dans le soir

Comme ça pue la vie !
Le nez à l’agonie
Respirer quelque part
Un souffle qui efface
Les miasmes des trottoirs
Je vais le nez museur
Le cœur à la surface
Gémir contre les sourds
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Quelles pensées avaient défilé dans la tête du petit fugueur durant ce trajet interminable ? Hussein A Khalidj serait bien incapable de se les remémorer. Est-ce que cet enfant oublié tant d'années au fond de lui-même pourrait refaire surface à nouveau, lui révéler ce qu'il ne sait pas, lui réapprendre un courage, une ferveur que les mille lâchetés de l'âge adulte lui ont fait perdre ?
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Il y a maintenant une semaine que Fathi a rejoint les insurgés, une semaine qu'il navigue dans cet océan de tentes multicolores, qu'il parle, rit, et s'époumone avec les autres. Le premier soir, le couvre-feu a été décrété et il est rentré chez lui pour que sa femme ne s'inquiète pas. Sans écouter les récriminations de Leyla, "Tu es complètement fou de t'associer à ces voyous. Tu oublies que tu n'as plus vingt ans et que tu as charge de famille !", il a pris une couverture et son vieux manteau et déclaré qu'il ne reviendrait qu'avec la "démocratie". Un mot tout neuf qui l'emplit d'espérance. Il y a tant de mots qu'il ne prononçais pas auparavant, comme le mot "dignité" et le mot "liberté". Il a l'impression de naître sur cette place Tahrir. De naître d'une vie multipliée, indistincte, d'exister hors des limites de son corps, de son enveloppe corporelle d'humble tailleur, pour vivre à travers ces milliers d'êtres, hommes et femmes, jeunes et vieux, porteurs de croix et barbus, étudiants et ouvriers. Traversé par le même courant. Plus rien ne compte désormais. Il n'a plus peur, lui que sa Leyla traitait de couard parce qu'il n'osait pas réclamer les factures impayées.
Personne n'a peur. Et encore moins les femmes qui sont montées en première ligne. Quand l'armée a tiré et que des dizaines de manifestants ont été blessés, des visages fracassés, des membres criblés de mitraille, personne n'a reculé. Ils sont tous restés là encore plus serrés, une masse de chair mouillée de sang, de larmes, de sueur. Cette odeur violente d'humanité non lavée qui s'exhale de Tahrir depuis une semaine de siège, Salma l'appelle : "l'odeur de la révolution".
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Le savoir était la vérité et il fallait la chercher sans relâche, c’était un devoir, mais l’art, eh bien, l’art restait toujours à inventer. L’art était la porte ouverte, la liberté de l’homme.
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Mes fils ! La descendance des Bahahmar. J’attendais tellement de mes fils ! Ah ! Mais vois ce que c’est que la vie ! Aucun qui n’ait tremblé ou trahi. Parfois tremblé et trahi en même temps. Et voilà que tu arrives, toi, l’Egyptien, avec ta jeunesse et ton rire à décrocher les lustres. Et tu me regarde en face et tu n’as pas peur. J’aurais aimé te ressembler quand j’avais ton âge. Appelle-moi Talal comme si nous étions frères. Nous le serons dans l’au-delà, pas vrai ? Laisse-moi au moins l’illusion d’être un jeune homme à travers toi, fils de pharaon, même si dans tes veines ne coule pas une seule goutte de mon sang!
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