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Citations de Carlos Drummond de Andrade (62)


POÈME À SEPT FACES (1930)

Quand je suis né, un ange tors
un de ceux qui vivent dans l’ombre
a dit : Tu vas, Carlos ! être gauche dans la vie.

Les maisons épient les hommes
qui courent après les femmes.
L’après-midi serait peut-être bleu
s’il n’y avait tant de désirs.

Le tramway passe bondé de jambes :
jambes blanches noires jaunes.
Pour quoi tant de jambes, mon Dieu, demande mon cœur.
Pourtant mes yeux ne demandent rien.

L’homme derrière sa moustache
est sérieux, simple et fort.
Il ne parle presque pas.
Il a quelques rares amis
l’homme derrière ses lunettes et sa moustache.

Mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné
si tu savais que je n’étais pas Dieu
si tu savais que j’étais faible.

Monde, monde vaste monde,
si je m’appelais Raymonde
ce serait une rime pas une solution.
Monde, monde vaste monde,
plus vaste est mon cœur.

Je ne devrais pas te le dire
mais cette lune
mais ce cognac
nous bouleversent en diable.
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Confidência do Itabirano


Alguns anos vivi em Itabira.
Principalmente nasci em Itabira.
Por isso sou triste, orgulhoso: de ferro.
Noventa por cento de ferro nas calçadas.
Oitenta por cento de ferro nas almas.
E esse alheamento do que na vida é porosidade e comunicação.

A vontade de amar, que me paralisa o trabalho,
vem de Itabira, de suas noites brancas, sem mulheres e sem horizontes.

E o hábito de sofrer, que tanto me diverte,
é doce herança itabirana.

De Itabira trouxe prendas diversas que ora te ofereço:
esta pedra de ferro, futuro aço do Brasil,
este São Benedito do velho santeiro Alfredo Duval;
este couro de anta, estendido no sofá da sala de visitas;
este orgulho, esta cabeça baixa...

Tive ouro, tive gado, tive fazendas.
Hoje sou funcionário público.
Itabira é apenas uma fotografia na parede.
Mas como dói!
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Poema de sete faces


Quando nasci, um anjo torto
desses que vivem na sombra
disse: Vai, Carlos! ser gauche na vida.

As casas espiam os homens
que correm atrás de mulheres.
A tarde talvez fosse azul,
não houvesse tantos desejos.

O bonde passa cheio de pernas:
pernas brancas pretas amarelas.
Para que tanta perna, meu Deus, pergunta meu coração.
Porém meus olhos
não perguntam nada.

O homem atrás do bigode
é sério, simples e forte.
Quase não conversa.
Tem poucos, raros amigos
o homem atrás dos óculos e do -bigode,

Meu Deus, por que me abandonaste
se sabias que eu não era Deus
se sabias que eu era fraco.

Mundo mundo vasto mundo,
se eu me chamasse Raimundo
seria uma rima, não seria uma solução.
Mundo mundo vasto mundo,
mais vasto é meu coração.

Eu não devia te dizer
mas essa lua
mas esse conhaque
botam a gente comovido como o diabo.
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Carlos Drummond de Andrade
 
 
  L’éternité est tout ce qui dure une fraction de seconde,
mais avec une telle intensité qu’elle se pétrifie, et aucune
force ne lui porte secours.
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Carlos Drummond de Andrade
INOCENTES DO LEBLON

Os inocentes do Leblon
não viram o navio entrar.
Trouxe bailarinas?
trouxe imigrantes?
trouxe um grama de rádio?
Os inocentes, definitivamente inocentes, tudo ignoram,
mas a areia é quente, e há um óleo suave
que eles passam nas costas, e esquecem.
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Sinto-me disperso,
anterior a fronteiras
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Acordo para a morte.
Barbeio-me, visto-me, calço-me.
É meu último dia: um dia
cortado de nenhum pressentimento.
Tudo funciona como sempre.
Saio para a rua. Vou morrer.

Je me réveille pour mourir.
Je me rase, je m'habille, je me chausse.
C'est mon dernier jour : un jour
traversé de nul pressentiment.
Tout marche comme d'habitude.
Je sors dans la rue. Je vais mourir.
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LA FEUILLE

La nature, il y en a deux.
L'une,
telle qu'elle se sait elle-même.
L'autre, celle que nous voyons. Mais voyons-nous ?
Ou bien n'est-ce que l'illusion des choses ?

Qui suis-je pour éprouver
l'éventail d'un palmier ?
Qui suis-je, pour être seigneur
d'une arche fermée, sacrée,
de vies autonomes ?

La prétention d'être homme
et non chose ou limace
m'écrase face à la feuille
qui tombe, après avoir vécu
intensément, silencieusement,
et qui, par ordre du Maire
va disparaître sous un balai,
mais continue dans une autre feuille
étrangère à mon privilège
d'être plus fort que les feuilles.

p.231
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L'ÎLE

Dessus les quatre bancs de ciment
de l'île du Parc sont installés
avec tenue des plus réservées
pudiques quatre couples d'amants.

Les îles toujours sont une invite
à des idylles sans simagrées
mais ici l'on trace la limite
des actes et de la volonté.

Les couples se regardent, discrets,
en espérant que l'un d'entre eux ose
délivrer les instincts aux aguets
et mettre un terme à ces fausses poses.

Nul ne s'enhardit à délivrer
tant de caresses qui rêvent d'être.
Un lourd rideau de bure est tiré
voilant le frémissement de vivre.

Jour si léger ! L'écureuil, le vert,
ciel favorable, en complicité…
Mais on voit bien que tout cela sert
de décor à la duplicité.

L'amour y perd encore un pari
dans cette Cythère provinciale.
Il est tard. On ferme le Parc. Rien
ne se produit en bien ni en mal.

p.301
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ASPECTS D'UNE MAISON
LA SALLE DE BAINS

La colombe se pose sur la bascule
assiste au jaillissement de l'eau
à la chanson des robinets
au glissiglisser des savons
à la purification des corps
et s'envole.

p. 228
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ASPECTS D'UNE MAISON
LA CHAMBRE DE PIERRE

Des mobiles en or de la Place du Général Osório
balancent dans l'air de Pierre des nouvelles du Brésil.
La chambre flotte entre posters et cahiers de géographie.
Le hamac bahianais se balance sur le balcon qui donne sur
la plate-forme aux terrasses à perte de vue.
Des trésors d'empereur jonchent le sol :
coquillages, mignonnettes, volant de voiture.
L'empire s'enfonce dans un rêve interplanétaire
mais sonne l'heure fatale
dans la chambre amatutinée :
l'empereur chausse les souliers de la routine
et s'en va, vaincu, vers l'école.

LA CHAMBRE DE MARIE

Toute la maison ici se résume :
l'idée devient parfum.

p.228


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ASPECTS D'UNE MAISON
CRÉATION

La maison de Marie est haute
et claire.
Ce sont des architectes qui la dessinent,
ceux qui la font, ce ne sont des bâtisseurs.
Le trait sur le papier
le concret, l'acier des volumes
sont des circonstances étrangères
à la création.
Marie crée sa maison
comme l'oiseau crée son vol
clarihaut.

Dans le vide des pièces
meubles tableaux tapis
sont la pensée de Marie
ébauchant des lignes changeantes
qui se fixent enfin dans leur ordre imprescriptible.
Les objets se laissent modeler
avec une affectueuse docilité.
Aidons Marie ( disent-ils
dans leur dire sans mots d'objets)
à composer sa maison
comme d'un tohu-bohu
se compose la structure musicale.

Sur la ville
sur la suie des heures perdues
et l'angoisse des souterrains traversés
sa maison est le visage de Marie
à la lumière retrouvée.

p.227

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PORTRAIT D'UNE VILLE
III

Chaque ville a son langage propre
dans les doublures du langage transparent.
Bondit
du coffre de l'argot une richesse
propre à Rio seul, et à nulle autre ville au Brésil.
Diamants-minute, des mots
scintillent de toutes parts, dans un éclair,
et s'éteignent. Dans la ville meurt l'ondulation
du signe ironique.
D'autres arrivent déjà, à profusion, en gambadant.

Ce Rio…
Cet affecter que rien n'est sérieux, rien de rien,
en conservant au fond la religieuse
terreur, ferveur sacrée
qui va d'Ogun et Iemanjà jusqu'à l'Enfant Jésus de Praga,
et qui sur l'autel baroque ou le terreiro
allume et consacre la même cierge allumé
la même rose blanche la même paume
à la Divinité lointaine.

Ce Rio muscadin !
Rio langoureux, érotique, fraternel,
ouvert au monde, orange
aux cinquante saveurs différentes
(certaines amères, pourquoi non ?)
orange tout en flamme, juteuse
d'amour.

Regarde, regarde les nuages : ils détachent
des drapeaux de pourpre et de violet
au-dessus des montagnes et de la mer.
La nuit tombe sur Rio. La nuit est lumière qui rêve.

p.350
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PORTRAIT D'UNE VILLE
II

Voici qu'une frénésie gagne ce peuple
griffe l'asphalte de l'avenue, heurte l'air,
Rio prend forme de sambista.
C'est carnaval pur, douce folie,
retentissant dans le chant de mille bouches,
dix mille, trente mille, cent mille bouches,
dans un rituel d'abandon à un dieu ami,
dieu rapide qui passe et laisse
un sillage de musique dans l'espace
pour le reste de l'année

Et l'élan de la ville ne s'épuise pas
dans la fête colorée. Une autre fête se répand
à travers tout le corps ardent des faubourgs
jusqu'au marbre et au verre fumé
des immeubles bourgeois sophistiqués :
une passion :
le ballon
le dribble
le shoot
le but
dans le stade-temple qui célèbre
les fébriles offices annuels
du Championnat

Le Christ, une statue ? Une présence,
du haut, non pas des astres,
mais du Corcovado, bien plus proche
de l'humaine contingence,
préside au vivre général, sans grand effort,
car par la loi carioca
(ou destin carioca, peu importe)
il faut mélanger tristesse, amour et musique,
travail, blague, loterie,
dans le même coquillage du moment
qu'il est indispensable d'avaler jusqu'à sa dernière
goutte de miel et de nerfs, pleinement.

La sensualité voletant
par des chemins ombreux et au plein jour
des collines et des baies,
dans l'air tropical infuse l'essence
des rondes voluptés partagées.
Tout autour de la femme
un système de gestes et de voix
va se tramant. Et va se définissant
l'âme de Rio : voir la femme en tout.
Dans le contour des jardins, dans la taille svelte
du palmier, dans la tour circulaire,
dans le profil du morne et l'écoulement de l'eau
femme femme femme femme femme.

p.348-349
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PORTRAIT D'UNE VILLE
I
Elle porte nom de rivière cette ville
où les rivières jouent à cache-cache.
Ville faite de montagne
indissolublement mariée
à la mer.

Ici
le jour se lève comme dans n'importe quel autre endroit du monde
mais vibre le sentiment
que les choses se sont aimées pendant la nuit.

Les choses se sont aimées. Et s'éveillent
plus jeunes, avec l'appétit de vivre
les jeux de la lumière dans l'écume,
la topaze du soleil dans le feuillage,
l'irisation de l'heure
sur le sable déployé à perte de vue.

Des formes adolescentes ou adultes
se découpent sculptées dans l'eau éclaboussée.
Un rire clair, venu d'avant la Grèce
(venu de l'instinct)
couronne la sarabande du bord de mer.

Regarde, regarde ce corps
qui est fleur en acte de fleurir
entre cette baraque et cette planche de surf,
luxueusement fleur, gratuitement fleur
offerte à la vue de celui qui passe
dans l'acte de voir et non de cueillir.

p.347
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DISCOURS DE PRINTEMPS
Discurso de Primavera e Algumas Sombras 1977

LA MUSIQUE DE LA TERRE

Souffrance habite en nous, le clavier l'ignore.
La vie, une gavotte ? Est-ce pure danse,
que l'amour ? Et le menuet de Lully
contient-il la difficulté d'exister ?

Dans le chaos, angélique quintessence,
plane le grâce de Mozart sur l'abîme,
sans y pénétrer, c'est l'oiseau de la nue.
Le temps est d'autre métal, qui nous consume.

Il est urgent de rompre le goût, la norme
limpide et les éclats sanglants du moment,
passer à la noblesse de la sonate.
Extirper du piano le son dramatique.

Et susciter le dialogue pathétique
entre piano et violon, comme on entend
dans la pénombre de l'âme, et à deux voix,
une rumeur de passion s'entretissant.

Mais la musique quitte sa pureté.
Les séraphins et les elfes se séparent.
La terre est foyer des hommes , non des mythes.
Il convient de démasquer notre destin.

Incessamment tâtonnant, dans le conflit
corps à corps entre l'être et la contingence,
la nouvelle musique, ointe de tristesse
mais irradiant la force, entre dans le monde.

Lutte de l'homme dans l'aire désolée
de sa solitude ; lutte sur la scène
frémissant de contrastes, quand il perçoit
que peu à peu se referment les espaces

de la perception, et que tout se limite
à la captation interne de signaux
silencieux, impalpables, invisibles,
mais jamais aussi vifs que s'ils sont captés.

Tandis que la souffrance augmente et qu'autour
l'amour lui refuse ses baumes terrestres,
se perfectionne la fabrique sonore
qui éternise la vie brève par l'art.

Es muss sein ! Il faut ! Au cœur de l'amertume,
dans la déconvenue du corps, sublimée,
la chanson de l'héroïsme et de la joie
rédime notre misérable passage.

Alors la symphonie entrouvre ses paumes
immenses, pour contenir tout le troupeau
de frères perplexes, de tourmentés qui
sont en quête de direction et de sens

pour le bonheur de tous. L'homme se révèle
dans le torrent de la mélodie, supplante
son naître obscur, son incertaine vision
de l'au-delà, mêlée de mort et de peur.

Ô Beethoven, tu nous as montré l'aurore.

p.350-351-352
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AIMER S'APPREND EN AIMANT
MINIVERS
(Extraits)

Pour mettre fin
aux agressions
contre les fourgons
convoyeurs de fonds
en un tournemain :
suppression
des fourgons
et des fonds.


Le peintre à mes côtés
se plaint :
Quand serai-je falsifié ?


La réforme universitaire
prévoit un cours
de réforme universitaire.

La censure s'est regardée
dans le miroir et l'a censurée :
quelle horreur !

p.393
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LE JOUR JAILLIT DE L'EAU

La fontaine de l'Aurore
fait naître le soleil.
L'eau est toute or
de ce mot blond.
La fontaine de l'Aurore,
dans l'iridescence tremblante,
bien plus qu'un trésor
est un prisme sonore,
carillon étouffé
dans le tliz cliz de l'écume,
choc aérien
subit
sur la pierre lisse
froid jaillissement,
elle tisse musicalement
la dorée nivéenne rose
parure du jour liquide.
Laisse couler l'aurore
elle est si pauvre
fontaine pour le peuple.

p.257-258
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Carlos Drummond de Andrade
.Mes camarades n'avaient pas dit
qu'il y avait une guerre
et qu'il fallait apporter
du feu et des vivres.

Je me sens dispersé,
antérieur aux frontières,
humblement je vous prie
de me pardonner.
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Privilégio do mar

Neste terraço mediocremente confortável,
bebemos cerveja e olhamos o mar.
Sabemos que nada nos acontecerá.

O edifício é sólido e o mundo também.
Sabemos que cada edifício abriga mil corpos
labutando em mil compartimentos iguais.
Às vezes, alguns se inserem fatigados no elevador
e vem cá em cima respirar a brisa do oceano,
o que é privilégio dos edifícios.

O mundo é mesmo de cimento armado.
Certamente, se houvesse um cruzador louco,
fundeado na baía em frente da cidade,
a vida seria incerta… improvável…
Mas nas águas tranqüilas só há marinheiros fiéis.
Como a esquadra é cordial!
Podemos beber honradamente nossa cerveja.
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