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Critiques de Céline Righi (32)
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Berline

Tout comme l’auteur Céline Righi, je suis petite-fille de mineur alors dès que je tombe sur ce thème dans un roman, je fonce sans même lire le résumé.





À peine commencé, j’ai tout de suite senti la pépite que j’avais sous les yeux, une pépite habillée par la noirceur de la vie de Ferdinand, illuminée par la plume de l’auteure, qui slame de manière poétique pour nous raconter cette histoire.





“ Aujourd’hui, dans le silence des morts, dans ce trou qui sera peut-être son ultime, l’enfance lui explose dans la poitrine comme un coup de grisou. ”







Si la vie de Fernand est bouleversante, la manière de la raconter l’est tout autant, c’est toute une vie qui défile devant nos yeux, un destin sombre où surgit pourtant quelques éclats d’humour et quelques brins de tendresse.



Un premier roman qui sort des sentiers battus tout à fait remarquable, j’ai tout aimé dans ce roman et j’ai hâte de découvrir le prochain.







Berline a remporté le Prix du livre à Metz - Marguerite Puhl Demange 2023 et le Grand Prix National Lions de littérature 2023
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Berline

Un texte ciselé, intense, à la fois roman et parfois presque récit poétique.

Fernand, 23 ans, est prisonnier de la mine où il travaille, suite à un accident. Seul, dans le noir, protégé par la berline en métal qui s’est retournée sur lui, il pense, passe sa vie en revue.

Quelles pommes du panier de la vie a-t il envie de goûter : les pommes juteuses et sucrées ou celles déjà un peu pourries que l’on retrouve forcément au fond ?

Berline c’est la description abrupte de la dureté et de la beauté de la vie. C’est, contre toute attente, l’envie qu’elle se poursuive encore, c’est accepter à défaut de comprendre les imperfections de nos proches.

Un premier roman très intense.
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Berline

Mon coup de cœur dans les premiers romans en lice pour le prix Québec-France Marie-Claire Blais 2023-2024. J’étais membre du jury de présélection et ce titre avait franchi cette étape. Puis, les comités de lecture régionaux l’ont choisi comme lauréate.



Un roman à la fois noir et lumineux. Une œuvre magistrale avec comme thématique les divagations et les états d’âme d’un mineur à l’article de la mort. Une écriture à la fois poétique (« Le chagrin lui avait enfariné les cheveux en une nuit ») et sombre (« Il est sorti d’un trou noir pour atterrir dans d’autres trous noirs »). Personnages touchants, à commencer par le narrateur.



Tout au long du récit, le lecteur se sent prisonnier sous la benne avec Fernand dont le passé horrible remonte à la surface. Belle structure littéraire qui permet de découvrir progressivement la triste enfance du mineur, son adolescence, ses parents, son seul ami, son seul amour, son village ouvrier, ses frasques, les relations faciles avec son père, malaisées avec sa mère. Le tout teinté de certains éclats d’humour qui mettent un baume sur le tragique de ce parcours.



Belle idée que cette petite voix intérieure qui se matérialise sous la forme d'un oiseau noir avec lequel Fernand échange. Belles métaphores, dont celle sur l’origine de la vie de Fernand et le sort qui l’attend.



Un éloge à la survie qui ne se concrétise qu’à la dernière phrase qui nous surprend et nous émeut.



Tout le drame de Fernand se résume dans cet extrait :



« Lui, ce qu'il aurait voulu, c'est être jardinier. Pas mineur, pas ouvrier, pas paysan: jardinier. Il aurait voulu travailler la terre par petits bouts, cultiver des couleurs, des odeurs, des morceaux de beauté. Être au-dessus, pas en dessous. À genoux sous le ciel, et creuser la terre à mains nues, s'écorcher aux cailloux, au rugueux des racines. Même avec le sang aux phalanges, il aurait été heureux comme ça, sous les soleils brûlants ou les pluies battantes. Travailler au grand jour. Respirer autre chose que la poussière et les fumées. Mais, au village, c'était la mine ou l'usine. Basta. »



Après une carrière d’enseignante en lettres modernes, Céline Righi, petite-fille de mineurs originaire d’Hussigny-Godbrange (département de Meurthe-et-Moselle, à la frontière avec le Grand-Duché du Luxembourg) et qui réside maintenant entre Strasbourg et sa maison en bois des Vosges se consacre entièrement à ses activités d’écriture. Chanteuse et parolière, elle anime des ateliers d’écriture auprès des détenus de la Maison d’arrêt de Strasbourg, de personnes âgées et d’enfants déscolarisés à la suite à des situations de harcèlement. En septembre 2021, elle remporte à l’unanimité le Grand Prix du jury du concours « Lire pour en sortir », parrainé par Leïla Slimani.



À propos de Berline, Céline Righi déclare :



« J’ai voulu apporter un peu de lumière au sein d’un destin très sombre. Et donner de l’espoir aux lecteurs. Nous ne sommes pas condamnés à vivre dans l’obscurité. Mon roman est un hymne à la liberté et à la compréhension. Oui, c’est un livre sur l’enfermement. Mais dans le noir, coincé sous cette berline, Fernand va cheminer vers une merveilleuse compréhension de lui-même. Il va pouvoir vivre sa vie comme il l’entend. C’est un roman lumineux. »



En Europe, le premier roman de Céline Righi a été multiprimé :



· Prix du livre à Metz – Marguerite Puhl Demange (2023)

· Prix national des Lions de Littérature (2023)

· Prix Roblès (2023)

· Prix du Festival du premier roman de Chambéry (2023)

· Prix Premières Paroles du festival Terres de Paroles en Seine-Maritime (2023)



Un dossier de presse est disponible sur le site des Éditions du Sonneur où on peut également télécharger un extrait en format PDF.



On trouvera également un résumé détaillé du roman réalisé par Chat GPT à la demande du journal en ligne ActuaLitté reproduit sur leur site web le 26 mai 2023 à l’occasion de l’annonce du Prix national Lions de Littérature 2023.





Originalité/Choix du sujet : *****



Qualité littéraire : *****



Intrigue : *****



Psychologie des personnages : *****



Intérêt/Émotion ressentie : *****



Appréciation générale : *****



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Berline



À la suite d'une explosion, Fernand est coincé au fond de la mine, le corps en morceaux. Le silence, la nuit, la claustration, la faim et la soif le tourmentent.

Paradoxalement cet enfermement dans les entrailles de la terre est presque une chance pour ce jeune homme qui n'a jamais le temps, harassé par le travail, de se poser pour réfléchir.

Aidé par un oiseau imaginaire sorti de son esprit, il fait le bilan de sa courte vie en laissant les souvenirs affleurer : la froideur d'une mère dévastée par la mort d'un enfant un an avant sa naissance ; la gentillesse taiseuse d'un père ; son premier amour ; son amitié pour Mario le costaud alors que lui est surnommé « l'allumette » ; les mantras fatalistes de la mère (« les pas le choix, les la vie c'est comme ça, les on n'y peut rien changer ») ; la tendresse des grands-parents, de l'oncle et de la tante ; la solidarité entre les mineurs...

Dans le huis clos ténébreux de la mine, les rêves de Fernand sont peuplés de couleurs ; celles des yeux de Martha, celles des champs de blé, celles de l'océan qu'il n'a jamais vu pour « troquer les gris des cités minières contre le bleu atlantique »...

Avec une grande justesse dans la narration, Céline Righi, qui signe un premier roman aux accents lyriques et nourri de métaphores, fait le récit poignant d'un garçon conditionné par son milieu dont il n'a pas osé s'affranchir.

Sa solitude forcée l'encourage, s'il sort du trou où il est bloqué, à aspirer à la plus grande des libertés, la liberté de choisir une autre existence que celle qui est toute tracée. Pour retrouver enfin le goût de vivre.

Son portrait sensible incarne le destin des immigrés italiens qui ont servi de bras dans les mines de l'Est de la France et plus largement de tous ceux qui ont trimé sous la terre au péril de leurs vies.



EXTRAITS

« Allumette », une trouvaille de la mère qui ne manquait jamais d'imagination quand il s'agissait de lui esquinter le cœur.

Ça avait toujours été comme ça, chez eux on se transmettait la mine de père en fils, comme un flambeau.

Dans la mine, sous la peau et dans l'âme, la nuit persiste.
Lien : http://papivore.net/litterat..
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Berline

J'ai adoré ! Un premier roman lumineux.

J'ai été emportée, par l' écriture aussi crue, dérangeante parfois et sans complaisance (mais toujours à propos) que sensible, poétique et lumineuse, chantée, parlée, rieuse,...

ça se lit et ça se relit, pour ne pas louper quelques recoins et fulgurances passés inaperçus.

Chaque fois que l'on s'enfonce avec Fernand dans l'obscurité la noirceur presque le dégoût, quelque chose nous tire vers la lumière, la beauté, la poésie, l'humour et la légèreté.

C'est fort de descendre au tréfonds de nos croyances, de notre condition humaine comme le fait l'auteur par des images sensorielles et directes , d'approcher nos côtés sombres comme dirait l'autre , avec parfois la tentation d'y rester et qu'à chaque fois la force puissante et douce, fluide comme l'eau de ses mots nous remonte avec Fernand à la surface, à la conscience, à la vie ..
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Berline

Roman lu dans le cadre du prix "premières paroles". C'est donc un premier roman pour l'autrice Céline Righi et c'est très réussi. Une écriture précise pour nous parler de l'univers de la mine, un langage populaire pour faire vivre le personnage de Fernand, de son ami Mario et son entourage familial.

Un probable coup de grisou a propulsé Fernand au fond de la mine et une berline s'est renversée sur lui le plongeant dans le noir absolu où il va demeurer plusieurs jours seul avec ses souvenirs qui remontent à la surface.

Ainsi l'ombre de la mère qui n'a jamais su prodiguer de tendresse a son fils, car prisonnière du deuil impossible du premier enfant mort né. Le père toujours penché comme accablé par la vie, le poids de la mine, le poids d'une vie morne. L'oncle et la tante sans enfant, substituts parentaux pour ce qui est de l'affection. Le grand copain Mario, qui lui explique que dans la vie il faut choisir les belles pommes et laisser les pommes pourries, ce qui permet d'affronter les coups durs de la vie. Martha son premier amour d'enfance.

La narrateur nous parle de son dégoût de la mine et de son incapacité à pouvoir choisir une autre vie que celle tracée par les ancêtres : descendre au fond du puits et risquer sa vie. Alors que Fernand se rêvait jardinier.

L'originalité de cette évocation, alors que Fernand est prisonnier de cette berline, c'est la présence d'un oiseau fictif, comme un morceau de sa conscience qui le titille et lui parle. C'est astucieux et permet d'éviter toute monotonie.

J'ai apprécié ce livre sensible et bien écrit.
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Berline

Quelque part dans le nord

Une catastrophe l effondrement d une mine.

Au fond Fernand bloqué se remémore sa vie

Sa jeunesse ses rapports avec sa mère.

Un magnifique premier roman avec une plume magnifique.

La plus belle découverte de l année

C est poétique sombre souvent drôle et tendre

Découvrez la vie de Fernand..

Vous n êtes pas prêt d oublier ce roman et ses personnages

Magnifique 👍👍👍👍
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Berline

Eh bien pour un premier roman ,Céline Righi,peut être fière : une belle réussite!Nous sentons la parolière et les ateliers d'écriture derrière.

Un très bel hommage rendu aux " gueules noires" au travers le personnage de Fernand ,23 ans,mineur de fond .

Un éboulement s'est produit dans la mine où travaille Fernand ,et il se trouve coincé sous une berline.dans un semi coma, il ne sait pas si il est mort ou vivant au début puis petit à petit il prend conscience qu'il est en vie mais salement amoché.

Et surtout pour ne pas sombrer dans un état léthargique, il va s''obliger à faire remonter les souvenirs. Pages de vie auxquelles il va se "raccrocher".S'inventant un messager: l'oiseau noir ,afin de ne pas s'endormir,de ne pas mourir il refera le chemin à l'envers.L'image de la mère prédominante, m'a fait penser à Folcoche( vipère au poing de H.Bazin.) ,sauf qu'ici la brutalité physique est absente tout comme l'amour de cette femme " taiseuse".Elle ne dit rien est froide et dure comme une pierre.Court roman: 119 pages ,raconté à la 3ème personne.chaque personnage va nous être décrit: le père ,la mère,l'oncle et la tante ,la grand-mère et surtout le grand copain :Mario ,qui sourit tout le temps,ainsi que quelques habitants du quartier,et tout cela sublimé par une écriture ciselée ,pointue.Des tableaux sombres mais en même temps lumineux ,tellement tendres et humoristiques parfois, qui m'ont laissé en apnée au côté de Fernand : un petit bijou ce roman que je vous conseille fortement

d'ouvrir.

Lu dans le cadre du1er roman sélectionné par : Terres de paroles.⭐⭐⭐⭐⭐
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Berline

Le récit commence avec jeune un homme coincé dans une mine sous une berline après une explosion. C'est lui le narrateur, son corps ne souffre pas, mais il ne peut pas bouger. Il a peur de mourir et alors les souvenirs défilent, pour s'occuper et ne pas trop penser à autre chose, la faim et la soif par exemple. Ses réflexions sont décousues, elles naissent au fil de rapprochements d'idées aléatoires, elles sont beaucoup tournées vers le passé et notamment son enfance qui ne fut pas heureuse. Son foyer était plutôt froid, sa mère pas aimante et son père en retrait, on lui a toujours répété que "la vie c'est comme ça, on n'y peut rien changer" et il a donc fait beaucoup de choix par dépit, pour plaire aux autres. Il évoque aussi son collègue et meilleur ami, Mario, ils sont très différents mais inséparables. Celui-ci arrivait à trier les "pommes pourries" des "bonnes pommes" en une métaphore de la vie, à n'en garder que le meilleur, le narrateur essaie de s'y appliquer aussi pour ne pas sombrer. Il a peur de mourir, surtout de mourir dans le noir, dans cette mine qu'il a tant craint et détesté et à laquelle il n'a pas eu le courage d'échapper. Lui il aurait voulu jardiner, une passion qu'il tenait de son père, mais ça ne se faisait pas dans sa famille, sa mère l'a poussé vers la mine et il a cédé. Sa mère amère suite à une fausse couche juste avant sa naissance, sa mère qui n'a pas su l'aimer, toute repliée sur sa douleur.

C'est un récit assez noir, malgré des moments lumineux, la vie du narrateur et de son entourage est jalonnée de drames. Lui-même aura beaucoup souffert de ce manque d'amour et de cette incapacité à s'affirmer pour faire ce qu'il voulait dans la vie.

Le roman retranscrit le parler du narrateur, assez familier, mais il y a aussi certains passages qui sont plus poétiques. Il se parle à lui-même et une petite voix intérieure se matérialise aussi sous la forme d'un oiseau noir qui s'adresse à lui et auquel il s'adresse en retour, cet oiseau là il ne l'aime et il va pourtant l'accompagner tout le long du roman.
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Berline

Un vrai coup de coeur pour ce 1er roman magistral !Années 60, quelque part en Lorraine.

Fernand, 23 ans, travaille à la mine.

Le récit débute par son réveil. Il est dans le noir absolu, seul, le corps en compote.

Un effondrement s'est produit, balançant tout autour de lui et lui avec : les hommes, le matériel, les pierres…

Il est enfermé, coincé sous une berline qui l'a protégé mais le maintient prisonnier.

Rivé au fond, sa mémoire remonte. Dans le noir absolu, enfin il voit clair. le corps est certes pris au piège mais libéré du travail pénible, il peut dès lors « Penser, penser, penser, se souvenir, se rappeler, descendre dans sa vie comme dans un puits de mine, explorer sa mémoire pulvérisée, son histoire en miettes, rien d'autre à se mettre sous la dent, rien d'autre ».

Ni mort, ni vivant, il attend de l'aide.

Mi mort, mi vivant il attend la mort. Mais elle tarde à venir. Son envoyé est là pourtant. C'est cet oiseau noir qui, par ses remarques intempestives, relance la mécanique du souvenir. Chaque chapitre est un bloc de souvenirs qu'il soulève un à un : sa mère asséchée par une vieille douleur, son père taiseux, son oncle et sa tante, son ami de toujours Mario, son seul amour Martha et son village, et la mine, la mine bien sûr.

Qu'il est touchant Fernand avec sa culpabilité, sa résignation, son absence de rancune, son besoin d'amour.

La poésie côtoie de trivial au gré des divagations de Fernand, de ses états d'âme.

Et étrangement, il y quelque chose de théâtral dans ce long monologue intérieur pourtant écrit à la 3ème personne.

J'ai adoré l'entendre.
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Berline

Livre de 119 pages, très touchant. L’auteur nous décrit avec beaucoup d’émotion, de doutes et d’espoir, le thème de la mort, dans des conditions assez spéciales.



La mine s’écroula sous l’effet d’une forte déflagration sur Fernand. La déflagration avait plaqué son corps contre la paroi. Il ne savait pas dans quel état était son corps. C’était le silence complet, le trou noir dans sa tête. Etait-il mort ? Peut-être que c’était aussi cela, la mort. En tout cas, il était pire qu’en prison. Une prison, dont il ne pouvait même pas bouger. Soudain, il entendit une voix qui lui demandait de se réveiller.



Il se rappelait, alors, son grand-père et son père mineurs. Et lui, qui avait dit, qu’il ne travaillerait jamais dans une mine. Il voulait être jardinier, mais il n’avait pas eu le choix. « C’était comme ça », disait sa mère.



Il se rappelait sa mère, si silencieuse, dont il connaissait si peu de chose d’elle, qui répétait sans cesse « C’est comme ça. », lorsqu’il essayait de lui parler. Cette mère, qui lui faisait porter le lourd et douloureux fardeau de la mort de son aîné. Elle ne lui en avait jamais parlé, mais il avait compris lorsqu’ils allaient au cimetière. Lui, était le mort-vivant, vivant dans l’ombre de son frère. Toute sa vie, il avait été frustré par celle qui lui faisait comprendre que c’était sa faute, si elle souffrait ainsi. Il aurait tant voulu que sa mère l’aime. Jamais, elle ne l’avait pris dans ses bras, trop occupée à aimer cet autre enfant.

Il se rappelait son père, qui souffrait comme lui de la mauvaise humeur de cette femme. Ce père, si peu bavard lors des journées de pêche avec lui, mais qui lui parlait tout bas quand sa mère se mettait en colère. Il revit sa douleur, lorsque son père les avait quittés.

Il se rappelait son ami d’enfance, Mario, prit comme lui dans l’effondrement de cette mine. Il avait tant partagé de bons moments avec lui, le foot, les bagarres, les filles…

Et puis, il se rappelait Martha, à qui il n’avait jamais osé lui dire qu’il l’aimait.

Sa tête n’arrêtait pas de lui imposer des souvenirs.

Il voyait de vieilles pierres, des couleurs provençales. Il sentait l’odeur de la lavande. C’était beau là-bas.



Il sentit qu’il avait faim et soif. S’il mangeait un doigt, le sentirait-il ? Impossible, il ne pouvait pas bouger. Alors, il rêva qu’il mangeait. Il garda les yeux ouverts de peur de rater la lumière d’un réverbère, d’une étoile, d’un simple petit rayon de lumière. On ne sait jamais. La nuit noire, sous cette terre, était, désormais, son autre planète. Il voyait les mêmes oiseaux noirs voler au-dessus de lui, qu’il avait vus quand son père l’avait quitté. S’il n’était pas mort, celle-ci n’était pas loin. Allait-il rejoindre son père ? S’il s’en sortait, il se promit de tout aimer.



Soudain, tout se mélangea dans sa tête. Les visages qu’il connaissait se superposaient. Il avait mal, mais se sentait bien. Il crut entendre des voix qui l’appelaient. Son père peut-être ? Il voyait une légère lumière. La mort venait-elle le chercher ???



Magnifique roman et magnifique écriture, qui nous laisse sans mots…

Céline Righi a remporté avec Berline, le premier Prix, « Premières Paroles », en 2023.
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Berline

Un roman qui dès les premières pages voire les premiers mots vous emporte et vous glisse dans la vie de Fernand, mineur malgré lui. On s’identifie forcément à certains de ces moments de vie écrits avec une plume habile et rythmée. Une auteure à suivre de près.
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Berline

Fernand reprend connaissance après l'explosion dans la mine. Il est en compote, dans le noir profond, dans le silence. Pour ne pas crever, il va se remémorer sa vie, ce dont il rêvait, les idées qu'il refusait, descendre à la mine par exemple, le caractère très dur de sa mère, son père travaillant au jardin, sa passivité, Mario son copain d'enfance qui doit être mort quelque part non loin de là.

L'écriture est vivante, le sujet émouvant. Pourtant je n'ai pas été très émue. J'ai trouvé un manque de réalisme, les souffrances de Fernand semblent occultées. Dommage !
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Berline

LES POMMES DE LA VIE

Je suis entrée sous la berline auprès de Fernand dès les premiers mots.

Dans le noir complet et jusqu’au point final

Je l’ai écouté avec affection et surtout beaucoup d’émotion.

Après l’explosion dans la mine

Fernand est prisonnier sous une berline

Il « ne veut pas crever », le répétant comme une litanie

Il est encore « un peu vivant »

Rien n’est perdu, surtout pas ses souvenirs.

Une éternité dans les ténèbres,

Seul,

Son esprit rapièce et reconstitue le puzzle de sa vie.

La tête et le cœur à vif

Ses souvenirs l’assaillent

Véritable invasion du passé au bord du trépas.

Il est jeune mais déjà une vie d’obscurité trop longue derrière lui.

Il rêvait d’être jardinier, à l’air libre, en plein jour

Une vie finalement à la mine, dans le noir, à étouffer

« Pas le choix »

Comme le père, le grand-père et l’arrière-grand-père.

Son père taiseux, même silencieux

Sa mère, meurtrie à jamais

Ni douceur ni geste maternels.

Alors oui c’est une vie d’obscurité,

Au mieux une vie grise,

Et pourtant…

Mario, son ami, éclaire et souffle sur la brume opaque de son quotidien

Fernand rêve de couleurs, de poésie, d’imaginaire et de fantasmagorie.

La mine dévore les êtres,

Fernand est une offrande prête à être engloutie à jamais

(Oui il y a du Zola dans cette métaphore - sans jamais chercher à l’imiter-

Le Voreux inévitablement- la dimension sociale également)

Et pourtant, Fernand ne cesse de faire jaillir des couleurs dans ses souvenirs

De la lumière dans sa vie prête à s’enfuir

De la tendresse et du bonheur

Malgré les sacrifices et les renoncements

Il préfère goûter aux bonnes pommes de la vie

Comme tout le monde assurément

Mais encore plus fort, là, perdu dans l’obscurité profonde

Face aux souvenirs de son existence.

Des portraits de personnages tendres et attachants

Parfois tristes et dramatiques

Mais toujours enveloppés d’une lumineuse douceur.

Fernand c’est une voix aphone qui n’a jamais su rugir

Et qui dans les ténèbres se fait enfin entendre.

Trop tard ?

Pour le savoir, lisez ce court roman singulier, émouvant et poétique, qui n’a pas été mis en avant à sa juste valeur à sa sortie en mai 2022.

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Berline

Il est des romans qui croisent notre route presque par hasard. C’est le cas de celui-ci alors même que je cherchais il y a quelques mois des recommandations de textes qui abordent les mines, les mineurs et tout ce qui les entourait. Tout d’un coup, sans aucun lien, c’est celui-ci qu’on m’a mis entre les mains. Berline. Du nom des wagonnets chargés du charbon extrait à remonter à la surface.



Et là, coincé sous une berline après l’explosion de sa mine, Fernand espère les secours et revient sur son existence. L’amour d’une mère, l’amitié, le travail à la mine… ce sont les différents épisodes d’une vie qui sont évoqués avec humour et poésie dans ce texte et derrière les drames latents : la lumière et la douceur des jolis souvenirs. Sous les pommes pourries, les bonnes pommes.

Ce court roman, porté par le langage parlé attachant de Fernand gagne en profondeur à chaque “bloc” parcouru pour finir par quelque chose de vraiment fort et poignant.



Le hasard a très bien fait les choses. Merci.


Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Berline

Une sublime écriture, poétique, intimiste.Le narrateur, enfermé sous un wagonnet, une berline, au fond d’une mine, après une explosion, entre la vie et la mort, va évoquer sa triste enfance, ses parents, son village. Humour, tendresse, tristesse. Ce court texte est un bijou!!
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Berline

Tout est noirceur dans cette mine où Fernand est piégé, coincé, après son effondrement, sous une berline.



Il est là « donné aux ténèbres, même pas mort, juste assez vivant pour éprouver la nuit dans une solitude à couper au couteau ».



Face à la mort. il pense à sa vie d’en haut ; s’accroche de toutes ses forces à ce qui lui reste de souffle, en se remémorant les « bonnes pommes et les mauvaises pommes » .



Sa mère toute puissante , peu aimante, qui lui a donné la vie, un an après avoir perdu un enfant, dont il porte le prénom : « il n’était pas son enfant, il n’était qu’un moignon ».



Ainsi, Fernand, à peine né, traîne déjà son premier wagon. Il est l’ombre de cet enfant mort, un mort vivant.



Son père, taiseux, un homme effacé , qui ne trouve pas le courage de s’opposer à sa femme et qui se réfugie dans son jardin.



Fernand lui ce qu’il voulait être c’est jardinier pas paysan et surtout pas mineur. « Il voulait travailler la terre par petits bouts, cultiver des couleurs, des odeurs, des morceaux de beauté. Être au dessus pas en dessous ».



Mais, il n’a pas eu le choix. Comment échapper à un destin écrit par les autres ? Il sera mineur.



Les mots sont forts, l’écriture est belle et poétique .



Petite fille de mineur, l’auteur évoque avec justesse la condition de ceux qui descendent sous terre.



Un livre très lumineux malgré la noirceur.
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Berline

Fernand travaille dans une mine, dans l’est de la France. Ses journées, il les passe dans des galeries souterraines, sans voir la lumière. Le quotidien d’un tas d’autres hommes de son époque, dans les années 60. Mais aujourd’hui n’est pas un jour comme un autre. Aujourd’hui, la terre l’a enseveli. Coincé au fond de la mine sous une berline, Fernand n’a rien d’autre à faire qu’attendre qu’on vienne le sauver. Et penser.



Alors il pense, il pense et se souvient. Il évoque son enfance, ses parents et le secret qui planait à la maison, qui empêchait l’amour maternel de se déployer. Il pense à son copain Mario, qui parvient à toujours voir le verre à moitié plein. Il se dit encore qu’il n’avait pas du tout envie de travailler dans la mine, lui ce qu’il voulait, c’est être jardinier ! Se trouver de l’autre côté de la terre, du côté des couleurs, de la vie.



Tout cela, Fernand le raconte avec une gouaille impertinente, savoureuse, qui nous prend par la main dès qu’on a laissé le temps d’adaptation des premières pages faire son œuvre. Ensuite on savoure à fond ce roman atypique, rieur et pétillant malgré le cadre délétère et le destin saboté de Fernand.



Le roman rend bien compte aussi d’une réalité, celle de l’immigration italienne arrivée dans l’est et qui avait le choix entre l’acier et le charbon. Ce thème m’a particulièrement intéressée et touchée car cela fait partie de l’histoire de ma belle-famille. J’ai aimé pouvoir imaginer un semblant de leur vie à travers les personnages qui gravitent autour de Fernand.



Une excellente surprise !
Lien : https://lejardindenatiora.wo..
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Berline

Quelque part dans une mine… un accident survient et voilà Fernand, la vingtaine, coincé sous une berline au fond d’un boyau.

Seul dans le noir, le voilà face à lui-même et à ses souvenirs qui vont le faire tenir autant qu’il peut, et qui vont nous emmener à la découverte de la vie de Fernand mais aussi de celle des mineurs.

Un récit intense et poétique qui m’a ravie et que je conseille.
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Berline

Si ma bibliothécaire ne me l'avait pas recommandé je n'aurai jamais ouvert ce premier roman à la couverture du sombre, sombre comme la mine, de or du récit. Bloqué sous terre. Fernand, 23 ans, retrace sa vie. Il paraît que c'est ce qui arrive quand on est aux portes du dernier voyage.

Dans une écriture à la fois simple, précise dans l'évocation d'une époque, les années 60, d'un milieu, la mine, le monde ouvrier, l'auteure comme le narrateur ausculte, décortique les étapes marquantes des souvenirs, les sentiments qu'ils laissent dans le cœur.

On s'y retrouve parfois, c'est a la fois simple et profond, c'est le genre de roman qui laisse des traces comme la suie sur le corps et les poumons. Prometteur.
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