Entretien avec Florent Oiseau à propos de son ouvrage Je vais m’y mettre :
1/08/2016
Je vais m’y mettre raconte l’histoire de Fred, un quarantenaire alcoolique et flemmard. Pourquoi avoir choisi un antihéros pour personnage principal ? Comment est-il né ?
Il est arrivé comme une évidence, s`est presque imposé à moi. En fait, je voue une affection toute particulière aux personnages peu glorieux. Dans les livres comme dans la vie. Mes proches apprécieront.
Ce personnage est dépendant de tout et de tout le monde. Qu’est ce qui vous intéressait dans ces questions de dépendance et de faiblesse ? Pourquoi les avoir évoquées dans un roman ?
Certes, il ne vit que pour les allocations, mais paradoxalement, je le trouve assez indépendant. Et très libre. Une liberté assez singulière, mais liberté tout de même.
Votre plume est plutôt orale et drôle. L’humour est-il un procédé que l’on maîtrise ou bien qui s’impose ? Pourquoi avoir choisi ce ton particulier ?
L`humour c`est primordial. Je ne fais pas dans le lyrisme, c`est un métier, et pas le mien. J`aime l`argot, les mots simples, les paquets de chips. Ils retranscrivent mieux les sentiments que j`essaye de faire passer. Enfin, je crois.
La majorité des personnages de votre roman est en marge de la société : addictions diverses, magouilles, prostitution...Est-ce votre vision du monde ? Pourquoi un tel cadre à votre histoire ?
Le cadre va avec le personnage. S`il était DRH, j`aurais peut être plus misé sur les zones pavillonnaires, et le rosé pamplemousse. Je n`ai rien contre les DRH et les boissons estivales, soit dit en passant.
Vous êtes beaucoup plus jeune que votre héros. Comment vous y êtes-vous pris pour le rendre crédible et pour imaginer ses attentes par rapport à la vie et surtout par rapport aux jeunes ?
C`est un exercice compliqué, en effet. J`ai justement essayé de ne pas forcer le trait, de le faire parler et penser assez naturellement. J`espère que le rendu est crédible.
Sans dévoiler la fin de l’intrigue, cette dernière sonne comme une sorte de morale. Est-ce volontaire ? Souhaitez-vous faire passer un message particulier à vos lecteurs ? Vous adressez-vous à certains en particulier ?
Non, il n’y a pas de morale ou alors elle est involontaire.
e vais m’y mettre est votre premier roman. Comment avez-vous décidé de vous lancer ?
Fallait s’y mettre, je m’y suis mis !
Avez-vous prévu d’écrire à nouveau ?
Oui. Après ma sieste.
Florent Oiseau et ses lectures :
Quel est le livre qui vous a donné envie d’écrire ?
Journal d`un vieux dégueulasse, Charles Bukowski.
Quel est l’auteur qui vous a donné envie d’arrêter d’écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?
Franz Bartelt.
Quelle est votre première grande découverte littéraire ?
Une biographie de Zinedine Zidane. A peine illustrée, en plus.
Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?
Le jardin du Bossu, Franz Bartelt.
Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?
Les Misérables I. Surtout qu`on y mentionne Montfermeil, mon lieu de naissance, et sujet de mon premier combat, un pamphlet particulièrement acide intitulé " à quand un RER à Montf` ? ". Disponible dans le Seine St Denis Mag d`octobre 2009.
Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?
Cronopes et Fameux de Julio Cortázar, pour tous les amoureux de l`absurde.
Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?
Avec un peu d`amertume, Martine, tome 08 : Martine à la montagne. Les spécialistes du ski alpin me donneront raison.
Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?
" On cherche parfois bien loin ce que l`on a tout près. C`est une chose qui arrive souvent aux astronautes. "
Et en ce moment que lisez-vous ?
Vos questions.
Entretien réalisé par Marie-Delphine
Découvrez
Je vais m`y mettre de
Florent Oiseau aux éditions
Allary :

Florent Oiseau vous présente son ouvrage "
Tout ce qui manque" aux éditions Allary.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2879934/florent-oiseau-
tout-ce-qui-manque
Note de musique : © mollat
Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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Devant mon immeuble, par terre, il y avait une mare de vomi, je l’ai regardée en fumant une cigarette, avec un mélange de dégoût et de fascination et j’ai jeté mon mégot dedans. À son contact, la braise s’est éteinte en libérant un sifflement léger, et je me suis entendu dire : les flaques de gerbe sont les ecchymoses des trottoirs.
- Qu’est-ce que tu aimes chez une femme ?
[...]
- Chez une femme ? J’aime les cernes et le sourire. Les choses sur lesquelles je peux avoir une incidence.
Dès que tu lui posais une question sur un pays, il répondait toujours la même chose. " La Sierra Leone, ça relève de l'intime." Jamais un détail sur la culture locale, jamais une précision météorologique, gastronomique, anthropologique, jamais une photo de lui dans une forêt tropicale ou devant une pyramide. Que de "l'intime" et des épingles sur son globe terrestre. Il avait cet air de ceux qui sont revenus de tout sans être jamais allés nulle part.
(page 175)
Le mouvement ajoute une dimension encore plus éphémère aux choses. Quand le bus file, il mange et digère les passants, le cerveau agit comme une baleine qui absorbe des milliers de poissons, sans qu’aucun n’apparaisse plus consistant qu’un autre. Et toutes ces personnes qui surgissent et disparaissent en même temps nous rappellent une chose que l’on ne prend pas assez en compte au quotidien : nous ne sommes que ça, des passants.
Je me suis arrêté après quelques arrêts, via Ginnastica, dans le vieux Trieste. Des immeubles aux couleurs chaudes mais usées, des façades qui se cassent la gueule et que personne ne semble vouloir refaire. Des murs roses, jaunes, orange, mais rien de clinquant, aucune trace d'un quelconque ravalement, d'une vaine tentative de rafraîchissement. Trieste se laissait vivre et mourir avec l'insouciance et la résignation de ceux qui ont trop aimé pour craindre de souffrir.
p 207
Parfois, la vie ne vous donne rien pendant des années, des décennies. Pas un trèfle à quatre feuilles, pas un Noël sous la neige, pas un billet de banque retrouvé dans une vieille veste. Aucune satisfaction, pas la moindre victoire, rien à manger pour l'égo. Elle ne vous donne tellement rien que vous pensez qu'elle vous a oublié. Vous êtes sous le porche d'une gare de province, un soir, et il pleut des cordes. Vous êtes trempé, il fait froid, vous êtes seul, le dernier bus vient de passer. Même un clébard ne viendrait pas vous tenir compagnie. Et alors que vous ne l'attendez plus, elle vient vous éclairer dans la nuit de ses phares emplis d'espoir. Elle fait ça pour tout le monde. Certains sont devant les pleins phares chaque journée, d'autres -la majorité- doivent se contenter de brefs faisceaux, d'éphémères éclaircies. Mais la vie finit toujours par revenir chercher les oubliés sous les porches des gares de province.
Le jour s'est levé, et je l'ai regardé faire.
Un clochard remontait la rue, habillé d'une grosse doudoune d'hiver. Le thermomètre de la pharmacie à l'angle de la rue indiquait trente et un degrés. Si les clochards portent leurs manteaux en été, ce n'est pas parce qu'ils ont froid, c'est parce qu'ils n'ont pas d'endroit pour les ranger.
(page 159)
-Qu'est-ce que tu aimes chez une femme ?
[...]
-Chez une femme ? J'aime les cernes et le sourire. Les choses sur lesquelles je peux avoir une incidence.
Je me suis acheté un café que j’ai touillé avec l’aiguille du temps.