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D'abord érigé à des fins militaires, le bâtiment de la Bibliothèque de l'Arsenal a basculé dès la seconde moitié du XVIIIe siècle dans le champ de la sociabilité savante et mondaine, sous l'égide du marquis de Paulmy qui y constitua une remarquable collection encylopédique à partir de 1756. À sa suite, d'autres hommes et femmes s'illustrèrent à l'Arsenal comme passeurs pédagogiques et culturels, à l'instar de Madame de Genlis, Charles Nodier ou José Maria de Heredia. Anne-Bérangère Rothenburger, conservatrice à la Bibliothèque de l'Arsenal, vous invite sur les pas de ces illustres, à travers une promenade dans les représentations iconographiques variées (gravures, statues, peintures, photographies ) conservées dans les collections de la BnF.
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Charles Nodier
Quiconque est parvenu à discerner le bien et le mal a déjà perdu son innocence, car le propre de l’innocence est de ne pas connaître le mal. Dans Revue de Paris (avril 1839 p.243) |
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Charles Nodier
Après le plaisir de posséder des livres, il n'y en a guère de plus doux que d'en parler |
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L'amateur de livres de Charles Nodier
Le bibliophile est un homme doué de quelque esprit et de quelque goût, qui prend plaisir aux œuvres de génie, de l'imagination et du sentiment. Il aime cette muette conversation des grands esprits qui n'exige pas de frais de réciprocité, que l'on commence où l'on veut, que l'on quitte sans impolitesse, qu'on renoue sans se rendre importun. (p.92-93)
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Jean Sbogar de Charles Nodier
La position de Trieste a quelque chose de mélancolique qui serrerait le cœur si l’imagination n’était pas distraite par la magnificence des plus belles constructions, par la richesse des plus riantes cultures. C’était le revers d’un rocher aride, embrassé par la mer ; mais les efforts de l’homme y ont fait naître les dons les plus précieux de la nature. Pressé entre la mer immense et de hauteurs inaccessibles, il offrait l’image d’une prison ; l’art, vainqueur du sol, en a fait un séjour délicieux. Ses bâtiments, qui s’étendent en amphithéâtre depuis le port jusqu’au tiers de l’élévation de la montagne, et au-delà desquels se développent, de degrés en degrés, des vergers d’une grâce inexprimable, de jolis bois de châtaigniers, des buissons de figuiers, de grenadiers, de myrtes, de jasmins, qui embaument l’air, et au-dessus de tout cela la cime austère des Alpes illyriennes, rappellent aux voyageurs qui traversent le golfe l’ingénieuse invention du chapiteau corinthien ; c’est une corbeille de bouquets, frais comme le printemps, qui repose sous un rocher. Dans cette solitude ravissante, mais bornée, on n’a rien négligé pour multiplier les sensations agréables. La nature a donné à Trieste une petite forêt de chênes verts, qui est devenue un lieu de délices : on l’appelle, dans le langage du pays, le Farnedo, ou le Bosquet. Jamais ces divinités champêtres, dont les heureux rivages de l’Adriatique sont la terre favorite, n’ont prodigué, dans un espace de peu d’étendue, plus de beautés faites pour séduire. Le Bosquet joint souvent même à tous ces charmes celui de la solitude ; car l’habitant de Trieste, occupé de spéculations lointaines, a besoin d’un point de vue vaste et indéfini comme l’espérance. Debout sur l’extrémité d’un cap, et sa lunette fixée sur l’horizon, son plaisir est de chercher une voile éloignée, et, depuis le Farnedo, on n’aperçoit pas la mer. Page 43 + Lire la suite |
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Jean Sbogar de Charles Nodier
Les brigands avaient paru à Santa-Croce, à Opschina, à Materia ; on assurait qu’ils occupaient même le château de Duino, et que c’était du pied de ce promontoire qu’ils se jetaient, à la faveur de la nuit, comme des loups affamés, sur tous les rivages du golfe, où ils portaient la désolation et la terreur. Les peuples épouvantés se précipitèrent bientôt sur Trieste. La casa Monteleone surtout était loin d’être un asile sûr. Un bruit s’était répandu qu’on avait vu Jean Sbogar lui-même errer, au milieu des ténèbres, sous les murailles du château. La renommée lui donnait des formes colossales et terribles. On prétendait que des bataillons effrayés avaient reculé à son seul aspect. Page 41 |
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Jean Sbogar de Charles Nodier
Ce sont des hommes redoutables que le désir de voir du sang tient éveillés pendant les plus longues nuits d’hiver, et qui égorgeraient une jeune mariée pour avoir son collier de perles. CONDOLA. Épigraphe du chapitre II |
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Jean Sbogar de Charles Nodier
On trouve donc ici les scories de mainte doctrine du pouvoir, passée à travers le filtre de l'expérience révolutionnaire : Machiavel, Hobbes, Rousseau s'y côtoient, mais ne s'y reconnaîtraient pas. En revanche, il n'est pas étonnant que les Jeunes-France, les romantiques de la seconde génération, se soient parfaitement reconnus dans ce portrait, qu'ils se soient jetés, pleins d'une foi mystique, dans cet idéalisme excessif. Et Nodier, pour l'occasion ; était prêt à oublier qu'il avait été un ultra-royaliste enragé. Préface signée L.C. (Loïc Chotard) |
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Jean-François les Bas-Bleus de Charles Nodier
Je n’écrirai de ma vie une histoire fantastique, on peut m’en croire, si je n’ai en elle une foi aussi sincère que dans les notions les plus communes de ma mémoire, que dans les faits les plus journaliers de mon existence ; et je ne crois pas pour ceci rien devoir en intelligence et en raison aux esprits forts qui nient absolument le fantastique. Je diffère d’eux, à la vérité, par une certaine manière de voir, de sentir et de juger, mais ils diffèrent ainsi de moi, et je ne me crois obligé par aucun défaut public et reconnu d’organisation à soumettre les perceptions intimes de mes sens et de ma conscience au caprice d’une autorité frondeuse, qui n’a peut-être de motif pour contester qu’une présomptueuse ignorance.
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Jean Sbogar de Charles Nodier
L’étranger doué d’une imagination vive, qui, assis sur les rivages de Dalmatie, a entendu une seule fois la jeune fille morlaque exhaler son chant du soir, et livrer aux vents ses accents qu’aucun art ne saurait enseigner, qu’aucun instrument n’imitera jamais, qu’aucune parole ne peut décrire, a pu comprendre la merveille des sirènes de l’Odyssée, et il a excusé, en souriant, la méprise d’Ulysse. Page 69 |
Quel fruit Homère appelait-il le "fruit des Dieux" dans l'Odyssée ?