Le Repos du Guerrier Trailer
On avait mis partout des pelouses régulières, entourées de grillages pour que les mômes n’y cavalent pas, on avait planté de jeunes arbres également dans des grilles pour que les mômes ne les massacrent pas ; comme ça ça leur faisait un Espace Vert, qu’ils le veuillent ou non. Ce que je me demande c’est pourquoi on ne fout pas plutôt les mômes dans les grillages et les arbres en liberté autour.
"Si on a une âme on devient fou, et c'est ce qui m'arrive." C'est probablement ce qui m'arrivait je devenais folle, mais non je devenais morte, c'est ça devenir une grande personne cette fois j'y étais je commençais à piger, arriver dans un cul-de-sac et se prendre en gelée ; un tablier à repriser sur les genoux éternellement. L'homme est composé d'un corps et d'une âme, le corps est quadrillé dans les maisons, l'âme cavale sur les collines, où ? Quelque part il y avait quelque chose que je n'aurais pas parce que je ne savais pas ce que c'était. Il y avait une fois quelque chose qui n'existait pas.
D'ailleurs les autres bonhommes étaient également des puits de science, ils étaient intarissables sur n'importe quoi, traitant tous les sujets avec autorité, chacun tenant à montrer aux autres qu'il n'était pas un con et qu'il en connaissait un bout, surtout sur les bagnoles, où on arrivait toujours quand tout le reste avait été traité […]
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- Si le bonheur consiste à accumuler des appareils ménagers et à se foutre pas mal du reste, ils sont heureux, oui ! éclata Frédéric. Et pendant ce temps-là les fabricants filent leur camelote à grands coups de publicité et de crédit, et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes...
- Capitalistes, dit le père.
- Le confort c'est pas le bonheur ! dit Frédéric, lancé.
- Qu'est-ce que le bonheur ? dit Ethel.
- Je ne sais pas, grogna Frédéric.
- Mais dis-moi, qu'on arrive à se poser ce genre de question au lieu de comment bouffer, ça ne prouve pas qu'on a tout de même un peu avancé ? dit M. Lefranc.
- Peut-être, dit Frédéric. Peut-être bien, dans le fond.
- Pour découvrir que le confort ne fait pas le bonheur, il faut y avoir goûté, non ? C'est une question de temps.... Quand tout le monde l'aura, on finira bien par se poser la question. Ce qu'il faut c'est regarder un peu plus loin.
A la mi-juillet, mes parents se présentèrent à l'hôpital. Ma mère avait les douleurs. On l'examina, et on lui dit que ce n'était pas encore le moment. Ma mère insista qu'elle avait les douleurs. Il s'en fallait de quinze bons jours, dit l'infirmière ; qu'elle resserre sa gaine.
Mais est-ce qu'on ne pourrait pas déclarer tout de même la naissance maintenant ? demanda mon père. Et on déclarerait quoi ? dit l'infirmière : une fille, un garçon, ou un veau ? Nous fûmes renvoyés sèchement.
Zut dit mon père c'est pas de veine, à quinze jours on loupe la prime. Il regarda le ventre de sa femme avec rancœur. On n'y pouvait rien.

La maîtresse ouvrit le livre, et dit : "Qu'est-ce que Dieu ? Dieu est un pur esprit infiniment parfait."
Jamais de toute ma vie je n'avais entendu un truc aussi extraordinaire. Dieu est un pur esprit infiniment parfait. Qu'est-ce que ça pouvait être ? Je restais la bouche ouverte.
Je retournais la phrase dans tous les sens, cherchant par quel bout la prendre ; et je n'y arrivais pas. Blanc, lisse et fermé comme un oeuf, le Pur Esprit Infiniment Parfait restait là dans ma tête, je m'endormis avec sans avoir pu le casser.
Melle Garret ne pondait pas un oeuf toutes les semaines. En général c'étaient, sauf l'histoire sainte qui était plus jolie que l'histoire non sainte, et, d'abord, sans dates, des explications assommantes et compliquées, comme "s'il faut un ouvrier pour construire une maison, il a bien fallu un Dieu pour créer le ciel et la terre". Je ne voyais vraiment pas pourquoi par exemple, et j'eus une histoire avec Melle Garret, qui ne comprenait pas pourquoi je ne comprenais pas, et me dit que je "raisonnais". C'était bizzare comme discussion, ce n'était pas moi qui raisonnais, mais eux avec leur ouvrier. mais quand les gens se butent il n'y a rien à faire. Elle me dit que je n'avais pas à chercher à comprendre, mais à savoir par coeur, c'était tout ce qu'on me demandait. Mais moi je ne peux pas réciter par coeur un truc que je ne comprends pas, c'est comme si j'essayais d'avaler un tampon jex.
Mon cher Philippe,
Tu m’as invitée au Carmel. Je t’ai suivi. Je m’en suis remise à toi. C’était te faire une bien grande confiance. Et, de ma part, c’était très étourdi. Je crois, mon cher Philippe, que tu ne te sois un peu pris pour un autre. Abandonnée dans tes mains, je n’ai fait que descendre. Un homme ne fait pas un Carmel. Alors, un député !... Ainsi que je t’en ai averti à temps, je ne serai pas même une heure la femme d’un député de cette étiquette.
Tu es élu, je te félicite, et je te quitte.
Je ne voyais que son comportement : visées, préparatifs, manoeuvres d'approche et d'encerclement, menées souterraines, pose de pièges, toute la mécanique comment ça marchait. Tout ça j'observais superbement, et voyais venir de loin - ce qui m'a peut-être poussé des antennes pour l'avenir mais n'avançait pas mon présent car il n'y avait rien qui le pût, vu qu'il détenait la force et le droit et sans doute aussi ce foutu dieu que nous avons.
L'oppresseur n'entend pas ce que dit son opprimé comme un langage mais comme un bruit. C'est dans la définition de l'oppression
On ne peut pas tourner le dos à tout. C’est géométrique.