Surprenant, dérangeant, hallucinant voir asphyxiant.. Ce roman, récompensé par le prix Goncourt lycéens 1994, est à la fois inclassable et intemporel.
"veuf, cinquante-six ans, sérieux, souhaite finir vie tranquille avec femme douce, bonne ménagère ,en vue mariage et affection" Cette annonce dans le Chasseur français a été rédigée par Alphonse Bouvier, Eudoxie, veuve également , 47 ans y a répondu. L'annonce précisait aussi "maison de rapport avec jardin, banlieue Paris, un enfant"...
mais ne précisait pas que l'enfant avait passé les trente ans, qu'il était un peu "bizarre" . C'est ainsi que Eudoxie est devenue la Belle-mère de Lucien à la vie à la mort oserais-je dire, parce qu'en 1935 lorsqu'une femme s'engageait elle ne rompait pas sa parole.Elle n'avait juste pas prévu de vivre cinquante ans en compagnie de son beau-fils...
Ce roman m'a fait pensé à un vieux film en noir et blanc, où chaque geste semble sortir du néant, où tout bouge lentement, très lentement , où les personnages principaux vieillissent côte à côte sans beaucoup échanger si ce n'est sans doute l'essentiel.
L'écriture de Claude Pujade-Renaud confère à ce texte une tonalité et une densité très particulière. Un roman qui pose les éternelles questions de la vieillesse et de la différence . Une lecture un brin éprouvante mais enrichissante
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Une très belle histoire qui ne peut laisser quiconque insensible. Avec une approche psychologique très fine et pleine de tendresse, Claude Pujade-Renaud aborde les problèmes de la vieillesse, les problèmes de la cohabitation quand les manies et habitudes s'installent. Et les miracles de la vie, le bonheur que nous offre une relation même quand l'horizon est opaque et l'avenir bloqué.
Eudoxie, couturière à domicile, tente d'apprivoiser Lucien, le beau-fils que lui a laissé Armand disparu pendant la guerre. C'est dans une annonce du chasseur français, qu'elle avait rencontré cet homme, comme il était assez courant à cette époque.
Se noue alors un arrangement, une vie à deux dans le quartier tranquille pavillonnaire de Meudon Val-Fleury entre elle, 47 ans, et son beau-fils de 30 ans. Cet étrange garçon d'abord taciturne qui écrit des lettres à sa défunte mère où il l'informe qu'aucune femme ne la remplacera est hypocondriaque. Il déclenche une crise d'asthme à la moindre contrariété. Malgré ce comportement étrange, Eudoxie, avec finesse, se rapproche de ce garçon attachant. Un garçon intelligent auquel aucun mécanisme ne résiste, un bricoleur ingénieux qui lui répare d'un coup de main habile sa Singer.
De confidence en confidence, entre deux mots échangés et quelques tâches ménagères, travaux de toutes sortes, ce couple insolite apprend à se connaître. Ces deux êtres qui tout sépare finissent par s'apprivoiser. Non sans quelques agressions. Avec le sourire. Quelques ruses et concessions. Ils traversent plusieurs décennies comme un vieux couple le ferait.
Un roman subtil servi par une plume extrêmement belle.
4.25/5
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Un livre qui m’a profondément émue, tout en pudeur et retenue, une belle histoire d’êtres marqués par le deuil et la perte, accompagnés de chats. Des histoires de vie et de vieillissement. Une écriture souple et simple
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Une révélation pour moi les romans de Claude Pujade-Renaud
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Eudoxie avait épousé Armand par petite annonce, mais la guerre a tué Armand et Eudoxie reste avec le fils de celui-ci, étrange, un peu fou... C'est le quotidien, les difficultés de cohabitation, la banlieue, beaucoup de tristesse et parfois de beaux moments. Bien écrit mais trop sombre pour me plaire.
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Claude Pujade-Renaud nous raconte ici, de sa très belle écriture, la relation entre Eudoxie et son beau-fils Lucien. Eudoxie épouse Armand, le père de Lucien, alors qu'elle a déjà une quarantaine d'année. La guerre la laisse veuve assez rapidement. Lucien et Eudoxie vont alors vivre ensemble et ce, jusqu'à leur mort. Mais Lucien est un garçon sauvage, bizarre, au comportement proche de l'autisme. Tout au Long de ses années, Eudoxie va l'apprivoiser et s'attacher à cet homme fragile, cet enfant perdu. Et l'amour qui nait entre ces deux êtres est profondément touchant. Le récit est subtil, délicat et fort. C'est un très beau roman. Ça m'a plu d'apprendre que des jeunes lecteurs lui avait décerné le prix Goncourt des lycéens en 1994.
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Des années 30 aux années 80, la vie ordinaire et simple de gens simples et ordinaires (ceux qu'on appelait les français moyen avant de les dénommer "La France d'en bas" puis, surenchère dans le mépris, "les gens qui ne sont rien"). Des gens venus en région parisienne de Normandie, de Mayenne, du Béarn, construire la France d'aujourd'hui.
Claude Pujade-Renaud, de son écriture limpide, livre un roman plein de pudeur et délicatesse sur la tendresse, la confiance et même l'amour qui s'établissent entre deux êtres qui se retrouvent, sans l'avoir souhaité et par la force des choses, vivre côte à côte dans leur pavillon de banlieue pendant une cinquantaine d'années.
De petites choses en petits détails, de non-dits en petits orages domestiques s'établissent des liens quasi filiaux entre Eudoxie, veuve du père, et son beau-fils Lucien, adulte "dérangé" ne vivant que pour ses chats et ses inventions.
Un très beau livre.
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L'annonce dans le chasseur français stipulait : Veuf, cinquante-six ans, sérieux, souhaite finir vie tranquille avec femme douce, bonne ménagère en vue mariage et affection. Maison de rapport avec jardin, banlieue Paris, un enfant. Eudoxie, âgée de quarante-sept ans, veuve de son état a répondu à cette demande et quelques mois plus tard, elle épouse Armand. Heureuse, elle l'est sûrement, enfin presque. Et pour cause : L'enfant mentionné dans la publication, s'avère être en réalité un jeune homme, Lucien, d'une trentaine d'années , perturbé, insondable, souffrant d'un comportement imprévisible qui l'évite, ne lui adresse pas la parole, se terre dans sa chambre, ignore totalement sa présence. Déstabilisée par le comportement de ce dernier, Eudoxie découvre des écrits de Lucien adressés à Blaisine, sa défunte mère, indiquant que jamais personne ne la remplacera, aucune autre femme ne prendra la place qu'elle occupait dans son coeur et dans sa demeure. Voilà qui promet bien du fil à retordre à sa belle-mère.
Malheureusement, au décès d'Armand, Eudoxie va devoir faire face à la présence de Lucien, supporter ses moments de folie et son mutisme d'où une divergence qui ne présage rien de bon entre ces deux protagonistes.
Pourtant, si pour Armand, son fils est " fou ", la réalité en est tout autre. S'il est certain que Lucien présente des failles qui se ressentent sur son comportement énigmatique, au fil des jours, Eudoxie découvre en cet homme fuyant, une incroyable ingéniosité, féru de mécanique, lésé de n'avoir pu déposer un brevet qu'un autre venait juste de présenter peu de temps avant lui. Petit à petit comme l'oiseau fait son nid, ces deux écorchés, solitaires vont s'apprivoiser, se soutenir, travailler et marcher ensemble sur le chemin de la vieillesse, si proches et si complices que l'on croirait voir presque un vieux couple.
Claude Pujade-Renaud nous dépeint la trajectoire de deux personnages hors du commun, unis par un concours de circonstances.
Une lecture émouvante sur l'attitude de deux êtres que tout opposait, la vie telle qu'elle se présente avec son lot de contingence qui réserve parfois des bien belles surprises.
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Une histoire de couple assez touchante et très singulière.
Eudoxie est une femme née à la fin du 19 eme siècle dans un milieu modeste. Après un premier veuvage, elle se remarie par petites annonces avec Armand, veuf lui aussi.
Elle s'installe dans son petit pavillon où vit également Lucien, le fils qu'il a eu de son premier mariage avec Blaisine. Lucien est un peu dingue et très sauvage. Il ignore la nouvelle épouse de son père pour rester fidèle à sa mère ( Et à ses tantes mortes)
Lorsque la guerre arrive, Armand et Eudoxie fuient les bombardements et au cours de l'exode, Armand meurt.
Eudoxie rentre au Val Fleury, Armand, délirant, est hospitalisé en psychiatrie.
Peu à peu, une relation étrange et forte se noue entre eux. Lucien est intelligent mais parfois bizarre.il est très exclusif, Eudoxie l'apprivoise en le respectant. Chaque fois qu'elle le quitte, il sombre à nouveau dans un délire. La vie s'écoule, les années passent, la vieillesse arrive et Eudoxie part en maison de retraite.
A l'occasion d'un WE de " permission" ils finiront ensemble dans l'étang avec le chat Nonotte.
L'auteur nous embarque dans cette vie de simples gens, l'époque est bien rendue avec l'arrivée du confort : Frigidaire, téléphone, télévision. On sent la solidarité, les engagements politiques, la peur du communisme.
Eudoxie a le goût des mots. Elle découvre la littérature. Elle est heureuse de ce qu'elle a, de ce que sa vie assez rude pourtant lui apporte.
Un très bon roman dont les personnages nous accompagnent encore une fois le livre refermé.
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Il s'agit d'une jolie histoire sur la relation dans le temps d'une femme et son beau fils.
Histoire douce sur une relation atypique qui passe et traverse les années.
On s'installe doucement et tranquillement dans ce roman qui arrive à vous raconter l'ordinaire d'un quotidien atypique.
J'ai apprécié me plonger dans ce petit livre tranquille.
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BELLE-MERE
Claude PUJADE-RENAUD
03 JUIN 2012
A sa façon, l’auteur nous raconte une histoire de vie de gens simples, humbles, dont les seules aventures sont celles du quotidien et de ses difficultés dans la pénurie, ni originales ni grandioses, mais assumées avec une grande discrétion et avec une moralité sans faille.
Une femme de quarante sept ans se remarie, suite à une annonce, avec un homme solide mais taciturne, qui a un fils à charge. Mariage discret, emménagement dans ce nouvel univers, adaptation aux lieux et gens, et découverte que le fils d’une trentaine d’années est un peu « marginal », sauvage et sans aucun lien social ni familial, intelligent à sa façon, mais quasi autiste depuis le décès de sa mère, mutique et sans travail.
Puis après quelques années, le mari meurt, laissant sa veuve seule face à ce fils.
L’auteur raconte alors la lente, progressive et chaotique vie à deux, les liens qui se tissent en douceur et souvent sans signes apparents mais en profondeur, où tout est dans le détail et le non-dit, leurs rares fréquentations avec les quelques personnes qui gravitent autour. Même les actes de civisme et de rébellion face à l’occupant, puisque cette histoire traverse la guerre qui n’est ici évoquée qu’en filigrane, sont commis et mentionnés avec la modestie de qui sait où est son devoir sans forcément ni le faire savoir, ni trouver cela héroïque, alors qu’on mourrait parfois pour moins que cela en ces temps.
Ce couple improbable et qui n’en est pas un, connait peines et joies, toujours mineures mais si importantes voire déflagrante pour eux, et, malgré toutes les difficultés de la vieillesse, préférer finalement cette union jusqu’au bout, plutôt qu’une séparation quasi socialement obligatoire.
Plein de pudeur, de retenue et de sensibilité, l’auteur nous remue étrangement avec des vies qui passent ordinairement inaperçues et dont on ne fait pas un roman, parce que totalement dépourvues de « sensationnel », d’aura, de péripéties : mais tout le sens de la vie, de la morale, de l’amour s’y exprime avec force et entêtement.
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Histoire d'une vie simple, celle d'Eudoxie ("celle qui a une opinion juste" comme elle l'apprendra sur le tard). Veuve une première fois, elle se remarie avec Armand qui lui perdra la vie à peine 5 ans plus tard lors d'un bombardement sur la route de l'exode. Retour pour Eudoxie, seconde fois veuve, dans la maison de Meudon, où elle cohabitera pendant près de 50 ans avec Lucien, son beau-fils de 15 ans son cadet. Un homme taxé tour à tour de fou et d'ingénieux par son entourage, un homme tantôt renfermé sur lui-même, tantôt faisant preuve d'une grande vivacité d'esprit. Un original avec ses secrets, et ces femmes qui le hantent, Blaisine sa mère, Firmine et Marceline ses tantes maternelles. Eudoxie ne juge pas, fait avec, finit en quelque sorte à l'apprivoiser, et c'est une relation ponctuée de petites attentions qui se développe. Un beau portrait d'une femme digne qui traverse le 20ème siècle sans faire de bruit.
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