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Critiques de Dave Gibbons (151)
Watchmen (Intégrale)

Watchmen ça sonnerait presque comme un titre des Village people…

et pourtant walou, quechi, rien à watcher… pour les plus comics d’entre vous dont je fais parti, par ironie et humour, bien que je préférasse le « Q » au « C », ce titre doit avoir une saveur amer, le ton est cynique, l’ambiance est noire, ça manque de sourire et de savon, on étoufferait presque dans cette uchronie toute crasseuse ou les super héros se comportent comme des enculés enfin surtout celui qui dès le départ testera les lois de la gravité avec pour fatalité (puisque Newton avait bien raison) un baiser volé avec écrasage de tronche sanguinolente sur le bitume qui faut pas trop emmerder quand t’habite au 10 ème étage…. Le « comédien » est mort….



S’en suit une enquête menée par un certain psychopathe du nom de « Rorschach » à la morale sélective invitant avec tortures les enfoirés à crever dans d’atroces souffrances… mais il se fera arrêter et enfermer pour « spychopathie aigue… »



Nos supers-héros n’ont pas réellement de supers pouvoirs sauf un, le docteur Manhattan, suite à un fâcheux accident nucléaire, monsieur a décidé de taquiner la divinité, facilitant un peu le destin des Etats-Unis… mais voilà la routine divine est grisante et le gars veut rester bleu, du coup c’est la merde, même avec sa meuf « Le Spectre Soyeux II » ça sent les radiations… et Mars rougit, lui fait de l’œil, il craque et s’exile loin des humains « Freudonnant » un mal être trop profond pour être cosmique par les trouducs qui peuplent la terre...



Loin des yeux loin du cœur, sa nana se frotte la luxure au « Hibou », leurs libidos se mélangent… et ensemble ils décident de faire évader leur pote pour terminer l’enquête et déjouer les plans du vrai méchant…



Sur fond de guerre froide, cette BD est un chef d’œuvre du genre, et l’actrice qui incarne Spectre soyeux dans le film adapté de celle-ci m’a donné toute justification lubrique (tout à fait honorable et romantique) de me tripoter l’envie d’acheter le bouquin pour mater les dessins… Faut voir la bombasse quand même, je veux dire que tout homme hétérosexeuellement constitué, pas trop porté sur les "Village People", devrait savoir érectionner de désir devant le spectacle soyeux d’un spectre de niveau bandant maximum, une main sur l’engin de la déprave pour éviter tout débordement malencontreux pinçant de manière héroïque et brutale l’orgasme un peu trop pressant :



« steplait steplait steplait, non non nonnnnnnnnnnnnnnnnnnn »



Je me dégoute…



Alors c’est vrai que je préfère les films aux BD, surtout quand ils sont bien réalisés, l’immersion dans un comics est pour ma part bien plus compliquée que dans un roman, pourtant je suis un visuel, amateur de crobars, de nichons, et de petits dessins à la con pour m’expliquer des choses simples qui m’échappent à l’oral...



" Femme donc la bouche toi, ça fait désordre…"



Donc je devrais être réceptif, et bah ouais, mais non, sans plus :



"L’imagination a ses fantasmes que l’inconscient ignore… "



A plus les copains…

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Watchmen (Intégrale)

S’attaquer au monstre protéiforme qu’est The Watchmen s’apparente à tenter l’ascension du K2 en espadrille et moi je préfère les tongs. J’ai 2200 signes (un peu moins maintenant) pour accoucher d’un post crédible sur le roman graphique de Alan Moore. Je pourrais pousser un aaargh orgasmique en étirant les a jusqu’à la jauge souhaitée mais bon... Nous sommes d’accord... Le point positif est le zéro pression, The Watchmen possède une telle aura, une telle puissance narrative, que ma chronique aura autant d’impact et de visibilité qu’une bouteille d’eau minérale dans le cellier de Gérard Depardieu.



Alan Moore s’empare d’une des rares figures mythologiques des Etats Unis : le super-héros. Il en pervertit assurément le sens of wonder. Moore a le génie de montrer la grandeur et le ridicule de ces hommes et femmes qui se griment pour délivrer une justice parallèle et hors de tout cadre juridique. Il a également la force de ne pas verser dans l’outrance et la parodie, The Watchmen n’a rien d’un The boys, c’est une œuvre sérieuse, poignante, non dénuée d’ironie et une tragédie, on pourrait se perdre sans fin en analyse sémiologique, sociologique et plein de truc en « gique » et on aurait tort.



The Watchmen, avant tout, c’est du plaisir, à l’état brut. Une joie enfantine devant le sens du rythme, le découpage, la densité romanesque, la cohérence de la dystopie créée par Alan Moore et sa profondeur. The watchmen rappelle ce principe fondamental : il est bon de surveiller les surveillants. Et la spirale n’arrête pas de s’enrouler, de s’entre-dévorer : surveiller les surveillants des surveillants des surveillants, etc.



Un livre fondamental qui enfonce les digues rassurantes des genres littéraires. Un chef-d’œuvre, une assertion que l’on peut énoncer, pour une fois, sans galvaudage.



(Re)lire The Watchmen est l’assurance d’une expérience déroutante, haletante, émouvante, profonde, propre à épuiser un registre solide de qualificatifs laudateurs.
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Watchmen (Intégrale)

Lecture indispensable et obligatoire.
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Watchmen (Intégrale)

1. Sortie initialement en 1986, Watchmen est une bande dessinée au potentiel de relecture infini. Il y’ a toujours un détail pour reparaître. Ainsi, dès la page 1, on aperçoit un camion de Pyramid Deliveries qui va sûrement livrer l’un des derniers composants pour le dénouement final.



2. Watchmen, c’est une bande dessinée policière qui commence par un crime et qui déroule l’enquête de manière ludique et intelligente adapté à ce média visuel. Le Comedian, un ex-superhéros, a été assassiné. Ses anciens compagnons se mettent à la recherche du coupable.



3. Watchmen, c’est une rigueur graphique exceptionnelle. Dave Gibbons réussit à mettre toutes les informations exigées par le scénario dans chaque dessin, sans aucune impression de surcharge visuelle. Il a retenu une trame rigoureuse de 9 cases par page, avec quelques variations qui consistent à fusionner 2 ou 3 cases entre-elles. Les dessins sont entièrement au service de l’histoire.



4. Watchmen, c’est une structure narrative complexe qui donne l’impression au lecteur d’être intelligent. Moore et Gibbons enchevêtrent l’enquête principale avec des pages de textes illustrées en fin de chacun des 11 premiers chapitres, et avec une bande dessinée dans la bande dessinée.



Cette histoire semble dans un premier temps s’appliquer au coupable et condamner ses actions (comme un signe annonciateur du jugement de valeur final du Docteur Manhattan), et comme un clin d’œil ironique au choix du prochain sujet de la feuille de choux d’extrême droite.



5. Watchmen, c’est un point de vue philosophique sur le sens de l’histoire et la perception de la réalité. À un deuxième niveau, l’histoire du Black Freighter indique que la compréhension et l’interprétation de la réalité dépend de la personne qui la contemple ; chaque individu est limité dans sa capacité à appréhender le monde qui l’entoure.



De la même manière, chacune de nos actions est asservie à notre capacité à comprendre ce qui nous entoure. Et ce développement de l’histoire renvoie à ces moments où les personnages changent de vision sur le monde qui les entoure en contemplant les actions du Comedian. Edward Blake est celui qui dispose de la vision la plus claire du monde qui l’entoure, mais c’est aussi celui qui est le plus incapable d’agir parce que cette absence d’illusions le prive de motivation.



6. Watchmen, c’est une uchronie dans laquelle l’existence d’un seul homme doté de pouvoirs extraordinaires a bouleversé le rapport des pouvoirs des nations. La défense stratégique des États-Unis repose sur ses épaules. Richard Nixon est toujours au pouvoir. Mais la tension monte entre l’Ouest et l’Est et une guerre semble inéluctable et imminente.



7. Watchmen, c’est une analyse psychologique pénétrante et sophistiquée de chacun des principaux personnages. Après le décès du Comedian, chacun se remémore à tour de rôle une de ses rencontres avec lui. Mais il s’avère que ces scènes ne servent pas tant à honorer la mémoire du défunt qu’à mesurer son impact sur chacun des narrateurs et sur l’orientation qu’il va donner à sa vie.



8. Watchmen, c’est un univers visuel d’une rigueur et d’une cohérence parfaites. Dave Gibbons et Alan Moore ont travaillé pour rendre chaque élément visuel significatif : les graffiti sur les murs, la récurrence symbolique du smiley taché, les voitures électriques, les logos des entreprises, les affiches publicitaires, jusqu’au design des chaussures portées.



9. Watchmen, c’est des séquences narratives d’une force et d’une intelligence inouïes. Le chapitre consacré à Rorshach est bâti autour de la symétrie du masque. La première page répond à la dernière, la seconde à l’avant dernière, etc.



Dans le chapitre 9, Moore et Gibbons réussissent un tour de force exceptionnel : ils arrivent à faire partager au lecteur le point de vue d’un personnage qui a une perception globale du temps et non linéaire. Et le résultat est convaincant. Cette séquence sur Mars vaut à elle seule 5 étoiles (et même plus).



10. Watchmen, c’est une bande dessinée qui s’est élevée au-dessus de son origine (comics de superhéros) pour atteindre le niveau de chef d’œuvre auquel on ne pourrait reprocher que la place réduite des femmes. Le lecteur fait connaissance avec des personnages singuliers dans le cadre d’une trame policière classique qui sert à interroger les désirs et les motivations de chacun, ainsi que le sens de l’Histoire, tout en possédant une hauteur teneur en divertissement.



11. Watchmen, c’est une déconstruction exemplaire des conventions du récit de genre « superhéros ». À l’instar des philosophes du 20ème siècle, Alan Moore fait apparaître les postulats acceptés sans question et les contradictions internes (concernant les récits de superhéros), tout en proposant une alternative.



Il pointe du doigt les conventions et stéréotypes du genre : problèmes réglés à coups de poing, puissance physique masculine prédominante, loi du plus fort, suprématie d’une vision du monde paternaliste et hétérosexuelle.



Un par un, les superhéros sont confrontés à leurs limites, à l’inadéquation de leur mode d’action. Le cynisme du Comédien ne lui apporte ni bonheur ni paix de l’âme et le conduit à vivre en marge de la société. L’intransigeance de Rorshach l’accule dans une impasse existentielle, au sens propre.



Le docteur Manhattan se débarrasse de toute responsabilité en devenant un esprit analytique retiré de l’humanité. Ozymandias a peut-être gagné une bataille, mais pas la guerre. Seul le Hibou semble avoir un avenir, or c’est le seul qui a renoncé à ses modes opératoires de superhéros.



L’idéal héroïque classique est incarné par des individus au système de valeurs sujet à caution, imposant leur volonté par la force, solitaires au point de se couper des individus qu’ils défendent. Le pire représentant de cette engeance est Edward Blake, homme d’action sans remords, ayant abattu une femme enceinte de sang-froid, et violeur.



Moore condamne sans appel ni ambiguïté cet individu viril, macho et violent. Son cynisme l’a empêché de construire quoi que ce soit, l’a séparé de tous ses compagnons et ne l’a sauvé de rien.



À l’opposé d’Edward Blake, il y a l’étrange tandem de Sally et Laurie Juspeczyk, la mère et la fille. La première est alcoolique et toujours sous le charme de son violeur, la deuxième boit, fume, tabasse et vomit, sans oublier ses relations sexuelles de femme libérée.



Pourtant, ce personnage débarrassé des atours romantiques et romanesques de la gente féminine incarne l’alternative intelligente et pertinente au patriarcat. Alan Moore a choisi de construire un personnage complexe, avec des défauts très humains, comme modèle à suivre et il s’agit d’une femme.



De la même manière, Moore refuse le simplisme dans la description de la minorité sexuelle lesbienne. Joey et Aline sont également débarrassées des clichés romantiques, dépourvues d’idéalisation, dépeinte sans sensationnalisme ni voyeurisme. L’auteur ne remplace pas un idéal parfait (l’homme viril et puissant), par un autre.



Il montre la réalité dans sa complexité et son pluralisme. Il s’inscrit dans le courant philosophique du postmodernisme (ou philosophie postmoderne, concept différent de celui de postmodernisme artistique). Il fait sienne la remise en question d’une vision universaliste de la réalité, pour mettre en scène une conception pluraliste de la réalité.



Moore montre des personnages agissant suivant leurs convictions, issues de leur compréhension incomplète de la réalité (ce qui est le lot de chaque être humain).



Au lieu d’imposer une vision unique supplantant les autres, son récit sous-entend que la condition humaine doit s’accommoder de cette pluralité, de cette absence de vision unique et absolue.



Les dessins très descriptifs et un peu uniformisés de Dave Gibbons renforcent cette idée, en mettant chaque individu sur le même plan, avec un traitement graphique similaire, sans favoriser un personnage ou un autre, sans qu’un point de vue ne bénéficie d’une esthétique plus favorable.



12. Watchmen, c’est un héritage impossible à porter pour l’industrie des comics de superhéros. Les maisons d’éditions Marvel et DC ont souhaité tirer les bénéfices de Watchmen et de Dark knight returns, en réitérant les éléments qui ont fait leur succès. Il s’en est suivi une vague de récits plus noirs, avec des superhéros plus névrosés, plus désespérés, et souvent plus sadiques dans leur violence.



Dans le pire des cas, les auteurs maisons (et les lecteurs) ont vu en Rorschach le vrai héros de Watchmen, l’individu qui n’a pas eu de chance à la naissance, et qui applique une justice expéditive et sadique. Dans Watchmen, Walter Korvachs n’a rien d’un modèle à suivre. Il exécute froidement, blesse et handicape à vie ses opposants. Il vit une vie malheureuse et misérable. Son intransigeance le conduit à une forme de suicide, par un tiers.



Au mieux, les suiveurs ont vu dans le Comédien une forme de nihilisme adulte et conscient. À nouveau, Edward Blake est une ordure de la pire espèce, violeur sans repentir (il n’hésite pas à revenir auprès de Sally Juspeczyk), meurtrier d’une femme enceinte sans défense.



Depuis sa parution en 1986/1987, l’œuvre de Moore et Gibbons a inspiré nombre de créateurs qui n’y ont vu que cynisme et violence, passant à côté de la ligne directrice qu’est la philosophie postmoderne.



Watchmen n’est pas l’histoire de cinq ou six superhéros confronté à un niveau de réalité dans lequel les affrontements physiques ne résolvent rien. C’est la déconstruction d’un genre, et la proposition d’une nouvelle façon de regarder le monde.
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Watchmen (Intégrale)

Voilà LE comics qui permet de faire taire ceux qui pensent que les histoires de supers-héros sont débiles et sans fond.

Il n'est de toute façon plus à prouver à quel point Watchmen a été une œuvre marquante amenant une révolution dans la façon d'aborder les héros en collant.

Se basant sur le principe simple de "who watches the watchmen" - qui surveille les gardiens - l'histoire explore les dérives d'un système où des héros auto-proclamés (dont un seul a des supers-pouvoirs) font justices. Ils ne sont cependant pas défaut : tentative de viol, meurtre, folie, mégalomanie... Bref, le monde en a eu assez d'eux, désormais interdits. Un soir, un ancien membre des Watchmen est assassiné. Un de ses anciens "amis" décident, contre l'avis des autres, de mener l'enquête. Car cet acte n'est pas isolé, et la menace risque de grandir.



Dans un monde où les USA seraient les vainqueurs du Vietnam, où Richard Nixon entamerait son troisième mandat, le tout sous fond de guerre froide où la menace nucléaire est plus que présente, Alan Moore a réinventé un genre méprisé à l'époque. Créant un background solide, avec un premier groupe de justicier dans les années 40 dont les dérives ont permis à la succession de se corriger, ou pas, l'histoire en elle-même n'est pas simple. Il serait déconseillé de s'attaquer à cette histoire si l'on est pas un brin familier avec ce genre de comics ou avec les héros en général. Bien qu'ici, il ne s'agit pas de fierté, de patriotisme manichéen ou autre stéréotype de ce genre. On y retrouve également une fausse biographie, des interviews et reportages, etc. ponctuant les chapitres et permettant d'apporter certaines petites explications et de grossir la psychologie des personnages.

Bien que bavard, jamais cela ne devient inintéressant jusqu'à la fin où le lecteur pourra à sa guise prendre parti lorsque viendra l'explication finale à ces événements.

A voir aussi, le film de Zack Snyder qui adapte fidèlement (et le pari était trèès loin d'être gagné) cette histoire en se permettant une petite modification quant à cette fin sans pour autant la dénaturer. Préférez-lui toutefois la version ultime proposant le film en version longue qui propose à la fois des scènes en plus, le comics lu dans la BD qui apparait ici sous forme de dessin animé en plusieurs segments, ainsi que quelques faux documentaires filmés. Cette version n'étant cependant pas sortie en Europe, l'import et la version originale sous-titrée restera inévitable...
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Un vrai chef d’œuvre... et un sacré pavé pour une bande dessinée, plus de 400 pages !

Il s𠆚git d’une incroyable dystopie, très noire et passionnante avec des héros masqués plus cabossés les uns que les autres . Les supers héros sont un prétexte à une analyse de notre société , très critique, très fine, politique et philosophique.

C𠆞st vraiment très réussi : lecture totalement indispensable
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Watchmen (Intégrale)

Il ne sert à rien d'epiloguer sur la trame tant il y a à dire et tant l'encre à déjà coulé. J'insiste lourdement sur le fait que les couleurs peuvent rebuter les non initiés et qu'il peut être difficile de se plonger dans ce pavé monumental même pour un bedephile amateur. Aussi je conseil de lire cette oeuvre chez l'éditeur Urban Comics où les couleurs mats sont moins criardes et la traduction du sieur Manchete tout bonhement littéraire...Apres quoi et seulement après un petit tour du côté de Before Watchmen s'impose pour rehausser le contemporain avec les histoires de Rorschak et Ozymandias.
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Watchmen (Intégrale)

Dans un monde presque identique au nôtre, un suicide attire l'attention du seul justicier encore en activité, Rorschach. La victime est son ancien allié, le comédien. Au fur et à mesure de son enquête, Rorscach pense à une élimination d'anciens justiciers. Il prend contact avec ses anciens alliés pour les prévenir du possible danger. Mais une menace gronde au dessus de tous. La tension américano-soviétique est à son point de rupture.



25 ans. Un quart de siècle qu'Alan Moore et Dave Gibbons ont laissé entre nos mains de lecteurs ce pavé unique qu'est Watchmen. Unique, c'est mot. A contrario de la plupart des comics-books de super-héros, Watchmen se déroule différemment. Son univers est clos, il n'y a ni avant, ni après. Toute l'histoire de cet univers (situation politique/personnages/histoire) repose dans quelques centaines de pages. Comme on peut le voir dans les bonus, Alan Moore prend une page pour détailler une case. Tout est détaillé, ciselé, pour que ce travail soit celui d'un orfèvre. Mais le scénariste ne s'arrête pas là. Ses héros ne sont pas si "super". Sans les mettre sur le divan, il en fait des portraits psychologiques peu reluisants: du spectre soyeux qui veut que sa fille suive cette voie, au docteur Manhattan seul surhumain, en passant par Rorschach le paranoïaque, ceux qui défendent la justice sont tous "malades".

Dave Gibbons rend l'univers d'Alan Moore, plausible, voire proche de nous. Son trait graphique est réaliste. Mais là-aussi, au contraire d'un comic-book où les corps sont hypertrophiés, ici, le temps, la maladie fait son oeuvre. Le monde ainsi rendu semble normal, et les justiciers, anormaux. Quant à John Higgins, ses couleurs accentuent de façon réelle, les tensions, les actions de ce Watchmen.



Cette édition est exceptionnelle. Elle reprend l'édition de Panini, dite "absolute". La traduction est celle de Jean-Patrick Manchette, revisée par son fils, pour l'occasion. On trouvera une postface des auteurs, une préface de Doug Headline, le suivi du projet, le parallèle entre les personnages de Charlton Comics et les personnages définitifs, les couvertures françaises de l'édition Zenda.



Si pour ceux qui aiment et connaissent Watchmen, cette édition est indispensable, que dire à ceux qui ne connaissent , ni aiment les super-héros voire la bande dessinée ? Watchmen, ce n'est ni l'un, ni l'autre. Watchmen c'est de la littérature !



WATCHMEN

AUTEUR : ALAN MOORE

DESSINATEUR : DAVE GIBBONS

COLORISTE : JOHN HIGGINS

URBAN COMICS
Lien : http://temps-de-livres.over-..
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Qui custodiet ipsos custodes ? Qui garde les gardiens ? C'est une des questions, et pas la moindre, que pose ce livre qui s'affirme avec le temps comme un des chefs-d'oeuvre de la bande dessinée. Conçu extérieurement comme un comics américain de super-héros, il en épouse artificiellement les codes pour mieux les détourner et se pose comme un ouvrage très structuré, d'où est bannie la moindre superficialité. Ici, on parle d'ailleurs de héros costumés ; aucun ne possède de super-pouvoirs (sauf un !) et, dans l'imaginaire collectif, ils sont vus comme des étrangetés, au mieux tolérées, mais plus souvent contraintes à la mise en parenthèse de leurs activités. D'ailleurs, eux-mêmes le reconnaissent, les méchants masqués se font rares et justifient par leur absence leur propre reconversion. Détail hilarant, dans ce monde-là, les histoires de super-héros n'ont jamais fait recette et les jeunes américains lisent des comics mettant en scène des histoires...de pirates.



Le récit met en avant une légère distorsion de notre histoire. Les U.S.A ont gagné au Vietnam, Nixon est réélu pour la cinquième fois et les valeurs de droite triomphent sans partage sur l'ensemble du monde libre. Par contre, la planète est à un ongle d'un conflit majeur, l'U.R.S.S jouant la carte d'une escalade nucléaire pour compenser sa propre infériorité militaire.

Au moment où l'histoire commence, un des anciens héros costumés, une montagne de muscles misogyne et fascisante, est assassiné chez lui. Parallèlement au travail de la police, une enquête est menée par un de ses anciens collègues, un ultra-conservateur cinglé et en voie de clochardisation. Celui-ci sera amené à reprendre contact avec ses collègues pour dévoiler peu à peu une vérité étrange qui nous laissera tous perplexe.



Le travail du dessin, l'agencement des cases, la dissémination visuelle d'indices tout au long du récit font de cette bande dessinée un ouvrage très plaisant à lire et qui donne matière à réflexion, jusqu'au personnage du docteur Manhattan, individu omniscient et omnipotent, mais dont le désintérêt pour lui-même et pour le reste de l'humanité va croissant. Qui custodiet ipsos custodes ? Personne, je crois...
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Watchmen c’est une uchronie qui met en scène des super-héros qui sont des hommes ordinaires, dans un univers parallèle de ceux traditionnels de DC Comics. Le scénario se base sur des événements et faits réel. Les super héros sont sans pouvoir. Il n’y a pas d’un côté les bons et de l’autre les méchants, les personnages sont en contrastes avec la place du choix qui est essentielle.

C’est également une dénonciation du pouvoir absolu et du fétichisme religieux qui s’incarne dans le personnage du Dr Manhattan, le seul possédant de vrais pouvoirs, un être omniscient et omnipotent, une sorte d’icône de dieu vivant qui, mal utilisé, devient une arme de destruction massive et la preuve que lorsque humanité se prend pour dieu elle se perd elle-même.

Les dessins sont crus et violents et les chapitres se concluent sur de longs passages littéraires, ce qui était assez révolutionnaire dans le monde de la BD à l’époque.

Watchmen propose de nombreuses pistes de réflexion au lectorat : que serait notre monde s’il était peuplé d’êtres avec des pouvoirs pour nous protéger ? Quelle serait réellement leur place vis-à-vis de nous ? Aurait-il une quelconque responsabilité dans nos travers humains ? Les héros patriotes sont-ils nécessairement des « gentils » ? Faut-il sacrifier des vies pour sauver toute une population ou chaque vie compte-t-elle au détriment de la paix collective ? Et finalement, Qu’est-ce que le Bien et le Mal ?



Outre mon blog, je viens de me lancer dans une chaîne YouTube qui compare les œuvres littéraires et leur adaptation cinématographique. la première vidéo étant consacrée à Watchmen, je vous mets le lien ci-dessous.
Lien : https://www.youtube.com/watc..
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Au delà des clichés, au delà du genre, au delà du média, un ouvrage d’une richesse inouïe. Pièce maîtresse de toute bonne bibliothèque de bédéphiles, Watchmen aurait même sa place dans n’importe quelle bibliothèque. Scénaristiquement, on touche des sommets et on a clairement là une oeuvre, parue initialement au coeur des 80s, qui se trouve être une des pierres angulaires du média dont se sont inspirées plusieurs générations de scénaristes et dessinateurs. Indémodable, percutant, complexe dans sa lecture, riche graphiquement, précurseur et toujours d’actualité, ce grand classique de deux auteurs au sommet de leur art et qui ont durant sa parution, su repousser les limites avec des exercices de style incroyables comme le chapitre 5 et son découpage unique. On ne lit pas Watchmen comme un comics, mais bien comme ce que le roman graphique fait de mieux encore aujourd’hui.
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Excellentes BD que j'ai adoré lire. L'histoire est très dark et sort du modèle avec les héros parfaits et sans défauts. L'histoire est très bien ficelée et les personnages sont très bien développés. J'aime aussi beaucoup l'idée d'un univers parallèle et le fait que la plupart des personnages n'ont pas de supers pouvoirs. C'est un classique de la bande dessinée.
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Je comprends toutes les critiques positives qui ont été écrites sur cette BD qui a tout pour plaire. Le scénario est très fouillé, les superhéros sont des personnes qui ont leurs propres problèmes, la critique de la société américaine est intéressante et le graphisme est génial. Et pourtant, je n'ai pas accroché à l'histoire. Les histoires secondaires qui sont racontées en parallèle rendent l'intrigue trop complexe et apportent peu à l'histoire principale. En fait, seuls les 2 derniers chapitres m'ont vraiment captivés.
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Un scénario dense et une réflexion passionnante sur le Super-héros, notamment dans ses implications politiques. Les dessins m'ont moins paru un peu vieillots mais je reconnais volontiers un regard peu expérimenté en la matière. Pour moi, c'est d'abord le texte et la pensée politique portée par Alan Moore qui font de cette œuvre un classique instantané.
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Watchmen est une œuvre ayant une excellente réputation dans le monde du comic book. Considérée comme étant l’une des meilleures histoires, j’avais énormément d’attentes, mais aussi quelques craintes avant de commencer la lecture. J’accorde énormément d’importance à la partie graphique d’un comics (aussi bien le style de dessins que la colorimétrie). Ma première surprise fut donc d’apprécier la qualité des dessins et le travail de la couleur que je trouve impressionnant pour un récit datant de 1986-1987.



J’ai été très facilement plongé dans l’histoire, il faut dire que le scénario aide à rentrer rapidement dans le vif du sujet. La qualité d’écriture des personnages est sensationnelle. De nombreux flash-back permettent d’approfondir les protagonistes et de mettre en place des éléments qui donneront de la consistance aux relations qui les unissent. Je me suis surpris à ressentir de l’attachement pour des personnages et même une profonde empathie pour certains d’entre eux. Je pourrais écrire des pages entières sur ce comics tellement il y a de choses à en dire…



Cette œuvre est absolument indispensable et constitue l’une des meilleures histoires que j’ai pu lire dans ma vie. Je ne le conseillerais pas à tout le monde pour autant car le ton général est très mature et conviendra davantage à un public adulte, ou à un lectorat ayant un certain nombre de lectures de comics à son actif.
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(Chronique rédigée sept ans après la lecture de ce livre)

A l'occasion de la sortie du film en 2009, une édition intégrale était parue qui m'avait permis de découvrir ce comics avant de voir le film. Si le graphisme ne m'a pas vraiment emballé, trop classique voire rétro, j'en ai apprécié l'histoire et surtout la narration bien pensée et la mise en scène remarquable. Bien que l'ensemble soit trop riche en intrigues parallèles qui complexifient l'histoire sans rien lui apporter, la lecture s'avère prenante, emplie de suspense jusqu'à une fin inattendue et d'envergure. Une œuvre complexe et généreuse pour ses lecteurs, ici dans une version enrichie par différents textes et documents qui alternent avec les différents chapitres de Watchmen.

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Ouf ! j'en suis venu à bout !!!

Mais quel ennui ! Salmigondis de "pensées", rêves naïfs.

Seul le graphisme est intéressant . C'est bien la seule justification aux deux étoiles.
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Faisons le point sur juin 2021. Il a été pour moi un mois assez complexe, entre surmenage, remises en question, mais aussi accalmies voire instants tout simplement magnifiques. J'essaie de prendre soin de moi tout en ébauchant des projets plus grands que le blog ; c'est pourquoi une surcharge de travail risque définitivement de me mettre HS. J'ai décidé d'arrêter les « mois à défi » et de manière générale que j'annoncerai de chroniquer tel ou tel livre. Il n'y aura donc pas de « Quoi de neuf » pour l'année prochaine et vous m'en voyez le premier désolé. Désormais, tous les articles paraîtront (du moins sur mon blog) le samedi à 19h sans exception, sauf que les traditionnels billets pour Noël, le Nouvel An et la date anniversaire du blog. Cela nous fera donc 55 articles par an. Moins de quantité, plus de qualité, c'est ce que dirait mon grand ami Arthur Aïoutz quand je débarque dans sa boîte de prod naissante avec 259 projets qui marchent plus ou moins bien.

(Et je vous dis ça alors que cet article sort un dimanche à 20h15... Les bonnes résolutions commencent bien.)

Assez parlé de moi. Ce qui nous amène ici, c'est toujours la passion de l'Imaginaire, l'envie d'explorer les sommets et les tréfonds de mondes nouveaux, la soif de nouveaux territoires non pas à conquérir mais à contempler. Quoi de mieux pour ça que les histoires de super-héros ? Qui peuvent prendre absolument tous les tons, du plus jovial au plus… névrosé.

En effet, c'est bien d'une super-science pessimiste dont nous allons parler aujourd'hui. Je ne pensais pas avoir un mot à dire sur le comic Watchmen. Grosse référence de chez DC même si déconnectée de l'univers des autres superslips (enfin… jusqu'à récemment), je pensais n'y trouver qu'une des premières déconstructions du mythe super-héroïque, avec un intérêt certes historique, mais guère plus ; un machin déjà critiqué et analysé en long et en large par des gens bien plus talentueux que moi, et que je ne pourrai peut-être même pas apprécier à sa juste valeur. Soyons clairs : finalement, j'ai très envie d'en parler. Je ne vais pas développer cela dit de point de vue très original mais avant tout une présentation exhaustive. Cette critique, même si elle part dans tous les sens (Marc Ang-Cho va me faire un procès pour tout analyser à sa place !), n'a qu'un seul but et une seule prétention : VOUS DONNER ENVIE DE LIRE WATCHMEN !



Qualité scénaristique



Super-héros et réalisme



Le comic d'Alan Moore et Dave Gibbons imagine donc l'impact réel que pourraient avoir les super-héros sur le monde. Serviraient-ils forcément le Bien ? Et leur patrie ? Quelle serait leur éthique ? Amélioreraient-ils forcément le monde ? C'est donc un univers bien plus sombre et réaliste que d'ordinaire pour le genre qui vient se dessiner ici. Si comme moi ce qui vous intéresse le plus chez les super-héros sont justement leurs implications morales et géopolitiques (« un grand pouvoir implique de grandes responsabilités », comme diraient tous les élèves de mon ancienne prof de philo exaspérée de ne jamais trouver d'autres citations), Watchmen est pour vous puisqu'il s'intéresse non seulement au rôle que pourraient avoir les super-héros mais aussi celui qu'ils auraient pu avoir.

En effet, dès la première page, des différences subtiles se font sentir avec l'époque de parution du comic : dans la forme d'une voiture, le nombre anormal de dirigeables dans le ciel, ou encore les modes vestimentaires des keupons. On apprend en effet par la suite que grâce à un être surpuissant, le Dr Manhattan, les étasuniens ont remporté la guerre du Vietnam et Nixon est resté au pouvoir (au point qu'on lui a même décerné une plaque sur la Lune !). C'est donc une Amérique plus impérialiste que jamais qui apparaît devant nous, dans une guerre froide de plus en plus tiédasse. Avec les circonstances auxquelles on pouvait s'attendre : omniprésence des réactionnaires, paranoïa, refus d'investir de l'argent dans les services publics (et donc les villes se délabrent)… Les agressions se font de plus en plus nombreuses, les gens restent cloîtrés chez eux ou dans leurs opinions de comptoir. le milieu progressiste, timide, ne s'exprime qu'au travers du Nova Express (vraisemblablement un magazine musical), concurrencé par le très droitier New Frontiersman.

Une autre conséquence de la présence de super-héros est que certains se sont retirés du métier pour profiter de leurs pouvoirs en se lançant dans le business. Ainsi un prodige d'intelligence, Ozymandias, a-t-il monopolisé tous les domaines de la société : transports, parfums, télévision, développement personnel… Ce que j'apprécie tout particulièrement, c'est que dès 1985 Alan Moore avait compris que la voiture électrique était possible… et que c'était une belle cochonnerie 😛

Enfin, les super-humains sont le plus souvent impopulaires, et parfois à raison. Au point que la presse comics s'est finalement tournée vers les histoires de pirates. Des histoires souvent moins morales, et sous la plume de l'un de leurs scénaristes les plus talentueux terriblement plus sanglantes et plus glauques, illustrant la perte de repères d'une époque plus déboussolée que jamais (et punaise, je me mets à parler comme le 20 heures…).



Les personnages



C'est donc dans ces années 80 qui feraient passer Saturday Night Fever pour un gentil film de famille qu'évoluent différents super-héros, certains ayant pris leur retraite à la suite d'une loi restreignant leur activité en 1977, certains continuant de se faire tolérer car ayant prêté allégeance au gouvernement étasunien. Les six (ou plutôt cinq) que nous suivons ne forment jamais d'équipe formelle, mais se font surnommer par les auteurs les Watchmen par analogie avec une équipe de super-héros ayant bel et bien existé dans ce monde, les Minutemen (on appréciera la polysémie du terme watch, désignant à la fois le fait de voir, se rapportant à l'observation de la société, et la montre, se rapportant au compte à rebours). Ils sont tous des personnages particulièrement soignés et humains, même lorsqu'ils se comportent comme de parfaites ordures :

- Rorsach est un détective masqué connu pour sa violence et la justice qu'il fait lui-même (de façon évidemment très expéditive). C'est un mélange entre Batman et le Punisher. Un évènement traumatisant de son enfance l'a également encouragé à devenir sexiste et puritain. Persuadé de l'existence des valeurs de l'Amérique, il pense que les États-Unis sont en plein délitement, et ce ne sont pas les gangs et les violeurs du coin de la rue qui lui feront dire le contraire. Pourtant, on notera chez lui un sens moral particulièrement élevé, le tout avec une justesse inespérée qu'Alan Moore décrit ainsi lors de la préparation du scénario : « En vérité, pour présenter ce personnage équitablement, il va me falloir décrire ses idées comme tout à fait logiques et venues du fond du coeur, de peur qu'il se transforme en parodie des idées de droite vues par un type de gauche. Selon le point de vue sous lequel on se place, [il] est soit la seule force incorruptible qui existe dans un monde aux valeurs morales en pleine érosion, soit un sociopathe dangereux et quasiment psychotique qui tue sans compassion ni souci des fioritures légales ».

- le Hibou est le super-héros le plus normal, et, il faut bien le dire, mon préféré (en grande partie parce que je voue une haute affection à ces nobles créatures). Deuxième du nom, il a pris sa retraite en 1975 même s'il a gardé une grande nostalgie de son métier qui consistait en partie à être inventeur. Il s'agit d'un quadragénaire simple et sensible, le genre de mec droit qui va pas fourrer son nez n'importe où par l'appât du gain. Mention spéciale à Archie, la « Hiboumobile », un vaisseau au design tout à fait particulier et dont le fonctionnement parvient à rester réaliste.

- Ozymandias est donc celui qui a fait fortune. Libertarien de gauche, il s'est imposé comme une des grandes figures progressistes encore en vogue. Un homme cultivé et voulant à tout prix le bien de l'Humanité… mais est-ce que la philanthropie peut suffire ?

- le Spectre Soyeux est elle aussi la deuxième de sa lignée, forcée par sa mère à endosser à son tour la casquette (ou, en l'occurrence, la jupette). Condamnée à être une héroïne femme (et donc forcément sexy), elle a vu la loi de 1977 comme une bénédiction car lui offrant enfin un semblant de vie normale. Ce qui n'empêche pas sa mère de continuer de projeter ses fantasmes en elle ; elles forment un duo fascinant, l'une à la poursuite des rêves de gloire qu'elle n'atteindra jamais et espérant donc que quelqu'un de son sang les accomplisse à sa place, l'autre qui les refuse car trop consciente de ce qu'ils impliquent.

- Il faut enfin ajouter qu'elle vit en couple avec le Dr Manhattan, transformé en quasi-dieu suite à une expérience de physique qui a mal tourné. Ses capacités lui permettent de percevoir le monde des particules, l'avenir, se dédoubler, convertir n'importe quelle matière en une autre, connaître toutes les informations dont il a besoin… Mais son point faible est que sa toute-puissance l'a rendu presque complètement imperméable au monde des humains. Si on pourrait à raison considérer que ce personnage est un gros « ta gueule, c'est quantique », en revanche on appréciera sa psychologie nuancée qui l'empêche d'être un simple deus ex machina : un équivalent de Spock ou Data… en plus mélancolique.

- Enfin, vient se greffer à tous ces joyeux drilles une figure solitaire et particulièrement malveillante, le Comédien. Un être ayant les mêmes inspirations que Rorsach, mais avec le Joker en plus. Se laissant guider par ses pulsions et son nationalisme extrême, le Comédien est une sorte de Rambo grotesque, cruel et ricanant. Pourtant, malgré le fait qu'il soit une enflure ++, il n'en demeure pas moins quelqu'un de solitaire, d'isolé, et qui contrairement à Rorsach désire la compagnie de ses semblables, ne serait-ce qu'au travers de leur destruction.

À ces protagonistes viennent se greffer encore d'autres super-héros, mais surtout des personnages secondaires particulièrement travaillés, des gens « de la vie de tous les jours » ; ils sont campés avec un naturalisme particulièrement précis, sans pour autant sombrer dans le cynisme un seul instant : on découvre ainsi la vie des années 80, les vendeurs de kiosque grincheux mais ayant bon coeur, les religieux un peu timbrés, la communauté LGBT se heurtant à des tabous allant bien au-delà de leur simple appartenance sexuelle et sous tension permanente, forcée d'un côté à se taire par les conservateurs, mais d'un autre, les libéraux se disent que ça ferait quand même un bon business… Moore finira d'ailleurs par écrire : « Pour le meilleur et pour le pire, les humanoïdes ordinaires, non télépathes, dépourvus de mutations et privés du don de double vue qui traînent sur un des coins de rue anonymes de Watchmen en sont venus à  me sembler plus précieux et plus intéressants que ceux qui soulèvent des rivières et déplacent des planètes. Je souhaite aux super-héros tout le bien imaginable entre les mains de ceux qui guideront leur vol dans le futur, mais, pour ma part, je suis impatient de revenir sur cette Terre ». Résultat des courses : on se retrouve avec un nombre de persos très élevé mais qui restent admirablement bien campés, ce qui je pense nous permet une comparaison avec un autre grand maître de l'Imaginaire : Guy Gavriel Kay.



L'intrigue



L'histoire commence avec l'assassinat du Comédien. Rorsach décide d'enquêter, en dépit de la police qui le traque. S'ensuit un long jeu de flash-backs et de retours au présent, entrecoupé à la fin de chaque épisode par un appendice constitué de documents venant approfondir l'univers. Vous l'aurez compris, non seulement il s'agit d'une narration à multiples personnages, mais en plus elle est non-linéaire. Pourtant, avec le nombre relativement peu élevé mais bien dosé d'affrontements et le fait que personne ou quasiment ne fasse juste de la figuration, tout reste parfaitement fluide contrairement à de gros gloubi-boulgas épiques qui partent dans tous les sens (Civil War). Cette richesse permet de cumuler différents registres et thématiques : polar noir, drame familial, exploration spatiale, guerre du Vietnam… La diversité déjà élevée n'en devient que plus grande.

Et il me faudrait encore vous citer les multiples références culturelles plus ou moins explicites, le sense of wonder / sense of doom, l'ironie dramatique modelant le récit et lui conférant un certain humour (très) noir, la symbolique omniprésente… le tout avec des fusils de Tcheckov qui tirent dans tous les sens et une fin glaçante de maîtrise. On pourrait relire ça cinq fois qu'on y trouverait encore des détails qui nous échappent !

Reste que rien n'est parfait, et qu'un point mineur m'a quand même fait tiquer sur la fin : l'univers, qui se voulait jusque-là réaliste (ou, dans le cas du Dr Manhattan, au moins pseudo-réaliste) laisse d'un coup apparaître le surnaturel avec la médiumnie. Alors, pourquoi pas essayer d'y donner des explications scientifiques ? D'accord, la chose que l'on veut faire grâce à elle n'est pas réaliste, mais c'est justement parce que le personnage qui l'orchestre ne veut pas qu'elle soit réaliste ; seulement son fonctionnement ne l'est pas non plus. Et une fois qu'elle a joué son rôle, on n'en entend plus parler ; on ne saura rien de plus sur les mystérieux pouvoirs psychiques qui auraient pu façonner des dizaines d'autres super-héros.



Qualité graphique



Concernant le dessin, il s'agit peut-être de ce qui m'a le plus rebuté : la ligne de Gibbons est claire, nette, presque rigide, comme bon nombre de récits super-héroïques de l'époque, sans la palette de couleurs particulièrement large qui leur permet aujourd'hui de produire des cases de toute beauté (rassurez-vous, les dessins sont quand même beaucoup moins statiques que les comic books des débuts). Mais elle a aussi ses avantages : elle arrive à être en tous temps lisible, sachant faire un dosage très équilibré entre épure et amour du détail. Et c'est sans compter la couleur qui dose intelligemment les différentes teintes dominantes, quitte à parfois prendre une palette réduite mais très contrastée. Les clair-obscurs du néo-noir, les teintes sombres, les dégradés, tout cela nous offre par moments des planches absolument sublimes (je pense notamment à la page 18).

Les deux auteurs ont également opté pour une narration recourant très souvent au gaufrier, cette technique consistant à faire des cases ayant toutes les mêmes dimensions. L'héroïsme est ici ou bien discret ou bien aux abonnés absents, inutile donc de faire des cadrages grandiloquents ; et cela retranscrit tout à fait bien l'ambiance anxiogène et enfermée du monde dans lequel vivent les personnages.



Qualité littéraire



Enfin, et c'est très certainement la raison pour laquelle on l'a parfois qualifié de « roman graphique », Watchmen ne se repose pas que sur l'image. En effet, un des reproches que l'on a longtemps faits à la bande dessinée était qu'il s'agissait d'une littérature diminuée, à laquelle on mettait des images pour pallier le manque de style des auteurs. D'une part, c'est faux (n'importe qui bossant dans le cinéma vous dira qu'on peut communiquer autant voire plus de choses et de subtilités dans une image que dans des mots), mais surtout cela n'empêche pas les auteurs de faire un usage virtuose (et pas forcément pédant) de la langue quand ils en ont l'occasion. Je pense bien sûr au parler désuet de Tintin, à la grandiloquence parodique d'Achille Talon… mais surtout à de Capes et de Crocs, hommage à la culture populaire du XVIIe siècle que vous devez absolument lire, ne serait-ce que pour la réplique culte du personnage voulant en jeter un autre « dans l'espace pour qu'on ne l'y entendît point crier »…

Et dans Watchmen, Alan Moore va montrer qu'il n'est pas seulement un grand scénariste mais aussi un grand écrivain (par contre, pour sa fresque ésotérique de 1800 pages, je crois qu'il va falloir attendre un peu — je suis fou, d'accord, mais un fou raisonnable). Il va en effet s'amuser à reprendre, en-dehors du récit principal, différents styles d'écriture, fournissant un travail d'imitation exemplaire de tout ce qui lui tombe sous la main : fausse autobiographie, introduction de traité géopolitique, critique journalistique, brèves de presse… Il y a même ce qui pourrait sembler un pastiche extrêmement réussi de mon journal-nanar favori, Valeurs actuelles, hallucinant de bêtise humaine.

Alors, c'est bien joli, mais depuis la mort de Diderot, on sait qu'il faut une petite plus-value : l'art ne se limite pas à de l'imitation, où est le génie ? Probablement dans cette mise en abyme relatant une histoire de pirates. Si le ton mélodramatique use et abuse des effets de roman de gare, ce récit qui semble n'avoir aucun rapport avec celui principal annonce en fait le destin fatal d'un des personnages, que je vous ferais le plaisir de ne pas vous spoiler.



Fond politique



Mais enfin et avant tout, Watchmen est plus qu'un simple divertissement. C'est un cri d'alarme politique. Il vient nous rappeler différentes choses : comment aurait pu tourner la guerre froide, comment nous pourrions lutter pour changer le monde, mais aussi que l'enfer peut très bien être pavé de bonnes intentions. le pouvoir corrompt : pouvoir politique, bien sûr, mais aussi le super-pouvoir, si l'on n'y prend pas garde. La chute, que l'on ne devine vraiment qu'à la dernière case, vient ébranler toutes les révélations finales. On peut l'interpréter comme une critique de la logique utilitaire / pragmatique que certains prônent pour lutter contre le Mal (comme j'avais déjà pu en parler dans une analyse de Block 109). Et ça fait très, très mal.

Il est intéressant de noter qu'Alan Moore est un anarchiste ; on aurait donc pu s'attendre à une oeuvre clamant à chaque page qu'elle rejette en bloc toute forme d'autorité, voire à une critique bas-du-front en mode : « ouais les super-héros ils sont plus puissants que les gens normals donc c'est des méchants ». Et pourtant, il parvient miraculeusement à maintenir une grande subtilité, sans jamais de prosélytisme. Preuve en est qu'on peut lire et apprécier la BD sans jamais se douter de ses convictions politiques, ce qui ne veut pas dire qu'elles ne donnent pas un cap au récit, bien au contraire.



Conclusion



J'espère avoir été suffisamment clair : si vous aimez les histoires de pirate, lisez Watchmen ; si vous aimez le pulp kitschouille avec des méchants qui cachent leur base dans des endroits incongrus, lisez Watchmen ; si vous aimez les polars noirs, les grands questionnements métaphysiques ou tout simplement les séries avec plein de personnages qui interagissent entre eux de manière plus ou moins heureuse, lisez aussi Watchmen. Il ne s'agit cela dit, en raison de la noirceur de son ton et de sa violence graphique, pas d'un livre s'adressant à tous les publics. Mais quel tour de force ! On a là un grand livre, aussi bien dans son humanité que sa monstruosité, qui laisse ébranlé longtemps après sa fermeture. Un ouvrage à vous procurer d'urgence pour votre culture…



(PS : le nombre de caractères étant ici restreint, je vous invite à aller sur mon blog où je parle du film)
Lien : https://cestpourmaculture.wo..
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Watchmen (Intégrale)

Watchmen est un comics scénarisé par Alan Moore et dessiné par Dave Gibbons. C’est un chef d’œuvre du genre, qui remet en question le récit super-héroïque.



Dans un univers uchronique où les États-Unis ont remporté la guerre du Vietnam et où une guerre nucléaire contre l’URSS risque d’éclater à tout instant, un justicier masqué, le Comédien, a été abattu. Ce meurtre constitue l’élément déclencheur d’une enquête sur un supposé « tueur de masques », qui cherche à éliminer ce qu’il reste des super-héros, dont les auteurs dressent des portraits ambivalents, complexes et parfois extrêmement sombres, de par leur passé ou leurs convictions. Ils sont vus dans toute leur humanité et toute leur noirceur, ce qui met à plat la naïveté et l’espoir que suscitent les super-héros, qui sont ici confrontés à un monde en proie au chaos.



Si vous vous intéressez aux comics de super-héros, ou même à l’histoire de la bande dessinée, je ne peux que vous recommander Watchmen.
Lien : https://leschroniquesduchron..
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Watchmen (Intégrale)

le meilleur des comics que j'ai lu: il reprend tous les codes du style pour les briser et en faire autre chose, plus universel et plus réaliste! Lisez le!!!
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