A l'occasion de « Nos futurs », un événement dédié à la jeunesse à Rennes, une vingtaine d'invités se sont réunis pour partager leur vision d'un monde durable. Des témoignages à retrouver dans ces vidéos « QuizzBox » réalisées par le Monde Campus, en partenariat avec Les Champs Libres.
QuizzBox « Nos Futurs » #7 avec :
Charline Vermont, enseignante, autrice, sexothérapeuthe, créatrice du compte Instagram @Orgasmeetmoi,
Didier Lestrade, journaliste, écrivain, fondateur d'Act Up Paris et du magazine Têtu.
+ Lire la suite
La force d'Act Up est d'utiliser les symboles. Agresser verbalement un responsable politique n'est plus vraiment un symbole. Utiliser la mort, comme dans le cadre des enterrements politiques, l'est encore moins car on touche là au drame fondamental de l'épidémie : la disparition des personnes. On peut penser que le détournement de la mort à des fins militantes représente l'ultime étape d'un processus activiste. On ne peut pas, aujourd'hui, imaginer un stade supérieur dans la surenchère, à moins d'imaginer des suicides collectifs, ce qui n'est pas très fun. On voit donc que ces idées d'action représentent une sorte d'impasse activiste. Quand on a déposé un cadavre devant l'Élysée, que peut-on faire de plus extrême ?
Act Up a conceptualisé la colère comme un rite de passage. Pour être quelqu'un dans le groupe, il faut nécessairement passer par le traumatisme de l'action. C'est à la fois violent et libérateur. Il faut avoir été traîné sur le sol par deux méchants CRS au moins une fois dans sa vie pour vraiment se dire qu'on est allé assez loin contre le sida.
Bob Rafski, un des plus importants militants d'Act Up-New York, explique dans une interview pour Spin, en 1989, le point de vue des gays de l'époque : « Nous étions libérés (sexuellement) et le monde était à nous. Soudain nous étions en train de mourir et tout le monde s'en foutait. Voici les conditions pour une révolution. »
Notre place dans la société, notre culture, notre business, notre sexualité, notre révolution associative, tout ça est sur le bon chemin et les Christine Boutin n’arriveront pas à empêcher l’inéluctable : oui, on fera ce qu’on veut et oui, on aura des gosses par-dessus le marché.
J'ai eu la tristesse de grandir à une époque où la nudité partielle était rare dans la culture, partout. J'ai passé mon adolescence à regarder la télé en espérant que l'acteur allait enlever sa chemise, parce qu'il était tombé à l'eau, parce qu'il avait chaud, parce qu'il était au lit avec une femme. J'ai vraiment découvert que j'étais homosexuel en regardant des épisodes de Hondo et des Mystères de l'Ouest. Quelques années après mon arrivée à Paris, avec mon premier magnétoscope, j'ai commencé à enregistrer chaque apparition de beau mec torse nu, que ce soit dans les séries télé, les films ou les compétitions sportives. Quand je regardais la télé, mon magnétoscope était toujours sur pause. J'ai ainsi collectionné des années de nudité partielle qui sont le reflet de l'évolution de l'homme à travers le média le plus populaire d'alors.
… il existe aux États-Unis, une directive discriminatoire qui stipule le renvoi des lesbiennes et les gays de l’armée. Entre 1989, date de nomination de Dick Cheney, et 1991, ce sont plus de 2000 homosexuels qui ont été renvoyés de l’armée. […]
Avec son mégaphone, il hurlait littéralement devant les manifestants, courant de long en large pour que les slogans soient repris par tout le monde. Il était beau, on avait envie de crier juste pour lui faire plaisir.
En pleine montée d’antidépresseurs, je me suis mis à parler comme si la fin du monde était proche, comme s’il fallait systématiquement dire la vérité. J’étais devenu tellement vulnérable que j’en étais transparent : chaque idée qui me traversait l’esprit sortait directement dans ma bouche. Je n’avais plus la moindre réserve.
Le rêve, le seul rêve que tout membre d'Act Up a dans son cœur, est simple : un jour le sida s'achèvera.
Vingt minutes après son arrivée, Dustan enleva ses lunettes noires et enfin, pfff, s’aperçut que j’étais là. Il vint me voir et me demanda bêtement si j’avais l’heure. Je regardai ma G-Shock et lui dis : « Non. »
Après huit années d'activisme, je ressentais d'une manière très cruelle la perte d'influence de l'association et ceci me mettait dans une position de crise existentielle grave.