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Citations de Dominique Bourg (52)


Le premier sens de la spiritualité, en tant que regard sur le monde, ne relève pas de l'expérience, mais de ce qui la conditionne et la rend possible ; le second sens renvoie au contraire à des modalités d'expérience intérieure et intime, mais nullement étrangères au mouvement d'une société donnée. Je n'organise pas mon existence en vue du salut ou de l'éveil sans y être porté au plus profond de moi-même. La spiritualité constitue ainsi une double fonction d'extériorité.
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Toutefois, comme nous le verrons, la modernité se signale, outre par l'éclatement des finalités possibles, par une forme de retournement, de renvoi vers l'intérieur du système social desdites fonctions : l'exploitation du donné est une activité sociale et économique, tout comme la consommation. Là où la spiritualité et ses deux fonctions nous portent traditionnellement au-delà de l'espace social, les formes modernes de spiritualité nous rabattent vers l'espace intérieur de la production et de la consommation. Il n'est de spiritualité moderne que honteuse, rabattant toute extériorité dans l'immanence du social. il est possible d'évoquer une forme d'autisme collectif, de civilisation autistique.
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À quoi s'ajoute cette dialectique subtile entre individualité des consciences et la dimension intrinsèquement collective de la pensée comme ses supports, et au premier chef les langues et les systèmes d'écriture. Les mouvements d'une culture, ceux de la pensée au sens des grands courants d'idées, le fait que des questions dominantes s'imposent à une époque donnée, et même les simples évolutions de l’opinion, sont autant de phénomènes collectifs et des phénomènes de réseaux. Le changement dans notre relation au donné évoqué précédemment - et que ce changement se soit progressivement imposé, sans qu'on soit parvenu à le penser durant des siècles - illustrait on ne peut mieux cette idée d'une pensée à laquelle nous appartenons, qui nous englobe et qu'on ne saurait maîtriser.
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Force est de l'admettre, l'idéologie du progrès selon laquelle l'avancée des sciences et techniques, via l'industrie, ne pouvait que déboucher sur une amélioration générale de la condition humaine, a vécu. Les dégâts, qui s'annoncent en termes environnementaux à moyen terme sont sans précédent dans l'histoire des relations de l'homme à la nature. Sur un plan plus immédiat, géopolitique, l'heure est plutôt au sauve-qui-peut pour épargner nos grandes valeurs, à savoir nos libertés, nos institutions démocratiques, les droits humains, etc. Et encore, pour la part des populations occidentales qui y reste attachée.
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Le type de régime qui s'installe actuellement aux États-Unis illustre notre analyse : un autoritarisme affirmé, s'en prenant à la presse comme à la justice, récusant les sciences du climat et de l'environnement notamment (voir le rejet du darwinisme avec le créationnisme), coupant les budgets des sciences en question, et s'employant à détruire toute espèce de régulation des activités économiques, tout particulièrement dans les domaines de l'environnement, de la santé et de la finance.
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Ontologiquement et généalogiquement, d'ailleurs, chacun de nous n'a pu accéder à sa propre humanité que grâce aux paroles et aux soins de son entourage, de ses parents en premiers lieu, et ce dès le sein maternel. Les compétences que nous avons acquises sont elles-mêmes inséparables des sollicitations et des apports d'autrui, avec des échelles variables allant des proches jusqu'à la culture d'une société donnée, systématiquement en lien avec d'autres cultures. Ainsi l'individualité de la conscience, bien qu'absolument réelle, n'en a pas moins été portée par un réseau pensant antérieur, et qui continue à la porter. La conscience n'existe que pour autant qu'elle participe de ce réseau dont on ne saurait définir les limites. Elle s'inscrit dans la pensée comme le corps dans l'espace. Ainsi, aucun de nous n'est donc détenteur de sa propre humanité, laquelle n'est pas plus enfermée dans notre cerveau que dans notre individualité corporelle, et nécessite d'ailleurs un milieu. Je suis humain parce je relève de plus que moi. Une conception qui est en harmonie avec le fondement de la dignité humaine telle que nous l'avons envisagée précédemment. Et la pensée humaine elle-même s'enracine dans l'histoire profonde du vivant, tout en appartenant plus largement à l'ordre même du monde, lesquels nous dépassent.
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Rappelons que le consumérisme naît aux Etats-Unis dans les années 1920 et s'étend à tout le monde occidental dans l'après-guerre, pour gagner grosso modo la planète avec la montée des pays émergents à la fin du XXème siècle. Le consumérisme est plus exactement la spiritualité correspondant à la religion de la croissance, spiritualité selon laquelle le seul infini qui nous soit accessible est celui de la consommation matérielle. Nous n'aurions d'autre voie d'accomplissement, d'achèvement de notre propre humanité que la consommation. Assortie à la croissance réputée infinie, la consommation nous permettrait collectivement d'accéder au seul infini possible, à savoir celui de consommations indéfiniment reconduites et toujours plus gourmandes, saturant toutes espèces d'angoisse et autres sources d'insatisfaction, toute forme de désir infini.
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Un autre physicien, Gabriel Chardin, dans un esprit plus critique [qu'un autre exemple donné précédemment par Dominique Bourg], s'est employé à calculer la durée d'une civilisation planétaire affectée d'un taux de croissance annuel de 2% de la consommation des ressources en général, c'est à dire le taux de croissance du PIB qu'ont connu au maximum les anciens pays industriels de 1870 à 1920, avant d'y revenir récemment. Rappelons que sur Terre (sic), avant 1820, la croissance s'élevait en moyenne à 0,06 % par an. Une telle civilisation détruirait la Terre est l'univers entier si elle ne s'effondrait d'abord. Un taux de croissance de 2% de la consommation des ressources, dont l'énergie «grillerait» en quelques centaines d'années la Terre et en 5 000 à 6 000 ans l'univers observable, soit dans un rayon de 10 milliard d'années-lumière... Une perspective qui devrait relativiser le déni moderne de toute dignité du donné naturel !

[NB : Dominique Bourg explique dans un chapitre précédent ce qu'est ce "donné naturel". Pour résumer, c'est tout ce qui se trouve à l'état de nature avant transformation et marchandisation par l'homme : minerais, énergies fossiles, terres arables, etc.]
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Première conclusion, l'expansion exosomatique de notre espèce a connu récemment une prolifération analogue à celle d'une tumeur cancéreuse, affectant puissamment le système qui l'accueille. Deuxième conclusion, il en résultera, il est en train d'en résulter a minima une altération significative des conditions d'habilité de la terre. Les générations présentes et futures semblent d'ores et déjà destinées à une vie plus difficile sur une planète appauvrie en ressources, plus hostile, avec des événements extrêmes plus extrêmes et plus nombreux, avec un écoumène sous la pression de la montée des mers et du devenir aride de régions entières. On ne saurait même écarter la possibilité d'un effondrement de la civilisation industrielle, que l'aveuglement techno-optimiste contribue d'ailleurs à conforter. On ne peut d'ailleurs se demander si le chaos géopolitique et politique en passe de s'étendre ne forme pas le début d'une dynamique d’effondrement.
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L'affirmation de l'individualisme ontologique, la fiction d'un état de nature composé d'individus isolés, se suffisant à eux-mêmes, ont fini par ruiner l'ancien régime juridique pour imposer le droit d'user et d'abuser, droit d'un individu exerçant sur lui-même et sur ses biens une souveraineté absolue. Les libertariens nord-américains et plus généralement les néolibéraux ont poussé jusqu'à son terme la logique individualiste en affirmant le droit de quelques-uns à considérer l'univers entier comme un stock de ressources à leur disposition.
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Autrement dit, la suppression de toute entrave au marché ne peut se faire qu'au détriment des autres formes de coordination de l'action collective, et tout particulièrement démocratique ou à l'échelle de petits collectifs.
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L'impact du néo-libéralisme est tout particulièrement catastrophique en matière de production du savoir, de jugement selon le vraisemblable et le faux. Commençons par un aspect marginal, mais non sans conséquences, celui du "ranking" universitaire. Il n'y a pas d'amélioration à attendre d'une mesure universelle en matière de production du savoir, car quel que soit le domaine, on trouvera toujours grosso modo le même pourcentage général d'excellence, de moyenne et dévaluations basses. Cela permet simplement d'imposer les mêmes standards, quelles que soient les disciplines, quelles que soient les nations, ce qui ne peut que nuire à l'une des expressions de l'excellence, à savoir la reconnaissance de la diversité des savoirs et celle de leurs modes d'évaluation. On obtient donc ainsi une sorte de PIB académique, avec les mêmes tares que l'instrument originel.
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L'enjeu des changements que nous connaissons n'est pas d'affecter telle ou telle contrée, tel type d'habitat, telles conditions de vie particulières, mais les conditions mêmes de la possibilité du déploiement des sociétés humaines, et de l'existence de chacun de nous. L'enjeu n'est pas ici tel ou tel aspect du conditionné, mais le conditionnant lui-même, l'habitabilité en tant que telle du système Terre pour les êtres humains et les autres espèces. Ce n'est donc pas tel ou tel type d'activité économique qui se voit menacé, mais la possibilité même de telles activités.
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En quelques décennies, une sorte de culture d'esclave s'est emparée des esprits. J'entends par culture d'esclaves un mode d'organisation de la société où le plus grand nombre se trouve dans la situation caractéristique des esclaves selon Aristote, à savoir d'être réduits à l'état d'instruments corporels animés par la volonté d'autres hommes. Tel est ce qui nous arrive lorsque nous n'avons plus d'autre ambition que de survivre le lendemain, de contribuer à un devenir collectif dont on ignore tout, dont on ne sait qui le conduit réellement et pour aller où. Tel est l'état de la société lorsqu'elle se réduit à un marché, et qui plus est un marché global, un automate planétaire et tentaculaire qu'aucun Etat n'est plus en mesure de contrôler.
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De nombreuses études ont mis empiriquement en évidence ce lien entre les inégalités sociales et les inégalités environnementales. Il est à cet égard intéressant de se tourner vers l'étude Handy et sa modélisation des relations inégalités et environnement, à la lumière des effondrements sociétaux passés. Cette étude repart du modèle proies-prédateurs bien connu des biologistes, censé recouvrir la relation riche (élites) - pauvres (travailleurs), mais l'enrichi en tenant compte des capacités techniques humaines. Sur ces bases sont distingués trois idéaux-types de sociétés : égalitaire, sans élites ; équitable ; inégalitaire avec accaparement des richesses. Il en résulte quatre trajectoires différentes : l'équilibre population et environnement ; des oscillations précédant l'équilibre ; une alternance de périodes de croissance et d'effondrements ; une croissance forte débouchant sur un effondrement irréversible. L'essentiel étant qu'apparaissent avec ce modèle des liens unissant degrés d'inégalité et relation à l'environnement, les inégalités conduisant immanquablement à un effondrement, et ce, même en cas de consommation faible. A contrario, seules les sociétés égalitaires échappent à l'effondrement.
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Dominique Bourg
Le progrès, notre référentiel pour penser le temps, donne l'idée d'une accumulation indéfinie du bien-être, de la richesse, de l'aisance. Le fait que la promesse de progrès, par son moteur même, aboutisse à la promesse opposée (la destruction) est incompréhensible pour nos cerveaux.

L'Histoire
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Comme nous l'avons vu en partant de l'Anthropocène, il ne nous est pas loisible de revenir en deçà des limites planétaires que nous avons franchies, compte tenu de l'inertie des phénomènes et de l'irréversibilité au long cours de certaines des dégradations que nous avons infligé à la biosphère. Revenir au degré de concentration atmosphérique du carbone précédant l'âge industriel exigera 100 000 ans. La biodiversité que nous avons détruite ne se reconstituera qu'au gré des prochains millions d'années. En revanche, il est urgent de construire une économie permacirculaire, à savoir une économie qui nous ramène dans celles des limites auxquelles il nous est possible de nous inscrire d'ici au milieu du siècle, soit découlant de la productivité biologique du système-Terre, et de sa capacité à supporter les effets de nos activités, autrement dit l'empreinte écologique. Il convient ainsi de revenir à une empreinte écologique d'une planète, alors que nous sommes, pour un pays comme la France, au prorata de la population nationale, à plus de trois planètes.
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Il ne fait guère de doute que le libéralisme politico-économique classique a été le meilleur garant de nos libertés. Mais on aurait tort cependant de considérer que le marché constitue par lui-même une sorte de garant de nos libertés. Singapour, la Chine sont en effet des économies de marché sans grandes libertés politiques, et nullement des démocraties. L'équivalence entre le marché, d'un côté, et les libertés publiques et démocratiques, de l'autre, que l'on a longtemps tenu pour évidente, n'était en fait qu'une coexistence. Ce constat suffirait à rouvrir des perspectives hâtivement refermées après la chute du mur. Cherchons ici plus modestement à mettre derechef en lumière les effets destructeurs et réducteurs d'un impérialisme de marché, mais désormais quant au pluralisme inhérent à la liberté elle-même ; l'absolutisation d'une forme d'expression de la liberté nuit nécessairement aux autres expressions possibles. Autrement dit, le marché tend à privilégier certaines formes de libertés au détriment d'autres. Il peut donc ainsi, lorsqu'il est érigé en principe absolu, déboucher sur une forme de réductionnisme pratique, une réduction bien réelle de nos potentialités.
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Tant que nous admirerons des milliardaires comme Elon Musk - pour qui science n'égale pas connaissance, mais technique, argent et pouvoir -, nous serons incapables de comprendre que nous sommes des Terriens, dépendants des autres formes de vie terrestre. Admirons le raisonnement : incapables de maintenir le vie sur notre planète, créons la vie sur une planète déjà morte !
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Un monde sans élevage risque fort en effet d'être un monde sans présence animale, si ce n'est des animaux fort anthropisés, pour ne pas dire aseptisés, comme les animaux de compagnie. Quel paradoxe d'ailleurs que de prétendre «libérer» des animaux en les condamnant à l'inexistence, en les rayant du paysage ! [...] Quoi qu'il en soit, il n'est pas plus sensé de prétendre fonder la morale sur la nature, que de rejeter pour des raisons morales les nécessités de la nature.

[NB : Quoi que reconnaissant au veganisme des questionnements, des réflexions intéressantes, il en fait toutefois une critique forte et très étayée, tant philosophiquement qu'écologiquement avec un grand sens de la raison et de la mesure]
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