Edwige Antier." Il faut retrouver nos yeux d'enfants "
Il faut cesser de convertir les pères en pères maternants. Cette tendance actuelle est tout à fait ridicule et dérisoire. Le rôle du père est de protéger la mère, la valoriser en tant que mère et en tant que femme. Il faut que chacun ait sa place. Pour l'enfant le meilleur des papas est celui qui aime et qui protège...maman!
La gestation en est assez longue ; je le publie en 1984, sous un titre un brin provocateur : Mémoires d'un nouveau-né. "Mémoires" car mon petit héros narrateur n'est pas tout neuf. Il est arrivé en notre bas monde, expliqué-je , doté d'une vie antérieure à sa naissance, d'un passé qui lui a déjà constitué une personnalité. Il se raconte à la première personne , je réagis à ses propos, en faisant entendre ma parole de pédiatre.
Vous faire comprendre, à vous, les hommes, les douleurs intimes que subissent les femmes plus que jamais, à notre époque, devrait vous donner conscience du rôle qui est le vôtre : protéger celles qui font vos enfants, qui les instruisent, qui les conduisent sur le chemin de la vie, est la plus noble des missions.
N'attendez pas d'elles qu'elles fassent votre place d'homme et de père, assumez votre rôle.
Les porteurs de paroles de notre époque ne tiennent malheureusement pas ce discours aux jeunes pères, mais les encouragent au contraire à piétiner d'impatience pour lutter contre le comportement soi-disant "fusionnel" de leur femme.
Nous verrons combien cette violence morale, et parfois physique, crée des blessures intimes.
Oui, le père a sa place. Mais, pendant les premiers mois, elle est celle d'un protecteur tranquille.
Les plus jaloux passent alors à l'agressivité.
Elle est "trop", cette femme, trop dévouée à ses enfants, trop courageuse au travail, trop indépendante matériellement, trop rieuse avec les amis !
Quels que soient ses efforts pour se faire pardonner en se médiocrisant, elle sera punie. Si souvent gravement ...
(...) Tant de femmes qui auraient pu éviter le désastre si l'entourage ne les avait pas enfoncées mais au contraire soutenues.
Le courage des femmes ne s'oppose pas à la lâcheté des hommes.
Mais plutôt à leur impréparation.
Mon confrère Aldo Naouri rêve de restaurer une autorité hiérarchique de l'homme sur la femme. Mais non, c'est fini.
Elles savent qu'elles sont aussi intelligentes que lui ; elles savent qu'elles peuvent être libres financièrement. Elles n'accepteront plus jamais d'être soumises (même quand elles feront semblant).
Il faut que les jeunes hommes le sachent.
Il faut les préparer à la vraie virilité contemporaine, celle qui ne consiste pas à faire la guerre, ni à s'imposer en payant.
La facilité consiste à profiter du courage des femmes pour se laisser aller à une vie d'homme, vie jouisseuse de l'immédiat, matérialiste et facile, puisqu'elles sont là à s'occuper de l'essentiel ...
Mais abuser du courage, c'est se priver d'un grand partage, de la création commune, d'être bien et épanoui avec un autre soi.
Celles qui semblent aujourd'hui avoir "tout pour être heureuses" mènent en réalité un combat quotidien, parce que la société, dans ses discours esthétiques, érotiques, compétitifs, exerce une pression continue sur elles, à travers leur conjoint, leurs enfants, leur milieu professionnel, par mille petites violences incessantes et sournoises - jusqu'aux violences les plus terribles mais qui ne sont pas les plus visibles ...
Même si elles sont parfois publiquement dénoncées, nombre de ces petites ou grandes agressions se retournent contre les femmes, qui préfèrent trop souvent se taire ou se battre seules.

Il faut rééduquer ceux dont la sensibilité est abîmée par les films pornographiques vus avant leur puberté, créer des groupes d'éducation - de rééducation - aux rapports amoureux dans le respect de l'autre.
Et surtout prévenir en cessant de considérer comme quasi normale la vision des films pornographiques par les enfants d'aujourd'hui. "Et alors ? diront les esprits "libérés", c'est notre époque ... Tous les enfants ont toujours regardé par le trou de la serrure." Oui, sauf qu'il n'y a rien de commun entre le brouillard de deux corps qui bougent et les gros plans précis (...)
Les parents doivent cesser de faire les autruches en s'imaginant que leurs enfants ne sont pas pollués peu ou prou par ces images violentes.
Les sachant à la merci d'une telle intrusion dans leur imaginaire, mieux vaut les avertir. Leur dire combien l'amour préside à la relation entre deux adultes (...) ; comment sentiments et respect de l'autre forment le terreau de la relation amoureuse. Et dire clairement qu'ils peuvent être amenés à voir des films pornographiques, où le plaisir est simulé (...)
Les enfants sont très réceptifs à ces explications (...)
Les filles peuvent alors oser dire non sans se croire anormales.
Les relations sexuelles à tout prix, même quand vous n'aimez pas, même quand vous êtes épuisée, même quand vous n'avez pas été respectée durant la journée, c'est non. Il n'y a pas de "tout le monde aime ça" !

Au clair avec la sécurité éprouvée quant à ce que vivaient mes enfants en même temps que je travaillais, j'étais plus disponible pour me concentrer sur mon travail.
J'encourage donc tous les employeurs à créer des lieux de garde près de leur entreprise pour que les parents puissent vivre dans la sérénité.
Une touche de tendresse ne fait absolument pas de mal à une atmosphère professionnelle !
Même lorsqu'elles ont pu bénéficier d'une garde professionnelle, les mères Courage partiront le cœur lourd de se séparer - huit heures de travail, l'heure de déjeuner, et le temps de transport ..., soit dix heures d'absence, une éternité pour un bébé !
(...) "Les femmes ont toujours travaillé plus que les hommes", disait Claude Lévi-Strauss lors d'une conférence à laquelle j'assistais en 1990 à l'Assemblée Nationale. Il faisait remarquer qu'avant la société industrielle elles transportaient leur enfant sur leur lieu de travail, qu'elles aillent dans les champs, qu'elles tissent sur le métier, qu'elles s'accroupissent au marché, le couffin à côté des paniers.
C'est l'avènement du travail en usine et en bureau qui a obligé les femmes à se séparer de leur enfant. Il est donc légitime de rapprocher maintenant le lieu de garde de ces structures. (...)
Oui, la crèche d'entreprise, en ce qu'elle rapproche le bébé de sa mère ou fait réellement participer le père, est un véritable baume sur le cœur des mères Courage.
Miracle de la nature, la femme retrouve sa ligne.
Il lui faut un an, un an pendant lequel je la vois s'inquiéter, affolée devant le miroir à l'idée de ne plus pouvoir mettre un deux-pièces.
Elle se prive, elle a faim tout en courant du travail à la crèche, ne trouvant plus le temps d'aller à la gym, avec ce bébé auquel elle ne veut pas manquer ... mais elle trouve tout de même les astuces de vêtements, de coiffure, d'accessoires pour rester désirable, féminine, pour vous, son homme.