Elizabeth Anne Lynn

- Cessez de la regarder, capitaine, dit Norres.
Sorren repoussa une mèche qui balayait son visage. Le bleu léger de sa tunique reflétait le bleu presue transparent de ses yeux. Ceux de Norres étaient d'un gris crépusculaire. Sorren croisa les bras sur la poitrine.
- Nous pouvons vous emmener avec nous si vous parvenez à sortir de l'enceinte, dit-elle.
- Vous acceptez? dit-il stupidement.
- Nous vous emmènerons, reprit Norres, mais pas très loin. Notre mission exige que nous retournions au Donjon des Nuages immédiatement. Vous viendrez avec nous jusque là.
Une nouvelle fois, Sorren rejeta ses cheveux en arrière. La dague pendait à son côté droit, comme une courte épée. Ryke se demanda si la cicatrice sous l'œil venait d'une bataille. Il n'avait jamais rencontré de femme qui sût se battre.
- Qui êtes-vous? demanda-t-il.

Nous, les enfants de la cité, on nous a enseigné dès l’enfance à révérer les sorciers, à croire que grâce à leurs pouvoirs ils étaient plus proches de la connaissance que nous. Et cela nous a fait oublier qu’ils ne sont que des hommes et des femmes, comme vous et moi. Quels que soient leurs pouvoirs, ce sont des êtres humains, et je ne crois pas qu’ils en sachent plus que vous ou moi, ou n’importe qui d’autre, sur la loi, la vérité, ou le kea.

… Les autres, ils s’amusent. Ils font de jolies images. Ce n’est pas cela l’art. C’est tout ce que tu es capable de donner. C’est ce qui demeure quant au détour d’un chemin tu aperçois la route, avec le Cavalier qui vient à ta rencontre. Ça demeure, parce que c’est dans ton propre sang que tu as trempé ton pinceau.

« Que font les sorciers Aneshs ? »
« Ils guérissent, font la pluie et le beau temps et décèlent la vérité. Ils servent aussi de liens entre les tribus. Envoyer un courrier à travers le désert, c’est long et souvent dangereux. Transmettre une pensée, c’est plus rapide. »

Kel le regardait gravement. Il posa doucement la main sur son épaule. Sa voix se fit caressante.
- Je ne voudrais pas qu'il t'arrive quelque chose. je t'apprendrai à te servir d'un poignard.
- C'est trop tard Kel.
- Non, il n'est pas trop tard. Je sais ce que je fais, ne l'oublie pas. Me laisseras tu t'enseigner le maniement du poignard ?
Les doigts de Kel glissaient sur son cou, son menton. Son pouce s'attarda sur la gorge de Kerrin, là où battait le sang.
Kerrin passa son bras autour de la taille de son frère. Leurs lèvres se rejoignirent.
- Mmmm …
Ils se caressèrent. Le corps de Kel était souple et fort.
Kel l'embrassa avec plus de force. Ses lèvres étaient fraîches. Il sortit la chemise de Kerrin de sa ceinture.
Kerrin l'enleva tout à fait et d'allonge sur le sol. Kel se glissa à ses côtés et l'aida à enlever son pantalon. Les doigts de Kel couraient sur la peau laiteuse de son frère. Puis il se souleva et s'installa entre les cuisse de Kerrin. Kerrin aurait aimé avoir deux bras pour enserrer ce corps puissant qui se dressait devant lui. Des images de Tryg et de Kili passèrent devant ses yeux. Kel se mit à genoux et explora le corps de Kerrin avec sa langue. Kerrin cambra les reins … sa respiration s'accéléra … un spasme de plaisir courut dans son corps comme une boule de feu. Un cri … et il retomba dans l'herbe …

Vous avez un don, l’œil d’un artiste, la capacité de saisir des formes. Toute votre vie s’est passée à l’exprimer au travers de votre art. Mais l’expression n’est évidemment pas l’œil. Il me faudrait devenir vous pour comprendre ce que vous voyez dans sa totalité. L’enseignement des techniques artistiques ne saura jamais transmettre cela. Et, sans me détruire, je ne possède aucun moyen d’effacer suffisamment ma propre personnalité pour devenir vous.

Sa jambe le faisait parfois souffrir, mais toute sa vie il avait vécu avec cette souffrance. Il n’était pas vrai, comme il l’avait lu une fois quelque part, que la douleur finissait par devenir une vieille amie. La douleur n’était jamais une amie.
Trois années auparavant, elle l’avait terrassé. Avec cette souffrance intolérable qui lui vrillait les os, il n’était plus qu’un tas de viande crue accrochée à son squelette branlant comme à un râtelier.

– Au bout du chemin tu trouveras ce que ton cœur désire, dit-elle. Prends soin de ce qui se trouve au fond de ton cœur.

C’est écrit dans l’ancien langage. Je ne le connais pas, mais on me l’a traduit. Il énumère les armes défendues dans la cité. Il y a deux mots pour « épée » dans le vieux langage : un désigne l’épée à longue lame, l’autre celle à lame courte avec un seul tranchant. L’interdit ne mentionne pas cette seconde arme.

Je suis comme un rat en cage. Un rat illustre, certes, et la cage est dorée, mais je ne peux oublier les barreaux.