Citations de Elizabeth von Arnim (195)
Lorsque Mrs Wilkins sorti de sa chambre, elle vit à travers la porte-fenêtre un arbre de Judée tout en fleurs sous le soleil. On n'entendait aucun bruit. Des seaux remplis de lys blancs avaient été disposés parterre, et une brassée de capucines brillait de tout son éclat au milieu de la table. Ce silence, ce sentiment d'espace, ces fleurs en abondance, l'absurde beauté de l'arbre de Judée, tout cela sembla d'un coup presque trop beau à Mrs Wilkins. Allait-elle vraiment vivre un mois entier environnée de toutes ces belles choses ? Jusqu'alors elle avait dû se contenter de miettes de beauté rencontrées au hasard -une touffe de pâquerettes remarquée au milieu d'une pelouse de Hampstead, un jour qu'il faisait beau, ou un coucher de soleil entre deux cheminées. Jamais elle ne s'était trouvée en un lieu qui fût totalement beau,
En arrivant dans la bibliothèque une émotion m’a prise-ma chère bibliothèque, que d’heures heureuses j’y ai passées, à fouiner parmi les livres, à imaginer pour mon jardins des plans mirifiques, à écrire, à rêver, à ne rien faire! (p. 82)
Nul ne paraît comprendre, ici, combien le cœur me bat en attendant la floraison de mes roses-thés. Il n’est pas un traité de jardinage allemand qui ne relègue les roses-thés dans les serres, les emprisonnant à vie et les empêchant pour toujours d’être touchées par le souffle de Dieu. (p. 35)
Cette petite chienne produit de bien grands effets, me direz-vous. Certainement pas plus qu'un bouquet de lilas sous le soleil d'un matin de mai n'en provoqua chez une dame de ma connaissance. Elle avait décidé, ce matin-là, d'en finir avec une vie qui lui paraissait trop pesante, mais en faisant un dernier tour de jardin elle avait découvert ce bouquet de lilas et pensé qu'elle pourrait peut-être attendre un peu. Un monde capable de produire une pareille beauté ne devait pas se quitter à la légère, s'était-elle dit. En tenant dans mes bras la petite Knobbie, toute chaude et caressante, je songeai pour la première fois depuis des années que le monde était plein de bonnes et belles choses. Il ne me restait plus qu'à me remettre à leur recherche.
Je sentis le mot resolut me traverser l'esprit, comme si mon serment d'autrefois se retournait dans sa tombe.
Im Wahren, Guten, Schönen resolut zu leben...
Pourquoi ne pas essayer encore une fois, me demandai-je, la joue contre les douces oreilles de Knobbie ?
Les invités peuvent être, et sont souvent, des êtres délicieux, à condition qu'on ne les laisse pas prendre le dessus. Or, jusqu'à ce que le mois de mars et le changement de temps aient mis fin à leurs allées et venues - à leurs venues tout court, car ils ne s'en allaient guère -, ils eurent incontestablement le dessus dans la maison. En faisant mention de mes invités, je n'oublie pas que ce livre, n'étant pas une autobiographie, ne parle que de chiens. S'ils apparaissent dans ces pages, c'est uniquement en fonction de Coco. Sans Coco, ils ne seraient plus rien, et comme bien des êtres et des choses je les passerais sous silence.
La raison de leur présence dans ma petite maison si tranquille, la voici :
J'avais cinq enfants, et chacun avait le droit d'inviter deux amis pour les vacances de Noël. J'avais fait cette promesse dans l'enthousiasme des premiers jours, lorsqu'on avait posé les premières pierres de la maison, et j'étais encore bien décidée à la tenir. Mais deux amis multipliés par cinq, cela faisait dix amis, plus mes cinq enfants. Au total, j'allais donc avoir à m'occuper de quinze enfants. C'était peut-être beaucoup.
Marie-Louise était une épouse pleinement épouse, dont aucune baleine (si je peux m'exprimer ainsi) ne raidissait les vêtements ou le caractère. Tout en elle était doux, féminin et rebondi. La touchait-on du bout du doigt, on laissait une fossette. Exerçait-on sur son esprit la moindre pression, elle cédait à l'instant.
(...) les subtilités de l'étiquette ne sauraient s'expliquer à qui n'en comprend pas la nécessité (...)
Nul ne peut obliger un homme à ouvrir les yeux. Les fermer, c'est quitter un monde de souci et de presse perpétuels pour pénétrer dans une vaste et paisible caverne dont nul ne saurait vous tirer aussi longtemps que vous aurez la force d'âme de ne pas les ouvrir.
Le sommeil m'apparaissait un havre de paix. Comment voulez-vous obliger un homme à faire quoi que ce soit s'il n'est pas réveillé. L'homme vraiment libre, songeai-je en fermant les yeux plus fort, est l'homme qui dort.
(...) la société anglaise obéit à des règles si fausses qu'une femme ne peut s'affairer sans qu'un homme doive au moins faire semblant d'être très occupé (...)
La meilleure plaisanterie du monde perd vite son sel si personne ne la comprend sauf vous.
Il ne suffisait pas d'un interlocuteur; ce dont on avait besoin, c'est de quelqu'un qui partage votre ardeur. Un compagnon d'enthousiasme, James en était ardemment convaincu, devait ajouter infiniment aux joies de la contemplation.
Perdue dans la contemplation de la mer, Rose sentit soudain monter en elle un irrépressible désir de serrer quelqu'un contre son sein. Elle, si mince et si réservée, se sentait étrangement – comment décrire cela -, étrangement tétonnière. Pour quelle obscure raison, San Salvatore semblait avoir multiplié les sensations et les dimensions de sa poitrine. Il fallait, il fallait absolument qu'elle tienne quelqu'un contre sa poitrine, pour le réconforter et le protéger, quelqu'un dont elle sentirait avec délice la tête chérie bouger entre ses seins et qui murmurerait des mots tendres. Ce pourrait être Frederick, ou l'enfant de Frederick, qui viendrait se blottir contre elle parce qu'il serait triste, ou qu'on lui aurait fait du mal... Elle souhaitait presque qu'on leur fit du mal afin de pouvoir les consoler.
Et voilà que sa Breloque s'était justement mis en tête de réfléchit très fort, de faire le point, de donner un sens à sa vie, que sais-je, en tout cas de s'occuper de choses auxquelles rien ne sert de penser avant quarante ans révolus.