AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Eric Dupond-Moretti (87)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Le droit d'être libre

Éric Dupont Moretti est un personnage singulier du paysage judiciaire français. Il est notamment connu pour avoir obtenu près de 149 acquittements devant la Cour d’Assises. Ce livre est un plaidoyer au droit d’être libre.



Au cours d'une conversation avec Denis Lafay, il nous éclaire sur la personnalité de ses clients, sur lui-même en tant qu’être humain, avocat et sa conception de la liberté. Il se questionne avec beaucoup de lucidité, s’indigne contre l’idéologie islamiste. En défendant, Abdelkader Merah, il s'est exposé à la controverse, à un risque de dérive éthique et professionnelle et interroge l'opinion publique insurgée sur son degré de sensibilité.”un avocat défend un être humain et non une cause et l'identifier, même à la marge, a ladite cause et aux interprétations qu’elles suscitent naturellement et légitimement dans la conscience de chaque citoyen est une lourde erreur’.



Dans cette affaire Eric Dupont Morreti, a été victime "d’un anéantissement inédit" une déflagration intérieure ayant pour origine les réseaux sociaux. Il a dû recourir à des soins.

"Dans notre système judiciaire français, il faut apporter la preuve de la culpabilité avant de condamner’ et c'est une question essentielle et pas toujours comprise."



Il est devenu avocat par un rejet viscéral de l’injustice et pour la combattre.



J ’ai aimé cette lecture même si à un moment sa réflexion aborde des points politico-philosophiques dans lesquels

j'ai un peu décroché. Il est difficile de rentrer dans tous les aspects des échanges entre les deux hommes car cela se présente sous forme de conversations et ce serait révéler trop.

C’est un livre choc qui interroge le lecteur dans une introspection de son intimité et de ses responsabilités.



Un avocat hors du commun dont la probité je l’espère, ne sera pas remise en cause dans une affaire de prise illégale d’intérêts.



Commenter  J’apprécie          447
Bête noire

J'étais assez fascinée par le franc parler et l'éloquence de Maître Dupont-Moretti, mais j'avais beaucoup de difficultés à comprendre comment un homme pouvait vouloir aussi fortement défendre des criminels reconnus. Et c'est là que l'on voit que cet avocat est doué, car après la lecture de son livre, je comprends parfaitement que c'est avant tout un devoir de justice. J'ai appris beaucoup avec ce livre, sur la justice, sur l'Homme, sur la misère, les émotions... Les auteurs ont su soulever de nombreuses incohérences dans notre système judiciaire français, mais ils ont également su vulgariser pour le tout venant la complexité de ce milieu. J'ai trouvé dans ce récit une volonté de défendre des droits fondamentaux, l'égalité pour tous et surtout le droit à la justice. Un livre que je recommande fortement.
Commenter  J’apprécie          335
Directs du droit

J'ai quand même eu du mal à entrer dans ce livre avec l'avant-propos et le premier chapitre "Les nouveaux juges", soit un total de 80 pages plutôt techniques où Maître Dupond-Moretti plaide contre les magistrats. Je n'ai pas particulièrement apprécié cette guerre déclarée avocats contre magistrats. Il me semble qu'il y a de bons fonctionnaires de Justice, comme il peut y en avoir de mauvais, et la même proportion de bons ou mauvais avocats. Cela se retrouve d'ailleurs dans toutes les corporations. Les chapitres suivants sont des études de cas d'affaires connues de Maître Dupond-Moretti. Là naturellement, en sa qualité de membre du barreau affirmé il prend fait et cause pour ses clients confrontés aux rouages de la Justice... c'est normal, c'est sa profession... mais je me demande quand même en découvrant ces prévenus, qu'elle aurait été mon intime conviction si j'avais été juré d'assises...

Je n'ai pas été convaincue par ce livre.
Commenter  J’apprécie          291
Bête noire

Entre autobiographie et essai, l'avocat pénaliste Eric Dupond-Moretti (et Stéphane Durand-Souffland) nous relate les turpitudes d'un défenseur de toutes les causes, à travers une liste sans ordre ni chronologie, de certaines de ses affaires, qui nous éclairent sur son état d'esprit et sa vision de la Justice et du rôle de l'avocat.



"Cette interminable attente de la sentence n'est pas un temps comme les autres : c'est un moment suspendu, une parenthèse de mystère durant laquelle se joue le destin d'un être."



Au travers de son regard critique et sans concession, c'est l'organisation d'une cours d'assise qui nous sera expliquée, tout comme les dérives de cette organisation, notamment sur le choix des présidents de cours et des avocats généraux.

Celui qu'on surnommera "acquittator" nous dévoilera ainsi les dessous du corporatisme, sa vision de l'affaire Outreau, des experts psychologiques et aussi des jurés, avec un franc parlé qui a fait sa réputation de Bête Noire de la justice.



J'aime le personnage d'Eric Dupond-Moretti ; sa prestance, son assurance, sa logique et sa force de persuasion.

C'est un homme de tempérament qui est passionné par son métier, dont il ressent la difficulté comme la nécessité et l'importance.



"Les vrais avocats pénalistes ne reconnaissent ni Dieu, ni maître, ils ne rendent de comptes à personne".



Dans ce cadre, il est imprégné de justice et d'égalité, entier en toute circonstance et n'a pas peur de dire ce qu'il pense.

On pourrait néanmoins lui reprocher ce complexe de persécution qui n'est rien moins que le retour de bâton de son franc parlé. Ben oui... quand tu causes comme ça, faut pas t'attendre à c'que ça plaise à tout le monde...



On ressent son amour du métier, celui d'avocat pénaliste, qui l'amène parfois à défendre l'indéfendable, et qui s'oppose à toute forme d'injustice.



Mais au-delà du personnage, ce récit manque un peu de structure. Il s'agit sans doute plus d'une série de mémos griffonnés sur un coin de nappe que d'un texte construit au fil du temps.

On y apprend néanmoins beaucoup sur les aberrations de notre système judiciaire au travers de son regard féroce mais quelque peu narcissique tout de même.



Si on aime le personnage, ce livre se lira sans difficulté et très rapidement... sur un coin de table aussi peut-être...



D'autres avis sur d'autres lectures sur :
Lien : https://blogdeslivresalire.b..
Commenter  J’apprécie          233
Bête noire

Eric Dupond-Moretti est un avocat pénaliste français de plus en plus connu. Il détonne un peu dans le monde des avocats, même des pénalistes, par son franc-parler.

Chaque époque a ses pénalistes célèbres. Depuis la fin de la peine de mort en France, ils font moins l'actualité mais Me Dupond-Moretti est avec Me Metzner et quelques autres une vedette du droit pénal en France,



Avec le chroniqueur judiciaire du Figaro, Stéphane Durand-Soufflant, il nous donne aujourd'hui un livre d'entretien en 13 petits chapitres, de 249 pages. Le livre est imprimé en gros caractères et on le lit très facilement, d'une traite ou deux.



Dupond-Moretti ne se prend pas au sérieux. C'est une de ses forces. Le livre lui-même fait preuve d'autodérision, déjà à travers son titre, Bête noire, avec en arrière-plan sur la couverture la photo en robe noire d'un avocat décidé. Bête noire de certains magistrats, il l'est assurément. L'un d'entre eux a même voulu le faire poursuivre pour une affaire d'usage de stupéfiants qui s'est révélée totalement infondée. L'avocat a beaucoup d'acquittements à son actif, au point d'avoir récolté le surnom d'"acquittador", et donc beaucoup de mécontents dans l'appareil judiciaire. Le sous-titre "Condamné à plaider" est dans le même registre d'autodérision.



Avocat depuis 30 ans, Me Dupond-Moretti est partisan non pas d'une défense de rupture à la Vergès, mais d'une défense musclée à l'intérieur du système. Il ne craint pas d'affronter les magistrats si nécessaire.



Il évoque son travail, les rapports avec les clients, bien qu'il n'aime pas ce qualificatif, prévenus ou accusés, le plus souvent, victimes parfois, ainsi que quelques tactiques et stratégies procédurales.



On y apprend beaucoup sur la façon dont se prennent les décisions, sur le rôle primordial du Président de la cour d'assises, à même d'influencer le verdict dans la quasi-totalité des cas et sur quelques grands procès, dont Outreau, un des plus grands scandales judiciaires de notre pays, dont on n'a toujours pas tiré les conséquences.



Lecture intéressante sur un univers trop méconnu .
Commenter  J’apprécie          222
Directs du droit

C'est étrange, je viens de terminer la lecture de ce témoignage de E.D.M. et l'affaire Balkany vient d'aboutir pour ce premier chapitre sur son incarcération à 4 ans ferme pour lui et 3 ans ferme pour son épouse. Voilà, en ce vendredi 13 septembre 2019, début d'après-midi, le Maire de Levallois-Perret se retrouve à la Santé (celle-ci ayant été complètement remise aux normes). Mr Balkany se retrouve donc dans un 9m² mais dans l'aile des ''cols blancs'', bien entendu. Sinon, pas de mesures particulières pour lui hormis une surveillance un peu plus accrue dans les premiers jours au cas où ses nerfs craqueraient suite au choc de ce mandat de dépôt.



J'en reviens au livre mais comprenez que je ne pouvais pas passer sur cette actualité dont la sentence ne s'est jamais vue en France pour ce type d'affaire concernant un couple d'élus.



E.D.M. relate quelques affaires dont il s'est occupées. Il y a des histoires ahurissantes mais elles sont véridiques ! le but de ce livre est pour lui de parler de l'intégrité, de la dépendance, de la neutralité des magistrats, juges d'instruction, présidents des cours d'assises. Bien entendu, il y a des juges qui sont de grands juges et qui écoutent attentivement la défense et n'oublient surtout pas que l'on reste présumé innocent.

D'autres juges, et c'est ce que dénonce Eric Dupond-Moretti, se font déjà leurs idées sans avoir vu qui que ce soit, ils sont liés d'office à la cause des victimes, s'ils n'aiment pas l'avocat de la défense, si les médias ont trop parlé en faveur des parties civiles, si l'opinion publique a condamné le mis en examen (sans d'ailleurs ne connaître d'aucune manière ce qui se trouve dans le dossier), le juge rend son acte à charge.

E.D.M. veut que la morale n'entre pas dans les jugements, les arrêts, les juges et autres doivent rester neutres, impartiaux, justes, se référer au droit et seulement au droit.



C'est l'affaire Christian Ranucci ''Le pull-over rouge'' qui a déclenchée chez Maître Dupond-Moretti qui à 15 ans écoutait la radio, et on annonçait la peine capitale pour Ranucci et c'est par détestation de la peine de mort qu'il a décidé qu'il exercerait la profession d'avocat.



Lu en septembre 2019 / Michel LAFON - 17,95 €.
Commenter  J’apprécie          2112
Le dictionnaire de ma vie

Fascinant

L'avocat prête au justiciable sa voix et son expertise. Il défend, il attaque. Le métier d'avocat est un métier d'indigné.

Aucune balance juste sans indignation.

Où se trouve le juste ? Où est la justice ?

En canalisant, en calmant nos colères inévitables, en calmant nos envies de vengeance, en trouvant la paix.

Maître Dupond-Moretti confesse avoir plus confiance en la cuisine française quand la justice française.

Le dictionnaire de ma vie

Le format dictionnaire est très pratique c'est bref, précis, anecdotique, peut-être trop anecdotique.

Merci Maître Moretti pour toutes vos pistes de réflexion, mon cerveau bouge plus grâce à vous.

La justice à travers le monde ?

Nos vie connaissent des métamorphoses continuelles au grés de nos passions, envies, ruptures, naissances, disparitions, créations, chagrins, regrets, envies de réparations, réconciliations.

L'institution justice peut nous aider ?

Ce que je pense à la fois de la justice et de ce dictionnaire parlant de justice. La justice nous éloigne de la bête terrifiante qui sommeille en chacun de nous.

Nous votons, et les lois émergent puis les lois s'appliquent ou ne s'appliquent pas. Nous inventons les lois pour jouer. Nous aimons notre civilisation, nous avons besoin de justice, nous avons besoin de ce jeux.

Grâce à ce jeux, nous nous servons des lois.

Le terme jeux ne signifie pas qu'il y a quelque chose à gagner ou à perdre. Le terme jeux signifie que chacun joue des rôles différents au cours de toute sa vie. A chacun de jouer son rôle.

La vie humaine ne peut faire sans tribunaux, sans loi, sans règles.

La vie humaine ne peut continuer sans justice.

Dés le plus jeune âge nous inventons la règle pour nos enfants : "dis bonjour à la boulangère, merci et à bientôt". Fais-le, respecte. C'est aussi du savoir vivre.

On interdit, à ceux que cela ne dérange pas, de corrompre. On interdit à tous, de passer entre les mailles du filet, on sous entend que nul n'est censé ignorer la loi.

Mais il faut reconnaitre que c'est devenu un sport international, l'irrespect des lois, l'irrespect de nos règles de vies.

Je parle de cas civiles, le pénal me stupéfie trop, je laisse Maître Moretti m'expliquer et vous expliquer à vous les cas les plus graves.

Accusé levez-vous, et dites-nous, dites-nous la vérité.

Oui, ça y est, je me lève, c'est fait, je suis debout, devant mes crimes.

Je vous le dis, oui, ce n'est un secret pour personne.

Oui la vie est une farce, la vie un jeu, la vie est une comédie, parfois une comédie romantique, la vie offre une idée de justice.

Mon indignation n'est pas celle d'un avocat. Nous ne savons pas où cette matière qu'est la justice finira, elle évolue à rythme soutenue. Elle est plus précise cette justice, elle est de plus en plus reconnue. Il y a, maintenant, une cour internationale de justice qui puni le plus grave.

Douter, je vous en prie, il est heureux de douter. Douter autant pour la ou les victimes que pour l'accusé ou les accusés. Douter jusqu'au bout des réquisitoires. Ne pas se précipiter pour rendre justice, pires conséquences pour tous. Douter jusqu'au bout.

La justice, c'est une histoire d'honneur mêlés à toutes sortes de corruptions et de lâchetés. Nous sommes actifs ou passifs et parfois les deux à la fois. Les hommes et les femmes sont irrésistibles, ils imaginent pleins de scénarios pour s'en sortir.

Ils sont parfois vertueux et vertueuses, parfois cupides et lâches, parfois déraisonnables, parfois violents et violentes. Nous sommes bourreaux nous aimons cela. Nous aimons donner des coups nous aimons recevoir des coups.

Nos volontés s'accomplissent.

Pourtant tous ces hommes et femmes cherchent la sérénité. Mais cette sérénité n'est pas définie de la même façon pour tout le monde. La justice c'est du commentaire. La justice c'est un très beau spectacle, c'est aussi un spectacle affligeant.

Le monde est submergé d'injustice et de beauté, le monde raffole d'histoires immondes, il en redemande.

Je pense ne plus croire au secret de l'instruction et je suppose et Maître Moretti n'y croit plus non plus.

Le coeur dans tout cela, nous sommes un coeur, nous sommes de chair, ceux qui rendent justice le font aussi avec leur coeur.

J'aime penser qu'il ne sont pas des machines agissant sans coeur qu'avec la loi expéditive.

Nous avons tous un coeur, nous sommes des justiciables.

Je préfères être épargné. Je préfères pardonner.

Vivre avec cette aigreur du coupable ou de la victime, qui sous entend une tension permanente de tout notre être, de notre coeur, ne me paraît pas favorable à une vie longue en paix.

D'après Maître Moretti les juges français devraient passer par la "case professionnelle avocat" avant d'exercer leur métier de juge. Ils sont trop jeunes et ne "connaissent rien à la vie" ils n'ont que la théorie et les lois, comment rendre justice avec si peu d'expérience. Je connais si peu le fonctionnement de la justice que j'ignorais même comment sont formés nos Juges.

Mais pourquoi ne pas faire les deux, former des juges après qu'ils aient été avocat pendant quelques années.



Je n'y parviens pas, ma chronique est brouillonne, elle utilise plusieurs temps, alors que l'emploi du présent est efficace.

Chères lecteurs et lectrices, I am so sorry.

Je ferais mieux la prochaine fois.

See you later.

Commenter  J’apprécie          141
Bête noire

J'ai toujours apprécié ce personnage médiatique officiant dans nos tribunaux. Ce Dupont Moretti de part sa prestance, son assurance, ses interventions dans des procès souvent à la une des journaux, bref pour résumer son charisme peut bien être qualifié de personnage à part entière.

La lecture de ce livre ne m'a pas décu, pas tellement par l'aspect des coulisses de certaines histoires judiciaire mais surtout pour les passages où il parle des coulises de sa vie d'avocat.

Sa comparaison avec une vie d'artiste est bien vu et me semble assez juste, une vie sans temps morts, une vie faite d'attente, une vie où le résultat final de votre travail, à savoir l'acquittement ou la condamnation de ses clients,ne dépend pas de vous mais des décisions d'autrui.

Quelle vie incroyable, il offre une vision de la justice singulière basé sur l'accusé et non sur les victimes. Un discours sans concession parfois dérangeant tellement il peut sembler anti moral. Mais comme il le repète souvent je fais du droit pas de la morale.

Le seul point négatif est qu'il s'appuie sur de trop nombreux exemples pour illustrer ses propos, un tri plus important de ses anecdotes n'aurait pas nui à la force du discours.

Commenter  J’apprécie          140
Bête noire

Chacun connaît ce redoutable avocat pénaliste, l’un de ceux qui a fait exploser l’accusation au procès d’Outreau ou dans l’affaire Viguié (ce professeur de droit toulousain accusé d’avoir fait disparaître sa femme, et définitivement acquitté aujourd’hui). Pour caractériser une reprise d’audience dans ce dernier procès, un journaliste écrivait : « Et Me Dupond-Moretti allume sa concasseuse… ». Il s’agissait bien sûr de sa machine à broyer les arguments faiblards de l’accusation.



Pour défendre ses clients, Me Dupond-Moretti se livre à une analyse critique de chaque pièce du dossier, afin d’introduire le doute ; le « joyeux » désordre régnant apparemment dans la gestion administrative de la Justice et de la Police lui permet souvent de démolir ce qui devait servir de preuve (par exemple en démontrant une confusion d’échantillons d’ADN).



Au-delà de cette intelligente méthode de défense, Me Dupond-Moretti met en cause la « violence » et l’inégalité des Assises, où tout est fait, comme au XIXème siècle, pour condamner. Il dénonce les nombreux moyens qu’a le Président pour favoriser l’accusation contre la défense, et en appelle à une procédure pénale plus égalitaire, et surtout à la rupture du lien étroit entre les Juges et les Procureurs, membres d’un même Corps où l’on peut faire carrière alternativement au Siège et au Parquet.



Il montre ainsi que l’affaire d’Outreau n’a pas été un accident, mais le fidèle reflet des dysfonctionnements qui affectent notre Justice : jamais la Chambre d’accusation, saisie par les accusés en appel du juge d’instruction et du juge de la détention, n’a remis en cause leurs raisonnements.



Que faire ? Bien sûr, il faudrait se rapprocher du modèle anglo-américain, dans lequel le Parquet est sur le même pied que la Défense, et qui laisse le Jury populaire seul dans sa délibération. Mais l’auteur est moins prolixe en propositions qu’en critiques : peut être ressent-il combien il est difficile d’aller contre le puissant corporatisme des magistrats et de leurs tout puissants syndicats.



Un petit bémol toutefois : la publication in extenso d’un échange de lettres entre l’auteur et un magistrat a sans doute soulagé (entendu au sens des Tontons Flingueurs) Me Dupond-Moretti, mais n’ajoute pas grand-chose à l’intérêt de son témoignage.

Commenter  J’apprécie          130
Bête noire

C’était une lecture passionnante à bien des égards. Eric Dupond-Moretti nous ouvre les portes de sa profession et particulièrement celle des avocats pénalistes.







Il critique de façon assez comique parfois certains abus de la justice, notamment aux assises concernant le rôle prépondérant du Président de Cour d’assises dans le déroulement du procès, celui encore plus fort du parquet, la frontière très diffuse entre la magistrature debout et assise avec toutes les connivences qu’il nous expose, exemples concrets et vécus à l’appui et enfin le poids mineur des jurés dans la sentence finale.







J’ai trouvé ses propos virulents à outrance, mais il est passionnant, n’est pas un brillant avocat qui veut… Quand à sa profession et le fait qu’il est parfois critiqué sur le fait qu’il défend plus les accusés que les victimes, il a une phrase admirable que je trouve résumer parfaitement sa philosophie : « Je peux défendre un négationniste, mais en aucun cas le négationnisme ».







Décortiquer toute la procédure pour retrouver d’éventuels vices de fond ou de forme, dénoncer les procès instruits uniquement à charge, revendiquer l’humanité de celui qui a commis l’irréparable, tenter de convaincre de l’innocence de son client lorsque celle-ci est plausible ou simplement obtenir une peine proportionnelle et juste aux faits reprochés, voilà le quotidien d’un pénaliste qui se déchausse de son jugement moral pour défendre uniquement sur le terrain du droit un client qui demande de le défendre.











L’opinion publique a facilement plus d’attachement pour la victime c’est un fait.



Le procès est parfois l’occasion pour la victime de faire son deuil, la condamnation à la peine maximale exigée par les parties civiles peut se comprendre d’un point de vue moral mais le procès ne doit pas servir comme forme de consolation pour la victime.



Le procès doit être entendu comme le moyen pour la société dans son ensemble de condamner le cas échéant à une peine juste, toujours en ayant à l’esprit le respect scrupuleux des droits de la personne mise en cause.







Je trouve cependant qu’il nous livre à travers son livre un certain nombre de préjugés qu’il a lui-même sur le procès, ou du moins qu‘il veut nous faire acquérir. Dans l’avant-propos il nous interpelle : « Observez le président quand il pose ses questions, devinez qui l’agace le plus : l’accusé, l’avocat qui le défend ou l’avocat général qui l’accuse? Prêtez attention aux arguments de ce dernier, chargé de prouver la culpabilité de l’homme du box:  Est-il convaincant? Fait-il des efforts pour l‘être ?…».



Pour moi il part du postulat que le Président ne fait pas son travail de façon neutre, que l’avocat de la défense agace forcément, et que l’avocat général n’a pas de grands efforts à fournir pour convaincre de la culpabilité…







Personnellement je trouve un peu malsain cette façon de nous exposer son point de vue, bien des sous-entendus en découlent. De mon point de vue lever des soupçons sur toute la profession de magistrat pour orienter dès le départ la vision du lecteur me paraît regrettable, c’est précisément ce qu’il critique avec tant de véhémence quant à la manipulation des jurés qu’il reproduit ici.







Pour le reste je suis parfaitement d’accord avec lui, des abus sont commis et doivent être relevés et dénoncés comme il le fait concrètement à travers divers exemples par la suite, mais à la lecture de ce paragraphe il en fait une telle généralité, surtout dans un avant-propos, cela donne bien évidemment un certain impact…







Son égocentrisme assumé m’a fait bien rire d’autant plus qu’il évoque les effets de manche qu’il ne produit pas évidemment…parce que ça n’impressionne plus les jurés… Pourtant dans la presse régionale on évoquait récemment l’affaire Clélia, les mots durs échangés entre l’avocat général Luc Frémiot et lui en 2011 et à nouveau en 2012. Pour ma part, c’est un spectacle absolument scandaleux, d'un côté comme de l'autre. Oui pour se faire entendre il faut parfois « crier » plus fort mais on n’est pas à la foire, ce ne sont pas des poissonniers à ce que je sache et la justice doit se faire dans un climat serein! La victime et même l'accusé méritent mieux tout de même.







Et puis j’ai particulièrement apprécié cette note finale d’un article de La Voix du Nord en date du 24/05/2012 relatant les paroles de Maître Dupond-Moretti à l’égard des jurés.



[Alors, sa colère retombe. Sa voix se fait solennelle. Chaude. Grave. « Si vous avez la certitude, la main à couper et la tête sur le billot que c’est lui, alors allez-y. Mais si vous avez un doute… » Il dit encore que « ce n’est pas déshonorant de dire que vous ne savez pas », se retourne vers le gamin de vingt-quatre ans qui est maintenant ratatiné dans le box et supplie… « Ne vous trompez pas. Surtout, ne vous trompez pas… »]







C’est son métier, c’est son gagne-pain après tout, un mélange habile d’intelligence, d’insolence, et de savante manipulation des mots et des acteurs du procès malgré ce qu’il peut en dire… La ruse verbale est édifiante.







«Acquittator» c’est bien une expression stupide comme il l’évoque, il n’en demeure pas moins qu’elle a le mérite de le mettre en valeur, peu peuvent se targuer d’avoir de si bons résultats, d’être autant adulés que détestés par ses confrères, par le monde judiciaire dans son ensemble, les médias et l’opinion publique. Un tel talent méritait bien un surnom hors du commun…



 



 



 

Commenter  J’apprécie          120
Directs du droit

Directs du droit est un ouvrage concis, clair et à charge. Dupond- Moretti dénonce avec force illustrations l’affaiblissement continue des droits de La Défense.

La médiocrité s’installe chez les juges et les magistrats, une confusion entre le droit et les considérations morales s’est installée.

J’ai trouvé l’ensemble crédible et bien documenté.

Si La réforme de la justice semble de plus en plus nécessaire, le climat général autoritariste et liberticide ne paraît guère propice. En tout cas les solutions vers plus d’efficacité ne sont pas abordées, l’auteur ne fait pas mieux, il se contente des constats, brillamment certes mais qu’est qu’on fait ? . A de nombreuses reprises Dupond-Moretti insiste sur la place du hasard, de la faute à pas de chance, sur des lacunes essentielles au stade des enquêtes, qui peuvent tout à fait conduire à des erreurs judiciaires majeures qui même reconnues, ce qui est proprement scandaleux, ne donnent pas lieu à une juste indemnisation.

La dernière page lue, il m’apparaît que l’obsolescence de notre justice et notamment sa lenteur, son anachronisme, sa fiabilité très relative, que j’ai pu constater dans les domaines administratifs, ou celui des affaires familiales frapperait aussi le pénal et le civil.

Et de conclure comme Dupond-Moretti : j’ai peur. Pas mieux pour le moment... Effrayant...





Commenter  J’apprécie          110
Directs du droit

Je ne vais pas être objective du tout : j’ai adoré cette lecture !

En même temps, comme on y parle (forcément) d’avocats, de magistrats, de procès,… je ne vois pas comment j’aurais pu ne pas apprécier.

Mais bien plus qu’un roman « pour juristes », Dupond-Moretti nous offre ici une réflexion sur la justice et sur les métiers judiciaires, en particulier sur l’interaction entre deux professions essentielles au système judiciaire : les avocats et les magistrats.

Tensions, rivalités, incompréhensions. C’est un peu ce qui caractérise les relations entre avocats et magistrats, en particulier lors d’un procès médiatisé. Pourtant, ces professionnels ont fait les mêmes études et ont sans doute, à un moment de celles-ci, partagé les mêmes idéaux. Mais, d’après l’auteur, les magistrats ont trop souvent tendance à voir les avocats (et en particulier les pénalistes) comme des fauteurs de trouble qui, en réclamant certains actes d’instruction ou autres, ne font que troubler une audience et retarder un verdict. Pourtant, comme le dit Dupond-Moretti, son rôle est bien de défendre, du mieux qu’il peut (= en utilisant la totalité des manœuvres qui lui sont offertes par le Code de procédure pénale) ses clients…

En lisant cet ouvrage, je me suis rendue compte d’une chose : même si la justice belge est « malade » (engorgement pathologique des tribunaux et retards conséquents dans le traitement des affaires, manque de personnel et de moyens financiers, palais de justice qui tombent en ruine – à Mons, un « filet » a été ajouté au-dessus de la salle des pas perdus, afin que les justiciables et avocats qui y déambulent ne se prennent pas des morceaux de la décoration du premier étage sur la tête), son mal-être n’est pas aussi grave que celui de la justice française. Les professionnels du droit, qu’ils soient magistrats, avocats, notaires ou huissiers, sont, pour l’immense majorité d’entre eux, courtois les uns avec les autres (c’est d’ailleurs une obligation déontologique entre avocats). Il n’y a pas autant de rivalité entre magistrats et avocats et, surtout, pas de connivence entre le parquet et le siège : chacun fait son boulot de façon indépendante, en respectant ses confrères/consœurs. La situation belge n’est donc pas si désespérée !

Dupond-Moretti fustige l’ENM (Ecole nationale de la magistrature) : d’après lui, si avocats et magistrats étaient formés ensemble et si les magistrats passaient par le barreau avant de devenir juges, ils comprendraient mieux le boulot d’avocat et verraient d’un meilleur œil ceux qui se présentent dans leur salle d’audience. J’ai tendance à lui donner raison car (même si je ne connais rien de l’ENM) en Belgique, de nombreux magistrats passent d’abord par le barreau avant de devenir magistrats (il faut d’ailleurs accumuler plusieurs années d’expérience professionnelle juridique et/ou de stage avant de pouvoir devenir magistrat) et mettent donc « la main à la pâte ».

Et même lorsqu’un magistrat ne passe pas par le barreau (on peut très bien, de nos jours, devenir magistrat après avoir été juriste d’entreprise, par exemple), il reste d’abord et avant tout juriste, comme l’avocat : les études de droit sont communes et nous n’avons pas, comme en France, d’ENM ou d’écoles d’avocats. Les deux professions requièrent la réussite de certains examens qui, eux, ne sont bien entendu pas communs, mais il n’en reste pas moins que la base est commune et que l’entente entre ces deux catégories de professions juridiques est bien plus cordiale que ce que dépeint Dupond-Moretti.

Bref, cet ouvrage me laisse très optimiste. Même si la justice belge n’est pas toujours idéale, elle fonctionne, dans l’ensemble, bien mieux que ce que le ténor du barreau français nous décrit ici. Et certains de nos magistrats, qui n’ont pas peur de se mouiller et de critiquer l’exécutif (comme Vincent Macq, Manuela Cadelli ou encore Luc Hénart) feront sûrement encore évoluer les choses…
Commenter  J’apprécie          110
Éric Dupond-Moretti à la barre

Je devais aller voir la pièce jouée par Eric Dupond-Moretti mais patatras, spectacle annulé suite à sa nomination en qualité de garde des sceaux. Si l'on m'avait dit qu'il accepterait cette fonction...

A défaut, j'ai lu le texte de la pièce. C'est court et nous y retrouvons l'avocat avec ses combats, ses convictions. Ce n'est pas une autobiographie mais des pensées éparses sur l'idée qu'il se fait de la magistrature, de la défense des accusés, de la justice.

Bien sur, il revient sur la présomption d’innocence souvent bafouée à l'heure des réseaux sociaux.

Cela se lit en une petite heure et cela ne fait jamais de mal de relire ces fondamentaux.

Eric Dupont-Moretti est clivant et je fais partie de ceux (même si je ne suis pas toujours d'accord avec lui) qui restent séduite en l’écoutant.
Commenter  J’apprécie          100
Le dictionnaire de ma vie

L'alphabet de l'avocat Eric Dupond-Moretti devrait être lu.

Il confortera ceux qui pensent pareillement (un moyen de ne pas se sentir ringard… pour certaines opinions); il éclairera ceux qui se posent de nombreuses questions sur la Justice et sur l'Humain; il permettra de dépasser nos certitudes; il hérissera ceux qui vont dans une tout autre direction.



Il y a de la beauté dans tout ce qui touche le respect de l'être humain, il y a de la laideur dans tout ce qui l'entrave.

Le portrait de l'Ecole Nationale de la Magistrature (ENM) suscite un grand nombre d'interrogations.



Belge, je découvre le système français dont certains aspects m'étonnent.

Eric Dupond-Moretti rend d'ailleurs hommage à l'entente entre magistrats et avocats (sans idéaliser) existant en Belgique et en Suisse.



Quelques mises au point dans ce livre, notamment la réponse faite à Bernard-Henri Lévy, sont proposées à notre réflexion.



Un homme qui ne renonce pas à ses origines (j'adore la répartie à Anne Sinclair lors d'une master class et le résultat qui en est tiré).



Un homme lucide qui insiste sur l'importance des mots (sans eux, la pensée ne peut se former et se dire), sur la pauvreté des réseaux sociaux l'information trop rapide, mal digérée, sur la notion de liberté et celle,galvaudée, du courage.



Très attaché aux libertés individuelles, il décrypte les travers de notre société qui se veut hyper transparente produisant ainsi les nombreuses dérives que tout un chacun peut aujourd'hui constater.



Un petit livre dense et riche qui ne peut que nous nourrir.

Une amertume combattante pour une justice qu'il voudrait meilleure, respectueuse, discrète (secret professionnel et déontologie), humaine.



Une méfiance de l'opinion publique, des préjugés, de l'émotion mal gérée, le tout entravant voire influençant cette justice qui peut blesser.



Une personnalité sensible, authentique, goûteur des bonnes choses de la vie, lucide sur notre époque, nous offre des paroles qui frappent et réveillent.
Commenter  J’apprécie          103
Le calvaire et le pardon

Ce récit avec les explications juridiques a tout pour vous retourner les tripes mais si en plus, vous êtes un(e) passionné(e) du droit pénal comme moi, alors là, vous en prenez pour votre conscience.



J'avais suivi les reportages concernant l'affaire Loïc Sécher mais le poids des mots est encore autre chose que le poids des images. En plus, il n'y a pas que la déchéance de se voir accusé d'un crime dont on n'est pas coupable mais les conséquences sont multiples et dramatiques. Cela anéanti votre santé, celle de votre famille, vous perdez tout (votre boulot, vos biens, votre argent, vos espoirs, votre raison de vivre, tout y passe..).



Tout comme Patrick Dils, Loïc Sécher aura subi toutes les injustices possibles et inimaginables de la justice. Je reste totalement abasourdie par la grandeur de ces hommes qui ont tenu le coup sans passer par la case "suicide". Là encore, l'interprétation des uns aurait dit "vous voyez, il était coupable, c'est pour ça qu'il s'est suicidé, pour échapper à sa peine" alors que d'autres se seraient écriés " il était innocent, il ne supportait plus le poids de l'injustice". Sauf que ce sont des considérations sans connaître le dossier, la justice ne peut se faire sur base d'interprétations, la condamnation d'un être humain ne devrait (et je dis bien devrait) se baser que sur des preuves irréfutables, après une enquête à charge et à décharge, et c'est bien là que le bas blesse puisque des juges, des experts, des policiers, de matons et j'en passe, n'ont pas fait leur boulot correctement et c'est un faible mot, certains pourraient être qualifiés de tortionnaires dans certains cas. Je ne sais pas comment ils arrivent à se regarder dans la glace tous les matins mais exercer un autre métier serait peut-être une bonne solution.



Et alors, à ceux qui osent encore dire qu'il n'y a pas d'innocents en prison, je les invite à étudier les dossiers d'Outreau, d'André Kaas, de Patrick Dils et tant d'autres, cela vous permettra peut-être d'ouvrir les yeux sur une réalité. Sans compter que si la justice n'arrête pas le vrai coupable, cela veut dire que le criminel court toujours dans la nature.



Et pour finir, je crois que beaucoup ont tendance à oublier que la peine prononcée est une peine de prison qui n'inclut pas de mauvais traitements càd une peine d'enfermement càd pour protéger la société d'êtres problématiques mais tous ressortiront un jour mais dans quel état? Si la société veut éviter la récidive et souhaite la réinsertion à quoi sert-il de traiter les prisonniers comme des déchéances humaines? pourquoi imposer des traitements inhumains et dégradants alors que la peine est une peine d'emprisonnement et non pas de mauvais traitements?



Il n'y a pas plus injuste que le milieu carcéral dans lequel les trafics règnent, les viols existent et où des innocents doivent résister alors que certains surveillants se rendent complices de délits au sein même d'un lieu qui devrait être irréprochable.



Ce qui est sûr, c'est que la justice des hommes ne ressort pas grandie de dossiers tels que ceux-là sans compter tous ceux qui restent méconnus.
Commenter  J’apprécie          90
Le calvaire et le pardon

Il est des lectures après lesquelles il est toujours difficile de s'exprimer, tant elles vous serrent le cœur ; le témoignage de Loïc Sécher en fait partie. Comment pourrais-je en effet porter un jugement sur un vécu aussi tragique ? Comment pourrais-je me faire le juge et le bourreau du calvaire d'un innocent ? Je n'en ai ni le droit, ni le devoir..



Le calvaire et le pardon est un livre écrit à quatre main par Loïc Sécher et Maître Eric Dupond-Moretti. Loïc Sécher y décrit le drame qu'il a vécu et Maitre Eric Dupond-Moretti y décortique chaque situation en sa qualité de professionnel. En somme, Loïc Sécher écrit avec ses tripes et Maitre Eric Dupond-Moretti écrit avec sa robe, mais tous deux racontent leur vécu.

Pour ma part, j'y ai vu plusieurs points de réflexions. Bien évidemment, le livre pointe du doigt les failles du système judiciaire et particulièrement le système carcéral.



Loïc Sécher est le septième condamné officiellement innocenté depuis 1945, entre Patrick Dills et Marc Machin. Il faut savoir que la justice ne reconnaît que trop très rarement ses torts et ce livre souligne très bien les failles du système.



Loïc Sécher décrit son (calvaire) quotidien en prison, d'abord à la maison d'arrêt de Nantes puis au centre de détention de Rennes. Je pense que les mots sont dérisoires pour pouvoir, nous lecteurs, comprendre et imaginer véritablement le quotidien d'un détenu, et plus particulièrement celui d'un « pointeur » (qui sont nommés ainsi car ils ont « pointé » leur victime). Promiscuité, manque d'hygiène, humiliations, violences, viols dans les douches ponctuent son quotidien. Un quotidien qu'il ne méritait pas, un quotidien qu'il a du affronter en serrant les dents, un quotidien dont la cause avait un son doux et amère à la fois : Emilie..



On l'apprendra bien plus tard, Emilie a bien été victime de viols dont on connaît aujourd'hui les auteurs. Mais au moment des faits, Emilie est une adolescente perturbée, enfermée dans son silence. Et quand elle dit à ses parents que l'auteur de ses viols serait un « vieil ami de la famille », ses parents feront immédiatement le lien avec Loïc Sécher, ce type un peu bizarre et qui n'inspire aucune confiance.. Ainsi, face à la pression de ses parents, et sans doute pour avoir la paix, Emilie confirme : oui, c'est bien Loïc Sécher qui m'a violée. Et à partir de là, la folle machine judiciaire est lancée..



La sacralisation de la parole de l'enfant-victime est remise en question avec l'affaire Sécher. Comment mettre en doute la parole d'une enfant ? Biensur, les preuves matérielles et scientifiques ne corroborent pas toujours avec les dires d'Emilie, biensur Emilie raconte une nouvelle version des faits à chaque fois qu'elle se présente devant le juge d'instruction, biensur il n'y a pas de test ADN.. Mais qu'importe, c'est une enfant ! Et une ado, c'est bien connu, ça ne ment jamais..



Et au mensonge, Loïc Sécher y a répondu par le pardon.. Et là, je ne peux que souligner sa grandeur d'ame.



Si l'on veut pousser sa réflexion un petit peu loin, il me paraît que c'est l'entier système dans lequel nous vivons qu'il faut remettre en cause.



Dès le départ, Loïc Sécher n'a pas été considéré comme un homme potentiellement innocent, ce qu'il est en réalité, mais comme un homme déjà coupable. Un homme « bizarre », qui dérange, que l'on doit lyncher sur la place publique. Et c'est ça que la foule le public veut. Il veut des bons, purs et innocents tels des enfants et des méchants très très méchants, comme on en voit la télé ou au cinéma. La foule veut du sang : elle veut en offrande le sacrifice du coupable sur l'autel de l'innocence de la victime.



La question qu'il faut se poser ici c'est : qu'est-ce qui a amené les protagonistes de cette histoire (gendarmerie, magistrats, jurées etc..) à offrir en sacrifice Loïc Sécher et le lyncher sur la place publique alors que le dossier présentait des failles gigantesques  (pas de test ADN, pas de confrontation avec la victime etc..) ?



Plusieurs facteurs ont pu intervenir : le système de pensée judéo-chrétien, les médias, nos politiques etc.. Le système judiciaire français est avant tout composé de femmes et d'hommes : ce sont eux qui entendent les déclarations, eux qui mènent l'instruction (à charge ou à décharge), eux qui dirigent l'accusation et enfin, eux qui jugent.. A partir de là, les influencer par des facteurs extérieurs devient très facile.. et surtout très dangereux !!!



Hier c'était Loïc Sécher, mais demain ce sera qui ?
Lien : http://mademoisellechristell..
Commenter  J’apprécie          90
Le calvaire et le pardon

« Aux yeux de la justice, je suis une erreur. » Ainsi débute le texte poignant de Loïc Sécher, celui qui est « le septième condamné officiellement blanchi depuis 1945. » Condamné à 16 années de prison, il est sorti après 7 ans de cauchemar : « On a cru que j’avais violé. En cela, je suis un cas unique, une sorte de spécimen né de la malheureuse rencontre d’une victime fabulatrice et d’une justice trop crédule… D’autres s’en sont moins bien sortis. »

Loïc Sécher affirme un peu plus loin que la justice qui se veut impartiale et donc aveugle, a été sourde, dans son cas et dans bien d’autres cas aussi. Cet homme brisé par tant de souffrance et d’incompréhension écrit et répète ce qu’il n’a cessé d’affirmer, cette phrase qui reste toujours la mienne : « je ne pouvais pas reconnaître un crime que je n’avais pas commis. » Plus loin, il précise : « mon accusatrice a finalement avoué avoir menti. Huit ans plus tard. » S’il est officiellement blanchi depuis 2011, il reconnaît être toujours hanté par ce qu’il a vécu. Comment pourrait-il en être autrement ?

L’intérêt de ce livre est double puisqu’il livre le vécu de Loïc Sécher ainsi que les impressions de Maître Dupont-Moretti, son avocat qui n’intervint que lorsque la demande de révision fut mise en route. Très justement, il décortique le cheminement des magistrats et des jurés qui condamnent : « … parce que acquitter au bénéfice du doute, reconnaître qu’on n’a pas suffisamment d’éléments et qu’on va peut-être relâcher un coupable, demande davantage de courage. » Il cite enfin Voltaire qui affirmait si justement : « Mieux vaut cent coupables acquittés qu’un innocent en prison. »

Commence alors le récit du cauchemar vécu par Loïc Sécher qui a 40 ans et vit dans un petit village de Loire-Atlantique, à La Chapelle-Saint-Sauveur. Gardé à vue pour agression sexuelle, il détaille l’enchaînement des événements qui rappellent pour l’essentiel ce que j’ai vécu : la peur, l’angoisse, les trois gendarmes interrogateurs, chacun dans un rôle différent, la nuit, la cellule sordide et froide, les menaces à 3 h du matin : « Tu es un violeur, il faut avouer ! »

Son avocat décrit bien « une escalade angoissante d’insinuations » et parle des procès : « Revoilà donc le gendarme Rouault drapé dans son uniforme et dans sa bonne conscience qui s’avance d’un pas décidé à la barre. » Il ajoute ce qu’avait déclaré un président de cour d’assises : « Quand une enquête est mal faite, dans la police c’est par défaut et chez les gendarmes, c’est par excès. »

Loïc Sécher se confie avec beaucoup de franchise et de sincérité, parle du cauchemar de la prison où l’on traite les violeurs de pointeurs plus les sévices corporels qui suivent. Pourtant, il précise : « Au fond, la véritable peine, c’est peut-être la disparition du silence. »

Il faut lire "Le calvaire et le pardon" car il est impossible de détailler tout ce qu’il révèle du « fiasco de la dictature de l’émotion » comme l’écrit Maître Dupont-Moretti qui ajoute : « L’affaire Sécher montre que les psychiatres sont devenus les nouvelle pythies judiciaires. À partir du moment où ils établissent qu’une plaignante est crédible, c’est un verdict de culpabilité… cela arrange tout le monde : ils se délectent de leur puissance. »

Laissons enfin la conclusion à Loïc Sécher parlant du procès en révision : « Ce procès m’a rendu l’innocence, pas l’insouciance… Je suis un chanceux, il y a des centaines d’innocents qui continuent à crier derrière les murs des prisons. »



Commenter  J’apprécie          80
Directs du droit

Pour Eric Dupond-Moretti, avocat cogneur surnommé « acquittator » dans les prétoires, la justice va mal, et plus particulièrement la magistrature, à quelques exceptions près. Selon lui, les citoyens ne voient pas le danger qu'il y a à abandonner une once des libertés conquises de haute lutte au fil des siècles. A ce titre, l'avocat – qui se doit de défendre même l'indéfendable – agace. Et EDM refuse de devenir un être transparent. Il donne ici, dans ce bref ouvrage à l'écriture ciselée au scalpel, comme ses plaidoiries et les analyses précises des pièces des dossiers qui lui ont permis de gagner bien des procès sur des détails ignorés ou négligés, quelques exemples où la justice est mise à mal par ceux-là même qui devraient la servir.

Un réquisitoire, donc, et surtout une réflexion nécessaire sur l'évolution dangereuse de la procédure pénale, la place des victimes et leur réparation légitime – y compris celle des acquittés après une longue incarcération préventive – sur la médiatisation des procédures et le tout relatif secret de l'instruction.

Comment le citoyen, justiciable en puissance, peut-il comprendre des jugements totalement contradictoires en première instance puis en appel (cf: le procès intenté au maire de la Faute sur mer après le désastre de la tempête Xintia) ? Comment ne pas s'étonner devant la description détaillée des pratiques sexuelles licites – même si elles sont moralement regrettables – des protagonistes de l' « affaire » DSK au Carlton de Lille alors qu'au final, une relaxe a été prononcée ?

Les dommages collatéraux des personnes incriminées avant toute décision judiciaire sont dévastateurs. Malheur à celui qui se trouve confronté à la nécessité de témoigner : il sera mis à nu, examiné sous toutes les coutures par le seul fait d'avoir eu la malchance de croiser l'accusé.

Eric Dupont-Moretti souligne les faiblesses de la justice : les erreurs de procédure commises par certains juges, leur mode de sélection et d'avancement (un exemple : le troisième procès intenté à l'un des acquittés de l'affaire d'Outreau), le rôle de groupuscules d'activistes s'érigeant sur les réseaux sociaux en défenseurs de la morale bourgeoise, celui de pseudo psychologues ou de journalistes sonnant l'hallali sans connaître les dossiers, celui de lanceurs d'alertes autoproclamés (qu'on appelait autrefois « corbeaux »), la presse à sensation, la confusion entre ce que prescrit strictement la loi pénale et le sentiment partial de certains magistrats … sans parler du cas de ce chien auditionné par la justice ...

Un fameux coup de gueule, bien nécessaire ces jours-ci, justement !
Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
Commenter  J’apprécie          71
Bête noire

Peut-être un peu exagéré de parler de la "Bible pour jeune avocat", mais en tout cas, un condensé d'informations, d'anecdotes, et de points de vus personnels qui peuvent n'être qu'instructifs.

Me Dupont-Moretti a réussi, je pense, à s'adresser avec simplicité à n'importe qui, et à exposer sa réalité de la Justice, mais également à s'adresser aux "gens du métier" avec sincérité, vérité, et humilité.
Commenter  J’apprécie          60
Bête noire

On a l'impression que ce livre est une transcription d'une longue interview de Dupond-Moretti.

Il y raconte essentiellement des événements, des anecdotes tirés de sa longue expérience. On y trouve de quoi confirmer, de son point de vue, que la justice pénale est un grand spectacle ou chaque acteur tente d'imposer son jeu et que le sort de l'accusé en dépend autant que le carrière des présidents, avocats généraux et avocats tout court.

Quelques moments émouvants au milieu de beaucoup de coups de gueule, c'est un peu brouillon et écrit dans un style parlé, mais comme ça se lit en 2h maximum, c'est distrayant comme une émission de télévision, même si on peut rester sur ça faim...
Commenter  J’apprécie          60




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Eric Dupond-Moretti (662)Voir plus

Quiz Voir plus

Stefan Zweig ou Thomas Mann

La Confusion des sentiments ?

Stefan Zweig
Thomas Mann

10 questions
35 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}