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Citations de Fernand Braudel (125)


Je le dis une fois entre toutes : j'aime la France et avec la même passion, exigeante et compliquée, que Jules Michelet.
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De lui même, le troc s'imposait, au fil des jours, maitre pacifique et débonnaire. L'agent, fort rare, servait surtout à la thésaurisation, à la conservation de la valeur. A l'inverse de ce qui semble la norme, il ne sortait qu'en période de difficulté, comme l'unique recours : par exemple, quand ceux qui, l'année précédente, avait cuit leur pain chez eux se trouvaient dans l'obligation , leur récolte étant mauvaise, de l'acheter chez le boulanger. au total, une autarcie somnolente, nécessaire, inconsciente.
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Ce qui a eu raison de Venise, ce sont les routes du monde qui se déplacent lentement de la Méditerranée à l'Atlantique ; ce sont les États nationaux qui grandissent. Dès le XVIème siècle, Venise se heurte à ces corps épais : l'Espagne, la France, l'une et l'autre avec des prétentions impériales ; plus encore surgit l'Empire turc, colosse d'un autre âge, mais colosse, contre lequel elle s'épuisera.
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L'essentiel des avantages que la France retirait du traité, c'était deux mariages : celui d'Emmanuel Philibert avec Marguerite, celui de Philippe II avec Élisabeth de France, une enfant, encore, qui devait être, en Espagne, la "reine de la paix". Nous avons tendance, aujourd'hui, à sous-estimer de tels avantages. [...] Le mariage espagnol est un éclatant succès français, ne serait-ce que parce qu'il écarte la possibilité d'un autre mariage. [...] Le mariage français, en dehors de ses avantages propres, est une garantie contre une nouvelle union de l'île et de l'Empire hispanique.

- La paix de Cateau-Cambrésis -
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Évidemment, on ne sait jamais avec la France. "Sire, écrivait Simon Renard, ce même 25 avril, les affaires et délibérations sont ici tellement sujettes à changements et à variations que l'on peut difficilement découvrir et signaler la vérité de leurs agissements." Trop parler après tout - c'est le défaut français - n'est-ce pas, autant que le silence où s'enferment soigneusement les Espagnols, cacher son jeu ?

- Lendemains et surlendemains de Mühlberg -
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Les événements sont poussières : ils traversent l'histoire comme des lueurs brèves ; à peine naissent-ils qu'ils retournent déjà à la nuit et souvent à l'oubli. Chacun d'eux, il est vrai, si bref qu'il soit, porte témoignage, éclaire un coin du paysage, parfois des masses profondes d'histoire. Et pas seulement d'histoire politique, car tout secteur - politique, économique, social, culturel, géographique même - est peuplé de ces signes événementiels, de ces lumières intermittentes. [...] Je ne suis pas l'ennemi, sans plus, de l'événement.
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Les règles de l’économie de marché telles que les décrit l’économie classique jouent beaucoup plus rarement sous leurs aspects de libre concurrence dans la zone supérieure, qui est celle des calculs et de la spéculation.
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Rayonner, donner, c'est dominer. La théorie du don vaut pour les individus et les sociétés, non moins pour les civilisations. Que ce don risque d'être appauvrissement à la longue, c'est possible. Mais il signale, tant qu'il dure, une supériorité et cette constatation achève la thèse d'ensemble de ce livre : la Méditerranée reste, un siècle durant après Christophe Colomb et Vasco de Gama, le centre du monde, un univers brillant et fort. La preuve? Elle éduque les autres et leur enseigne l'art de vivre. Disons bien que c'est toute la Méditerranée qui jette alors ses lumières au-delà de ses rivages, aussi bien la musulmane que la chrétienne. Même l'Islam nord-africain, qu'on traiterait volontiers en frère pauvre, rayonne vers le Sud, vers les bordures sahariennes et à travers tout le désert jusqu'au Bled es Soudan. Quant à l'Islam turc, dont la Süleymaniyé à Istanbul est le chef d’œuvre, rayonne au loin, affirme sa suprématie, et l'architecture n'est qu'un élément d'une vaste expansion.

- Les rayonnements extérieurs -
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En vérité, au-delà des changements qui altèrent ou bouleversent les civilisations, se révèlent d'étonnantes permanences. Les hommes, les individus, peuvent les trahir : les civilisations n'en continuent pas moins à vivre de leur vie propre, accrochée à quelques points fixes, quasi inaltérables.
Pensant à l'obstacle de la montagne, J. Cvijić déclare qu'elle s'oppose "moins à la pénétration ethnique qu'aux mouvements qui résultent de l'activité humaine et aux courant de civilisation". Interprétée et peut-être modifiée, cette idée paraît juste. À l'homme, toutes les escalades, tous les transferts sont permis. Rien ne peut l'arrêter, lui et les biens, matériels ou spirituels, qu'il transporte, lorsqu'il est seul et qu'il opère en son nom. S'agit-il d'un groupe, d'une masse sociale, le déplacement devient difficile. Une civilisation ne se déplace par avec la totalité de ses bagages. En traversant la frontière, l'individu se dépayse. Il "trahit", abandonne derrière lui sa civilisation.

- Permanences et frontières culturelles -
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Pour une civilisation, vivre c'est à la fois être capable de donner, de recevoir, d'emprunter. Emprunter, tâche difficile, n'est pas capable qui veut d'emprunter utilement, pour se servir, aussi bien que le maître, de l'outil adopté. [...]
Mais on reconnaît, non moins, une grande civilisation à ce qu'elle refuse parfois d'emprunter, à ce qu'elle s'oppose à certains alignements, à ce qu'elle fait un choix parmi ce que les échangeurs lui proposent, et souvent lui imposeraient s'il n'y avait des vigilances ou, plus simplement, des incompatibilités d'humeur et d'appétit. Il n'y a que les utopistes [...] pour rêver de fondre les religions entre elles : complexes de biens, de forces, de systèmes qu'est toute civilisation. Il est possible de les mêler en partie, de déplacer de l'une à l'autre telle idée, à la rigueur tel dogme, tel rite ; de là à les confondre, le chemin est immense.

- Rayonnement et refus d'emprunter -
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Il n'y a de civilisations vivantes que capables d'exporter leurs biens au loin, de rayonner. Une civilisation qui n'exporterait pas hommes, façons de penser ou de vivre est inimaginable. Il y a eu une civilisation arabe : on sait son importance, puis son déclin. Il y a eu une civilisation grecque, elle a au moins sauvegardé sa substance. Au XVIe siècle, il existe une civilisation latine (je ne dis pas chrétienne sans plus), la plus résistante de toutes les civilisations aux prises avec la mer : rayonnante, elle s'avance à travers l'espace méditerranéen et, par-delà, vers les profondeurs de l'Europe, vers l'Atlantique et l'Ultramar ibérique.

- Rayonnement et refus d'emprunter -
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[...] presque prêt à suivre Gabriel Audisio et à penser que la vraie race méditerranéenne est celle qui peuple ces ports bigarrés et cosmopolites : Venise, Alger, Livourne, Marseille, Salonique, Alexandrie, Barcelone, Constantinople, pour ne citer que les grands. Race qui les réunit toutes en une seule. Mais n'est-ce pas absurdité ? Le mélange suppose la diversité des éléments. La bigarrure prouve que tout ne s'est pas fondu dans une seule masse ; qu'il reste des éléments distincts, qu'on retrouve isolés, reconnaissables, quand on s'éloigne des grands centres où ils s'enchevêtrent à plaisir.

- Comment voyagent les biens culturels -
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Mais la plupart des transferts culturels s'accomplissent sans que l'on connaisse les camionneurs. Ils sont si nombreux, les uns si rapides, les autres si lents, ils prennent tant de directions que nul ne s'y reconnaît dans cette immense gare de marchandises où rien ne demeure en place. Pour un bagage reconnu, mille nous échappe ; adresses et étiquettes manquent, et tantôt le contenu, tantôt l'emballage. Passe encore qu'on veuille tout remettre en ordre quand il s'agit d’œuvres d'art [...]. Passe encore quand il s'agit de ces biens tangibles, les mots, ceux du vocabulaire ou de la géographie : le contrôle en est possible bien sûr. Mais quand il s'agit des idées, des sentiments, des techniques, toutes les erreurs sont possibles.

- Comment voyagent les biens culturels -
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Voyage des hommes ; voyage aussi des biens culturels, les plus usuels comme les plus inattendus. Ils ne cessent de se déplacer avec les voyageurs. Apportés ici par les uns telle année, repris par les autres l'année suivante ou un siècle plus tard, sans cesse transportés, abandonnés, ressaisis, et par des mains souvent ignorantes.

- Comment voyagent les biens culturels -
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Les civilisations sont les personnages les plus complexes, les plus contradictoires de Méditerranée. À peine leur reconnaît-on une qualité que la qualité opposée leur est acquise. Les civilisations sont fraternelles, libérales, mais en même temps exclusives et revêches ; elles reçoivent les visites des autres, elles les rendent aussi ; pacifiques, elles sont, non moins, guerrières ; d'une étonnante fixité, elles sont en même temps mobiles, vagabondes, animées de flux et de tourbillons, dans le détail de leur vie en proie à d'absurdes mouvements "browniens". Ainsi les dunes, bien accrochées à des accidents cachés du sol : leurs grains de sable vont, viennent s'envolent, s'agglomèrent au gré des vents, mais, somme immobile d'innombrables mouvements, la dune demeure en place.

- Les civilisations -
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Un dernier trait singularisera ces sociétés de Méditerranée : malgré leur modernité, elles restent esclavagistes, aussi bien en Occident qu'en Orient. C'est là une étrange fidélité au passé, la marque peut-être d'un certain luxe, car l'esclave coûte cher, a ses exigences et se trouve en concurrence avec les pauvres et les misérables, même à Istanbul. C'est la rareté de la main-d’œuvre, le rendement des mines et des plantations de canne à sucre qui permettra l'esclavage à l'antique du Nouveau Monde, ce vaste et profond retour en arrière. En tout cas, l'esclavage, pratiquement effacé dans l'Europe du Nord et en France, se survit dans l'Occident méditerranéen, en Italie, en Espagne, sous forme d'un esclavage domestique assez vivace. [...] L'esclavage est une réalité de cette société méditerranéenne, dure vis-à-vis des pauvres, malgré le grand mouvement de piété et de charité religieuses qui grandira à la fin du siècle. En tout cas, il n'est pas l'apanage de l'Atlantique et du Nouveau Monde.

- Les esclaves -
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On dit avec raison que l'État moderne a été l'ennemi des noblesses et des féodalités. Cependant il faut s'entendre : il a été à la fois leur ennemi et leur protecteur, leur associé. Les réduire à l'obéissance, première tâche, jamais achevée d'ailleurs ; ensuite les utiliser comme instruments de gouvernement. Au-delà d'eux et par eux, tenir le "peuple vulgaire" comme on disait en Bourgogne. Compter sur eux pour la tranquillité et l'ordre public, la défense des régions où sont leurs terres et leurs châteaux, pour l'encadrement des levées du ban et de l'arrière-ban [...]. En outre, le Roi met constamment les seigneurs importants au courant de ses intentions, de ses ordres, des nouvelles décisives ; il sollicite leurs avis et les oblige à lui prêter de grosses sommes d'argents... Mais les avantages concédés en contrepartie par la Monarchie ne sont pas négligeables.

- En Castille : Grands et titrés face au Roi -
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Au vrai l'argumentation de Josef Schuumpeter, répète de vieilles leçons et de vieilles lectures où le hasard chez les historiens avaient bon dos - elle écarte, sous-estime l'État, alors qu'il est, au même titre que le capitalisme, le fruit d'une évolution multiple. En réalité, la conjoncture, au sens large, porte aussi sur son mouvement les assises politiques, les favorise ou les abandonne. Et quand un nouveau jeu recommence, les gagnants ne sont jamais les anciens vainqueurs : la main passe.

- Hasard et raisons politiques -
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L’œuvre de Charles Quint a été relayée, durant la seconde moitié du XVIe siècle, par celle de Philippe II, maître aussi d'un Empire, mais combien différent ! Dégagé de l'héritage du grand Empereur durant les années cruciales 1558-1559, cet Empire est même plus vaste, plus cohérent, plus solide que celui de Charles Quint, moins engagé en Europe, plus exclusivement centré sur l'Espagne et ainsi ramené vers l'Océan. D'un Empire, il a la substance, l'étendue, les réalités disparates, les richesses bien qu'il manque à son souverain maître le titre prestigieux par lequel seraient résumés et comme couronnés, les innombrables titres qu'il porte.

- L'Empire de Philippe II -
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Enfin, la politique aragonaise qui entraîne l'Espagne tend aussi à se dresser contre la poussée de l'Islam, elle précède les Turcs en Afrique du Nord ; en Sicile et à Naples, elle est sur l'un des remparts extérieurs de la Chrétienté. [...] Avec Ferdinand, la croisade espagnole est sortie de la Péninsule, non pas pour s'enfoncer délibérément dans l'Afrique misérable qui lui fait face, non pas pour se perdre dans le Nouveau Monde, mais pour se situer au vu et au su de tous, au cœur même de la Chrétienté d'alors, en son cœur menacé, l'Italie. Vieille politique, mais prestigieuse.

- L'unité espagnole : les Rois Catholiques -
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