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Citations de Fernand Braudel (125)


De l'autre côté des détroits, la conquête turque a été largement favorisée par les circonstances. La péninsule des Balkans est loin d'être pauvre, elle est même, aux XIVe et XVe siècles, plutôt riche. Mais elle est divisée : Byzantins, Serbes, Bulgares, Orthodoxes et Latins sont aux prises ; socialement enfin, le monde balkanique est d'une extrême fragilité - un vrai château de carte. Tout cela à ne pas oublier : la conquête turque dans les Balkans a profité d'une étonnante révolution sociale. Une société seigneuriale, dure aux paysans, a été surprise par le choc et s'est écroulée d'elle-même. [...] L'Asie Mineure avait été conquise patiemment, lentement, après des siècles d'efforts ; la péninsule des Balkans semble ne pas avoir résisté à l'envahisseur. En Bulgarie, où les Turcs feront des progrès si rapides, le pays avait été travaillé, bien avant leur arrivé, par des troubles agraires violents. Même en Grèce, il y avait eu révolution sociale.

- La grandeur turque : de l'Asie Mineure aux Balkans -
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La rentrée des Anglais a été liée a commerce de l'étain. La première entrée massive des Hanséates et des Hollandais a dépendu des achats de blé des Méditerranéens. Le blé, et non pas tant, une fois encore, la politique maladroite et inefficace de ces mauvais concierges de la Méditerranée que sont les Espagnols, bien qu'elle ait eu sa part de responsabilité.
Ce sont les mauvaises récoltes italiennes des années 1586 à 1590 qui ont alerté Hollandais et Hanséates, aidés peut-être par des négociants et des intermédiaires juifs [...]. Rien de plus naturel que ces villes (Dantzig, Lubeck, Hambourg), aux portes des grands marchés du blé, spécialisées depuis longtemps dans le commerce en gros des céréales, aient entendu l'appel des Méditerranéens.

L'arrivée des Hanséates et des Hollandais
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Le voyage de Livourne, entrepris par flottes entières, n'était exempt cependant ni de périls, ni d'obstacles, ni même de tentations. À travers l'exemple de la Manche, où à contourner les Îles Britanniques par l'Écosse, on se heurtait aux Anglais, qui accordaient ou non le passage - et au mauvais temps ; dans les ports espagnols, il y avait le risque des embargos ; en Méditerranée surgissaient les Barbaresques. Alors, à Lisbonne, ou à Cadix, ou à Séville, pour peu que le blé se gâtât, qu'y consentissent les autorités consulaires compétentes, la tentation était grande de décharger et de vendre le grain, puis de retourner au plus vite chez soi. Finalement c'était par l'argent, à moitié payé d'avance, que Livourne et les villes d'Italie tenaient ces pauvres du Nord.

Dernière vicissitude : le blé nordique après 1590
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Le blé ne fait tellement penser à lui que parce qu'il manque : les récolte méditerranéennes sont généralement au voisinage de l'insuffisance Les cultures riches, la vigne, l'élevage lui font une concurrence constante. Première raison qui n'est pas la seule. Le blé, en Méditerranée, reste une culture extensive ; il demande de grandes surfaces pour des rendements pas très élevés, d'autant que le même terrain ne peut s'ensemencer tous les ans. [...] Ajoutons le drame des inondations d'hiver, le drame des sécheresses d'été, que ne suffisent pas à conjurer les processions passionnées. Résultat : une extraordinaire variation des prix qui oscillent à la moindre nouvelle.

- Quelques règles du commerce des grains -
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Ce qui n'était que projet devient réalité quand Philippe II s'est emparé du Portugal. 1580, c'est pour lui, comme 1547 pour Charles Quint, le sommet de la puissance. Si le Portugal s'est donné, car il s'est donné à lui, c'est pour avoir la triple protection de l'argent, des armées, des flottes de Philippe II et, par ce triple moyen renforcer sa prise sur l'océan Indien.

- Projets et tractations à propos du poivre portugais -
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Tout laisse à prévoir, dès 1590, plus encore en 1593 et 1595, la prochaine banqueroute de l'État castillan. Ses dépenses sont sans limites, ses revenus en baisse avec les décrues visibles des impôts ; un temps économique maussade multiplie les faillites et les emprisonnements pour dettes. Au milieu de ces difficultés, seuls les arrivages d'argent d'Amérique sont en hausse, si bien que toute la circulation métallique à Séville, à Barcelone comme à Gênes, à Venise ou par la navigation du Rhin mise à contribution pour les transports vers les Pays-Bas, est en ordre et fonctionne bien. Ces facilités à la base peuvent créer et créent des illusions, de fausses tranquillités même chez les hommes d'affaires, malgré l'énormité des luttes que l'Espagne a engagées contre une grosse partie de l'Europe, malgré leurs habituelles prudences et la gêne qu'entraîne, une fois de plus, la suspension des sacas de plata à partir de 1589. Le signe le plus alarmant c'est sans doute la tension fiscale qui devient excessive en Castille ; tous les contribuables sont harcelés : les Grands, la haute noblesse, le Clergé, les villes, même les marchands sinon les "hommes d'affaires", et d'énormes sommes de juros sont jetées sur un marché relativement avide.

- De la dernière banqueroute de Philippe II à la première de Philippe III (1607) -
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Mais l'or du Soudan, ce n'est pas seulement la base de la prospérité de l'Afrique du Nord et de l'Espagne musulmanes de ce bloc de l'Islam occidental qui, coupé des grandes routes de la mer avec le XIIe siècle, fut obligé de vivre sur lui-même. Cet or se relie à la grande histoire de la Méditerranée : il entre dans la circulation générale de la mer à partir du XIVe siècle, peut-être à partir du pèlerinage tapageur à La Mecque de Mansa Moussa, roi du Mali, en 1324.

- L'or soudanais : les précédents -
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L'État moderne vient de naître, armé et désarmé tout à la fois, car il ne suffit pas à sa tâche : pour faire la guerre, percevoir les impôts, administrer ses affaires, rendre la justice, il doit s'appuyer sur les hommes d'affaires et les bourgeois en quête de promotion sociale. Mais ceci même est un signe de sa force nouvelle. En Castille où l'on voit admirablement les choses, chacun s'embarque alors dans l'entreprise de l'État, les marchands, les grands seigneurs, les letrados... Toute une course s'organise aux honneurs et profits.

- Les États sont les plus gros entrepreneurs du siècle -
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Le commerce au loin, c'est la mise en contact, plus ou moins aisée, de contrées où l'achat se fait à bas prix et d'autres où les ventes sont à haut prix. Pour prendre des exemples connus : acheter des carisee ou les faire fabriquer dans les Cotswolds anglaises et les vendre à Alep ou en Perse ; ou acheter du poivre à Calicut et le revendre à Lisbonne, Venise ou Lubeck.

- Étroitesse et importance du commerce au loin -
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Alors résumons-nous : trop d'hommes d'un côté et pas assez de chevaux ; l'autre trop de chevaux et pas assez d'hommes ! La tolérance de l'Islam viendrait peut-être de ce déséquilibre : il serait trop heureux d'accepter les hommes, quels qu'ils soient, pourvu qu'il les trouve à sa portée.

- Les vides méditerranéens -
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Le XVIe siècle n'a pas toujours souri aux univers urbains. Disettes et épidémies frappent les villes à coups redoublés. Avec la lenteur et le prix prohibitif des transports, avec l'irrégularité des récoltes, toute agglomération risque la disette à chaque instant de l'année.

- Misères anciennes, misères nouvelles : les disettes et le problème du blé -
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Il y a pourtant un travail positif de l'hiver, un seul : les négociations, les discussions diplomatiques, les résolutions pacifiques. De ce point de vue, l'hiver est une halte salutaire. C'est un fait, en tout cas, que les traités de paix, étudiés dans ce livre, sont du semestre de l'hiver, qu'ils se situent avant les tumultes et l'irréparable de l'été.

- Paix et bavardages de l'hiver -
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À l'autre extrémité de la Méditerranée, vers l'Est : île encore, la Syrie, ce relais entre mer et désert. À partie d'elle, tout se diffuse : les hommes, les techniques, les impérialismes, les civilisations, les religions.

- Et les îles que n'entoure pas la mer -
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[...] si la politique française soulève le peuple des montagnes corses avec facilité, presque sans le vouloir, c'est moins en vertu de plans préconçus que de la liaison vitale entre une France alors riche d'espace et une île trop riche en hommes. La France est ouverte à l'émigration corse comme le plus vaste et le plus fructueux des champs d'expansion alors que l'Italie est trop peuplée et considère, au contraire, la Corse comme une terre à coloniser pour son propre usage.

- Émigrés insulaires -
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L'insuffisance de la provende explique l'insuffisance des pêcheurs, par suite celle des marins qui a toujours insidieusement freiné les grandes entreprises des dominations méditerranéennes. Entre les rêves des politiques et les réalités, il y eut constamment cet obstacle : la rareté des hommes capables de construire, d'équiper, de manœuvrer les flottes.

- Les peuples de la mer -
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On se tromperait plus facilement encore sur le rôle de la plaine en Méditerranée. Dites : la montagne ; l'écho répond austérité, âpreté, vie arriérée, population clairsemée. Dites : la plaine ; le même écho répond abondance, facilité, richesse, douceur de vivre. Au temps où nous nous plaçons, s'agissant des contrées méditerranéennes, l'écho a toutes les chances de tromper qui l'écoute.

- Les plaines -
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La montagne, ordinairement, est un monde à l'écart des civilisations, créations des villes et des bas pays. Son histoire, c'est de ne point en avoir, de rester en marge, assez régulièrement, des grands courants civilisateurs qui passent avec lenteur cependant. Capable de s'étaler loin en surface, à l'horizontale, ils se révèlent impuissants, dans le sens vertical, devant un obstacle de quelques centaines de mètres.

- Montagnes, civilisations et religions -
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L'identité de la France selon Fernand Braudel - Le Monde - Entretien du 24 mars 1985. Michel Kajman.

Je crois que le thème de l'identité française s'impose à tout le monde, qu'on soit de gauche, de droite ou du centre, de l'extrême gauche ou de l'extrême droite. C'est un problème qui se pose à tous les Français. D'ailleurs, à chaque instant, la France vivante se retourne vers l'histoire et vers son passé pour avoir des renseignements sur elle-même. Renseignements qu'elle accepte ou qu'elle n'accepte pas, qu'elle transforme ou auxquels elle se résigne. Mais, enfin, c'est une interrogation pour tout le monde.

II ne s'agit donc pas d'une identité de la France qui puisse être opposée à la droite ou à la gauche. Pour un historien, il y a une identité de la France à rechercher avec les erreurs et les succès possibles, mais en dehors de toute position politique partisane. Je ne veux pas qu'on s'amuse avec l'identité.

Vous me demandez s'il est possible d'en donner une définition. Oui, à condition qu'elle laisse place à toutes les interprétations, à toutes les interventions. Pour moi, l'identité de la France est incompréhensible si on ne la replace pas dans la suite des événements de son passé, car le passé intervient dans le présent, le "brûle".

C'est justement cet accord du temps présent avec le temps passé qui représenterait pour moi l'identité parfaite, laquelle n'existe pas. Le passé, c'est une série d'expériences, de réalités bien antérieures à vous et moi, mais qui existeront encore dans dix, vingt, trente ans ou même beaucoup plus tard.

Le problème pratique de l'identité dans la vie actuelle, c'est donc l'accord ou le désaccord avec des réalités profondes, le fait d'être attentif, ou pas, à ces réalités profondes et d'avoir ou non une politique qui en tient compte, essaie de modifier ce qui est modifiable, de conserver ce qui doit l'être. C'est une réflexion attentive sur ce qui existe au préalable. Construire l'identité française au gré des fantasmes, des opinions politiques, ça je suis tout à fait contre.
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Le va-et-vient des troupeaux de moutons et de chèvres entre les pâturages d'été du haut pays et l'herbe qui s'attarde dans les plaines, pendant les mois d'hiver, faisait osciller des fleuves de moutons et de bergers entre les Alpes méridionales et la Crau, entre les Abruzzes et le plateau des Pouilles, entre la Castille du Nord et les pâturages méridionaux d'Estrémadure et de la Manche de Don Quichotte.
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Chaque été, l'air sec et brûlant du Sahara enveloppe l'étendue entière de la mer, en déborde largement les limites vers le nord. Il crée au-dessus de la Méditerranée ces "ciels de gloire", si clairs, ces sphères de lumière et ces nuits constellées d'étoiles que l'on ne trouve nulle part ailleurs. Ce ciel d'été ne se voile que lorsque, pour quelques jours, se déchaînent les vents du sud, chargés de sable, le khamsin, ou le Sirocco, le "plumbeus auster" d'Horace, gris et lourd de plomb.
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