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Citations de François-Xavier Bellamy (108)


Entendons-nous bien : le marché est évidemment nécessaire à l'économie, et l'économie à la vie sociale et politique des hommes. Cependant, une difficulté majeure survient quand l'économie marchande n'est plus une activité parmi d'autres, mais la clé de toute activité ; quand l'argent par lequel les objets circulent n'est plus un moyen, mais une fin ; quand le marché ne trouve plus une place au sein de la cité, mais que toute la cité devient un immense marché.
Difficulté majeure en effet ; car cette domination de l'économie marchande ne signe pas seulement la crise de la politique : elle entraîne aussi, paradoxalement, une crise inédite de l'économie elle-même. Le marché est un outil essentiel à la vie des hommes ; et quand il absorbe tout de leur vie, il perd son sens, devient absurde, et se retourne contre eux.
La culture contemporaine porte partout des traces de cette crise profonde. On connaît le mot désabusé qui ouvre le film de Jan Kounen, 99 Francs :

Tout s'achète. L'amour, l'art, la planète Terre, vous, moi. Surtout moi. L'homme est un produit comme les autres, avec une date limite de vente.
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En réalité, le progressisme, nous l'avons dit, n'est pas une option politique, mais une neutralisation de la politique. Il ne consiste pas à considérer qu'un progrès est désirable – ce qui est une tautologie, mais a considérer que tout mouvement est un progrès. De ce point de vue, la seule maxime qui reste à la politique et l'injonction de tout faire pour libérer le mouvement, pour défaire les immobilismes, pour déconstruire les barrières, pour « laisser faire et laisser passer ». La politique est conduite par là à s'effacer pour que plus rien ne puisse empêcher la circulation universelle des personnes et des choses, orchestrée par l'économie marchande.
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Ainsi la publicité vide de leur sens les mots les plus essentiels, et rend absurde le langage. Derrière elle, le marché trahit des réalités qu'il absorbe : rendre tout bien échangeable et liquide, c'est à la fin détruire ce qui ne saurait devenir l'objet d'un échange marchand. La mobilisation générale qui constitue la dynamique du marché, cette extension perpétuelle pour ne rien laisser en dehors de la marche de l'économie, c'est, au sens littéral du terme, une liquidation générale. Vendre de la « présence », c'est seulement révéler et emmurer encore notre infinie solitude ; commercialiser l'«humain», c'est de toute évidence contribuer à construire un monde inhumain. Si elle va au bout de ce renversement universel, la société la plus prospère peut aussi bien devenir celle la plus grande misère…
Cette misère n'a rien d'une fatalité : elle est un choix, le produit d'une vision du monde.
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La science elle-même se déploie dans le temps, bien sûr : elle découvre peu à peu de nouvelles connaissances, de nouvelles vérités, qui ajustent l'une après l'autre notre représentation du réel. Mais si la science a une histoire, c'est celle d'un mouvement vers cette vérité qui n'en a pas, et dont la nécessité est étrangère à nos découvertes. L'histoire des sciences a un sens, parce que les sciences s'approchent peu à peu dans le temps de ce qui est extérieur au temps. Et on peut parler de ce cheminement de la science comme d'un progrès, si l'on considère ce cheminement par rapport à l'objectif immuable que constitue la vérité, vers laquelle tout chercheur tente simplement d'avancer.
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Le transhumanisme se donne un but totalement autre : non pas réparer le corps humain, mais le remplacer. Il ne s'agit plus de se modeler sur une régularité naturelle, que l'on appelle la santé – l'état du corps dans son cours ordinaire, quand aucune pathologie n'est venue le troubler. Le progressisme post-moderne ne veut pas recevoir l'homme tel qu'il est, mais le dépasser – pour cela, il faut commencer par le mépriser, et par se mépriser soi-même.
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Bergson, à qui on demandait un jour de décrire l'avenir de la littérature, répondit qu'il n'en savait rien ; et lorsque le journaliste qui l'interrogeait, dépité, se contenta de lui demander au moins à quoi ressemblerait la grande œuvre dramatique de demain, il lui répondit : « Si je savais ce que sera la grande œuvre dramatique de demain, je la ferais. » L'innovation qui marquera l'avenir n'est pas un possible à pressentir ; elle deviendra possible avec le génie de l'inventeur. Mais alors, si les nouveautés qui naîtront demain sont encore inexistantes et imprévisibles, comment affirmer par avance qu'elles seront nécessairement bonnes ?
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La modernité s'accomplit aujourd'hui en faisant triompher ce principe si singulier dans toutes les activités humaines. La mode est la morale des modernes. Elle ne gouverne pas seulement les comportements vestimentaires ; elle oriente l'économie, à travers l'impératif indiscuté de l'innovation, qui accompagne et oriente les pratiques de consommation. Elle s'impose à la vie intellectuelle : nous avons sans doute plus peur d'être ringards que d'être dans l'erreur… Il y a des vérités qui ont simplement le tort de n'être pas d'actualité, et qui, prononcées à contretemps, passent pour d'impardonnables fautes de goût.
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Si un ami n'est qu'un numéro dans une liste dont je cherche à augmenter le total pour exister sur les réseaux sociaux, alors cet "ami" peut être échangé contre n'importe quel autre et il sera changé si dans l'opération j'ai une chance d'en gagner plus. Si une relation amoureuse peut n'être que le résultat d'un algorithme, alors nous sommes tous remplaçables et donc concurrents sur un grand marché du couple à l'échelle de la planète.
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On attend d'un salarié moins d'habileté que d'adaptabilité, moins de capacité à faire que de capacité à changer. Comme nous avons abandonné la demeure pour le logement, nous oublions donc le vieux monde des métiers pour occuper des emplois. La demeure suppose du temps, le logement un simple espace, de même, le métier est ce qu'il faut du temps pour acquérir, et qui ne s'oublie pas, quand il est si rapide de prendre, ou de perdre, un emploi.
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La technologie contemporaine entre en lutte contre le réel, parce qu'il est constitué de consistances qui sont autant de pesanteurs pour notre exigence de mobilité. La vie implique pourtant de les assumer — et si nous préférons les fuir, seul la mort pourrait nous offrir la perspective d'une absence de contrariétés. Vivre et habiter ce monde, exister et être un corps, suppose d'accepter un ordre de contraintes, une infinité de renoncements. Se trouver vraiment quelque part, c'est à chaque instant de cette présence renoncer à être ailleurs. Faire vraiment quelque chose, c'est ne pas faire tout le reste. Voilà ce à quoi nous ne voulons plus nous résoudre.
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Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d'une vie authentiquement humaine sur terre.
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Indifférence solitaire à autrui, indifférence relativiste au vrai et au faux, au bien et au mal : en suivant le chemin tracé par ces trois auteurs, nous préférons refuser de savoir, refuser de voir et de reconnaître ce qui nous précède, afin de rester parfaitement indéterminés – c’est-à-dire parfaitement libres.
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Pour le dire autrement, nous ne sommes pas immédiatement nous-mêmes, immédiatement humains. C’est là un caractère singulier de notre espèce : s’il n’existait qu’une seule différence fondamentale entre l’homme et l’animal, ce serait sans doute celle-là.
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Si gagner la guerre devient la seule finalité, alors on observera ce que Clausewitz s’inquiétait de repérer dans l’évolution de la guerre, et qu’il appelait le risque de la « montée aux extrêmes ». Quand la guerre n’obéit plus à une finalité politique mais qu’elle devient un but en soi, quand la violence n’est plus un moyen de la politique, mais que gagner la guerre devient le but politique, quand toute la politique s’organise autour de l’effort de guerre, alors la guerre engendre cette « montée aux extrêmes ».
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Revenons à Bernanos : le pessimisme et l’optimisme, écrivait-il, « s’accordent à ne pas voir les choses comme elles sont » ; ils constituent ainsi « les deux faces d’un même mensonge ». Espérer, au contraire, commence par un acte de lucidité. « L’espérance se conquiert. On ne va jusqu’à l’espérance qu’à travers la vérité, aux prix de grands efforts et d’une longue patience. »
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Ce qui est en jeu, ce n'est pas d'arrêter le mouvement ; c'est au contraire de sauver la possibilité d'un mouvement authentique. Pour qu'un changement effectif nous approche du meilleur, encore faut-il un point d'appui : « Donnez-moi, demandait Archimède, un point fixe et un levier, et je soulèverai la terre. » Si l'on nous refuse tout point fixe, nos leviers même les plus puissants ne nous serviront à rien… En affirmant que tout est mobile, on tue en fait le mouvement. Le progressisme a détruit l'idée de progrès en décrivant le changement comme nécessaire par principe. Il faut sauver de cette illusion absurde les progrès véritables dont nous avons besoin : et voilà comment nous pourrons remettre la main sur notre propre destin.
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La science elle-même se déploie dans le temps, bien sûr : elle découvre peu à peu de nouvelles connaissances, de nouvelles vérités, qui ajustent l'une après l'autre notre représentation du réel. Mais si la science a une histoire, c'est celle d'un mouvement vers cette vérité qui n'en a pas, et dont la nécessité est étrangère à nos découvertes. L'histoire des sciences a un sens, parce que les sciences s'approchent peu à peu dans le temps de ce qui est extérieur au temps. Et on peut parler de ce cheminement de la science comme d'un progrès, si l'on considère ce cheminement par rapport à l'objectif immuable que constitue la vérité, vers laquelle tout chercheur tente simplement d'avancer.
On ne peut donc parler de progrès que pour décrire un mouvement qui se connaît pour but un point d'arriver immobile.
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Notre optimisme est un nihilisme : il décrète que ce monde ne vaut rien, puisque tout autre monde sera meilleur. Il n'y a pas d'hésitation à avoir, d'incertitude possible sur le sens de l'histoire : il faut choisir le changement par parti pris, parce qu'il va arriver et parce qu'il doit arriver. Une telle perspective refuse de considérer que nous ayons des biens qu'il faudrait prendre en compte dans un choix, un discernement à mener ; c'est donc supposer que nous n'avons rien à perdre — c'est supposer que nous n'avons rien du tout, en réalité. C'est ramener tout l'être au néant, en ne donnant de crédit qu'à ce qui n'est pas encore.
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Affirmer que ce qui existe doit exister, c'est évidemment une erreur de raisonnement ; mais le contraire d'une erreur n'est pas forcément une vérité : et en l'occurrence, affirmer de manière opposée que ce qui existe doit être remplacé, que l'innovation est forcément un bien — regarder l'histoire comme étant forcément l'occasion d'un progrès, c'est aussi une erreur de raisonnement, non moins absurde, et non moins dangereuse.
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L’être humain est par nature un être de culture : c’est par la rencontre avec ce qu’autrui lui transmet que s’accomplit son humanité.
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