J’ai terminé ce livre et là, je ressens une immense tristesse. Comment, c’est fini ? Non ! Impossible ! Pas déjà ! Je reste scotchée. A cette magnifique couverture, déjà. A ces pages qui se sont tournées à une vitesse folle. Immaîtrisable. J’ai dévoré les chapitres. Dévoré les mots de Marnie. Ceux d’Olivia. Ceux de Géraud. J’ai dévoré les souvenirs d’Agatha. Même ceux de Manos. J’ai tout dévoré, absorbé, digéré. J’ai épié les secrets. Guetté les confidences. Bien sûr beaucoup de révélations étaient attendues, mais peu importe, j’ai joué les surprises parce que je n’ai pas aimé ce livre : je l’AI ADORÉ. C’est un gros coup de cœur.
D’abord, il y a Marnie. Cette adolescente, un peu rebelle, un peu sage parfois. Tout de même plus rebelle que sage ! Fille aimante, malmenée par la vie, affectée de malheurs. Jeune fille qui se cherche. Amoureuse de son île, de son indépendance. En colère.
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« Cette île regorge de granges désaffectées, où Marnie se terre en attendant que la colère se calme, que les vents s’apaisent, que son cœur cesse de battre aussi fort, que tous les démons qui mènent la danse s’épuisent enfin et la ramènent à Glass. »
Marnie. Attachante. Terriblement attachante. Qui se protège de la vie, de ses aléas. Curieuse. Tellement curieuse qu’elle sait tout. Les moindres secrets de son île –île désaffectée, qu’on imagine, sauvage, brutale, localisée on ne sait où, peu importe, on y sent le vent, la houle, les herbes et les embruns. On y voit les falaises, les chemins escarpés et les plaines. On s’y promène. Avec Marnie. Avec Olivia. Cette île sur laquelle se dresse Glass, forteresse de verre et d’acier, sanctuaire des secrets. Ceux que Marnie (et les autres) nous révèle.
« La nature même adore Glass. Le ciel s’y regarde toute la journée et arrange ses cheveux bleus, gris ou noirs. Le soleil chauffe le verre, la pluie cogne à la vitre mais nul ne l’invite à entrer. La vie aurait pu être douce. Les hommes n’apportent rien de bon, et personne ici ne dira le contraire. Je sais des choses pour mon âge. Sans doute parce que je colle trop souvent mes oreilles aux portes fermées et mon œil aux serrures. »
Marnie, dont on voudrait étreindre la main. Que l’on voudrait consoler. Elle est si proche.
« J’ai quatorze ans, j’ai cent ans. Peu importe. Je sais des choses. J’ai vécu avec ces mots-poisons qui m’ont rongée à l’intérieur. J’ai grandi trop vite comme une herbe folle qui court le long des arbres jusqu’au sommet. Mais ce n’est pas encore assez haut, j’ai besoin du ciel et même au-delà. »
Et puis, il y a Olivia. Cette femme que l’on croit dure, hautaine, bourgeoise et gâtée. Une femme rescapée des hommes. De ceux qui auraient dû la chérir.
« Les hommes sont des enfants qui grandissent malgré eux. Et Dieu sait combien leur bêtise est sans limites. Certes, ils ne cassent plus de jouets. Ils brisent le cœur des femmes. »
On l’écoute. Tous ces silences, ces secrets. Ces secrets qu’elle croyait bien gardés.
« Je pense que son éducation la corsetait si fort qu’elle préférait le silence aux confidences. Je la voyais bien hésiter parfois, pencher sa tête ou pincer ses lèvres pour empêcher les mots de jaillir. »
Il y a les autres aussi. Tous les témoins, qui sont aussi des acteurs : Prudence, la gouvernante, Géraud, le médecin de famille, Rose, la maman de Marnie, Agatha, la seule amie, Manos, le coiffeur, Vincy, l’amoureux de Marnie. Ils nous expliquent, apportent leurs avis, étayent des faits que l’on devine déjà lourds. Inavouables.
« La violence est une maladie de l’âme, qu’elle soit sous l’emprise de l’alcool ou de la colère. Rien ne la soigne vraiment sauf peut-être la mort qu’on vient à souhaiter comme une délivrance. »
Ce roman est sombre et mélancolique. L’atmosphère est pesante. J’ai été happée par cette île, par Glass, par les secrets que tous taisent, par ces hommes qui n’ont pas su, par cette adolescente qui s’échappe, par ces femmes qui ont vécu. Les pages se sont tournées, je suis restée accrochée.
Je ne connaissais Gilles Paris qu’en tant qu’auteur du roman adapté au cinéma « Autobiographie d’une Courgette – Ma vie de courgette » que j’avais apprécié. Je souhaitais le découvrir autrement. Je n’ai pas été déçue. Les thèmes abordés sont connus : la mort, la maladie, la violence, les secrets que l’on croit étouffer, mais l’alternance des points de vue des protagonistes intéresse, captive. Les mots, le style, la légèreté de la plume entraînent. Je n’ai pu résister. Je suis sous le charme.
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