A mes yeux, la vie aurait dû s'arrêter jusqu'à ce qu'on retrouve Bien. Les aiguilles des horloges auraient dû s'immobiliser, l'oxygène n'aurait pas dû se transformer en gaz carbonique dans nos poumons, nous aurions dû cesser de respirer, et nos coeurs cesser de battre. La vie n'aurait dû revenir à la normale qu'après le retour de Ben.
Découvrir que l'histoire dont on parle au journal télévisé est la vôtre est la chose la plus étrange au monde : vous comprenez qu'une personne que vous ne connaissez pas a la charge de retrouver votre enfant, et vous devez accepter que vous êtes tout autant en retrait que n'importe qui d'autre écoutant les informations, et que vous êtes impuissant.
- Non ! ai-je hurlé : un cri, le hurlement d'un animal sauvage, que seule une mère peut pousser quand elle voit sa progéniture lui être enlevée par un prédateur.
Voici le problème qui est désormais le mien : les pensées qui m'obsèdent.
Elles me rappellent heure par heure, parfois minute par minutes, les pertes, et les actions sur lesquelles on ne peut plus revenir, même si on le souhaite plus que tout.
Le doute s'est insinué dans nombre de mes relations, comme le feraient de petits éclats de verre brisé invisibles à l'oeil nu mais susceptibles de vous blesser alors même que vous pensiez avoir tout bien balayé.