Etre le nouveau de la classe, c'était vraiment mon destin. (… )
Le premier jour, on ne parlait pas beaucoup, on essayait juste de ne pas se faire tabasser.
Une bonne chose de faite. Le plus dur était passé.
Le deuxième jour, on était déjà un peu moins nouveau que la veille.
Le troisième jour, on savait se rendre aux toilettes et en revenir sans se perdre.
De jour en jour, on était moins nouveaux, les autres cessaient peu à peu de nous demander d'où on venait, quelle était notre équipe de foot/ basket/ baseball préférée, et d'où on tenait cet accent si bizarre. Mais, à peine s'était- on intégrés que notre mère ou notre père en avait marre, et qu'on partait pour un autre pays.
Et là, il fallait tout recommencer.
Le temps s' est arrêté.
Mais le temps ne s'arrête jamais très longtemps. Si l'on écoute attentivement, il continue toujours à passer.
Depuis l'accident, j'avais l'impression d'être toujours entouré de bruit. Qu'autour de moi, ce n'était que cris, sirènes et moteurs d'ambulance, sonneries, bips, ascenseurs, courses, roues de chariot et bruit de machine à café. Le pouls de sept milliards de personnes qui bat en même temps.
Trop de bruit.
Et trop fort.
La musique n'est pas juste de la musique, c'est aussi de la magie. Qui peut conjurer des émotions dont on ignorait jusqu'à l'existence, et faire naître à la vie des sentiments que l'on pensait éteints à jamais. Un peu comme un voyage dans le temps. La musique est capable de nous transporter à une époque, à d'autres endroits, avec une telle précision qu'on revoit les bandes de baskets qu'on n'a plus depuis longtemps, qu'on entend pépier les oiseaux envolés depuis longtemps et qu'on va jusqu'à sentir l'odeur de vinaigre des chips de l'été précédent. Et lorsque toutes ces émotions, ces souvenirs surviennent par le biais d'un objet concret, et pas seulement d'un MP3, eh bien, la magie est encore plus forte.
« Je venais de comprendre quelque chose. Que la musique n’est pas juste de la musique, c’est aussi de la magie. Qui peut conjurer des émotions dont on ignorait jusqu’à l’existence, et faire naître à la vie des sentiments que l’on pensait éteints à jamais. Un peu comme un voyage dans le temps. »
Une personne qui aime la poésie a toujours une longueur d'avance sur les autres. Crois-moi.
Malgré notre tristesse, Griff et moi, on n'était pas proches. C'est comme si on était déconnectés. Il était dans son univers, moi dans le mien, et je ne savais pas comment le rejoindre. Il était toujours près de moi et, en même temps, à des millions de kilomètres.
J'imagine que c'est ça le chagrin : le sentiment d'être totalement coupé d'une personne qu'on aime. Ou des personnes qu'on aime. Mais comment parler de quelque chose d'aussi douloureux ? Comment mettre des mots sur cette expérience ?
Pour se sentir mieux, rien de tel que de penser à quelque chose d'heureux.
Je m'appelle Lottie Biggs et j'aurai quinze ans dans trois semaines. Au collège, la plupart des gens m'appellent Lottie-la-pas-si-bien-lotie. Je n'ai jamais trouvé ça très drôle. Je mesure un mètre cinquante-trois et demi. Ma nuance de cheveux actuelle est "Aubergine ardente" - c'est moins joli que "Potiron pétulant", mais ça vaut quand même mieux que la drôle de couleur jaunasse que j'ai testée la semaine dernière.