Héla Saïdi

Dans le ventre de ma mère, mon âme ne s'était donc nullement imprégnée de l'amour qui pouvait exister entre un homme et une femme ni de la douceur de leurs voix qui devaient devenir peu à peu familières pour rassurer l'enfant qui allait prochainement passer d'un monde à un autre

Pour les amateurs de douceurs tunisiennes, le makroud est une spécialité préparée à partir de deux couches de pâte à base de semoule de blé dur séparées par une couche de pâte de dattes. Une fois découpé sous forme de losange, le makroud est frit dans l'huile végétale puis trempé dans un sirop de miel et de fleur d'oranger. Délice pour les papilles et pour les hanches qui s'empressent de s'emplir de tant d'amour !

Il est clair que ce qui nous ressemble nous rassure, mais en prenant le risque de tenter la différence on aboutit à ce qu'on appelle tout simplement la tolérance.

La bonté ne se décrète pas. Elle ne s'acquiert pas non plus. Mais, elle s'impose lorsqu'on agit avec justesse, à la fois, avec soi et avec les autres.

"(...) vous venez de prendre la meilleure décision pour vous et pour l'enfant. Vous savez, lorsqu'on anticipe le pire, on ne peut récolter que le meilleur !"

A ce moment précis, nos âmes avaient décidé de ne plus se quitter, main dans la main, nous prîmes le chemin de son appartement. Nous n'avions plus soif, nous n'avions plus faim. Blotties, nues, l'une contre l'autre, nos corps enlacés jusqu'au petit matin. Les premiers rayons du soleil réveillèrent chaudement les caresses, éclairant ainsi en plein jour notre amour naissant...

Il a fallu passer par un état de dégoût et de mal-être total pour apprécier les moindres petites choses de la vie. Chaque moment de la vie devenait exceptionnel et unique.

Que se passe-t-il quand une personne tombe amoureuse ?

Des scientifiques ont essayé d'apporter une réponse à cette question. (...) Il semble que les mêmes zones du cerveau sont activées chez une personne qui tombe amoureuse que chez celle qui devient dépendante aux drogues ; les deux vont étrangement présenter des symptômes similaires. Cela explique sans doute pourquoi lorsque nous tombons amoureux, nous sommes très attachés à cette personne.

Lorsque les choses sont vécues, on réalise vraiment ce qui relève de nos capacités. Nos capacités à agir. Nos capacités à encaisser. Nos capacités à évoluer.

Chaque voyage avait constitué une étape clé et avait su me faire apprécier encore plus ce que je détenais déjà ; (...).

La tolérance, l'acceptation de l'autre, implique un effort, celui de pénétrer dans le monde de l'autre avec le risque d'en revenir avec la volonté de modifier un peu, beaucoup ou à la folie son propre monde.

Tout doucement mon esprit m'interpella :

- Hé ! Dis-moi, qu'évoque pour toi exactement le mot "voyager" ?

Adorant chantonner, soudain, ma tête fut submergée par le son poétique de certains mots, rythmant et temporisant le déferlement d'idées en réponse à cette question. Presque comme un réflexe, mes yeux se fermèrent et je me retrouvais à nouveau transportée vers un monde où les émotions et les sentiments du moment attrapaient au vol les mots qui se bousculaient en tous sens dans ma tête, pour les ordonner et former ainsi des phrases.

A ma grande surprise, le Coran indique sans aucune ambiguïté que la femme n’est nullement considérée comme un corps second ni comme une servante, allant même jusqu’à insister sur une certaine égalité entre l’homme et la femme. L’homme et la femme semblent jouir de la même dignité humaine et assumer les mêmes devoirs. Encore faut-il avoir une lecture éclairée et contextualisée du Coran en se rappelant qu’à l’époque de la révélation, les femmes ne jouissaient d’aucun droit et que le Coran leur avait permis d’accéder à une vie digne au sens large du terme. Ainsi, pour de nombreuses féministes musulmanes, "ce n’est pas l’islam qui opprime les femmes, c’est la lecture machiste qui en est faite". Selon que la lecture du Coran soit faite de manière "masculine" ou "féminine", certains vont finalement y retrouver une égalité entre les hommes et les femmes.

Dans l'islam, le consentement est une obligation majeure dans le mariage. Les parents peuvent aider leurs enfants à choisir le conjoint par leurs conseils et leurs suggestions, mais rien ne peut être imposé : Une fille a le droit d'accepter ou de rejeter des propositions de mariage. Le mariage forcé sans le consentement mutuel invalide le mariage !

J'ai toujours été frappée par le décalage entre nos danses si suggestives et les restrictions imposées aux jeunes filles au nom de la religion, de la morale et des coutumes.

Devant le miroir, je voyais surtout la peur. J'étais terrifiée par l'idée de devoir un jour faire un choix, entre le mensonge d'une vie cachée auprès d'une femme et l'enfermement pour l'éternité dans une relation amoureuse malheureuse avec un homme.

J'avais grandi dans un monde où l'apparence importait plus que la vérité. Une hypocrisie qui arrange tout le monde et ne dérange finalement personne. Je ne voyais pas d'autres alternatives que de faire comme tout le monde : si je voulais vivre ma vie comme je l'entendais, je devais moi aussi "dire" ce que les gens voulaient entendre et "faire" ce que mon cœur me dictait. J'avais décidé de respecter mes envies et d'accepter qui j'étais.

Une vie libérée de toutes les contraintes que la religion ou encore la bienséance auraient pu m'imposer. Dans ma tête, tout paraissait clair. J'avais décidé que je n'aurais sûrement pas cette vie à laquelle mes parents me destinaient.

Ma vie serait mienne !

Mais est-on véritablement libre de choisir ? Ou bien nos choix restent-ils tout de même, fatalement, influencés par notre famille ?

Il est important de rappeler que la burqa, le niqab, le tchador ou le jilbab représentent plus des coutumes qu'un acte religieux, ils étaient même totalement inconnus à l'époque du prophète. Ce que préconise l'islam, c'est un comportement et un habillement décents, notamment pour la prière. Le voile n'est donc pas lié au culte ou au rite, et n'est en aucun cas un objet religieux.

Le voile n'était destiné initialement qu'aux jeunes filles en âge de procréer pour les protéger des dangers de la rue. Ma mère avait commencé à le porter à 52 ans, un âge où la ménopause faisait partie de sa vie de femme depuis maintenant plusieurs années. Au fur et à mesure de nos discussions, j'acquis la certitude que ma mère ignorait véritablement pourquoi elle se sentit soudainement obligée de s'affliger ce bout de tissu.