Henri Pourrat

La nuit, cependant, était venue, la nuitée de la Toussaint, qui passe pour la plus noire de l'année. (...)
Et le vent s'était levé, comme il sifflait sous les portes, il arrivait de loin, d'entre les sapins des bois. Et sous aile noire, les âmes en peine gémissaient avec lui dans les montagnes.

Le château des sept portes
Troisième veillée
Quatrième pause

Il y avait quelque rencontre à minuit au fond des bois, encore sous un gros arbre, un pacte avec le démon, une maison solitaire haut dans les monts près d'un endroit où le chemin tourne; (...).

Le château des sept portes
Troisième veillée
Deuxième pause

Durant sa messe, à l'élévation, cette fille était enlevée en l'air par trois fois sans que quatre hommes qui se cramponnaient à elle pussent la retenir...

Le château des sept portes
Troisième veillée
Deuxième pause

Leur maison, c'était un drôle de commerce. On entendait des coups dans les murs et tout dansait autour de ce gamin. Les chaudrons, les écuelles sur la pierre d'évier, les outils, même pendus sous l'escalier, oui, quand le petit était là, tout entrait en danse ou volait à travers la salle.

Le château des sept portes
Troisième veillée
Deuxième pause

Cet homme saint et d'un grand âge, ayant dû renoncer prêcher des missions, s'était retiré au bourg de Marsac.
Il y travaillait empêcher les procès, à étouffer les haines, à réconcilier les familles, et y donnait, en patois, des sermons tout populaires, qui changeaient les coeurs.

Le château des sept portes
Troisième veillée
Deuxième pause

Il faut bien que le langage de ces bois dans l'ombre de minuit parle aux imagination : tant de contes rapportent les aventures que les gens ont cru leur être arrivées là, alors qu'ils faisaient route sur leur ramée mal hantée.

Le château des sept portes
Troisième veillée
Première pause

Quand on sème des épines, on ne va pas sans sabots.

Le château des sept portes
Troisième veillée
Première pause

Ces choses sont si vieilles qu'on n'oserait les donner pour tout à fait véritables. Cependant encore aujourd'hui les bergers montent à la Saint Jean sur la plus haute montagne pour voir danser le soleil : car il danse, ce jour-là, à son lever, ne sachant s'il doit aller à droite, aller à gauche. Beaucoup en ces cantons écartés ont dû demeurer longtemps paiens et magiciens dans le secret de leur coeur.

Le château des sept portes
Deuxième veillée
Cinquième pause

On peut toujours se donner tant de garde. Quand le malheur nous en veut, il arrive du côté qu'on l'attendait le moins.

Le château des sept portes
Deuxième veillée
Troisième pause

Elle, elle serait là, avec sa figure claire, sur laquelle il y a toujours une douceur, comme celle qui fait pencher la fleur de la rose; et puis on ne sait quoi de plus, une lumière. Oui, cette vie de lumière au fond de ses yeux couleur de noisette. Elle, là, qui me regarderait, Anne-Marie.

Le château des sept portes
Deuxième veillée
Deuxième pause

Les gens y vivaient de cette eau fraîche et de l'amour du Bon Dieu, se sustentant pour le reste de raves, de lard et de tourtes de seigle. Lorsqu'ils avaient quelqu'un à dîner, la chose est véritable, ils servaient au dessert des carottes crues comme régal et friandises. Et aurait-on seulement trouvé une assiette dans le village ? On ne mangeait alors que dans des écuelles ou sur des tranches de pain bis.

Le château des sept portes
Deuxième veillée
Première pause

Il voulait la revoir comme il avait vue un matin, sous un cerisier : Ô Anne-Marie, rose alors, plus rose rose que cette heure de six heures, avec je ne sais quel étincelant du bon courage sur la joue, et tout l'été de la montagne en son regard.

Le château des sept portes
Première veillée
Sixième pause

" En voilà encore une qui manquait à notre bonheur ! "
Il avait comme cela quelques plaisanteries, éternellement les mêmes, des sornettes d'almanach qu'il répétait à l'occasion.

Le château des sept portes
Première veillée
Troisième pause

(...) les gens de ce canton, quand ils sont en confiance, avouent qu'il arrive, en ces bois peureux, comme on les nomme, des aventures étranges.
Mais cette année-là on commençait de penser qu'outre les revenants, les démons, il devait y avoir du mauvais monde dans le pays. On ne disait cela qu'à voix de confesse. c'est que sous ces sapins un coup de fusil s'attrape aisément.

Le château des sept portes
Première veillée
Troisième pause

Il arrivait encore qu'un coin de futaie fût illuminée par une lueur diabolique. On apercevait des feux tels que les langues de flamme dépassaient la pointe des sapins. Pour aller aux foires de la Chaise-Dieu il faut traverser ces bois solitaires, et c'était les soirs, au retour, qu'on voyait les fantasmagories.

Le château des sept portes
Première veillée
Troisième pause

Une forêt comme celle de la complainte de sainte Geneviève de Brabant, où des ermites peuvent vivres solitaires et qu'on imagine pleine de loups, de renards, de blaireaux. (...) Tout est silence, mais un silence traversé de vingt bruits menus. Pas une âme, et pourtant il semble que quelqu'un soit tapi par là en embuscade. Il faut avoir l'esprit bien fort pour ne pas se laisser gagner par la peur.

Le château des sept portes
Première veillée
Deuxième pause

Des sapins, des sapins, des sapins, jamais une âme. Les chemins sablonneux s'enfoncent de salle obscure en salle obscure, parmi la mousse et la fougère, sous ces grands rames balançantes. (...) Il y a des endroits où le soleil semble n'avoir point percé depuis des mondes d'années : c'est la mort.

Le château des sept portes
Première veillée
Deuxième pause

Il y a, dans ces forêts, les plus beaux sapins du monde, hauts de cent pieds et aussi droits qu'un jonc.

Le château des sept portes
Première veillée
Première pause

Le grand-père avait été un simple paysan sans grands moyens qui, à force de se lever tôt et de se coucher tard, et de se plaindre même un verre de vin, avait empilé écu sur écu.

Le château des sept portes
Première veillée
Première pause

Il fait du vent. Et dans ce vent, je veux partir, aller encore
Là-bas, où je retrouverai le grand matin d'herbe et d'oiseaux.

Prologue