Citations de Ivan Zinberg (60)
Le jardinier de la célèbre affaire OAMR M A TUER avait bien tué sa riche patronne
Parfois, Jacques s'en voulait de mentir. Il profitait de la naïveté des gens, très souvent crédules en milieu populaire.
Rien d'étonnant à l'ère du complotisme et des fake news, quand une proportion notable de Français, dépourvus d'esprit critique, croyaient que la terre était plate, qu'on n'avait jamais marché sur la Lune, qu'un puissant réseau judéo-maçonnique manipulait le monde, ou que les Américains s'étaient balancé eux-mêmes des avions sur la tronche en septembre 2001.
Selon sa théorie, les flics possédaient un capital psychologique leur permettant de supporter leur métier : un quotidien de misère sociale, de violences, de souffrances, de tensions, d’affrontements, de scènes insoutenables…Tant que la jauge de ce capital était pleine, le policier tenait. Plus elle diminuait, plus la force lui manquait. Et, lorsque le quantum était dépassé, le policier se consumait lentement, imperceptiblement, jusqu’à la rupture.
Un chaos intérieur, brutal. Malgré le supplice, la confusion, son cerveau lui fit comprendre qu’il allait mourir, là, dans un fauteuil défoncé, devant cette barre HLM. Quitter ce monde aussi tôt n’avait jamais été dans ses plans.
Pendant une année, il apprit les rudiments du métier. Le tir. Les techniques d’intervention. La procédure pénale. La rédaction des PV. Les infractions. Son excellente condition physique et sa connaissance de la délinquance se révélèrent des atouts. Revers de la médaille, on le regardait de travers. Il venait de la zone et il s’appelait Karim Bekkouche, le seul Arabe de la promotion. Il se fit malgré tout quelques bons amis et obtint un classement final honorable.
Être policier, c'est se trouver aux premières loges de la violence de nos sociétés. Je n'ai pas eu à chercher loin la matière première de ce roman. Tout est sous mes yeux, chaque jour. Il suffisait de raconter.
- Tu connais la philosophie du bon socialiste : "Il faut être solidaire et partager l'argent... Mais surtout l'argent des autres!"
Pour Jacques, manichéen dans l'ame, il existait définitivement deux mondes. En surface, il y avait celui de l'insouciance, le long fleuve tranquille du bonheur et des habitudes, rythmé par un courant agréable, sans remous, commun à la plupart des gens. En profondeur, on en décelait un second, plus sombre et houleux, où s'enfonçaient ceux dont la vie se fracassait sur un récif indétectable au radar.
Lorenzo n'éprouvait aucune pitié pour elle. Son histoire à lui regorgeait d'une telle dose de cruauté qu'il ne ressentait plus aucune compassion pour autrui, a fortiori face aux malheurs qu'il jugeait dérisoires par rapport aux siens.
- Pourquoi déterrer et faire brûler un cadavre qui n'avait aucune chance d'être retrouvé ?
Il connaissait des collègues décédé peu après avoir quitté la boîte. Des hasards malheureux, survenant à l’heure du juste repos. Souvent, il s’agissait des conséquences d’une vie plus chargée que la moyenne. Les effets du stress, des nuits blanches, du tabac. Cancers. Infarctus. D’autres succombaient au contrecoup de l’inactivité ou de la solitude. Le contraste pouvait faucher sans vergogne. Dépressions. Suicides.
Le boulot de policier permettait de sonder la société et la multitude des affaires confortait cette thèse : même le plus improbable, le plus dramatique, le plus sordide, finissait par se produire un jour ou un autre.
« Le monde n’était pas avare d’abrutis »
On s'habitue à tout, même aux pires malheurs. L'être humain est programmé pour tout supporter. Et survivre.
Il tira de sa poche le matériel nécessaire. Haschisch. Feuilles à rouler. Briquet. Cigarettes. Attirer l'attention avec ce genre de friandise, drogue ou alcool, marchait à merveille dans un contexte de fête. Un peu comme ces pédophiles qui usaient de bonbons ou de tours de magie pour séduire les enfants.
Profite de ceux que tu aimes tant que tu peux encore le faire. Je sais de quoi je parle, tu peux me croire.
On s’habitue à tout, même aux pires malheurs. L’être humain est programmé pour tout supporter. Et survivre. J’en ai fait l’expérience et je sais que c’est vrai.
La mère de famille ne s’embarrassait ni de l’orthographe ni du respect de la langue. Bek détestait cet usage dans les échanges écrits. Mais peu importait. On n’en était plus à cette nuance près à l’époque du terrorisme, de la flambée des populismes, de la désinformation de masse, de l’Internet fou et du dérèglement climatique.
L’ex-flic se rappelait cette phrase de Mark Twain : " L'Homme est le plus cruel des animaux, il est le seul capable d'infliger une douleur à ses congénères sans autre motif que le plaisir." Constat lucide.
Bek soupira. Cette façon de placer des wesh, des wallah ou des Coran de la Mecque à chaque phrase lui foutait les nerfs en boule. Douma ignorait que ce marqueur social lui fermerait quatre-vingts pour cent des portes du monde professionnel. En son temps, il s’était bougé le cul pour perdre ces manies de pseudo-caïd. IL mourait d’envie de la secouer pour lui faire comprendre cette nécessité.