AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Ivo Andric (202)


En effet, ceux qui gouvernent et doivent opprimer les autres pour gouverner sont condamnés à agir selon la raison ; mais si, emportés par leur passion ou contraints par leurs adversaires, ils dépassent les limites des actes raisonnables, ils s’engagent sur une pente glissante et déterminent ainsi eux-mêmes le début de leur chute. Tandis que ceux qui sont opprimés et exploités ont aisément recours à la raison comme à la déraison, car elles ne sont que deux armes différentes dans la lutte, tantôt sournoise tantôt ouverte, qu’ils mènent sans fin contre l’oppresseur.
Commenter  J’apprécie          10
C’est ainsi que le pont avec sa kapia vit le jour, et que la ville s’épanouit autour de lui. Par la suite, pendant plus de trois siècles, le rôle qu’il joua dans l’évolution de la ville et l’importance qu’il eut pour la population demeurèrent tels que nous venons de les décrire brièvement. Il semblait qu’il trouvât son sens et sa vertu dans sa permanence. Sa silhouette claire, intégrée à la ville, ne changeait pas plus que le profil des montagnes environnantes sur le ciel. Les lunaisons se succédaient et les générations disparaissaient rapidement, mais lui demeurait, immuable, comme l’eau qui coulait sous ses arches. Il vieillissait, naturellement, lui aussi, mais selon une échelle de temps bien supérieure non seulement à la durée d’une vie humaine, mais aussi à toute une suite de générations, tellement grande que ce vieillissement était imperceptible à l’œil. Sa vie, bien qu’elle ne fût pas
infinie, paraissait éternelle, car nul n’entrevoyait sa fin.
Commenter  J’apprécie          10
Notre peuple étant peu instruit, têtu et doué d’une vive imagination, chacun des lettrés de la ville lisait et commentait à sa façon l’inscription de Badi gravée sur le mur, laquelle, à l’instar de tous les textes, une fois livrée au public, demeurait là, éternelle dans la pierre éternelle, exposée à jamais et de façon irrévocable aux regards et aux interprétations de tous, sages et fous, bons et méchants. Et chacun de ceux qui écoutaient gardait en mémoire les vers qui convenaient le mieux à son oreille et à son caractère.
Ainsi, ce qui figurait là, au vu de tous, gravé dans la pierre dure, était répété et passait de bouche en bouche sous différentes formes, transformé et
déformé parfois jusqu’à l’absurde.
Commenter  J’apprécie          00
Il valait cent fois mieux n’être personne et n’avoir rien !
Commenter  J’apprécie          30
En tout cas, une chose est sûre : entre la vie des gens de Višegrad et ce pont existe un lien étroit, séculaire. Leurs destinées sont si mêlées qu’elles sont inconcevables l’une sans l’autre et qu’on ne peut les raconter séparément. C’est pourquoi l’histoire de la construction et du destin du pont est en même temps l’histoire de la ville et de ses habitants, de génération en génération, de même que dans tous les récits qui parlent de la ville se profile la silhouette du pont de pierre sur ses onze arches, avec la kapia, telle une couronne, en son milieu.
Commenter  J’apprécie          70
Parmi les membres de la garde qui se relayaient sur la kapia, il y avait un jeune homme, Russe de Galicie orientale, qui s'appelait Grégor Fédoune. Ce jeune homme de vingt-trois ans avait la taille d'un géant et le coeur d'un enfant ; il était fort comme un ours et timide comme une jeune fille.
Commenter  J’apprécie          110
C'était une de ces chaudes journées dont il était agréable de passer le long crépuscule sur la kapia, à l'heure où les musulmans de la ville remplissaient les deux terrasses au-dessus de l'eau. Par des jours pareils, on faisait venir les melons par paniers. Melons et pastèques bien mûrs étaient mis au frais toute la journée, et le soir les promeneurs les achetaient et les mangeaient sur les bancs. Il se trouvait toujours deux compères pour parier que la pastèque serait soit rouge soit blanche à l'intérieur. Alors ils la coupaient, celui qui avait perdu payait, et tout le monde mangeait en conversant et en plaisantant bruyamment.
Commenter  J’apprécie          80
Il me parut soudain évident qu'il ne faut point trop éviter les rencontres et les conversations avec ceux qui en ont besoin, si insensés et déplaisants qu'ils nous paraissent. Cela n'est ni bien ni raisonnable car si, par égoïsme et pour notre propre confort, nous évitons d'écouter quelqu'un, nous devrons, honteux, le faire plus tard, peut-être à l'occasion d'un souvenir importun ou d'un rêve, ce qui rend la chose plus difficile et plus désagréable encore.
Commenter  J’apprécie          70
Ivo Andric
- Ce qui surprenait les gens de la ville et les emplissait à la fois d’étonnement et de méfiance, ce n’était pas leur nombre que leurs incompréhensibles et interminables projets, l’activité débordante et la persévérance dont ils faisaient preuve pour mener à bien les tâches qu’ils entreprenaient. P 152
Commenter  J’apprécie          40
En effet, ceux qui gouvernent et doivent opprimer les autres pour gouverner sont condamnés à agir selon la raison ; mais si, emportés par leur passion ou contraints par leurs adversaires, ils dépassent les limites des actes raisonnables, ils s’engagent sur une pente glissante et déterminent ainsi eux-mêmes le début de leur chute. P 91
Commenter  J’apprécie          90
Tous burent à la ronde encore une rakia et un café, oubliant la réalité pour pouvoir la supporter, et tous parlaient plus facilement et plus librement, songeant tout à coup que dans la vie il y a d’autres choses, plus humaines et plus gaies que ces ténèbres, cette peur et cette canonnade meurtrière.
(page 375)
Commenter  J’apprécie          210
Les jeunes gens dansaient la tête renversée en arrière, blêmes, les narines frémissantes, tandis que les jeunes filles, les joues en feu, gardaient timidement les yeux baissés, de peur que leur regard ne trahît la volupté qu’elles trouvaient à danser.
(page 350)
Commenter  J’apprécie          260
Le pont, lui, était toujours là, égal à lui-même, arborant l’éternelle jeunesse des grandes œuvres conçues avec génie, lesquelles ignorent ce que vieillir ou changer veut dire et ne partagent pas, du moins semble-t-il, le destin des choses éphémères de ce monde.
(page 264)
Commenter  J’apprécie          260
Nombre de ces fonctionnaires, Hongrois fougueux ou Polonais arrogants, franchissaient avec angoisse ce pont, entrant avec répugnance dans cette ville à laquelle, au début, ils ne pouvaient s’intégrer, telle la goutte d’huile surnageant à la surface de l’eau. Mais un ou deux ans plus tard, déjà, ils passaient des heures assis sur la kapia, arborant de gros fume-cigarettes d’ambre, et, comme les gens du cru, regardaient la fumée se dissiper et s’évanouir dans le ciel clair, dans l’air immobile du crépuscule.
(page 213)
Commenter  J’apprécie          220
Tout ici, des murs au mobilier, porte la marque de l'incurie et du laisser-aller, comme si la maison était habitée par un aveugle ou par une personne qui reste parfaitement indifférente aux objets quotidiens et s'en sert uniquement parce qu'il le faut et autant qu'il le faut, insensible à la place qu'ils occupent et à leur aspect. (...)

Mais la Demoiselle ne dépense ni beaucoup d'énergie ni beaucoup de temps aux besognes telles que le ménage ou la cuisine. Comme elle n'aime pas non plus ce verbe-dépenser- dans quelque acception ou contexte que ce soit.

(p. 17)
Commenter  J’apprécie          10
Le ciel de Belgrade est haut et vaste, changeant mais toujours beau(...)
Toujours beau et riche, comme pour dédommager cette ville étrange de tout ce qui lui manque et la consoler de ce qui ne devrait pas s'y trouver.
Commenter  J’apprécie          100
En effet, on a toujours une bonne raison de pleurer et rien n’est plus doux que de se lamenter sur le malheur des autres.
(page 209)
Commenter  J’apprécie          366
Le pont paraissait interminable et irréel, ses extrémités se perdant dans la brume laiteuse et ses piles sombrant à leurs bases dans les ténèbres ; un côté de chaque pile et de chaque arche était violemment éclairé, tandis que l’autre était dans une totale obscurité ; ces surfaces lumineuses et sombres se brisaient et se recoupaient suivant des contours nets, transformant le pont en une étrange arabesque née du jeu éphémère de la lumière et de l’ombre.
(page 177)
Commenter  J’apprécie          220
Je ne sais par quelle illusion des sens, ou quelle insondable logique j'ai toujours eu l'impression que les vergers escaladent les hauteurs et que les cimetières les descendent.
Commenter  J’apprécie          80
Mais partout et chez tous, la peur régnait. Les Autrichiens qui faisaient leur entrée avaient peur des embuscades. Les musulmans avaient peur des Autrichiens, les Serbes des Autrichiens et des musulmans. Les Juifs craignaient tout le monde car, surtout en temps de guerre, tout le monde est plus fort qu’eux.
(page 148)
Commenter  J’apprécie          260



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Ivo Andric (735)Voir plus

Quiz Voir plus

Alex de Pierre Lemaitre : l'avez-vous lu ?

Le personnage principal est :

une femme
un homme

8 questions
670 lecteurs ont répondu
Thème : Alex de Pierre LemaitreCréer un quiz sur cet auteur

{* *}