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Critiques de J.M. DeMatteis (72)
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Journey into Mystery: The Manchester Gods

Ce tome contient les épisodes 639 à 641 (parus en 2012) de la série "Journey into Mystery", ainsi que le numéro annuel 1 de la série "The mighty Thor" (également paru en 2012). Il fait suite à The Terrorism myth (épisodes 632 à 636).



Épisodes 639 à 641 "The Manchester gods" (scénario de Kieron Gillen, illustrations de Richard Elson) - Quelque part dans Otherworld (la dimension des mythes et légendes de la Grande Bretagne, sous la responsabilité de l'escadron des Captian Britain) est apparu un nouveau groupe de dieux : les Manchester Gods. La cohabitation avec Merlin, Arthur et les autres est placée sous le signe de la guerre et de l'extermination des anciens par les nouveaux. Un émissaire d'Otherworld vient demander l'aide du panthéon nordique, mais la Mère toute puissante d'Asgard refuse d'intervenir dans une guerre interne à un panthéon, conformément aux traités en vigueur. Par contre, elle accepte de fermer l'oeil sur une opération clandestine réalisée par Loki et Leah. En route pour Otherworld.



Parfait ! En 3 épisodes, Kieron Gillen raconte une aventure de Loki, avec un coup tordu en bonne et due forme, un conte avec de la magie et des légendes, une histoire d'amitié, une fable sur l'évolution de la nature des légendes, un humour élaboré et pertinent (avec un clin d'oeil au collectif Anonymous), une petite virée touristique en Grande Bretagne. Du début jusqu'à la fin, le lecteur se laisse emmener dans une guerre mythologique, facile à comprendre, facile à suivre, avec plusieurs surprises. Loki combine ses 2 aspects : le jeune adolescent plein de vie et d'optimisme dépassé par l'ampleur du conflit des adultes, et le dieu de la malice, espiègle sans être méchant. Il n'y a aucun temps mort et le récit est accessible à tous les lecteurs, avec plusieurs moments gratifiants pour les lecteurs fins connaisseurs de l'univers partagé Marvel.



Les 3 épisodes sont illustrés par Richard Elson qui avait déjà illustré des épisodes des 2 tomes précédents. Son style s'accorde parfaitement avec le ton donné au récit par Gillen. Il retient quelques apparences enfantines, tel le représentant des dieux de Manchester qui fait penser à un conte pour enfant. Il y a donc dans les visuels le rappel du coté encore enfantin de cette incarnation de Loki, ainsi qu'à un autre niveau le principe qu'il s'agit d'une histoire pour lecteurs de tout âge (ça rend quand même l'apparence de Daimon Hellstrom peu crédible). Elson sait rendre le visage de Loki entre l'enfance et l'adolescence. Il transcrit avec nuance les émotions sur les visages à commencer par ceux de Loki et Leah. Il est aussi à l'aise pour les décors dans le monde magique que pour ceux dans le monde normal. Il représente les arrière-plans dans la majeure partie des cases. Les illustrations d'Elson sont à la hauteur et à l'unisson du scénario. La mise en couleurs d'Ifansyah Noor rehausse les visuels, sans les écraser. À nouveau les couvertures de Stéphanie Hans combinent la majesté mythologique du récit, avec le caractère espiègle de Loki.



Avec cette histoire, Kieron Gillen et Richard Elson réalisent une histoire parfaite de cette incarnation de Loki originale, très attachante, sans trahir le personnage, avec plusieurs niveaux de lecture. 5 étoiles. La suite des aventures de Loki par Gillen se poursuit et s'achève dans Everything burns (épisodes 18 à 22 de "Mighty Thor", et 642 à 645 de "Journey into Mystery").



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Annual 1 "Scrier's game" (scénario de JM DeMatteis, illustrations de Richard Ellson) - Quelque part au fond de l'espace, une entité cosmique connue sous le nom de Scrier confronte Galactus pour lui demander de lui prêter le Silver Surfer, le temps d'une mission. Et il obtient gain de cause. Sur Terre, à Broxton dans l'Oklahoma, Donald Blake voit Rachel (la vétérinaire de la ville) se transformer en silhouette d'énergie et s'envoler vers les cieux. Après s'être transformé en Thor, il la suit pour découvrir qu'avec d'autres individus transformés de la même manière, elle s'en prend à lui. Peu de temps après, Scrier explique à Thor et au Silver Surfer que la relocalisation d'Asgard à Broxton a fragilisé les barrières entre les dimensions et qu'une entité appelée Other s'apprête à s'introduire dans notre dimension.



Cette histoire n'a donc pas de rapport avec les tribulations de Loki (si ce n'est qu'elle est également dessinée par Richard Elson). Elle a été incluse dans ce tome pour augmenter la pagination. Néanmoins en découvrant l'identité du scénariste (JM DeMatteis, auteur de Kraven's Last Hunt et Moonshadow, parmi tant d'autres), le lecteur peut se dire qu'il ne s'agit pas d'un simple bouche-trou. Le début montre que DeMatteis a opté pour un récit métaphysique mettant en scène l'entité Oblivion évoquant la fin de toutes choses (apparue pour la première fois dans la minisérie Iceman du même DeMatteis). Le début est très prometteur avec un premier niveau de lecture de type aventure où Thor et Silver Surfer se battent contre Other aux cotés de Scrier à qui ils ne peuvent pas faire confiance, et un deuxième niveau de lecture où Scrier, Other et Oblivion sont des concepts métaphysiques s'opposant. Les illustrations de Richard Elson sont là aussi très efficaces et évocatrices de l'espace intersidéral, avec de belles décharges d'énergie cosmique, et des affrontements bien chorégraphiés. Et puis en cours de route, DeMatteis semble oublier ses différents niveaux de signification pour effectuer un mélange indigeste dans lequel les fils métaphysiques semblent se perdre avant d'aboutir à une forme de conclusion.



DeMatteis et Elson proposent un récit ambitieux sur la vanité des efforts face à l'assurance du néant final, et l'importance de l'action pour exister, sans réussir à achever leur propos. 3 étoiles.
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Justice League International vol. 5

Ce tome fait suite à Justice League International 4 (épisodes 23 à 30 de la série JLI) ; il contient les épisodes annuels 2 & 3 de la JLI, ainsi que les épisodes 1 à 6 de la série dérivée Justice League Europe (débutée en 1989). Tous les scénarios sont de Keith Giffen et les dialogues de John-Marc DeMatteis.



Annual 2 (Dessins de Bill Willingham et encrage de Joe Rubinstein) - Le Joker propose à Rumaan Harjavti (dictateur de Bialya) un échange de bons procédés : Joker élimine la JLI pour le compte d'Harjavti, et ce dernier fournit au Joker l'identité secrète de Batman. Le résultat est très, très poussif, avec une bonne idée qui est un barbecue dans le jardin de Scott Free et Barda. Pour le reste, les scènes s'enchaînent avec une répartie à coté de la plaque suivie par une répartie pas drôle. Les dessins renvoient le lecteur aux mauvais comics des années 1980. 1 étoile.



Annual 3 - Maxwell Lord emmène les membres de la JLI faire le tour des différentes ambassades, pendant qu'une délégation de KooeyKooeyKooey essaye de les rattraper avec Martian Manhunter pour leur proposer de faire de leur île une nouvelle ambassade. 2 étoiles pour des gags répétitifs et des dessins trop appliqués. Dans la deuxième histoire, Martian Manhunter fait équipe avec Batman pour essayer de savoir qui a tué son ex-partenaire. 4 étoiles pour l'histoire car JM DeMatteis maîtrise le personnage de J'onn J'onzz comme peu de scénaristes, 1 étoile pour les illustrations qui semblent à peine d'un niveau professionnel.



JLE (épisodes 1 à 6, dessins de Bart Sears, encrage de Pablo Marcos, remplacé par Josef Rubinstein pour l'épisode 5) - Suivant le principe d'une Justice League internationale, Maxwell Lord a décidé d'implanter une équipe à demeure à Paris, dans un bel hôtel particulier à proximité de la Tour Eiffel. Cette équipe se compose initialement de Flash (Wally West), Power Girl (Kara Zor-L), Metamorpho (Rex Mason amnésique après les événements de Invasion : Secret No More), Rocket Red (Dmitri Pushkin), Animal Man (Bernhard Buddy Baker), Elongated Man (Ralph Dibny) accompagné par sa femme Sue, Catherine Cobert (la civile qui assure les relations publiques de l'équipe) et Captain Atom (Nathaniel Christopher Adam, chef inexpérimenté de cette équipe). Wonder Woman n'apparaît que le temps de quelques pages dans le premier épisode, pour ne jamais redonner signe de vie.



Les 4 premiers épisodes sont consacrés à résoudre une intrigue secondaire développée dans les précédents tomes de la JLI : les Global Guardians (ex-équipe de superhéros européens, dissoute du fait de la création de la JLI à qui les nations Unies ont accordé leur soutient financier, leur retirant par là même aux Global Guardians) ont décidé de reprendre leur place d'équipe officielle avec l'aide de Queen Bee, une femme fatale pour qui la fin justifie tous les moyens.



Dans l'épisode 5, Sapphire Stagg (la femme de Rex Mason) vient le retrouver. Problème : Metamorpho n'a gardé aucun souvenir d'elle, et en plus Java (son nouveau mari) n'est pas très content d'apprendre que Mason n'est finalement pas aussi décédé que l'avaient annoncé les journaux. Pire encore, le beau père débarque également à l'ambassade parisienne de la JLE.



Épisode 6 - Wally West, Kara Zor-El, Nathaniel Adam, Rex Mason et Buddy Baker suivent des cours du soir de français pour essayer de mieux s'intégrer en France. Les membres de l'Injustice League (Major Disaster, Multi-Man, Big Sir, Clue-Master et Clock King) ont choisi d'assister au même cours du soir.



On prend les mêmes et on recommence : Keith Giffen pour une intrigue bien linéaire et peu palpitante, DeMatteis pour dialogues trop communs. L'idée de créer une deuxième équipe de Justice League semblait solide au départ, mais à la lecture il s'avère que Giffen n'a pas grand-chose à dire sur ces personnages et ses scénarios s'avèrent vains. DeMatteis est passé d'une écriture pleine d'esprit à des vannes plus basiques et plus répétitives. L'esprit de la JLI ne subsiste qu'au travers de 3 blagues répétées jusqu'à la nausée : les téléporteurs qui fonctionnent mal, les centres d'intérêt de Wally West limités à l'argent et à la drague, et Captain Atom manquant d'assurance. Ça fait peu de matière pour tenir pendant 6 épisodes. Même pour l'apparition de l'Injustice League, Giffen et DeMatteis resservent les mêmes blagues que dans le tome précédent de la JLI. Du coup, le lecteur a surtout le sentiment que ces personnages sont trop superficiels pour nourrir les scènes de sitcom. L'humour tombe à plat et les intrigues s'embourbent dans les machinations à deux balles de Queen Bee. Il faut attendre l'épisode 5 pour que les malheurs de Rex Mason provoquent des sourires du fait de leur énormité et du caractère assez particulier de Sapphire Stagg.



Bart Sears affiche déjà un style marqué, pas toujours agréable à l'oeil. Il est assez régulièrement fâché avec l'anatomie (en particulier des jambes vraiment trop longues). Il a une curieuse façon de représenter les chevelures, avec une épaisseur déconcertante de cheveux au niveau du sommet du crâne. Il ajoute beaucoup de rides sur les visages pour accentuer les expressions ; il m'a fallu un peu de temps pour m'y habituer mais ce n'est pas si désagréable que ça en fin de compte. Ce style graphique prend tout son ampleur pour les personnages éloignés de l'être humain normal, comme la surface brillante de Captain Atom ou les textures improbables de Metamorpho. Les scènes d'action sont lisibles sans être mémorables. Au final, je préfère de loin l'encrage de Josef Rubinstein (très traditionnel) qui ramène l'exubérance de Sears dans des limites acceptables, par rapport à Pablo Marcos qui donne parfois l'impression de partir dans des directions conflictuelles.



Les bons moments de cette équipe européenne étaient trop espacés à mon goût, noyés dans des histoires peu passionnantes avec des dessins pas toujours digestes. DC Comics continue de rééditer les aventures de la JLI dans un sixième tome (JLI 6, épisodes de JLA 31 à 35 et de JLE 7 à 11), avec les débuts d'un petit jeune nommé Adam Hughes.
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Spider-Man, tome 1 : La dernière chasse de Kr..

Ce recueil constitue une histoire complète parue à l'origine en 1987 dans Web of Spider-Man 31 & 32, Amazing Spider-Man 293 & 294, et Spectacular Spider-Man 131 & 132. Ce tome comprend les 6 épisodes en question.



Sergei Kravinoff est un criminel qui s'habille d'un pagne en léopard et d'un gilet sans manche et se fait appeler Kraven the Hunter. Ce personnage est apparu pour la première fois dans Amazing Spider-Man 15 en août 1964. Il possède des connaissances en herboristerie qui lui permettent de concocter des potions ayant différents effets : poison, paralysie, augmentation de la force ou de l'acuité des sens... Dans cette histoire, Kraven abat Spider-Man d'une balle de fusil de chasse, il le fait enterrer et il revêt l'habit du superhéros pour prendre sa place.



J.M. DeMatteis est un grand professionnel des comics, autant pour des histoires de superhéros (Batman : absolution & Justice League International), que pour des bandes dessinées plus personnelles (The Compleat Moonshadow & Brooklyn Dreams). Mike Zeck est essentiellement connu pour avoir illustré The Punisher : Cercle de sang. Il est ici encré par Bob McLeod, un autre professionnel vétéran des comics.



La particularité de cette histoire de Spider-Man est qu'elle a pour principal personnage le criminel et que Peter Parker ne débite pas de blagues. Il s'agit d'une histoire très sombre qui a pour principaux thèmes l'introspection de Kravinoff et l'impact prychologique pour Peter Parker d'avoir été enterré vivant. J.M. DeMatteis nous fait pénétrer dans la psyché de Sergei sous forme de flux de pensées. Il nous invite à adopter le point de vue de Kraven sur la réelle signification des combats qui l'opposent à Spider-Man et sur le poids de son héritage familial. Du coté de Peter Parker, DeMatteis nous montre à la fois la peur instillée par Kraven et l'incapacité totale à déchiffrer et comprendre les actions de Kraven.



À l'évidence, il ne s'agit pas d'un comics pour les plus jeunes et il ne rentre pas dans le moule des aventures habituelles du tisseur de toiles. DeMatteis va même jusqu'à jouer avec l'idée de l'araignée comme totem de Peter Parker (thème qui sera repris et développé plus tard par Straczynski) et comme symbole de l'échec de l'être humain. Les illustrations de Mike Zeck sont un peu datées années 80 et souffrent à plusieurs reprises d'un manque criant d'arrière plan. D'un autre coté le rendu des personnages est très soigné avec des relents de Joe Kubert qui leur donnent une intemporalité et une force peu commune.



Pour les fans, cette histoire se classe parmi les meilleurs classiques de Spider-Man. Effectivement les 2 créateurs réussissent le pari de rendre Sergei Kravinoff humain, crédible, tourmenté et étrangement lucide. Peter Parker a rarement été aussi vulnérable et héroïque. Mary Jane (les 2 étaient jeunes mariés à ce moment) est une femme amoureuse mais pas mièvre. Ce qui m'arrête dans l'attribution d'une cinquième étoile est ce manque de décors très déconcertant et le mode narratif qui ne va pas assez loin dans l'utilisation du flux de pensées désordonnées. L'exécution de l'histoire manque d'un soupçon de savoir faire pour atteindre tous les buts ambitieux qu'ils s'étaient fixés. Cette histoire a eu droit à un épilogue : Soul of the Hunter (en anglais).
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Spécial DC, tome 4 : Batman & Spider-Man

Il s'agit d'une histoire complète en 1 tome, initialement parue en 1997, écrite par JM DeMatteis, dessinée par Graham Nolan, encrée par Karl Kesel, et mise en couleurs par Gloria Vasquez. Spider-Man et Batman s'étaient déjà croisé une fois dans Disordered minds (1995, en VO), également écrit par JM DeMatteis.



Un télévangéliste est en train d'intervenir à la télévision, évoquant une multitude de désastres : tremblement de terre au Sud de l'Inde, inondation dans le Midwest, attentat terroriste dans une mosquée à Jérusalem. Il conclut en expliquant qu'un sauveur arrive et en montrant son tatouage dans la paume de sa main : celui de Ra's al Ghul. Dans sa cité au Tibet, ce dernier se recueille devant les dieux de plusieurs religions pour chasser ses doutes. À New York, Peter Parker souhaite une bonne nuit à Mary Jane, et Spider-Man s'en va se battre contre des hommes de main, interrompant une transaction illégale. À Montmartre, Wilson Fisk retrouve enfin Vanessa, son épouse très malade. À Gotham, Batman a une rencontre orageuse avec Talia (la fille de Ra's al Ghul) qui va ensuite rencontrer Wilson Fisk pour affaires. Batman se rend également à New York.



La première page est aussi parlante pour le lecteur découvrant l'univers de Batman que pour celui le connaissant de longue date. Ra's al Ghul est un terroriste écologique qui a la conviction qu'il faut épurer les civilisations actuelles, pour pouvoir en installer une plus respectueuse de son environnement. Et pour ce faire, il n'y a pas 36 moyens : il faut exterminer la majeure partie de la population terrestre, grâce à des cataclysmes de grande échelle. Le lecteur s'attend alors à quelques discours bien sentis sur les civilisations humaines cancéreuses pour la planète Terre. Pas du tout, JM DeMatteis raconte une bonne vieille histoire de superhéros, sur base de récit d'aventure du dix neuvième siècle, avec une pincée de James Bond, et un peu d'amour.



Côté superhéros, DeMatteis évite certains clichés (pas de bagarre due à une incompréhension entre Batman et Spider-Man), mais en utilise d'autres d'un autre âge (Batman et Sipder-Man enlevant des masques avec lesquels ils s'étaient fait passer pour des hommes de main, et révélant leur costume en dessous, cape comprise, bon retour dans les aventures de Batman des années 1960). Peter Parker est le mieux traité des 2 superhéros : sa réelle connivence avec Mary Jane, sa personnalité qui transparaît bien (ses blagues pour se détendre, sa volonté de bien faire, c'est lui qui convainc Batman de travailler ensemble), et un ou deux détails extraits de sa série (un cadre avec sa photographie de mariés, où apparaît Mary Jane dans sa robe aisément reconnaissable, créée par Willi Smith, styliste de mode). Le personnage de Batman est traité de manière plus superficielle, sans apparition d'Alfred, avec une relation stéréotypée entre Talia et lui, sans moment où il brille de mille feux.



Côté récit d'aventure, DeMatteis puise son inspiration dans les voyages extraordinaires emmenant les 2 superhéros dans une cité reculée et ignorée au fin fond de l'Himalaya. Le lecteur a droit bien sûr au voyage périlleux dans la neige et à l'avalanche obligatoire. Graham Nolan dessine tout ça de manière peu palpitante, et ne se risque même pas à donner une vue d'ensemble du royaume de Ra's al Ghul. Le récit s'achève dans une immense base souterraine bourrée de technologie, tout droit sortie d'un film de James Bond des années 1970, là encore avec des dessins banals. Parmi les clichés usés jusqu'à la corde, et un peu infantiles, le lecteur trouvera le signe de reconnaissance peu crédible (le tatouage représentant une tête de démon, symbole peu crédible pour un sauveur, ça ne met pas en confiance), Ra's al Ghul qui laisse ses sbires s'occuper de Batman et Spider-Man (alors que tout le monde sait qu'ils ne feront pas le poids), et les héros qui arrivent juste au bon moment pour empêcher les méchants d'appuyer sur le bouton déclenchant les cataclysmes.



Les dessins de Scott Hanna s'inscrivent dans un registre assez réaliste, un peu simplifié, avec des tics propres aux comics (en particulier des expressions de visage systématiquement exagérées), et une bonne densité d'arrière plan. En prêtant attention aux images, il est possible de repérer quelques détails plus personnels. Il y a la façon dont Hanna représente le Kingpin, qui est calquée sur celle de John Romita senior. L'arrière plan de la scène à Paris ressemble vraiment à une rue de Montmartre. Mary Jane porte des pantoufles en forme de patte de tigre (trop mignon). Batman porte un costume sans slip par-dessus (des années avant New 52).



L'un des thèmes sous-jacents du récit réside dans les différentes formes d'amour entre les personnages, malgré les défauts du partenaire. À l'évidence, DeMatteis privilégie le couple Mary Jane / Peter comme modèle de compréhension et d'amour respectueux de l'autre. Les 2 séquences mettant en scène ce couple montre des personnes différentes acceptant le caractère différent de son conjoint. Malheureusement, il a la main plus lourde en ce qui concerne les autres couples. La relation Talia / Batman en reste aux stéréotypes de "ils s'aiment, mais tout les oppose". DeMatteis s'en tient à Batman qui refuse de se compromettre avec la fille de son ennemi, et Talia qui refuse de renier son père. La relation Wilson Fisk / Vanessa reste également en surface, avec Fisk possessif, et Vanessa dégoûtée par ses activités criminelles mais amoureuse quand même. La relation fille / père entre Talia et Ra's al Ghul est du même niveau.



Cette deuxième rencontre entre Batman et Spider-Man écrite par JM DeMatteis s'avère un peu plus convenue que la première. La thématique de la relation amoureuse en dépit des défauts du partenaire n'est pas aussi bien développée que celle de l'entraide dans la première rencontre. Les dessins sont moins criards que ceux de Bagley, mais toujours avec la même touche infantile (même l'avion personnel de Ra's al Ghul ets logotisé avec une tête de démon, discrétion assurée). Bien que cette histoire ait été publiée par DC Comics, Spider-Man est plus à l'honneur que Batman, et le véritable personnage principal finit par être Wilson Fisk.
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Forever evil : L'ombre du mal (1/3)

Les intrigues de ces récits sont assez prenants malgré quelques longueurs par moment.

Mais bon, cela reste du bon divertissement toutefois.
Lien : http://www.sceneario.com/bd_..
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Stardust Kid

Ce tome contient un récit complet indépendant de tout autre. Il reprend les 5 épisodes de la minisérie, initialement publiés de 2005 à 2007 par Boom Studios, écrits par John-Marc DeMatteis, dessinés et encrés par Mike Ploog, et mis en couleurs par Nick Bell & Sumi Pack.



Dans une ville de moyenne importance aux États-Unis, un cocon apparaît au milieu d'un tronc d'arbre situé dans le Park Wilde une griffe commence à déchirer l'enveloppe dudit cocon dans un appartement d'un immeuble non loin du parc, le père de la famille DiMarco est en train de faire la vaisselle, pendant que la mère finit de débarrasser. Cody (le fils aîné, à peine adolescent) annonce qu'il va faire un tour au parc. Sa jeune sœur Katherine Mary se moque de lui en indiquant qu'il va rejoindre son copain Paul Brightfield. La mère accepte en lui demandant d'être prudent. Alors qu'il sort, la voix du narrateur donne des renseignements sur Paul Brightfield, supputant sa potentielle dangerosité, sa véritable nature, sur le fait que la mère de Cody ne lui fait pas confiance. En se rendant au parc, Cody DiMarco passe devant sa copine Alana et son petit frère Nathaniel. Il décline son invitation à venir regarder un film chez eux, préférant a compagnie de son copain Paul, au grand dam d'Alana qui est son ami d'enfance.



Cody Dimarco arrive au parc et retrouve son ami Paul Brightfield, pendant qu'Alana pense à Cody et à la manière dont il s'est éloigné d'elle. En suivant Paul, Cody passe au travers d'une mince couche de terre, et se retrouve dans l'antre souterrain de son ami. Il s'installe alors confortablement pendant que Paul (ayant pris l'apparence d'un gros mille-pattes multicolore) lui raconte une histoire. Dans le même temps, le narrateur confirme que Paul Brightfield n'est pas un être humain, mais un mirage 3D composé de rêves errants et de poussière d'étoile. Il évoque également la manière dont Paul est apparu sous différentes formes au fil des années, pour approcher progressivement Cody de plus en plus près, comment cette entité dépourvue de forme a fini par prendre celle de Paul Brightfield. Puis le narrateur laisse la place au Livre qui raconte comment les créatures magiques ont peu à peu disparu de la Terre, jusqu'à qu'à ce qu'il n'en reste plus que 2 : Paul et son Miroir, changeant de forme au gré des siècles et de leur fantaisie. Paul finit par proposer à Cody de sortir et de marcher un peu dans la pénombre du soir. La créature a fini de déchirer son cocon, elle est libre de se promener dans le parc à sa guise.



John-Marc DeMatteis est un scénariste de comics à la carrière impressionnante, aussi bien capable d'écrire des histoires de superhéros inoubliables (par exemple Spider-Man: La Dernière Chasse De Kraven) que des récits personnels très ambitieux comme Moonshadow avec Jon J. Muth ou Blood, livre 1 avec Kent Williams. Mike Ploog est un dessinateur de comics, et il a déjà collaboré avec JM DeMatteis sur la série de livres Abadazad. En regardant la couverture, et en découvrant la nature des protagonistes, le lecteur comprend rapidement que les 2 créateurs ont réalisé un ouvrage tout public, plus particulièrement à destination d'un public relativement jeune. Il constate également que chacun des 5 épisodes est assez copieux, puisque le récit comprend une trentaine de pages à chaque numéro. Il remarque rapidement que la voix du narrateur intervient de manière très régulière dans des cartouches de texte assez nombreux, et même complétés par d'autres remarques formulées par une autre voix, dans des cartouches avec un fond d'une couleur différente et complétés à quelques reprises par des remarques dans une police plus petite. Bien évidemment, ces cartouches de texte ont pour conséquence immédiate de rendre la lecture plus lente. Néanmoins, ils apportent des informations supplémentaires, et même de temps à autre, le texte reprend un élément déjà montré dans le dessin qu'il accompagne. Par le biais de la voix du narrateur, JM DeMatteis développe l'état d'esprit d'un personnage ou d'un autre, explicitant son émotion ou ce qui le met dans un tel état.



Le scénariste se sert également de cette voix supplémentaire pour s'adresser directement au lecteur, souvent de façon facétieuse. En particulier, il change sciemment de temps dans un même paragraphe passant du passé au présent assez régulièrement. Il ne manque pas de le faire remarquer au lecteur et de mettre ça sur le compte d'une perception du temps différente de celle d'un être humain. Même si DeMatteis donne l'impression de jouer sur ce changement intempestif de temps qui défie les règles de la concordance des temps, il s'avère qu'il y a bel et bien une explication qui est intimement liée au caractère intemporel ou en tout cas pérenne d'un récit. Il joue également sur l'identité non dévoilée de ce narrateur, ainsi que sur celle de celui qui se permet de faire des remarques en coin. Malgré tout, les propos de cette voix supplémentaire restent dans un registre plus explicatif que réflexif. Il faut attendre le dernier épisode pour qu'elle établisse des constats plus introspectifs sur la condition humaine, des motivations cachées, ou des convictions qui défient les lieux communs.



Dans sa forme, ce récit reprend les étapes du voyage du héros avec des compagnons en qui il peut avoir confiance. Effectivement la narration reste au niveau de Cody DiMarco, de son amitié indéfectible pour Paul Brightfield et de la confiance qu'il lui accorde, de son amitié pour Alana (mais qui passe après celle pour Paul) et de sa relation affective pour sa petite sœur. Pour autant, Alana, Katherine Mary et Nathaniel ne disposent pas d'une personnalité développée. Du fait de sa véritable nature, Paul Brightfield relève plus du concept que de l'individu. Le lecteur découvre donc chaque scène par les yeux de Cody qui se laisse le plus souvent guider par les indications de Paul ou des créatures adultes qu'il rencontre. L'intrigue amène Cody et la petite troupe à interagir avec des créatures hautes en couleurs, soit bienveillantes, soit malveillantes, révélant éventuellement par la suite une trahison ou un changement d'allégeance. Un lecteur adulte éprouve de fortes difficultés pour se projeter dans un personnage aussi générique, ou pour s'intéresser à des rebondissements survenant au gré de la fantaisie du scénariste, sans beaucoup d'impact émotionnel.



Dans l'introduction, John-Marc DeMatteis raconte la genèse un peu compliquée du récit, ayant commencé lorsqu'il racontait des histoires à son jeune fils. Il explique le plaisir qu'il a eu à collaborer avec Mike Ploog dont les dessins ne sont pas pollués par les tics graphiques spécifiques aux récits de superhéros. Effectivement, Mike Ploog se tient à l'écart des individus bodybuildés, et met en scène des enfants qui ressemblent à des enfants, avec une morphologie d'enfant (différenciée suivant qu'il a plus ou moins de 10 ans), des expressions du visage enfantines, des vêtements de jeune, etc. Il réalise des traits de contours un peu lâches dans les arrondis ce qui donne plus de souplesse aux silhouettes de Cody, KM, Alana, Nathaniel et Paul. Il agrandit un peu leurs yeux pour faire passer plus d'émotion, essentiellement lors d'un étonnement ou sous l'effet de la peur. Le lecteur se rend compte que Mike Ploog est adepte de la bouche ouverte pour ses personnages avec une régularité qui dépasse les 50%, reflétant un manque de nuances dans les expressions. En revanche les postures des personnages sont beaucoup plus naturelles et expressives. Il se montre très convaincant avec les différentes créatures merveilleuses et surnaturelles. L'artiste sait croquer des bestioles et une sorcière aux formes inventives, avec une texture presque palpable pour leur peau ou leur parure. Le lecteur peut voir que ces créatures comprennent une discrète touche d'exagération qui les rend tout public, sans agressivité méchante.



Au départ, Mike Ploog doit représenter un environnement normal de petite ville. Il intègre suffisamment de détails pour donner un cachet spécifique à la rue et au parc. Puis l'action du récit se déroule dans un monde fantastique, et il s'amuse beaucoup avec les arbres torturés, la végétation à demi vivante, les flammes qui dansent. Il ne crée pas vraiment un environnement consistant et pensé à l'échelle de la localisation spatiale relative des différents endroits, mais les éléments de décor sont consistants d'un endroit à l'autre. À plusieurs reprises, il doit également changer de forme narrative, en passant d'une bande dessinée traditionnelle, à des illustrations pour les cellules de texte, voire même des fac-similés des pages d'un livre. Le lecteur apprécie la fluidité de la narration visuelle pour ces 3 formes, ainsi que les mises en page changeantes.



Au fur et à mesure de son avancée, le lecteur se rend compte que JM DeMatteis a souhaité rendre son ouvrage accessible au plus grand nombre et en particulier aux enfants. Le lecteur peut parfois ne pas se sentir concerné par la narration qui en découle, avec une trame assez simpliste. Il se rattrape un peu avec les cellules de texte et les remarques du narrateur, mais là encore ses observations restent souvent dans le constat, sans beaucoup de réflexion. Même la remarque sur la nature malléable et relative du temps (entre le passé, le présent et le futur) ressemble plus à une blague récurrente, qu'à une réflexion sur sa nature. Malgré tout, il apparaît que cette remarque finit par prendre un autre sens quand on l'applique à l'intemporalité d'un récit. En outre, le lecteur se rend compte que la stratégie de Cody DiMarco face à la méchanceté de son ennemi, et les conseils de Paul Brightfield ne vont pas dans le sens de l'affrontement, mais prennent position pour une autre posture, plus adulte et plus humaniste.



Le lecteur adulte ressort de ce tome avec un sentiment mitigé. Il a pu apprécier l'originalité des dessins de Mike Ploog, et sa capacité à s'adapter aux changements de styles narratifs, mais il a également constaté qu'ils restent dans un registre assez classique, empruntant beaucoup à l'imagerie d'Alice aux pays des Merveilles. De la même manière, il a pu apprécier la sophistication de la narration de John-Marc DeMatteis, avec les observations du narrateur entremêlées à l'intrigue, mais avec une volonté de rester très concret qui ne permet pas au récit de s'envoler vers la poésie ou l'onirisme.
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Récit Complet Marvel, tome 13 : Iceberg

Ce tome comprend une histoire complète consacrée au personnage d'Iceman (Iceberg en français) qui ne nécessite pas de connaissance particulière du personnage pour être comprise. Il contient les 4 épisodes de la minisérie, initialement parue en 1984/1985, écrite par John-Marc DeMatteis, dessinés par Alan Kupperberg, encrés par Mike Gustovitch, avec une mise en couleurs réalisées par Bob Sharen. Les couvertures ont été dessinées par Mike Zeck, encré par John Beatty, sauf celle de l'épisode 2 qui est encrée par Bob McLeod. Ce tome contient également l'histoire consacrée à Iceman parue dans Bizarre Adventures 27, écrite par Mary Jo Duffy, dessinée par George Perez et encrée par Alfredo Alcala. Cette deuxième histoire est en noir & blanc avec des nuances de gris.



Iceman 1 à 4 - L'histoire commence étrangement avec un peuple réduit en esclavage sur une planète extraterrestre. Dans une forteresse, un grand individu encapuchonné, assis sur un trône, missionne 2 individus The Idiot & White Light, pour une tâche non explicitée. Pendant ce temps-là, Iceberg arrive à Port Jefferson, à Long Island. Il repère sa cousine Mary dans la rue et descend la prendre avec une piste de glace qu'il a générée. En papotant avec elle chemin faisant sur la piste glacée, il remarque une belle jeune femme en contrebas sur un trottoir. Il va se présenter à elle, en se vautrant à ses pieds. Elle se prénomme Marge.



Iceman reprend son identité humaine de Robert Drake et va saluer ses parents chez eux : Madeline & William Drake. Comme à leur habitude, ils se montrent très aimants, mais aussi un peu trop envahissants, comme si leur fils était encore un enfant. Il est venu leur rendre visite à l'occasion de la fête organisée par ses parents pour le départ à la retraite de son père. Pendant la soirée, il se fâche avec son cousin Joe qui lui a pris la tête sur la poursuite de ses études. Il part se promener et croise à nouveau Marge, avec qui il commence à papoter.



A priori, cette histoire n'a pas grand-chose pour attirer le chaland. Pour commencer, elle a été commanditée par les responsables éditoriaux Marvel pour étoffer le nombre de miniséries offertes à la vente. À la même époque, Hank McCoy a droit à sa propre minisérie tout aussi sortie de nulle part : Beauty and the Beast, écrite par Ann Nocenti, dessinée par Don Perlin. Le lecteur sent bien que Marvel essaye de capitaliser sur les X-Men de l'équipe originelle, sans encore avoir trouvé la bonne formule. Ça viendra plus tard avec la création de X-Factor, c’est-à-dire la reformation de l'équipe originelle, mais c'est une autre histoire. En attendant, John-Marc DeMatteis a déjà rapatrié les laissés pour compte (Angel, Beast, Iceman) dans l'équipe des Defenders, époque New Defenders.



Ensuite, cette histoire envoie Iceman dans une banlieue résidentielle, pas vraiment un endroit de rêve pour des aventures de superhéros. En plus il est rabaissé à l'état de grand enfant par la présence de ses parents. La narration fait un peu datée : bulles de pensées à gogo, explications très détaillées, rappel des principaux événements en début de chaque épisode, alors qu'il s'agit d'une minisérie en 4 épisodes. Iceman se bat contre des supercriminels hauts en couleurs et ridicules, suite à un quiproquo téléphoné. Le grand méchant semble habillé d'une grande robe, avec une sorte de torchon sur la tête et une ceinture de crâne, juste pour faire macabre. Alan Kupperberg réalise des dessins descriptifs un peu appliqués, par toujours très jolis, avec une forme de simplification qui les destine à de jeunes adolescents, et parfois des postures évoquant vaguement celles spécifiques de Steve Ditko. L'intrigue en elle-même montre Iceman enlevé par les agents d'Oblivion, par erreur, projeté dans le passé, puis menacé d'être effacé de la réalité, suite à une méprise. Ce récit est très loin des aventures traditionnelles contre le supercriminel du mois, et il y règne une atmosphère un peu gentille qui neutralise une partie de la tension dramatique. Bref, le lecteur venu chercher son quota d'action et de combat physique reste sur sa faim, ayant l'impression que les auteurs ont ramené le personnage dans une aventure pour grand adolescent encore sous la coupe de ses parents.



Dans le même temps, le lecteur se rend compte que la narration est dense, chaque épisode nécessitant une fois et demi à deux fois le temps de lecture d'un comics normal. Il note aussi que tout au long de ces 4 épisodes, il a accès au flux de pensée de Bobby Drake, sous la forme de bulles de pensée. Assez taquin, John-Marc DeMatteis fait apparaître que Bobby Drake n'est pas très sûr de lui. Il sent bien qu'il va devoir se justifier auprès de ses parents de ne pas avoir continué ses études de comptable. Il est à la fois content de revoir ses parents, et appréhensif de revenir dans des schémas comportementaux où ils le traitent comme un gamin. Lors de la soirée de départ à la retraite, il répond sèchement à son cousin bien rangé, refusant de se conformer aux attentes très ordinaires de sa famille. Même si la pièce principale de la maison des Drake semble un peu trop spacieuse, Alan Kupperberg sait transcrire l'atmosphère très banale de cette soirée, avec les différents invités sagement bien habillés pour faire honneur au retraité. Même si chaque lecteur n'a pas vécu son cheminement vers l'âge adulte de la même manière, il reconnaît bien là l'un des points de passage obligé : constater que ce que l'on est déjà devenu est différent de ce que sont ses parents, et différent aussi de ce qu'ils avaient imaginé ou envisagé pour leur progéniture.



Du coup, le lecteur ressent rapidement une forte empathie pour ce jeune homme qui essaye de s'émanciper et d'assumer ce qu'il est devenu depuis qu'il a quitté ses parents. Les dessins très pragmatiques de Kupperberg en font un individu normal, très ordinaire ce qui facilite la possibilité pour le lecteur de se projeter dans ce personnage. S'il a déjà lu d'autres récits écrits par John-Marc DeMatteis, il reconnaît bien là la capacité de ce scénariste à aborder des questions spirituelles de manière franche, sans être naïve. Il ressent l'honnêteté de la démarche. De fait, en attaquant le deuxième épisode, il se rend compte que le scénariste continue à développer ce thème : l'évolution de la relation qu'un fils devenu indépendant entretient avec ses parents. Alors que Marge (Margaret) se retrouve en 1892, Bobby Drake se retrouve en 1942, face à ses parents, alors de jeunes adultes entamant leur vie autonome. En ayant en tête le thème principal du premier épisode, cette nouvelle phase de l'aventure fait entièrement sens. Alors que Bobby Drake se plaint que ses parents ne soient pas capables de s'adapter au fait qu'il a grandi et évolué, lui-même doit accomplir l'effort de les regarder comme des individus à part entière, avec leur histoire personnelle. Il doit se montrer capable de modifier l'image qu'il s'est construit d'eux, comme un enfant dépendant des adultes qui l'élèvent. Alan Kupperberg utilise un jeu d'acteurs un peu surjoués, et des expressions des visages exagérées, aboutissant à une dramatisation appuyée. Le lecteur peut y voir une forme de naïveté visuelle, mais aussi la manière dont Bobby Drake regarde les autres, c’est-à-dire avec un état d'esprit encore un peu juvénile.



En progressant dans le récit, le lecteur se retrouve donc face à l'incarnation de l'Oubli dans l'univers Marvel. À nouveau, il peut trouver que John-Marc DeMatteis fait dans la série à budget limité. Ce personnage métaphorique présente une apparence ridicule, avec une tenue fauchée et générique. Il fait pâle figure à côté d'autres incarnations comme Eternity, In-Betweener, Love & Hate ou même les 2 têtes flottantes comme Lord Chaos & Master Order. Mais le scénariste sait faire s'exprimer la saveur de ce concept de 2 manières. Pour commencer, le lecteur se rend compte qu'Oblivion traverse une crise de paternité, avec un de ses enfants qui se rebelle contre lui. La configuration est bien plus drastique que celle entre Bobby Drake et ses parents, puisque la relation qu'entretient avec son rejeton est de nature fusionnelle, au degré le plus élevé. Il établit ainsi une image déformée entre ces 2 relations parentales, permettant de mieux faire ressortir les caractéristiques spécifiques de celle entre Bobby et ses parents. Alan Kupperberg fait le nécessaire pour donner une forme visuelle à cette ultime confrontation, malgré un décor aux abonnés absents. En effet, Oblivion étant une forme d'entropie ultime, dans laquelle tout est voué à l'oubli, son château lui-même n'est fait que de noirceur. Le lecteur est quand même en droit de se demander ce que sont devenus les éléments de décors (par exemple la planète extraterrestre) présents au début du premier épisode.



Il est bien sûr possible de voir une autre métaphore dans cette personnification de l'oubli. De manière littérale, Iceman est confronté à l'oubli. Alors qu'il a fait partie des X-Men d'origine (l'équipe dont la série vend le plus d'exemplaires à l'époque), ce personnage a été écarté et peu de lecteurs se préoccupe de son sort. Lorsqu'il n'est pas sous forme de glace, il se balade en slip blanc et bottes blanches, une tenue des plus ridicules. Il n'a pas de supercriminel charismatique qui lui soit spécifique. Il ne dispose pas d'une vie privée qui fasse rêver. Bref, il n'existe qu'en tant que personnage secondaire, d'abord dans une série qui a périclité (la série initiale Uncanny X-Men), puis dans une équipe faite de bric et de broc (les Champions), puis encore dans une (non-)équipe composée de personnages laissés pour compte, les Defenders. D'une certaine manière, disposer de sa propre minisérie permet à Iceman d'exister et de se confronter à ce risque d'oubli, soit un métacommentaire qui constitue une partie de la minisérie.



Ces 4 épisodes ne payent pas mine et il est à craindre que pour beaucoup de lecteurs, il s'agisse d'une vieillerie ne présentant d'intérêt que comme témoignage d'une époque révolue, à la fois pour la gentillesse de son personnage principal, et pour les dessins un peu datés. Mais pour le lecteur qui fait l'effort de commencer sa lecture, il succombe rapidement au charme désuet de la narration visuelle, et il découvre un regard pénétrant sur un passage de la vie humaine, le moment où parents et enfant doivent réviser la manière dont ils se considèrent. 5 étoiles.



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- Bizarre adventures 27 - Bobby Drake se promène dans le jardin de l'université de Dartmouth, en contemplant les sculptures de glace qui ont été réalisées à l'effigie de nombreux superhéros. Il n'y en a pas de consacrée à Iceman. Il se retrouve bien vite au milieu d'une bataille de boules de neige avec d'autres étudiants. Puis il intervient pour empêcher un cambriolage et un vol de matériels techniques au sein de l'université.



Le lecteur reconnaît bien là la politique de l'éditeur Marvel, d'étoffer la pagination d'un recueil avec un épisode supplémentaire pour pouvoir y accoler un prix plus élevé. Le lien thématique est qu'il s'agit d'une histoire complète en noir & blanc, donc Iceman est le héros. Le lecteur ne reconnaît pas forcément les dessins de George Perez, qu'Alfredo Alcala s'est complètement approprié par le biais de son encrage. Le résultat aboutit à des dessins réalistes, bien peaufinés, mais un peu trop chargés en aplats de nuances de gris. L'intérêt du récit réside entièrement dans l'intrigue, car la personnalité de Bobby Drake ne transparaît pas beaucoup. Mary Jo Duffy a imaginé une forme de cambriolage un peu élaborée. Mais une fois le comment révélé, le récit se limite à une course-poursuite entre Iceman et le criminel, dans les espaces verts enneigés, peu inventive et peu crédible. Le lecteur n'arrive pas à croire qu'une être humain un peu âgé sans aucun pouvoir puisse donner autant de fil à retordre à Iceman. 2 étoiles.
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Defenders Epic Collection: The Six-Fingered..

Ce tome est le sixième dans la réédition intégrale de la série Defenders, sans que tous les précédents ne soient parus. Il comprend les épisodes 92 à 109, initialement parus en 1981/1982, écrits par John-Marc DeMatteis, dessinés par Don Perlin, avec un encrage majoritairement réalisé par Joe Sinnott, aidé par Al Milgrom, Frank Giacoia, Sal Trapani, Jack Abel, Chick Stone et quelques autres. Il comprend également le numéro 101 de la série Marvel Team-Up (écrit par JM DeMatteis, dessiné par Jerry Bingham et encré par Mike Esposito) et le numéro 268 de la série Captain America (écrit par JM DeMatteis, dessiné par Mike Zeck, encré par John Beatty).



Kyle Richmond est en train de donner une conférence de presse au sujet de l'enquête gouvernementale sur ses entreprises quand il est attaqué à la gorge par Mindy Williams, ou du moins un robot à son effigie. Peter Parker (journaliste dans la salle) revêt son costume de Spider-Man et intervient. Par la suite, l'équipe des Defenders doit aller récupérer des fragments de l'entité Eternity disséminés et incarnés en humains sur Terre, puis se battre à nouveau contre Nebulon (un de leur ennemi récurrent). Mais c'est en enquêtant sur la destruction de la maison de Dolly Donahue (l'aide de maison de Patsy Walker) que les Defenders se rendent à Christiansboro en Virginie. Sur pace ils se heurtent à la Gargouille (Isaac Christians), ils affrontent le démon Avarish et ils entendent pour la première fois parler de l'entité appelé Six-fingered-hand. L'équipe se compose alors de Doctor Strange, Hellcat (Patsy Walker), Hellstorm (Daimon Hellsrom) et Valkyrie (Brunnhilde). En cours de route, ils seront rejoints par Hulk (Bruce Banner), Nighthawk (Kyle Richmond), Clea, Devilslayer (Eric Simon Payne), Namor et Silver Surfer (Norrin Radd), et feront même alliance avec Dracula le temps d'un épisode.



Après avoir affronté Six-fingered-hand, Daimon Hellstrom se retrouve prisonnier de son père en Enfer. Eric Simon Payne construit une étrange relation avec Ira Gross, un drogué. Patsy Walker s'interroge sur son véritable père et fait la connaissance de Serina, une jeune enfant cancéreuse. Kyle Richmond se confie aux bons soins de sa garde-malade Luann Bloom car il est paralysé des jambes le jour. Mais les Défenseurs vont encore devoir affronter une organisation gouvernementale officieuse (représentée par Augustus Masters) effectuant des expériences sur Mindy Williams, combattre le démon Null, sauver la femme de Devilslayer d'un sorcier, neutraliser ce qu'il reste de la Couronne du Serpent et défendre l'âme de Valkyrie. Ils bénéficieront de l'aide ponctuelle de Daredevil, puis de Spider-Man.



En plongeant dans ces récits du tout début des années 1980, le lecteur sait qu'il doit s'attendre à une forme narrative encore vieillotte, à destination de jeunes lecteurs. Les couleurs sont vives et à base d'aplats sans variation de nuances. Les bulles de pensée pullulent, les personnages expliquant et commentant ce qu'ils font parfois même à haute voix. Les personnages sont kitchs à souhait, de la tenue moulante jaune vif d'Hellcat, à l'apparence littérale de gargouille d'Isaac Christians, en passant par un personnage qui porte le titre de Fils de Satan (voir Son of Satan Classic). Les différents démons qui viennent tourmenter les Défenseurs, semblent sortir tout droit d'un film de série Z avec des monstres en caoutchouc dont l'apparence évoque une imagerie naïve et désuète interprétant au pied de la lettre des descriptions infantiles. L'apparence de Valkyrie défie toutes les règles du bon goût : des couettes de petite fille avec des cheveux bien blonds, les jambes nues ce qui est étrange pour une guerrière, des sandales à lacet montant de ballerine en lieu et place de bottes de combat, et des bonnets métalliques pour protéger sa poitrine (on ne voit qu'eux puisqu'ils sont argentés sur fond noir).



Ainsi prévenu de la forme naïve du récit, les seuls lecteurs qui restent sont ceux qui ont déjà une affection nostalgique pour les personnages, ou une curiosité sans borne pour les tréfonds historique de l'univers partagé Marvel, ou encore une admiration pour le talent d'écriture de John-Marc DeMatteis. Il leur faut encore s'accommoder des dessins de Don Perlin (né en 1929). Il s'agit d'un artiste confirmé avec déjà 30 ans de carrière quand il prend en charge les dessins de la série de 1980 à 1986. Il est évidemment tributaire des scénarios quant à ce qu'il représente, et il s'agit d'épisodes datant de 1981/1982, une époque où les comics sont encore majoritairement pour un lectorat d'enfants, ou à la rigueur de jeunes adolescents. Toutes les créatures démoniaques ont une apparence ridicule, à base de morphologie humanoïde avec des appendices improbables. Ils ont bien des grandes dents acérées pour prouver qu'ils sont méchants. Les dessins restent donc un registre descriptif et un peu simplifié. Les monstres ne sont pas beaux et sont souvent agressifs, mais leur qualité graphique est comparable à celle des monstres du cinéma japonais quand les acteurs revêtaient des costumes en caoutchouc. Un lecteur adulte ne peut pas les prendre au sérieux ou au premier degré ; par contre il peut tomber sous le charme de leur poésie naïve.



En termes d'impression visuelle, les dessins de Don Perlin font souvent penser à un film au budget limité. Les décors sont à l'économie, souvent masqués par les mouvements des personnages, ou des explosions diverses et variées, ou encore des effets de lumière. La forme des buildings est générique, sans style architecturale marqué, encore moins reconnaissable. Les aménagements intérieurs ne sont pas folichons, juste fonctionnels et dépouillés la plupart du temps. Les tenues vestimentaires civiles ne présentent pas beaucoup de particularités ou de détails. Les acteurs ont l'air un peu empruntés dans leur rôle, un peu figé dans leurs mouvements. Les expressions des visages prêtent souvent à sourire, avec des sourcils un peu arqués et des personnages qui ont souvent la bouche ouverte.



Néanmoins dans ces épisodes, les dessins sont encrés par Joe Sinnott pour la majeure partie, ce qui adoucit les contours et rend les dessins plus agréables à la lecture. En arrivant page 360 à l'épisode de Captain America, le lecteur apprécie les dessins plus vivants, et les angles de vue plus dynamiques de Mike Zeck. Malgré tout, les dessins de Don Perlin accomplissent leur fonction qui est de raconter une histoire. Au bout de quelques épisodes, le lecteur s'est accoutumé à leurs particularités et n'y prête plus trop attention, noyé comme il l'est sous des phylactères conséquents, pouvant aussi bien détailler l'état d'esprit d'un personnage, que redire les informations déjà contenues dans la case afférente. Il prend donc conscience que sous des dehors communs, la suite de cases apporte bon nombre d'informations que le scénariste n'a pas besoin de reprendre dans les cartouches de texte. Tous les personnages sont immédiatement reconnaissables, toutes les actions sont lisibles et s'enchaînent dans un ordre logique. Tous les personnages tiennent dans les cases, ce qui n'est pas toujours facile au vu de leur nombre. Même si les dessins de Don Perlin manquent de panache, ils assurent une narration visuelle facile à lire pour les lecteurs de tout âge. Le lecteur peut regretter que les épisodes n'aient pas été dessinés par Marshal Rogers qui réalise une partie des couvertures, mais il découvre aussi qu'ils présentent une autre qualité inattendue dans leur banalité, en étant en phase avec la sensibilité du scénariste.



En 18 épisodes, JM DeMatteis raconte plusieurs histoires dont celle qui donne son titre au présent volume. Les Défenseurs se battent contre des démons de pacotille, y compris le Satan de l'univers Marvel, ainsi que contre une organisation gouvernementale hors de contrôle, un faux prophète, des atlantes, etc. Il n'y a pas vraiment de supercriminel de petite ou de grande envergure, ce qui dénote déjà par rapport à l'ordinaire des comics de superhéros de l'époque. Il n'y a pas d'attaque de banque ou de fourgon blindé, ou de vol d'objet précieux. Vraisemblablement conscient de cette particularité qui rend la série moins attractive aux lecteurs de série de superhéros, le scénariste intègre des participations d'autres personnages comme Man-Thing ou Ghost Rider, ce qui n'attire pas forcément beaucoup plus de lecteurs. Il y a la présence des Avengers le temps de quelques pages, mais ils ne prennent pas part à l'aventure. La présence de Spider-Man ressort comme un dispositif artificiel pour attirer l'attention d'autres lecteurs, car il n'apporte rien à l'intrigue.



Pourtant le lecteur n'a pas l'impression de souffrir d'ennui pendant ces 470 pages. C'est parfois un peu pesant et un peu lent, mais pas rebutant. C'est que les histoires ne se limitent pas à vaincre le méchant du mois au cours d'un affrontement physique allant crescendo. DeMatteis met en scène des personnages singulièrement décalés. Ils ne brillent pas tous avec le même éclat dans ce tome, mais il y a quand même le fils du diable, une femme qui découvre qu'elle a un côté démoniaque, un homme de 70 ans prisonnier d'un corps monstrueux, un superhéros en chaise roulante, un homme divorcé, une valkyrie dont l'esprit a été séparé de son corps. Alors que le scénariste ne sait pas trop quoi faire de Hulk ou de Namor, il est visible que sa sensibilité s'accorde mieux des personnages secondaires et des simples humains. C'est l'une des particularités, aujourd'hui presqu'inimaginable, ces superhéros interagissent avec le commun des mortels, non pas en se plaçant sur un niveau supérieur, mais en étant sur un pied d'égalité. Parfois même ils prennent des leçons des simples mortels, comme Eric Simon Payne face au drogué Ira Gross, ou Patsy Walker prenant sur ses genoux Serina, la petite fille cancéreuse.



Au fil des épisodes, plusieurs Défenseurs se heurtent à leur sentiment de culpabilité, à leur faillibilité d'être humain, à la déprime face à une succession d'événements malheureux, à la responsabilité de leurs actes, à l'absence d'assouvissement suite à l'aboutissement d'une vengeance, au méfait de l'auto-apitoiement. Le sentiment de culpabilité pousse même l'un d'entre eux à se suicider en se pendant. Il passe à l'acte mais échoue. Lors de ces passages, la tonalité narrative oscille entre dramatisation excessive (non pas du fait de gesticulation ou d'une prose exagérément lacrymale, mais du fait de dessins manquant de nuances) et sensibilité d'une justesse touchante. C'est tout à l'honneur de John-Marc DeMatteis de réussir à traiter de sujets aussi humains, avec des personnages aussi chamarrés. À plusieurs reprises, des personnages au bord du gouffre se tirent d'affaire grâce au soutien de leurs camarades, à leur sollicitude, à leur empathie. Le scénariste n'hésite pas à mettre en scène les bienfaits de l'amitié. D'une certaine manière, ce thème est au centre de la série et de l'équipe. En effet, les Défenseurs se sont rapidement qualifiés de non-équipe, du fait qu'ils n'ont pas de charte comme les Avengers, ou d'école comme les X-Men. Ce sont des individus réunis par les circonstances, certains demeurent, d'autres s'en vont, puis reviennent à l'occasion d'un épisode. Au final ce qui en fait une équipe réside bien dans leur capacité à se préoccuper des autres.



A priori, seuls des lecteurs très curieux peuvent s'aventurer à plonger dans ce recueil. L'esthétique des dessins présente un décalage important avec celle des comics d'aujourd'hui au point de pouvoir en paraitre rebutante. La narration est alourdie par des textes envahissant et des bulles de pensée explicatives. Les ennemis sont tous plus kitchs les uns que les autres. Pourtant, le charme désuet des dessins finit par opérer et les relations entre les personnages s'aventurent, avec intelligence et sensibilité, sur des terrains délaissés depuis longtemps par les comics de superhéros.
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Mercy : Shake the World

Ce tome contient un récit complet, indépendant de tout autre. Il est initialement paru en 1993, publié par Vertigo (la branche adulte de DC Comics), l'année de son démarrage. Le récit a été conçu et écrit par John-Marc DeMatteis, dessiné et peint par Paul Johnson, avec un lettrage de Todd Klein. Cette réédition de 2015 contient également une préface sous la forme d'un dialogue entre DeMatteis et Johnson, les 10 premières pages de script de DeMatteis correspondant aux 28 premières pages du récit, les 61 pages de crayonnés pour le découpage du récit, 1 page de texte écrite par l'artiste expliquant sa méthode de travail, 18 pages de crayonnés et de peintures sans texte, et une postface de 2 pages écrites par Art Young, le responsable éditorial du projet en 1993.



Un homme est allongé dans un lit d'hôpital en Suisse. Il s'appelle Joshua Rose et a une cinquantaine d'années. Il est relié à tout un tas d'appareillages par des câbles et des tuyaux. Il a été victime d'une crise cardiaque il y a quelques jours. Il sent son esprit flotter indépendamment de son corps et il ne ressent aucun regret à quitter à quitter un plan d'existence peuplé d'êtres humains égoïstes et menteurs. Il avait atteint une position enviable en tous points (réussite professionnelle, salaire, épouse, enfants), et pourtant, à y réfléchir il n'y trouvait aucun sens, aucune valeur. Alors qu'il dérive dans les limbes, son attention est attirée par la silhouette d'une femme Mercy.



En Inde, au bord du Gange, Mercy rayonne de vitalité et de raison d'être. À New York, elle est une jeune femme sans domicile fixe qui dort dans la rue. À Paris, elle est une ballerine, gracieuse sur scène. En chine, c'est une vieille femme en train de repiquer du riz, le dos cassé en deux. En suivant cet esprit, il le voit intervenir auprès d'un couple aigri habitant dans la banlieue de Richmond en Angleterre, auprès d'un jeune adolescent dans une tribu brésilienne, et encore auprès d'une vieille femme noire à Brooklyn. Ses visions s'interrompent quand sa femme rend visite à son corps sans connaissance, puis reprennent après.



Le titre complet indique clairement la couleur : la miséricorde secoue le monde. En fonction du contexte, le mot Mercy peut aussi bien signifier miséricorde, clémence, ou encore pitié. Le monde de Joshua Rose, ou la vision qu'il en a va vaciller sous la manifestation de la miséricorde. Cet étrange projet comics prend ses racines avec Disney. À l'époque, Disney voulait développer une branche comics pour adulte appelée Touchmark. Après quelques semaines de développement, il était évident que les projets soumis dépassaient les attentes du commanditaire, et les risques bien au-delà de ce qu'était prêt à tenter Disney. Par le biais du responsable éditorial Art Young, ces projets furent rapatriés pour le lancement de Vertigo, par Karen Berger.



En 1993, John-Marc DeMatteis a déjà réalisé 2 récits hors du commun pour Epic, la branche adulte de Marvel : Moonshadow avec Jon J. Muth et Blood: A tale avec Kent Williams. Le lecteur sait que cet auteur dispose des compétences nécessaires pour réaliser un récit incroyable, déconnecté de toute influence superhéros. Paul Johnson est moins expérimenté, ayant à son actif London's dark de James Robinson, et la quatrième partie de The books of Magic de Neil Gaiman. Les documents supplémentaires permettent de se faire une idée du mode de travail peu usuel. JM DeMatteis a commencé par écrire un script d'une vingtaine de page (sans précision de découpage en nombre de pages par séquence) qu'il a transmis en toute confiance à l'artiste. Ce dernier lui a renvoyé une proposition de découpage sous forme de croquis. Après validation et remarque, il a réalisé les 61 pages de récit, à partir desquelles le scénariste a composé le récitatif de Joshua Rose. En effet, il n'y a pas de dialogue, juste le flux de pensée intérieur du protagoniste.



Comme l'annonce le titre, le lecteur ne s'attend pas à une intrigue, mais à la mise en œuvre d'une allégorie. L'auteur présente le voyage astral de son personnage, comme un cheminement spirituel, au cours duquel il découvre une dimension de l'existence qu'il n'avait pas eu le loisir de percevoir avant. En introduction de son script, DeMatteis prend la précaution de préciser que Paul Johnson ne doit pas se sentir tenu par le découpage grossier qu'il propose et qu'il lui fait confiance pour proposer des solutions graphiques adaptées. Dans la page de postface qu'il a rédigé, l'artiste confirme qu'il a utilisé plusieurs techniques de dessins. Globalement chaque page bénéficie d'une mise en couleurs à la peinture directe, à une époque où l'infographie n'existait pas ou en était encore à ses balbutiements. Les différentes techniques employées évoquent aussi bien la gouache, que l'aquarelle, ou encore les crayons de couleur, en fonction des pages, et même des zones d'une feuille.



Paul Johnson peut aussi bien détourer les formes par un trait au crayon, encré ou non, que ne pas tracer de contours qui sont alors matérialisés par le passage d'une couleur à une autre. Il utilise parfois aussi les collages pour matérialiser une forme de fond, sur laquelle il va repasser en peinture. À la découverte de l'ouvrage, le mode de représentation de l'artiste déstabilise un peu. Il ne se cantonne pas à des dessins descriptifs dans une mise en page accolant sagement des cases rectangulaires bien ordonnées. Les couleurs ont tendance à se superposer, les dessins à se chevaucher, les cases à être de guingois. La deuxième page n'est pas figurative. Il faut donc un temps d'adaptation au lecteur pour se faire à la narration visuelle.



En fait, c'est surtout la présentation qui ne respecte pas le sage agencement des cases rectangulaires. Sinon, le lecteur se rend compte que plus de 80% des cases contiennent un dessin figuratif. Le degré de détail de ce qui est représenté peut aller de l'esquisse au photoréalisme, en fonction de la nature de la séquence. Paul Johnson n'utilise pas d'icône, de schéma, ni de leitmotiv visuel. De temps à autre, il insère un arrière-plan non figuratif, ou une composition abstraite. La majeure partie du temps, il illustre de manière concrète ce que dit le monologue intérieur de Paul Johnson. C'est même un peu réducteur comme approche. Lorsque le lecteur parcourt les pages de script du scénariste, il découvre finalement la trame très précise du récit et se demande ce qu'apportent les images. Finalement l'artiste s'attache surtout à rendre concret les éléments du scénario comme Brooklyn ou la chambre d'hôpital. Il donne un point d'ancrage au texte qui court.



Le lecteur se dit que Paul Johnson aurait pu donner une dimension plus onirique ou plus mystique au récit, s'il ne s'en était pas tenu à la lettre. De la même manière, il constate que John-Marc DeMatteis n'a pas tiré tout le parti qu'il aurait pu des informations visuelles contenues dans les images. Il aurait pu alléger son texte en information concrète et se faire plus mystique, en installant des correspondances entre le registre de vocabulaire et ce qui est montré. Néanmoins, les 2 auteurs sont en bien en phase dans leur narration, et l'ambition du récit est déjà élevée. L'enjeu indiqué dès la première séquence est de confronter le matérialisme du protagoniste à une valeur morale participant de l'empathie, de la gentillesse et de la pitié. Un lecteur un peu cartésien ne verra dans ce récit qu'une forme déguisée de réflexion morale, s'appuyant sur des principes psychologiques basiques qui restent sous-entendus.



Cependant, texte et images offrent un voyage qu'il n'est pas possible de réduire à une psychanalyse de comptoir. Les images emmènent le lecteur dans un monde onirique dont les techniques expressionnistes génèrent des émotions allant du divertissement à l'empathie pour des individus banals. Le texte de JM DeMatteis est assez léger : il s'agit de cellules de 2 ou 3 phrases, proscrivant les longs pavés. Il n'est pas possible de réduire la narration à un constat de type : ça fait plaisir de faire plaisir. Alors même que le scénariste ne développe pas profondément les autres personnages que celui de Joshua Rose, il sait en 2 ou 3 phrases transmettre leur état d'esprit, leur espoir, leur regret. Le lecteur ressent leur situation, leur amertume, ou leur joie. La rédaction du texte touche le lecteur, lui parle de ses émotions, d'émotions universelles à l'échelle de la race humaine. Il y a là toute la sensibilité de l'auteur qui transparaît dans le choix de ses mots. Au travers de quelques cases, les autres personnages dépassent le stade de cliché (le bon sauvage, la pauvre petite vieille) pour se retrouver dans un environnement spécifique, une situation particulière, aboutissant à un comportement personnalisé. C'est ce qui fait toute la différence avec une enfilade de stéréotypes à la petite semaine sur la gentillesse, et une œuvre touchante sur une qualité spirituelle qui change la vie de l'individu.



Parler de la nécessité d'être gentil avec autrui est un sujet affreusement naïf, pouvant devenir cucul sous une couche de bons sentiments moralisateurs. John-Marc DeMatteis et Paul Johnson sont en phase pour mettre en scène une commisération débarrassée de ses oripeaux moralisateurs ou même religieux. Il ne s'agit ni de tendre la main, ni de faire la charité, mais de transformer sa vision du monde grâce à une approche spirituelle. Loin de se rendre ridicules, ils emmènent le lecteur avec sur ce chemin d'éveil, avec une conviction tout en douceur.
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Justice League 3001, tome 1 : Deja Vu All O..

Ce tome fait suite à The Camelot war (épisodes 8 à 13) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 14 & 15 de Justice League 3000, ainsi que les épisodes 1 à 6 de Justice League 3001 et le Sneak Peek, initialement parus en 2015, coécrits par Keith Giffen et John-Marc DeMatteis. Andy Kuhn a dessiné et encré l'épisode 14. Howard Porter a dessiné et encré le Sneak Peek, l'épisode 15 de JL3000, et les épisodes 1 à 3 et 5 de JL3001. Keith Giffen a réalisé le découpage des pages des épisodes 2 et 3 de JL3001. Scott Kolins a dessiné et encré l'épisode 4 de JL3001. L'épisode 6 de JL3001 a été dessiné et encré par Colleen Doran. Il faut avoir lu les 2 tomes précédents pour comprendre qui sont ces gugusses, ainsi que leur situation.



Épisoe 14 - Ice (Tora Olafsdotter) a refait surface à Camelot. Elle raconte son histoire à travers les siècles, pour le bénéfice de Flash, Superman, Spectre, Green Lantern (Hal Jordan) et Ariel Masters. Épisode 15 - Etrigan le démon déclenche l'offensive sur Camelot, menée par Fire (Beatriz de Costa). Dans les coulisses, Lois effectue son retour à la tête d'un groupe ennemi de la Justice League.



Épisodes 1 à 6 - Pour commencer, cette Justice League très particulière (Superman, Batman, Flash, Wonder Woman, Green Lantern version Guy Gardner) est dépêchée sur la planète Wodin 12, pour mettre fin à une infestation de Starro. Mais en fait cette intelligence collective dispose d'une autorisation de réduire la population en esclavage, délivrée par le Bureau de la Bureaucratie Insondable. Blue Beetle et Booster Gold sont toujours perdus quelque part sur Terre. Ariel accepte une interview pour une émission holographique. Une superhéroïne arrive en direct de la Terre du vingt-et-unième siècle. Un autre Batman fait son apparition, ainsi qu'un individu transformé en tortue anthropomorphe géante. Il ne manque plus que L-Ron qui justement…



En 1986, dans des conditions éditoriales assez particulières, John-Marc DeMatteis et Keith Giffen réinvente la Justice League, dans une forme de comédie de situation, avec des dialogues aux petits oignons. C'est la naissance de la Justice League International, avec des personnages plus drôles que vraiment efficaces. 30 ans plus tard ces épisodes ont conservé un charme indéniable, et régulièrement Giffen & DeMatteis collaborent ensemble pour retrouver cette magie. Ça ne marche pas à chaque fois et il leur faut un peu de temps pour retrouver le rythme d'antan. Cette fin de première saison de cette itération à nouveau très particulière de la Justice League, accolée à la première moitié de la deuxième saison, en atteste encore.



Le lecteur comprend vite que ces 2 créateurs connaissent bien l'histoire de l'univers partagé DC et que l'environnement qu'ils ont conçu leur donne une grande liberté pour en user. C'est ainsi que l'histoire de Tora Olafsdotter est l'occasion d'évoquer Kamandi (de Jack Kirby) en lui collant une sorte de tutrice (idée à la fois pertinente et absurde) et les Atomic Knights et de lier leur histoire avec audace et pertinence. Non seulement, ils utilisent des personnages des différents futurs de l'univers partagé DC, mais ils n'hésitent pas non plus à récupérer des personnages dans l'époque actuelle (Starro, ou Booster Gold). Ils évoquent également leurs propres épisodes de la Justice League International (le retour de l'inénarrable robot L-Ron), les Super Buddies de Formerly known as the Justice League. La présence d'un certain personnage menaçant rappelle également que Keith Giffen a longtemps apporté son grain de folie aux aventures de Légion des SuperHéros, en particulier pour The great darkness saga.



Parmi les différents dessinateurs, Howard Porter est celui qui est le plus au diapason des coscénaristes. En y prêtant attention, le lecteur remarque qu'il y a beaucoup de figurants à l'apparence singulière qui fréquentent les bars. Il aperçoit ainsi Ambush Bug (apparition fugitive et discrète), les bras de Mister Fantastic et d'Elongated Man (Ralph Dibny) effectuant des arabesques en arrière-plan, Darth Vader, Alien, Predator, Doctor Manhattan. De même les membres de cette Justice League vont prendre un verre dans un bar appelé Ralf & Sue Grill (comme Sue & Ralph Dibny qui ont fait partie des Super Buddies).



Les auteurs ne se contentent pas de vivre sur leur passé en le ressassant avec plus ou moins de variations. En fait, ils racontent une histoire ambitieuse qui compte au moins 5 fils narratifs différents. Il y a (1) les aventures de la JL3001 proprement dite, (2) les manigances d'Ariel Masters (sous les quolibets de L-Ron), (3) Fire & Ice essayant de préserver Camelot, (4) Blue Beetle & Booster Gold tentant de survivre à ce futur bizarre, (5) Green Lantern (Hal Jordan) & Spectre essayant de donner un sens à leur nouvelle vie. Même en 8 épisodes, les auteurs ont bien du mal à développer autant d'intrigues, d'autant que toutes comprennent au moins 2 personnages, chacun avec leur histoire personnelle, et parfois 2 histoires personnelles (par exemple Ariel Masters et Flash) du fait de la nature de ces versions des personnages.



La narration navigue entre aventures et comédie. Dans le premier registre, Giffen & DeMatteis font montre d'une imagination débordante pour concevoir des dangers nécessitant l'intervention de la Justice League. Il y a donc la Terre transformée en planète prison avec des trafics inquiétants, Camelot qui constitue un enjeu stratégique majeure, le retour de Starro, ou l'existence d'un deuxième Batman aux méthodes très expéditives, l'arrivée d'une horde de robots (Scullions) qui semblent indestructibles, et un complot pour assassiner les membres de la Justice League. Côté humour, les coscénaristes ont la possibilité de plus se lâcher que la première version de la Justice League International, en particulier parce qu'il ne s'agit pas des vrais Superman, Batman, Wonder Woman et autres. C'est ainsi qu'ils intègrent un commentaire récurrent sur la vie sexuelle de Diana, un autre sur la taille de l'engin d'Etrigan (et ses prouesses au lit), qu'ils se moquent sans pincette du déguisement à base de lunettes (celles de Clark Kent). Guy Gardner se retrouve dans un corps de femme, avec des modifications comportementales moins primaires qu'il n'était à craindre, concernant la condition féminine. Le comique de situation lié à Starro et à son statut repose sur une idée reçue plus élaborée que la simple incompréhension basique.



Le dilemme psychologique de Teri Magnus donne lieu à des gags plus sophistiqués que la simple incompétence. DeMatteis et Giffen jouent aussi sur sa célérité pour une succession rapide d'émotions très directes (l'expression de son amitié pour Diana est irrésistible). L'esprit tordu de Giffen prend le dessus à quelques reprises, comme pour le troupeau d'animaux (très) sauvages qui sont le croisement de piranha + ours + dinosaure. Le lecteur de la première heure de la Justice League International sent la nostalgie fonctionner à plein avec les remarques sarcastiques de L-Ron, comme au bon vieux temps, également savoureuses pour les nouveaux lecteurs, même sans l'effet nostalgique.



Le lecteur éprouve un petit pincement à l'œil quand il découvre l'épisode 14. Andy Kuhn utilise un gros trait pour marquer les contours des personnages, avec des traits non jointifs, donnant lieu à des contours anguleux, un niveau de détails satisfaisant, mais des dessins plutôt laids. Il retrouve avec plaisir les dessins d'Howard Porter, en mode aussi à fond que ses épisodes de la Justice League écrits par Grant Morrison (voir JLA Vol. 1), avec de l'énergie qui crépite, des personnages qui courent, des costumes hauts en couleurs, un très grand niveau de détails (jusqu'à la texture des costumes de superhéros revêtue de minuscules hexagones pour rendre compte de leur matériau). Il est donc à l'unisson de la narration des coscénaristes, en ajoutant des petits détails discrets en arrière-plan.



Le château de Camelot est somptueux. L'architecture de la planète Wodin 12 permet des trajectoires spectaculaires de Flash. Les habitants de cette planète se déplacent comme des individus à moitié aveuglés par le Starro qui s'est attaché à leur visage. Les expressions des visages des protagonistes ne sont pas toujours très nuancées, mais elles transcrivent bien leur état d'esprit, en particulier le contentement de soi de Clark Kent, ou la brutalité de Diana. Ces dessins sont complétés par une mise en couleurs vive et minutieuse qui ajoute de la consistance, pour une expérience de lecture intense.



Scott Kolins a dessiné l'épisode 4, avec des traits de contour plus fins que ceux de Porter, la même énergie héritée de Jack Kirby, un sens du détail un peu moins consistant que celui de Porter. Il a le plaisir de retrouver le personnage de Flash dont il avait dessiné de nombreux épisodes écrits par Geoff Johns (voir par exemple Blood will run). Colleen Doran dessine d'une manière plus descriptive, sans l'exagération massive et énergétique de Porter, sans celle accélérée de Kolins. La lecture perd alors un peu en intérêt graphique. Les 3 dessinateurs sont confrontés à la même difficulté : des dialogues copieux, les coscénaristes ayant besoin d'amener beaucoup d'informations, tout en maintenant la personnalité des protagonistes au travers de leurs échanges.



Ce troisième tome des aventures de cette curieuse Justice League du futur ne peut se comprendre qu'en ayant lu les 2 tomes précédents. Les dessins rendent justice à la loufoquerie du scénario, aux batailles plus que nature, aux superpouvoirs, et aux caractères marqués des personnages. Keith Giffen et John-Marc DeMatteis racontent une histoire dense, aussi bien sur le plan de l'intrigue, que de l'univers partagé DC, ou de l'humour. La lecture s'en trouve allongée d'autant et parfois un peu pesante quand ils perdent le sens du rythme.
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Justice League 3000, tome 2 : The Camelot War

Ce tome fait suite à Yesterday lives (épisodes 1 à 7) qu'il faut avoir lu avant. Il contient les épisodes 8 à 13, initialement parus en 2014/2015, avec une intrigue de Keith Giffen, des dialogues de John-Marc DeMatteis des dessins et un encrage d'Howard Porter. Seule exception, Chris Batista a dessiné 10 pages de l'épisode 9, encrées par LeBeau Underwood.



L'action se déroule toujours en l'an 3000. Ariel Masters et les versions de l'an 3000 de Superman, Wonder Woman, Batman, Green Lantern et Firestorm ont été faits prisonniers et viennent d'arriver sur Cadmus World. Ils sont reçus par Terry, le responsable du projet Cadmus, qui vient d'assassiner sa sœur.



L'objectif de la Justice League est de trouver un moyen de s'échapper, puis un vaisseau spatial pour se rendre sur une autre planète. L'un des leurs va les trahir. En cours d'aventure, ils seront rejoints par Flash, version 3000. La lutte contre Terry et ses sbires (Coveal, Convert, Khali et Locus) pourra alors commencer à s'organiser.



Dans le premier tome, le lecteur avait pu faire 2 constats. Premièrement, Keith Giffen et John-Marc DeMatteis n'avaient aucune intention d'écrire cette version 3000 de la League comme une suite de la Justice League International de 1987, qui les avaient rendus célèbres, en particulier pour l'humour très particulier. Deuxième constat, il leur aura fallu quelques épisodes de rodage avant que leur série ne surmonte l'inertie propre à une histoire dans laquelle il faut présenter de nombreux nouveaux personnages.



Ici, dès le début, tout est en place et les auteurs poursuivent leur intrigue, en profitant de l'élan acquis dans le premier tome. Dans les 4 premiers épisodes, le lecteur peut apprécier la synergie existante entre les 2 auteurs. Keith Giffen n'a rien perdu de sa capacité à concevoir un récit qui manie superhéros et environnement de science-fiction, avec une intrigue de grande ampleur. Comme à son habitude, il sait piocher des éléments disparates dans l'univers partagé DC pour nourrir sa narration, sans qu'ils n'en deviennent de simples leurres pour masquer sa vacuité.



Le lecteur suit donc ces superhéros qui ne sont pas tout à fait ce qu'ils paraissent être (voir le premier tome pour leur véritable nature), essayer de trouver leur place et de déterminer leur marge de manœuvre dans la situation qui est la leur. Giffen n'oublie pas d'intégrer des séquences dédiées à l'action pour remplir le quota propre à un comics de superhéros. De son coté, DeMatteis complète le scénario avec les dialogues. Il ne réussit pas à retrouver la qualité de ceux qu'il écrivait pour la Justice League International. Les personnalités des uns et des autres ressortent moins nuancées, avec des réactions parfois un répétitives.



DeMatteis écrit des dialogues portant l'arrogance de ce Superman, la fougue guerrière de cette Wonder Woman, le mépris de ce Batman. Il réussit à inclure la masse d'informations nécessaires à l'avancée de l'intrigue. Les réparties restent encore un peu répétitives, mais il réussit à tout caser, sans que les phylactères ne phagocytent les images.



Comme dans le premier tome, Howard Porter marie lui aussi la composante superhéros à la composante science-fiction. Le fait qu'il ne s'agisse pas des superhéros de la continuité en cours de DC lui permet d'introduire des variations, sans crainte de subir les foudres d'un responsable éditorial. Ainsi il a la possibilité de doter Wonder Woman d'un pantalon, sans que cela ne déclenche une polémique inane. Si le visage de ses personnages n'est pas toujours très joli, Wonder Woman en impose par sa carrure et son langage corporel agressif.



Porter s'en donne également à cœur joie avec Superman, n'hésitant pas à lui faire adopter une posture arrogante, indicatrice de son sentiment de supériorité. Il sait même donner une représentation de la vitesse de Flash qui est à la fois débordante d'énergie, et assez personnelle.



Du point de vue de l'environnement de science-fiction, Porter se contente de représenter une technologie futuriste assez générique, mais cohérente d'une séquence à l'autre. Les arrière-plans sont représentés avec une fréquence supérieure à la moyenne de celle des comics, ce qui permet au lecteur de conserver la sensation de l'endroit où se déroule chaque action. Quand le scénario place les personnages dans un château fort de type moyenâgeux, le dessinateur en réalise une description édulcorée (pas trop disneyenne quand même); mais massive à souhait.



Cette première partie du récit contient son lot d'action, de superhéros, de rebondissement, et de caractères. Sans être inoubliable, elle retient l'attention du lecteur, contient un bon niveau de divertissement et donne envie d'en savoir plus sur le devenir de cette Ligue pas ordinaire. 4 étoiles.



- ATTENTION – Cette partie du commentaire révèle des surprises de l'intrigue. -

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Spider-Man and Batman

Il s'agit d'une histoire complète en 1 tome, en couleurs, de 48 pages, initialement parue en 1995. Le scénario est de JM DeMatteis, les dessins de Mark Bagley, l'encrage de Scott Hanna et Mark Farmer.



Chacun de leur coté, Peter Parker et Bruce Wayne sont la proie d'un cauchemar récurrent dans lequel leur avenir est défini par un coup de feu, dans lequel toute leur vie à venir découle du meurtre de leur figure parentale : l'oncle Ben pour Parker, ses parents pour Wayne. À New York, Peter Parker a revêtu son habit de Spider-Man pour chasser les restes de ce mauvais rêve. Il a répondu à l'invitation du docteur Ashley Kafka à venir voir Cletus Kasady (Carnage) dans la prison spécialisée de Ravencroft. Kasady est un psychopathe meurtrier incapable d'éprouver la moindre empathie pour son prochain. Le gouvernement a autorisé le docteur Cassandra Briar (une psychologue spécialisée dans le comportement) à tester un modificateur de comportement (une puce électronique greffée au cerveau) sur Kasady. À Gotham, Batman se bat contre le Joker.



Ce crossover entre un personnage Marvel et un personnage DC appartient déjà la deuxième génération de ce type de crossover. Les scénaristes ont pris conscience des énormes contraintes inhérentes à ce type d'histoire (attribuer le même nombre de cases dédiées à chacun des personnages, n'introduire aucun changement, mélanger à parts égales l'univers de chaque personnage) et ils essayent de trouver une intrigue adaptée à cette situation. Certains n'y arrivent pas (John Byrne pour Darkseid / Galactus, George Perez pour Silver Surfer Superman), d'autres s'en sortent mieux. C'est le cas de JM DeMatteis. Il bénéficie aussi du fait que les responsables éditoriaux sont devenus plus souples dans les possibilités d'appariement entre superhéros.



Ici John-Marc DeMatteis trouve un point d'entrée aussi évident que pertinent : la vocation de ces 2 superhéros découle d'un événement traumatique similaire, le meurtre de parents proches. DeMatteis n'est pas le premier scénariste venu : il a écrit pour énormément de séries de superhéros dont Spider-Man (Kraven's last hunt), Batman (Absolution), et d'inoubliables histoires indépendantes (Moonshadow). Pour donner plus densité à l'existence des 2 superhéros, il a recours aux flux de pensées dans des cellules de texte, de façon modérée (pas à chaque page, encore moins à chaque case). Prenant le contrepied de la tendance "loup solitaire et brutal" qui prédomine dans les comics de cette époque, il montre comment ces meurtres traumatiques ont forgé le principe fondamental de ces 2 superhéros de ne pas tuer. La qualité de l'écriture de DeMatteis transforme ce principe qui peut sembler désuet en une évidence immuable.



Ayant établi ce principe moral, DeMatteis l'oppose à une autre évidence : à chaque fois que Carnage et Joker seront libres, ils tueront encore des victimes innocentes. À partir de cette autre évidence, le refus de tuer des 2 superhéros apparaît d'un autre âge et totalement inadapté (Frank Miller s'en était déjà largement moqué dans "Dark knight returns"). Et cependant la résolution du conflit contre ces 2 psychopathes naîtra des valeurs liées au refus de tuer. DeMatteis ne développe pas une approche nouvelle des superhéros, ni même des idées novatrices, mais il réussit à les incorporer de manière convaincante dans un cadre très rigide, à contrecourant de la mode des personnages sombre et réalistes ("grim and gritty"). Il ne s'agit pas d'un retour en arrière vers des comics à destination d'un public plus jeune, mais d'exposer une valeur morale de manière crédible et adulte.



Mark Bagley réalise des pages de bon dessinateur de superhéros, c'est un bon artisan bien encré, mais pas un artiste. Il dessine de manière réaliste avec un degré de simplification qui se manifeste aussi bien dans les personnages que les décors. La musculature des superhéros est exagérée comme d'habitude, avec des corps plus sculptés que ceux d'un culturiste. Les émotions sont exagérées sur les visages pour être plus lisibles (à ce niveau, la nuance est considérée comme une faute professionnelle). Les buildings en arrière plan sont réduits à de gros parallélépipèdes rectangles avec des façades plaquées dessus, sans notion d'urbanisme. La façade de l'asile d'Arkham décroche le pompon avec des fenêtres placées pour donner une impression étrange, sans logique de construction ou de disposition intérieure des pièces. Néanmoins dans ce style, Bagley apporte plus de soin que d'habitude à ses dessins, en incluant régulièrement des arrières plans, en prenant soin dans sa mise en scène que les déplacements et mouvements des personnages s'effectuent de manière cohérente avec les endroits où ils évoluent. Il a trouvé la bonne manière d'accentuer les caractéristiques graphiques du Joker (menton très allongé et très pointu) et de Carnage (extensions du costume très coupantes) pour rendre visuel leur dangerosité et leur folie meurtrière. Il a un peu de mal à rendre le joker vraiment menaçant car il utilise des grimaces ridicules pour rendre compte du désordre de son cerveau.



Alors que le lecteur pouvait supposer que ce crossover entre Marvel et DC serait aussi quelconque que de nombreux autres, il découvre une histoire solide qui ose s'aventurer sur le terrain glissant des valeurs morales, à commencer par la décision de ne pas mettre à mort même les pires criminels. Dans un registre très superhéros, DeMatteis expose avec éloquence l'intelligence morale de ce principe sans tomber dans l'angélisme, la naïveté et ou le prêche. Bagley (bien aidé par des encreurs minutieux) reste également dans un registre très superhéros pour des dessins s'adressant plus à de jeunes adolescents qu'à des adultes, mais assez travaillés pour permettre un bon degré d'immersion. DeMatteis a pu écrire un deuxième crossover avec les mêmes personnages : New age dawning dessiné par Graham Nolan et encré par Karl Kesel (1997).
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New Defenders - Volume 1

Ce tome contient les épisodes 122 à 131 de la série "Defenders" en couleurs (rebaptisée "New Defenders" à partir du numéro 125), parus en 1983/1984. Les épisodes précédents ont été réédités dans Essential Defenders 6 (épisodes 107 à 125, Avengers annual 11 et Marvel Team-up 119).



Au début du récit l'équipe des Defenders se compose de Beast (Hank McCoy, ex X-Men), Valkyrie (Brunnhilde), Gargoyle (Isaac Christians), Overmind (une intelligence collective dérivée des Eternals, ayant eu maille à partir avec les Fantastic Four et le Squadron Supreme ; enfin, c'est très compliqué), et Dolly Donahue leur hôtesse. Dès le premier épisode, Bobby Drake (Iceman, ex X-Men) rejoint Hank et son équipe, et comme l'indique la couverture Warren Worthington (ex X-Men) n'est pas loin derrière.



Patsy Walker (Hellcat) et Daimon Hellstrom (Hellstorm ou Son of Satan) ont quitté l'équipe et sont sur le point de convoler en justes noces. L'elf au pistolet ("Elf with a gun", une créature inventée par Steve Gerber dans Essential Defenders 2) est de retour et il rassemble l'équipe originelle des Defenders (Doctor Strange, Hulk, Silver Surfer et Namor) pour leur révéler la véritable nature de sa mission. La nouvelle équipe des Defenders doit faire face à la résurgence du Secret Empire (une organisation mystérieuse ayant pour objectif la domination de la planète), et ses équipes de choc dont celle menée par Mad-Dog (Robert Baxter, le premier mari de Patsy Walker), et celle composée de Cloud, Seraph et Harridan. Une nouvelle recrue arrive pour s'imposer dans l'équipe contre le gré des autres membres.



Tous les épisodes sont écrits par John-Marc DeMatteis (à l'exception de 2 pages par Ann Nocenti dans l'épisode 127, et des dialogues de l'épisode 131 conçus par Peter B. Gillis). Les 2 premiers épisodes donnent le ton de la narration de tout le tome. Dans l'épisode 122, il n'y a aucun combat, les personnages papotent entre eux à différents endroits sur différents sujets. Hank, Brunnhilde, Isaac et Overmind prennent des nouvelles de Patsy et Daimon, ils réfléchissent à la direction qu'ils souhaitent donner à leur vie, au sens des Defenders, sur un ton amical et tranquille. Les réflexions restent à un niveau très superhéros, sans rien d'existentiel, avec une ambiance entre amis, presque familiale. Le plus grand danger provient d'un chiot qu'Hank vient d'acheter et qui est très joueur. Le lecteur reconnaît là la propension de DeMatteis à s'intéresser à ses personnages en tant qu'individus, qu'êtres humains toujours intéressant à connaître, à découvrir. Autant il arrive à établir cette chaleur humaine, autant la psychologie reste à un niveau superficiel. L'un des exemples le plus parlant concerne Bobby Drake. Ce dernier a décidé que ses études de comptable ne lui permettaient pas de s'épanouir et qu'il préférait revenir à la vie de superhéros. Mais DeMatteis ne dépasse jamais le stade du constat que c'est sympa de s'éclater avec ses potes (Hank et Warren). L'introspection s'arrête à ce niveau primaire et même la visite chez les parents de Bobby ne relance pas la réflexion.



Le deuxième aspect mis en avant avec l'épisode 123 concerne les criminels que les Defenders doivent combattre. Cette série possède une longue tradition de menaces sortant de l'ordinaire et DeMatteis respecte cette tradition. Mais à y regarder de plus près, le résultat laisse pantois en termes d'utilisation des codes propres aux récits de superhéros. Coté surréaliste, la dose y est : il n'y a qu'à voir Moondragon apostropher Cloud. Une télépathe au costume très révélateur mène une discussion passionnée avec un nuage de taille humaine, mais de forme nuageuse. Malheureusement ce moment surréaliste au possible reste ponctuel et les intrigues globales ne sont pas du même niveau. Anthony Powers (responsable du Secret Empire) ambitionne de devenir maître du monde (difficile de trouver un cliché plus éculé), tout en partageant un historique alambiqué avec Charles Xavier, composante qui est répétée à plusieurs reprises sans apporter grand-chose à la narration.



De la même manière, la révélation du l'intrigue secondaire liée à l'Elf au pistolet peine à intéresser le lecteur du fait de circonvolutions artificielles dont l'unique objectif est d'écarter l'équipe originelle des Defenders, sans aucune incidence sur les péripéties de l'autre équipe. Du coup ce dispositif narratif intriguant (l'elf) se mue en une explication laborieuse et inintéressante. DeMatteis prouve à nouveau que personne ne peut faire du Steve Gerber, qu'il avait une forme d'imagination qui n'appartenait qu'à lui.



La principale équipe de dessinateurs est constituée de Don Perlin et Kim DeMulder (le premier réalisant les mises en page et les esquisses, le second les complétant et les encrant). Ils illustrent les épisodes 122 à 125, 129. Alan Kupperberg illustre les épisodes 126, 127 (avec Sal Buscema), 128 avec un encrage de Mike Mignola, et 131 tout seul. Enfin Mike Zeck dessine l'épisode 130, avec un encrage de Kim DeMulder. Toutes ces équipes réalisent des dessins très prosaïques, avec une faible quantité de détails et des mises en page peu inspirées. Les visages sont uniformément laids et repoussants. À leur décharge il faut bien dire que l'anatomie est respectée et que chaque case se lit facilement, même lorsque les cellules de texte prennent des proportions envahissantes. Mais d'épisode en épisode, il devient évident que Don Perlin n'a pas la fibre superhéros, il ne pratique pas l'emphase propre à ce style, et il n'arrive pas à trouver des compositions de cases qui mettent en valeur l'utilisation des superpouvoirs soit pour les magnifier, soit pour montrer leur aspect contre-nature. Par contre il est vrai que les scènes de dialogues hors combat dégagent une forme de charme suranné qui ajoute à leur aspect prosaïque. Kupperberg ne s'en sort pas mieux en se calant sur le style de Perlin, avec une compréhension de l'anatomie moins fiable. Il faut attendre l'épisode 131 où il s'encre lui-même pour qu'apparaissent des détails plus personnels. L'épisode de Mike Zeck correspond à un travail rapide, sans l'éclat ni l'intensité de son travail sur le Punisher.



Ce tome offre une plongée nostalgique dans une série à part dans le tout-venant Marvel. Le talent de DeMatteis brille dans les scènes où les héros se retrouvent pour papoter, malheureusement tout le reste s'apparente à une production de masse peu inspirée. Malgré leurs talents, Don Perlin et Alan Kupperberg n'arrivent pas à donner l'éclat nécessaire à ses péripéties bas de gamme. Il reste tout un lot de couvertures qui, elles, sortent de l'ordinaire et mettent en évidence les talents d'illustrateurs de Carl Potts, Kevin Nowlan et Frank Cirocco.
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Spider-Man: Soul of the Hunter

Il s'agit d'une histoire complète en 1 seul tome initialement parue en 1992. Elle constitue un épilogue pour Kraven's Last Hunt (1987), réalisée par les mêmes auteurs (JM DeMatteis, Mike Zeck et Bob McLeod).



À New York, en plein hiver, il neige, Peter Parker et Mary-Jane Watson descendent d'un taxi pour assister à une cérémonie funéraire. La défunte était la mère d'un ami commun de Peter et MJ. La vue du corps dans son cercueil ravive des souvenirs dans l'esprit de Peter : le corps de Ben Parker, et les 2 semaines que Peter a passé dans un cercueil lors de "Kraven's last hunt". Submergé par l'angoisse, il sort et tisse quelques toiles au dessus des toits pour lutter contre la sensation de sa propre mortalité. De retour au funérarium, il écoute le discours du prêtre. Il évoque l'image utilisée par le prêtre avec MJ qui comprend la source du trouble de Peter. Bientôt les cauchemars de Peter sont hantés par le spectre de Sergei Kravinoff.



"Kraven's last hunt" a marqué les esprits des lecteurs du fait d'une narration concise, de thèmes assez durs (la mort, l'échec, le suicide). D'un point de vue commercial il était donc naturel d'envisager une suite. D'un point de vue thématique, il aurait été catastrophique de ressusciter Kraven (oui, je sais, on a déjà vu pire). DeMatteis propose une histoire assez courte (45 pages de bandes dessinées) qui reprend les mêmes thèmes (mort, échec, suicide) sans remettre en cause la mort de Kraven.



Les événements de "Kraven's last hunt" ont traumatisé Peter Parker et il n'a pas encore accepté la réalité de ce qui s'est passé. Le traumatisme s'avère profond (enterré vivant pendant 2 semaines) et l'esprit de Peter n'arrive pas digérer ces émotions et donner du sens à ces événements. JM DeMatteis est très à l'aise dans cette histoire. Il met en évidence le conflit psychologique de Peter. Spider-Man aurait-il pu éviter le suicide de Kraven ? N'a-t-il pas un autre mort sur la conscience, faute d'être intervenu à temps (comme pour l'oncle Ben) ? À partir de là, Peter s'interroge sur la mort et le devenir de l'âme. En fait DeMatteis juxtapose 2 interprétations potentielles des tourments de Peter avec possibilité pour le lecteur de préférer l'une ou l'autre. D'un coté, DeMatteis suggère que l'âme de Kraven ne pourra pas trouver de repos du fait qu'il s'est suicidé. De l'autre, il est possible que Peter ait refoulé ces expériences traumatisantes dans son esprit sans réussir à les assimiler et que le spectre en soit la manifestation fantasmée.



Évidemment comme il s'agit d'un comics, les images illustrent plutôt le spectre et le combat qu'il mène contre Peter Parker. Mike Zeck effectue une mise en page efficace, avec une moyenne de 4 à 6 cases par page. Chaque dessin opte pour une posture classique des personnages. Peter et MJ apparaissent crédibles en tant qu'individus. Les dessins sont simples sans être creux, avec une réminiscence du style de John Romita senior. Zeck et McLeod intègrent ce qu'il faut de détails pour que les lieux prennent un peu de personnalité. Même lors de la scène finale dans un cimetière sous la neige, ils évitent de recourir aux cases sans décors (grande amélioration par rapport à "Kraven's last hunt"). L'autre évolution importante dans le style graphique réside dans l'encrage, en particulier des ombrages. Zeck (ou McLeod) a conservé son goût pour les belles surfaces noires, mais il a également développé les hachures pour les zones baignées d'une faible luminosité. À mon goût, les illustrations perdent de leur fort contraste et la juxtaposition de zones noires et de hachures jure un peu. La présence des personnages sur la page impressionne par son intensité. Zeck et McLeod recourent au leitmotiv sans en abuser. Par contre, quelques visuels restent un peu enfantins, telle la nuée des âmes des suicidés et la mystérieuse silhouette encapuchonnée.



À sa parution, cette histoire a déçu le lectorat américain qui n'a pas retrouvé l'intensité dramatique et la noirceur de Sergei Kravinoff. Effectivement, ce récit aborde des aspects délicats du deuil et de la gestion psychologique d'un traumatisme. DeMatteis privilégie l'aspect spirituel à l'aspect psychologique, et les illustrations abondent dans ce sens. Les 3 créateurs s'accommodent facilement des codes des superhéros pour aborder ces questions, sans tomber dans le ridicule. Toutefois, la réflexion spirituelle reste à un niveau assez simple du fait de la faible pagination. Il n'en reste pas moins un récit prenant qui fournit un épilogue à la hauteur du récit initial.
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Justice League International vol. 3

Ce tome comprend les épisodes 14 à 22 ; il fait suite à JLI 2 (épisodes 8 à 13, annuel 1 et Suicide Squad 13).



Épisode 14 & 15 (dessins de Steve Leialoha, encrage d'Al Gordon) - À bord d'un énorme vaisseau extraterrestre, Manga Khan et ses commerciaux (avec leur slogan "achetez ou mourrez !) ont décidé de prospecter une planète qui semble être une proie facile : notre bonne vieille terre. Comme un malheur n'arrive jamais seul, G'nort (le green lantern le plus incapable de l'histoire) a décidé de venir nous aider. J'onn J'onzz organise une équipe d'intervention avec les membres de la JLI dont il dispose : Mister Miracle (Scott Free), Booster Gold (Michael Jon Carter), Blue Beetle (Ted Kord), Rocket Red (Dmitri Pushkin), Captain Atom (Nathaniel Adam), Icemaiden (Tora Olafsdotter) et Green Flame (Beatriz Bonilla Da Costa).



Épisode 16 & 17 (dessins de Kevin Maguire, encrage d'Al Gordon) - Ruman Harjavti (le dictateur de Bialya, une petite nation balkanique) a indiqué par voie de presse qu'il invitait des grands de ce monde et des célébrités à découvrir sa nouvelle arme dissuasive. Batman (déguisé en Bruce Wayne pour l'occasion) fait partie des invités de marque et il a amené avec lui Green Flame (qui a changé son nom en Fire, pour former le duo Fire & Ice avec l'ex-Icemaiden), Blue Beetle et Booster Gold. Pendant ce temps, Big Barda (la femme de Scott Free), Martian Manhunter, Rocket Red et G'nort se sont lancé à la poursuite de Manga Khan qui a capturé Mister Miracle et qui compte bien trouver un acheteur intéressé, pour réaliser un joli profit.



Épisodes 18 & 19 (dessins de Kevin Maguire, encrage d'Al Gordon, puis Joe Rubinstein) - Manga Khan a décidé de faire appel à un assassin professionnel pour se débarrasser des cette JLI qui s'avère vraiment collante. Il loue donc les services d'une personne qui mène toujours à bien son contrat : Lobo (dont le nom signifie dans sa langue maternelle : celui qui dévore votre entrailles et y prend plaisir). Lobo commence par affronter l'équipe du Martian Manhunter dans l'espace, puis il se retrouve au siège de la JLI à New York. Guy Gardner prend un nouveau coup sur la tête. La JLI essaye de recruter de nouveaux membres.



Épisodes 20 & 21 (dessins de Ty Templeton, encrage de Joe Rubinstein) - Manga Khan a décidé de vendre Mister Miracle à Granny Goodness, sur Apokolips.



Épisode 22 (dessins de Kevin Maguire, encrage de Joe Rubinstein) - Il s'agit d'un épisode découlant du crossover Invasion, secret no more. Une bande d'extraterrestres lilliputiens a envahi l'ambassade de New York de la JLI. Il n'y a plus qu'Oberon pour les arrêter.



Keith Giffen continue d'utiliser son imagination délirante, son second degré mordant et son sens de l'autodérision pour emmener la JLI là elle n'était pas encore allée. Il subit toujours le dictat des éditeurs de DC Comics qui ne lui permettent pas d'utiliser Superman, Aquaman, Wonder Woman, et Batman (dans une moindre mesure pour ce dernier). Giffen n'hésite pas à recourir au cliché de l'invasion extraterrestre (ressort narratif usé jusqu'à la corde) pour construire une histoire sur 8 épisodes. Mais ces extraterrestres là ont pour credo le profit, comme alternative à la conquête militaire. Ils ont à leur tête un humanoïde recouvert d'une armure dorée de la tête aux pieds, qui a la fâcheuse habitude de parler tout seul à haute voix. Il est servi par un robot valet affublé du nom de L-Ron (une forme d'ironie dirigée contre le fondateur de la Scientologie) qui est très sensible à la mode robotique et à l'humeur changeante de son patron. En fait, il faut bien reconnaître que cette histoire étirée finit par lasser parce que le tandem Giffen/DeMatteis alterne trop systématiquement les scènes d'action avec les scènes de dialogues humoristiques. Le lecteur finit par avoir l'impression que chaque épisode doit remplir son quota de l'un et de l'autre, aux dépends d'un déroulement plus organique de l'intrigue.



Heureusement, JM DeMatteis continue à s'en donner à coeur joie pour les dialogues. Manga Khan est aussi mégalomaniaque que risible. L-Ron est à la fois servile et méprisant. Et puis il y a la consolidation de l'amitié sarcastique entre Blue Beetle et Bosster Gold, l'amitié de 2 personnes aux personnalités opposées (extravertie/introvertie) que sont Fire & Ice. Keith Giffen et JM DeMatteis calquent la personnalité de Beatriz Da Costa sur le stéréotype de la femme brésilienne (sexy, sublime et n'ayant pas froid aux yeux). Le pauvre Captain Atom est plus frustré et humilié que jamais. Le vrai Guy Gardner est de retour. Seul Lobo n'a pas le droit à sa personnalité habituelle car à l'époque il s'agit encore d'un personnage très récent, et Alan Grant & Keith Giffen ne l'ont pas encore approfondi (ce qu'ils feront dans Lobo, Portrait of a Bastich). Par contre, l'humour et Apokolips ne font pas bon ménage car le mélange transforme Darkseid en méchant d'opérette.



5 épisodes dessinés par Kevin Maguire, c'est toujours un plaisir pour le sens du détail vestimentaire, pour les moues expressives, pour le langage corporel et la majesté impressionnante de l'espace intersidéral. Je regrette juste qu'Al Gordon n'ait pas été en charge de l'encrage de tous les épisodes car Rubinstein a du mal à s'adapter au style de Maguire.



Les épisodes 14 & 15 sont intéressants visuellement car Leialoha a choisi de mettre du Steve Ditko dans ses dessins. Il adopte un style un peu vieillot avec un résultat convaincant pour les scènes d'action et d'humour, sans jamais essayer de faire du sous-Maguire. Ty Templeton respecte le cahier des charges : réaliser des dessins minutieux dans lesquels figurent beaucoup de personnages. Mais son style est nettement plus rond et plus enfantin, rajoutant encore une couche d'infantilisme pour la séquence sur Apokolips qui n'en avait vraiment pas besoin.



La JLI continue de défricher des nouveaux territoires dans JLI 4 (épisodes 23 à 30).
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Marvel Comics - La collection : Amazing Spi..

Ce recueil constitue une histoire complète parue à l'origine en 1987 dans Web of Spider-Man 31 & 32, Amazing Spider-Man 293 & 294, et Spectacular Spider-Man 131 & 132. Ce tome comprend les 6 épisodes en question.



Sergei Kravinoff est un criminel qui s'habille d'un pagne en léopard et d'un gilet sans manche et se fait appeler Kraven the Hunter. Ce personnage est apparu pour la première fois dans Amazing Spider-Man 15 en août 1964. Il possède des connaissances en herboristerie qui lui permettent de concocter des potions ayant différents effets : poison, paralysie, augmentation de la force ou de l'acuité des sens... Dans cette histoire, Kraven abat Spider-Man d'une balle de fusil de chasse, il le fait enterrer et il revêt l'habit du superhéros pour prendre sa place.



J.M. DeMatteis est un grand professionnel des comics, autant pour des histoires de superhéros (Batman : absolution & Justice League International), que pour des bandes dessinées plus personnelles (The Compleat Moonshadow & Brooklyn Dreams). Mike Zeck est essentiellement connu pour avoir illustré The Punisher : Cercle de sang. Il est ici encré par Bob McLeod, un autre professionnel vétéran des comics.



La particularité de cette histoire de Spider-Man est qu'elle a pour principal personnage le criminel et que Peter Parker ne débite pas de blagues. Il s'agit d'une histoire très sombre qui a pour principaux thèmes l'introspection de Kravinoff et l'impact prychologique pour Peter Parker d'avoir été enterré vivant. J.M. DeMatteis nous fait pénétrer dans la psyché de Sergei sous forme de flux de pensées. Il nous invite à adopter le point de vue de Kraven sur la réelle signification des combats qui l'opposent à Spider-Man et sur le poids de son héritage familial. Du coté de Peter Parker, DeMatteis nous montre à la fois la peur instillée par Kraven et l'incapacité totale à déchiffrer et comprendre les actions de Kraven.



À l'évidence, il ne s'agit pas d'un comics pour les plus jeunes et il ne rentre pas dans le moule des aventures habituelles du tisseur de toiles. DeMatteis va même jusqu'à jouer avec l'idée de l'araignée comme totem de Peter Parker (thème qui sera repris et développé plus tard par Straczynski) et comme symbole de l'échec de l'être humain. Les illustrations de Mike Zeck sont un peu datées années 80 et souffrent à plusieurs reprises d'un manque criant d'arrière plan. D'un autre coté le rendu des personnages est très soigné avec des relents de Joe Kubert qui leur donnent une intemporalité et une force peu commune.



Pour les fans, cette histoire se classe parmi les meilleurs classiques de Spider-Man. Effectivement les 2 créateurs réussissent le pari de rendre Sergei Kravinoff humain, crédible, tourmenté et étrangement lucide. Peter Parker a rarement été aussi vulnérable et héroïque. Mary Jane (les 2 étaient jeunes mariés à ce moment) est une femme amoureuse mais pas mièvre. Ce qui m'arrête dans l'attribution d'une cinquième étoile est ce manque de décors très déconcertant et le mode narratif qui ne va pas assez loin dans l'utilisation du flux de pensées désordonnées. L'exécution de l'histoire manque d'un soupçon de savoir faire pour atteindre tous les buts ambitieux qu'ils s'étaient fixés. Cette histoire a eu droit à un épilogue : Soul of the Hunter (en anglais).
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Spider-Man, tome 4 : La dernière chasse de Kr..

Un quatrième tome vraiment sympa. Cette collection renferme vraiment des pépites ! La dernière chasse de Kraven est un vrai classique des aventures de Spiderman. Ici, on a quelque chose de très sombre, accompagné par une "voix-off" qui rend chaque personnage schizophrénique. C'est un récit lourd, les dessins sont sombres, accentué par le costume noir de Spiderman. Le récit a aussi ce côté tragique où Kraven atteint son but ultime... pour quoi ensuite ? Rien, il n'y a plus rien. J'ai vraiment aimé cet épisode !
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2010, l'année du premier contact

Une adaptation en BD du film et du roman du même nom d'Arthur C. Clarke. Je n'ai vu ni le film, ni lu le livre. Cette BD date de 1985, où nous voyons les Russes et les Américains qui sont encore ennemis en 2010. L’œuvre est surtout une guerre froide, une rivalité entre USA et URSS sur font de SF.
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Justice League 3001, tome 2 : Things Fall A..

Ce tome fait suite à Déjà vu all over again (épisodes 1 à 6 + Sneak peek) qu'il faut impérativement avoir lu avant. Il contient les épisodes 7 à 12, initialement parus en 2016, coécrits par Keith Giffen & John-Marc DeMatteis. Les dessinateurs sont les suivants : Chris Batista pour l'épisode 7, Scott Kolins pour les épisodes 8 à 11, Colleen Doran & Timothy Green pour l'épisode 12, Colleen Doran pour les histoires en fin de chapitre des épisodes 9 & 10, consacrées à Lois Lane & Ariel Masters.



À la fin du tome précédent, une armée robotique de scullions avait surgit de nulle part pour mettre en œuvre un nouvel ordre à l'échelle de la galaxie. Ils avaient annoncé l'avènement de Lady Styx, comme despote intergalactique. La Justice League de l'an 3001 avait été contrainte de battre en retraite. Cette Justice League se compose de versions étranges (et expliquées dans les tomes précédents) de Supergirl (en provenance du temps présent), Batman (Tina), Ice (Tora Olafsdotter), Wonder Woman, Fire, Guy Gardner et Flash (Teri Magnus). Ces superhéros ont dû fuir et se réfugier dans un lieu secret pour échapper aux Sculions, capables de se régénérer à grande vitesse en se dédoublant, et capables de s'adapter aux capacités des individus qu'ils combattent.



L'équipe dispose d'un téléporteur qui leur permet d'aller et venir à leur guise. Contraints et forcés, les membres doivent retourner à la vie civile en briguant un emploi capable de leur donner des informations sur le nouveau régime mis en place si rapidement. Mais certains d'entre eux préfèreraient en découdre au plus vite, quitte à trouver une mort digne au combat. Teri Magnus propose de retourner au Projet Cadmus pour essayer de trouver des indices sur l'identité réelle de Lady Styx. Cette dernière n'attend pas que ses derniers ennemis réussissent à trouver des armes assez puissantes pour avoir une chance de la battre. Elle a récupéré Terry Magnus (le frère jumeau de Teri) et l'a transformé en Eclipso. Il a alors assemblé plusieurs individus dotés de superpouvoirs pour former la Légion de la Ruine.



En apprenant le lancement de la série Justice League 3000 en 2014, le lecteur s'en était pourléché les babines à l'idée de retrouver le duo mythique de la JLI, sur un nouveau de titre de la Justice League, qui plus est éloigné de la continuité, donc avec une liberté de délire assez grande. Il s'était vite rendu compte que Keith Giffen & John-Marc DeMatteis s'étaient associés une nouvelle fois pour avant tout raconter une histoire, sans revenir au ton de la comédie de situation qui avait les beaux jours de Justice League International en 1987. Il y avait bien quelques clins d'œil aux années 1980, et quelques prises de bec, mais dans une moindre mesure. Le constat reste le même dans cet ultime tome. Cette série n'ayant pas su attirer assez de lecteurs, elle se termine à l'épisode 12, intitulé Cancelled (annulé) comme un dernier clin d'œil, un signe de dérision.



Comme dans les tomes précédents, les auteurs ont plus misé sur l'intrigue que sur les personnages. Giffen & DeMatteis en donnent pour leur argent avec des épisodes comprenant de nombreux rebondissements, et des phylactères denses, sans être envahissants. Ils gèrent à la fois une mainmise d'un mystérieux despote sur le gouvernement galactique, avec une prise de pouvoir aussi soudaine qu'efficace, une enquête menée par les membres de cette Justice League peu banale (7 membres), les recherches de Lois Lane et Ariel Masters, les rapports heurtés entre ces membres, le retour d'autres personnages dont une nouvelle itération d'Eclipso et le retour du pire des Green Lantern (G'nort), des liens avec la continuité. Comme à son habitude, Keith Giffen a bien fait son travail avec une intrigue solide, charriant une belle distribution de personnages. Il s'approprie le cliché du criminel qui veut devenir le maître du monde en établissant qu'il a réussi. Il se moque gentiment des clichés habituels, avec des personnages qui veulent foncer dans le tas pour se montrer plus fort que le tyran. Leurs coéquipiers leur rappellent que ce n'est pas en détruisant quelques sculions qu'ils renverseront un régime, ou qu'ils remettront en cause l'hégémonie dudit tyran. Contrairement à certains de ses collègues, il gère bien les déplacements d'une planète à une autre par le biais d'un dispositif de téléportation. Le lecteur qui a lu la série depuis son début avec Yesterday's lives a le plaisir de constater que les intrigues secondaires ne sont pas oubliées et sont bouclées comme il se doit, comme celle liée au shérif Tariq, ou celle liée à Starro.



Au vu de la densité narrative, le lecteur se dit que les auteurs ont peut-être dû accélérer le rythme pour pouvoir boucler leur histoire dans le nombre d'épisodes qui leur était imparti. Il constate que par voie de conséquence John-Marc DeMatteis dispose de moins de place pour faire exister les personnages, les dialogues servant avant tout à apporter des informations sur l'intrigue. Il réussit quand même quelques moments remarquables : Wonder Woman dépassant le stade d'individu qui tape d'abord et qui réfléchit après, Guy Gardner risquant de voir la personnalité de Shiryalla supplanter la sienne, Tina (Batman) se rendant insupportable par son manque de contrôle de soi et ses réparties sarcastiques qui fusent. Il doit parfois faire avec la propension iconoclaste marquée de Giffen, sans réussir à tout sauver, comme le rôle vraiment trop exagéré de Sinestro.



L'époque à laquelle se déroule l'histoire est propice au rapatriement de personnages emblématiques de l'univers partagé DC, sous une forme remaniée. Le lecteur prend un malin plaisir à détester cette version de Lois Lane. Il prend Guy Gardner et G'nort en pitié. Il regrette que les auteurs n'aient pas disposé de la place nécessaire pour pouvoir développer suffisamment la Légion de la Ruine. Il se demande où sont passés Booster Gold et Blue Beetle. Il se rend compte que la fin prématurée de la série n'aura pas permis de développer ces éléments de manière à ce qu'ils expriment toute leur saveur.



Le premier épisode est dessiné par Chris Batista, sur la base d'un découpage effectué par Keith Giffen qu'on a déjà connu plus inspiré sur cette tâche. Les dessins sont denses comme ceux de Scott Kolins, mais plus appliqués et plus fades. Les expressions des visages manquent de nuances, et les postures manquent d'originalité. Les images font leur travail narratif, mais sans réelle saveur. C'est donc un vrai plaisir de retrouver les dessins plus rentre-dedans de Scott Kolins pour les 4 épisodes suivants. Les formes sont souvent détourées par des traits de contours fins et secs, ce qui confère une impression de spontanéité aux images, ainsi qu'une impression de forte densité visuelle, que certains pourront trouver un peu surchargée. Kolins embrasse pleinement les conventions visuelles propres aux comics de superhéros : personnages souvent agités, décors baroques, décharges d'énergie, postures bagarreuses et agressives. Ces dessins sont rehaussés par une grande attention portée aux détails, donnant une forte consistance à chaque costume, chaque décor, et prouvant que le dessinateur s'investi fortement dans ce qu'il raconte, ce qui a pour effet d'augmenter le degré d'immersion du lecteur. La mise en couleurs précise et appliquée des studios Hi-Fi augmente la facilité de lecture des cases, en accentuant la distinction entre chaque surface. Scott Kolins compense la densité de la lecture par des dessins à l'énergie juvénile et communicative.



Il appartient donc à Colleen Doran (auteure de A distant soil, et dessinatrice de Gone to Amerikay ou de Amazing Fantastic Incredible: A marvelous memoir) de suppléer Scott Kolins, tout d'abord par 2 récits de 5 pages en fin des épisodes 9 & 10, puis dans le dernier épisode. Pour le fil narratif consacré à Lois Lane et Ariel Masters, elle réalise des dessins également avec une bonne densité d'informations visuelles, mais plus propres sur eux que ceux de Kolins, plus posés. La narration visuelle revient vers des comics traditionnels, mais en conservant les détails baroques conçus par Kolins. Le dernier épisode conserve également ce bon niveau de détails, mais avec un découpage et une mise en scène plus conventionnels, en particulier pour l'affrontement final. Sans retomber dans une production mensuelle insipide, la série perd quelques degrés de personnalité.



Avec ce dernier tome de la série, le lecteur apprécie l'inventivité des auteurs, la rigueur de l'intrigue, les efforts de caractérisation des personnages, l'énergie débridée de Scott Kolins. Mais il ne peut que regretter que la fin ne survienne trop vite et trop tôt. Plusieurs idées n'ont pas pu être suffisamment développées. Les dialogues ont trop à faire en termes d'information sur l'intrigue pour pouvoir exprimer la personnalité de chaque personnage. Scott Kolins doit boucler ses épisodes trop vite pour pouvoir tous les assurer. D'un côté le lecteur éprouve une forme de satisfaction à ce que les auteurs aient pu mener leur histoire à son terme ; de l'autre il regrette cette précipitation qui nuit gravement à la qualité de la narration.
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Justice League 3000, tome 1 : Yesterday Lives

Ce tome regroupe les épisodes 1 à 7 d'une nouvelle série débutée en 2014. Elle écrite par Keith Giffen (scénario) et John-Marc DeMatteis (dialogues), avec des dessins et un encrage d'Howard Porter, et une mise en couleurs du studio Hi-Fi. Seul l'épisode 5 a été dessiné par une autre équipe : Raymond Bermudez et Wayne Faucher. Une connaissance très superficielle des principaux personnages DC suffit pour pouvoir apprécier ce récit.



À l'aube du trente-et-unième siècle, sur la planète Bradbury Seven, Ariel Masters essaye de conserver son avance sur ses poursuivants. Ils agissent pour le compte des 5 et essayent de la capturer pour qu'elle mette son savoir scientifique à leur service (elle a été à la tête du projet Cadmus). Sur Cadmusworld, les jumeaux Terry et Teri ont pris sa suite à la tête du projet Cadmus.



Sur une autre planète, 5 superhéros sont en train de se battre contre une entité collective "The convert" qui prend possession des habitants. Ces superhéros ressemblent très fortement à Superman, Batman, Green Lantern, Wonder Woman et Flash. Après avoir plus ou moins réglé ce problème, ils sont envoyés par Terry et Teri, sur une autre planète pour neutraliser une garnison des 5.



À l'annonce de cette nouvelle série, l'attention du lecteur est titillée par la nature de la série, et par l'identité des auteurs. D'un côté, il s'agit d'une nouvelle série consacrée à la Justice League, mais elle se déroule dans le futur, donc potentiellement avec une Légion des SuperHéros pas très loin. De l'autre côté, le tandem Giffen & DeMatteis a laissé sa marque dans l'univers partagé DC, avec une version originale de la Justice League mêlant humour et personnages de second plan, dans Justice League International Vol. 1. Howard Porter a lui aussi imprimé sa marque sur la Justice League quand il dessinait les histoires créées par Grant Morrison : JLA Vol. 1 et suivants.



Giffen construit la dynamique de son récit sur 2 axes. Le premier est de savoir qui sont réellement ces 5 superhéros. Ce ne sont pas des clones développés dans le futur, ni des robots. De séquence en séquence, le lecteur s'amuse à jouer au jeu des comparaisons : les points communs et les différences, à commencer par le caractère des uns et des autres. Sur ce dernier point, le lecteur s'apprête à savourer des dialogues ciselés et pétris d'humour. Il commence par s'amuser de l'ego surdimensionné de Superman, du caractère suffisant de Batman, de l'agressivité de Wonder Woman. Mais ces caractéristiques deviennent répétitives dès le deuxième épisode, sans progression, un humour de répétition trop mécanique. Le lecteur patiente donc gentiment pour accumuler les indices sur la nature réelle de ces personnages (elle est révélée dans ce tome).



La deuxième dynamique du récit réside dans l'intrigue elle-même, c'est-à-dire la nature réelle du projet Cadmus, et cette guérilla contre les 5. Le lecteur reconnaît le savoir-faire de Giffen qui amalgame de manière naturelle ces 2 composantes, et le développement des personnages. Par contre il ne retrouve pas la démesure de ce scénariste (présente par exemple dans Lobo: portrait of a bastich). Il introduit bien un personnage ayant la possibilité de remodeler la réalité à sa guise (Locust), mais l'utilisation de son superpouvoir reste assez mesurée et plate.



De son côté, JM DeMatteis s'acquitte de sa tâche en rédigeant des dialogues mesurés. Mais rapidement le lecteur s'aperçoit que le scénario de Giffen exige de longs dialogues pour pouvoir exposer tous les éléments de l'intrigue, et que DeMatteis a du mal à faire mieux que de l'utilitaire. La finesse incisive des dialogues de la Justice League International n'est pas présente ici, à cause du volume d'informations à transmettre.



Howard Porter crée un univers visuel plutôt dense, avec une composante futuriste convaincante. En particulier, il dessine des vues d'ensemble sur 2 ou 3 doubles pages qui dépassent le simple décor en carton-pâte. Il a su conserver l'incroyable énergie de l'époque JLA, en affinant ses dessins pour un encrage plus fin, et des expressions plus nuancées.



Il suffit de comparer les épisodes dessinés par Porter à celui dessiné par Bermudez et Faucher pour se rendre compte de la différence. Sans être mauvais, ces derniers ne prêtent pas la même attention aux décors, au langage corporel, aux tenues des superhéros. Du coup leurs dessins sont plus fades. Par contraste, Porter est plus minutieux, plus constant dans le degré de détail, ce qui donne une narration visuelle plus intense.



Au final, ce tome propose une équipe de superhéros qui ressemble à la Justice League, mais avec assez de variations pour ne pas être une pâle copie et posséder une identité propre. L'histoire ne se focalise pas uniquement sur ces incarnations de Batman et consorts, et s'ouvre sur une lutte contre une dictature inique dont le lecteur découvre petit à petit le visage, en intégrant des références discrètes à l'univers partagé DC (le projet Cadmus apparaissant pour la première fois dans les séries "Fourth World" de Jack Kirby). Howard Porter apporte une grande énergie aux dessins, et une consistance qui dépasse les décors de série Z.



Néanmoins, Howard Porter doit également dessiner beaucoup de dialogues, c'est-à-dire des têtes en train de parler. JM DeMatteis a déjà été beaucoup plus inspiré pour écrire des dialogues aux petits oignons et Giffen doit installer tellement d'informations qu'il n'a pas l'opportunité de se lâcher vraiment. Un peu comme dans Larfleeze - Revolt of the Orange Lanterns (également de Giffen et DeMatteis), le lecteur sent qu'il y a du potentiel dans le récit, mais que les auteurs n'arrivent pas en tirer tout le parti attendu.
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