AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jacques Lusseyran (156)


“La joie ne vient pas du dehors. Elle est en nous quoiqu’il arrive. La lumière ne vient pas du dehors. Elle est en nous, même sans les yeux.”
Commenter  J’apprécie          180
Alors que les lois des hommes sont si chatouilleuses en matière de corps, elles n'ont jamais eu l'idée de fixer des bornes à la nudité ni au contact des voix. Apparemment, elles ne songent pas que la voix peut aller plus loin, dans l'ordre des attouchements licites et illicites, que toutes les mains et tous les yeux n'ont jamais été.
Commenter  J’apprécie          170
Claude et Raymond étaient philosophes. Ils pensaient que la France n'étaient qu'un cas particulier des démocraties, et que c'était la démocratie qu'il fallait défendre, qu'elle était digne de tous les courages.
D'autres, tels François et Jean et bientôt la plupart, exprimaient moins clairement leurs raisons de se battre, mais les connaissaient mieux.
Les mots leur étaient aussi indifférents qu'à moi. Ils se battaient pour l'Honneur, la Liberté, l'Idéal, le Droit à la Vie, la Pureté, le Christianisme, le Respect... Simplement, ils ne supportaient plus qu'on bombarde et affame les populations civiles, qu'on mente en public et conformément à des lois, qu'on appelle alliance le pillage, et protection le despotisme policier.
Surtout, nous ne voulions plus qu'on traite un monstre (ou même un homme : Adolf Hitler) comme s'il était un dieu. "Dieu n'est ni allemand, ni russe, ni français" : je le répétais sans cesse à Georges. "Dieu, c'est la Vie, et tout ce qui attente à la vie est contre Dieu." p 172-173
Commenter  J’apprécie          170
Il ne faut pas perdre la vie. C’est une source très forte mais très cachée : quelques détours, et nous voilà tous égarés loin d’elle pour longtemps. Or, il me semble cette nuit que le campus s’est éloigné d’elle, je ne sais comment. Cela lui donne un caractère d’irréalité. Et je me trouve à l’aise, mais je me trouve sans joie.
La liberté politique, c’est bien. La liberté sociale, c’est bien. Mais il est une autre forme de liberté dont, par un concert général de silence, personne ne parle aujourd’hui, ni dans les États démocratiques ni dans les autres : c’est la liberté intérieure.
Je ne dis pas la liberté religieuse : celle-là, qu’on me pardonne, est importante mais relativement superficielle. Je dis l’indépendance, la non-dépendance des hommes, de chacun d’eux pour son compte, envers les biens matériels, l’océan des services et des produits qui résultent de son industrie. C’est encore plus simple : la non-dépendance des hommes envers le monde extérieur.
Ce que je vois à travers la nuit bien faite et parfumée de mon « college », c’est que mon « college » n’existe pas – pas plus qu’aucun lieu de la terre – s’il n’y a pas des hommes pour le voir, pour le bâtir de nouveau à chaque regard qu’ils posent sur lui. C’est que sa beauté n’existe pas, si les filles et les professeurs qui l’habitent ne la font pas se lever du fond d’eux-mêmes chaque matin.
Les objets sont des pièges et d’autant plus prompts à se refermer sur nous qu’ils sont plus parfaits. Hollins, l’Amérique, la civilisation du XXe siècle sont des pièges. p 34-35
Commenter  J’apprécie          172
"En prison , plus que jamais, c’est au-dedans de vous qu’il faut vivre. Et s’il y a une personne dont vous ne pouvez pas vous passer, réellement pas, faites comme je faisais alors : regardez-là plusieurs fois par jour, longtemps. Mais n’essayez pas de l’imaginer là où elle est en ce moment, là où il y a de l’aire libre et partout des portes ouvertes, parce que vous n’y arriverez pas et que cela vous fera du mal. Regardez-là en vous. Coupez autour d’elle tout ce qui est espace Toute la lumière que vous contenez, mettez-là sur elle. N’ayez pas peur de l’épuiser, cette lumière : l’amour, la pensée, la vie en contiennent à ne plus savoir qu’en faire.”
Commenter  J’apprécie          160
“Nous passons notre temps à préférer les idées que nous avons du monde au monde même. L’égoïsme n’est qu’une forme, et très particulière, de cette préférence totale. Ce qui m’empêche de lire dans la pensée d’autrui, ce n’est pas le silence d’autrui, ou même ses mensonges. C’est le bruit que je fais, dans ma tête, à son sujet. Avant d’aller à lui, je calcule, je pèse et contre-pèse les mérites et les torts, je tire déjà ma conclusion. Cette conclusion, je la crie dans mes propres oreilles. Je m’enivre d’elle, je m’endors déjà sur elle. Comment pourrais-je m’étonner ensuite de ne pas voir cet homme que j’ai enseveli dans mon vacarme? Je me suis dressé dans mon armure d’habitudes, dressé moi-même entre lui et moi. Je vais donc me tromper, être trompé, m’établir enfin dans ma solitude — une solitude hostile. Ah! L’artificielle misère, et comme il serait plus simple de faire attention! Comme cela nous rendrait heureux!
Commenter  J’apprécie          160
Mes parents me portaient. C'est sans doute pourquoi, pendant toute mon enfance, je n'ai pas touché terre. Je pouvais m'éloigner, revenir; les objets n'avait pas de poids, rien ne collait à moi. Je passais entre les dangers et les peurs comme la lumière à travers le miroir. Et c'est cela que j'appelle le bonheur de mon enfance. C'est une armure magique qui, une fois posée sur vos épaules, peut-être transportée à travers votre existence entière.
Commenter  J’apprécie          140
La voix humaine entre en nous, de force. C'est vraiment à l'intérieur de nous que nous l'entendons. Il faut même, pour l'entendre bien, la laisser vibrer dans notre tête et notre poitrine, dans notre gorge, comme si elle était la nôtre pour un instant. C'est pour cette raison sans doute que les voix ne nous trompent pas.
Commenter  J’apprécie          140
Mes parents me portaient. C'est sans doute pourquoi, pendant toute mon enfance, je n'ai pas touché terre. Je pouvais m'éloigner, revenir; les objets n'avaient pas de poids, rien ne collait à moi. Je passais entre les dangers et les peurs comme la lumière à travers un miroir. Et c'est cela que j'appelle le bonheur de mon enfance. C'est une armure magique qui, une fois posée sur vos épaules, peut être transportée à travers votre existence entière. (p. 16)
Commenter  J’apprécie          130
Malheur à celui qui n'admire et ne respecte que lui-même ! Son âme est infirme.
Commenter  J’apprécie          120
Je courais sans cesse. Toute mon enfance s'est passée à courir. Seulement je ne courais pas pour m'emparer de quelque chose (que voilà bien une idée d'adulte et non d'enfant !). Je courais pour aller à la rencontre de tout ce qui était visible et de tout ce qui ne l'était pas encore.
Commenter  J’apprécie          110
Les enfants, il me semble, sont bien plus disposés que les adultes à changer d'univers. Ils n'ont pas encore eu le temps de se satisfaire du leur. A vrai dire même, ce qui les embarrasse et les opprime, c'est que les grandes personnes - et leurs parents, qui plus est - restent toujours semblables à elles-mêmes : croyant à ceci, dénigrant cela, appelant table la table, et argent l'argent, répétant constamment les mêmes phrases, en somme oubliant la vérité première : que le monde est double, triple, innombrable et toujours nouveau.
Commenter  J’apprécie          110
Nous, il faut que nous sachions - oui, même cela - que la pénétration est un moment étrange, un moment unique ; celui où nos corps, que les lois sans nombre condamnaient à vivre dans l'isolement (c'est pire : à l'extérieur les uns des autres), pour une fois s'y rencontrent. Ils font plus : chacun d'eux se met à éprouver l'autre, et à l'éprouver comme il a eu lieu : du dedans. Et c'est un choc, si l'âme est là pour le voir, qui n'a pas eu d'autre exemple dans le reste de nos vies. Jusqu'ici le baiser, seul le baiser avait pu nous y préparer ; mais il n'était encore qu'une image en miroir. Tout à coup l'homme est dans la femme : il ne la voit plus, il, la vit. Il vit quelque chose qui n'est plus simplement lui. Et pour la femme, l'homme n'est déjà plus cet étranger absolu ; ce bloc posé là dans le monde en face d'elle. Désormais, chacun va vivre ses sensations, mais aussi celles de l'autre. S'ils ne croient pas que cela soit possible, c'est qu'ils sont distraits, emportés et c'est qu'ils n'ont pas encore appris à faire l'amour dans la lumière.
Commenter  J’apprécie          110
La peur est le vrai nom du désespoir.
Commenter  J’apprécie          91
Il m'était devenu subitement égal que les gens eussent les cheveux bruns ou blonds, les yeux bleus ou verts. Je trouvais même que les voyants employaient beaucoup trop de leur temps dans ces observations inutiles.
Toutes ces expressions de la conversation courante - "il donne confiance", "il a l'air bien élevé" - me paraissaient prises juste à la surface des gens : c'était la mousse, ce n'était pas le breuvage.
Commenter  J’apprécie          90
“je regardais trop loin, et je regardais trop à l’extérieur. Je me suis mis à regarder de plus près. Non pas plus près des choses mais plus près de moi. A regarder de l’intérieur, vers l’intérieur au lieu de m’obstiner à suivre le mouvement de la vue physique vers le dehors. Tout était là, venu de je ne savais d’où. On ne m’avait rien dit de ce rendez-vous de l’univers chez moi ! Je vis la bonté de Dieu et que jamais rien, sur son ordre, ne nous quitte.”
Commenter  J’apprécie          90
J'aurais dû apprendre à détester les boches. Grâce à Dieu, pas d'avantage ! Ma famille m'en dissuadait. Les livres, les symphonies, me disaient qu'il ne le fallait pas. Je continuais à appeler les Allemands : les Allemands, avec respect.
Commenter  J’apprécie          80
Nous sommes tous -aveugles ou non-
terriblement avides. Nous n'en voulons que pour nous. Sans même y penser, nous voulons que l'univers nous ressemble et qu'il nous laisse toute la place. Eh bien! Un petit enfant aveugle apprend très vite que cela ne se peut pas. Il l'appprend de force. Car chaque fois qu'il oublie qu'il n'est pas tout seul au monde, il heurte un objet, il se fait mal, il est rappelé à l'ordre. Et chaque fois au contraire qu'il se le rappelle, il est récompensé: tout vient à lui.
Commenter  J’apprécie          80
Tout enfant encore, je comprenais que notre liberté n'est pas dans le refus de ce qui nous frappe. Être libre, je le voyais, c'était, acceptant les faits, de renverser l'ordre de leurs conséquences. On niait les yeux de mon corps. D'autre yeux s'ouvraient, s'ouvriraient en moi: je le savais, je le voulais. Jamais un doute ne me vint sur l'équité de Dieu.
Commenter  J’apprécie          80
(p. 33)
On dit couramment que la cécité accroît les perceptions auditives. Je ne crois pas que cela soit vrai. Ce n’étaient pas mes oreilles qui entendaient mieux qu’autrefois, c’était moi qui me servais mieux d’elles. (…) J’avais besoin d’entendre et d’entendre encore. Je multipliais les bruits à plaisir. Je secouais des clochettes, je donnais du doigt contre tous les murs, j’essayais la résonance des portes, des meubles, des troncs d’arbres, je chantais dans les pièces vides, je jetais des galets au loin sur les entendre siffler dans l’air puis s’ébouler.

(p. 49)
Les noms, les chiffres et généralement tous les objets n’apparaissaient pas sur mon écran intérieur d’une façon amorphe, ni même en noir et blanc, mais revêtus de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. (…) En quelques mois, mon univers personnel était devenu un atelier de couleurs.

(p. 99)
Le monde des violons et des flûtes, des cors et des violoncelles, des fugues, des scherzos et des gavottes, obéissait à des lois si belles et si claires que toute musique semblait prier Dieu. Mon esprit n’écoutait pas: il priait. Mon esprit n’avait plus de limites. (…) Je pleurais de reconnaissance chaque fois que l’orchestre commençait à chanter.
Commenter  J’apprécie          80



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jacques Lusseyran (383)Voir plus

Quiz Voir plus

Qui a écrit ces thrillers ?

Code 93 ?

Camilla Läckberg
Olivier Norek
Bernard Minier
Franck Thilliez

15 questions
184 lecteurs ont répondu
Thèmes : thrillerCréer un quiz sur cet auteur

{* *} .._..