Jean-Paul Belmondo. Documentaire.
De la même façon que je me retourne rarement vers le passé, je ne sais jamais de quoi sera fait mon avenir. Aujourd’hui, seul le présent m’intéresse et il est beau.

Le Magnifique
Des affres de la création littéraire pour Belmondo alias François Merlin face à Vittorio Çaprioli alias Georges Charron son éditeur, pour réclamer une avance:
Georges Charron (au téléphone) : Non. … Oui. … Oui… Ah non ! Mmm… Entendu. (Il raccroche.)
Georges Charron : Je vous écoute !
François Merlin : Voilà ! J'ai…
Georges Charron : Comment va Bob Saint-Clar ?
François Merlin : Il est à Acapulco.
Georges Charron : Ah ! J'aime bien Acapulco. Je vais probablement aller y passer cet hiver. Vous connaissez ?
François Merlin : Non. Vous savez, on travaille sur documents, alors… un bon plan et quelques prospectus…
Georges Charron: Vous avez plus de satisfaction que moi au bout du compte. Vous faites rêver des milliers de gens: Eh oui. Je vous écoute.
François Merlin : Voilà ! J'ai un…
Georges Charron : Oui.
François Merlin : … j'ai un découvert…
Georges Charron : Mmmoui. (Il bâille.)
François Merlin : … et j'ai promis à ma banque de passer tout à l'heure…
Georges Charron : Oui.
François Merlin : … alors, j'ai pensé… si on pouvait me donner une petite avance…
Georges Charron : Mmm.
François Merlin : Pardon ?
Georges Charron : Non.
François Merlin : Ah.
Georges Charron : Quand devez-vous remettre votre manuscrit ?
François Merlin : Lundi.
Georges Charron : Eh bien ! Vous l'aurez lundi, votre avance. (Il prend une boîte de bonbons, en propose un à Merlin.) vous voulez un Cachou ?"
François Merlin: Non.
Georges Charron: Croyez-moi, c'est vous qui avez la meilleure part, cher Merlin. Alors que moi, qu'est-ce que je fais? Je reçois ça... des manuscrits...20 par jour, 140 par semaine...Qu'est-ce que vous voulez que je foute de toute cette saloperie? ... Croyez-moi, vous avez certainement plus de satisfaction que moi au bout du compte...Vous faites rêver des milliers de gens...
( Gros plan sur l'édition du Pigeon Maltais dans la collection Super Crime Club.) Et ce rêve, cher Merlin, c'est vous qui le fabriquez....parce que...parce que vous êtes un magicien...et moi je ne suis qu'un boutiquier...Allez, à lundi cher ami... (Il le met à la porte).
François Merlin: Mais pour...
(Il claque la porte et prend un cachou.)
Jean-Paul Belmondo (1933-2021)
Le charme est la capacité de faire oublier aux autres que vous ressemblez à vous.
De la même façon que je me retourne rarement vers le passé, je ne sais jamais de quoi sera fait mon avenir. Aujourd'hui, seul le présent m'intéresse. Et il est beau.
"Dire "bonjour", c'est faire la moitié du chemin"
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Bébel dans "Itinéraire d'un enfant gâté"
Il voulait me sentir, me renifler. C’était une oreille, une éponge, Audiard, il vous écoutait, il saisissait votre ton pour le restituer dans les dialogues. On parlait de sport, de cyclisme. J’étais pour Poulidor, pas pour Anquetil, on évoquait le 14e arrondissement, où on avait tous les deux grandi.
-- Vous savez la différence qu'il y a entre un con et un voleur ?
-- ...........
-- Un voleur, de temps en temps, ça se repose ! ( clin d'œil )

Toute ma vie, j'ai eu en moi une bipolarité non pathologique qui me fait aspirer en même temps à deux modes d'existence parfaitement antagonistes.
Un premier appétit m'entraîne à mener une vie de bamboche, à brûler mes forces comme une cigarette, à faire sauter tous les cadres, y compris horaires, en inversant le jour et la nuit, à consumer les choses et liquider les bouteilles de whisky, à multiplier les canulars, à pousser la vitesse à son maximum, à jouer aux jeux dangereux de l'argent, de l'amour et de l'oisiveté. En cela, je suis un enfant de Saint-Germain-des-Prés, de son époque grandiose, après guerre, de son Flore avant qu'il ne soit fané, et de ses Deux-Magots encore riches d'oiseaux rares et de surprises.
Mais de l'autre côté, je rêve de tranquillité sous un ciel clair, de me retirer du monde et du bitume pour m'étirer en face de quelques vaches. La compagnie de ma famille suffit amplement à mon bonheur et la modestie chaleureuse des petits logis en bois me convient d'avantage que la prétention des palais. Laisser couler les jours me semble être une occupation idéale, parce qu'essentielle.
La paternité aurait pu m'inculquer l'inquiétude, l'esprit de conservation, la crainte de l'avenir. J'aurais dû, si j'avais été un père "ordinaire", garder mes enfants sous cloche pour les mettre à l'abri. De quoi ? De la guerre ? De la mort ? Je n'avais pas ce pouvoir là. De l'imprévu ? Certainement pas. Ne pas les priver de ce qui a si bon goût, de ce qui ravive sans cesse, de ce qui anime. Je voulais qu'ils aient une enfance aussi souriante que la mienne ; je voulais être un père aussi indulgent et tendre que mon père l'avait été.
En revanche, je n'avais pas son calme, mais une frénésie à faire le pitre, à être le clown personnel de mes trois enfants chéris, Patricia, Florence et Paul.
[...] "Que pensez-vous de votre physique ?" Depuis le conservatoire, on me gratifie d'épithètes non homériques : "jeune premier laid", "débutant aux traits ingrats", "drôle de gueule". Ces incessants commentaires ne me blessent pas, mais continuent de m'étonner. Les comparaisons - en ma défaveur - avec Alain Delon n'ont pas encore commencé ; je suis encore un laid non relatif. Edith Piaf n'a pas encore dit : "Je sors avec Delon, mais je rentre avec Belmondo." Mais le rôle fort romantique que j'occupe dans A bout de souffle vient de me placer dans la catégorie "séducteur avec physique grossier". Ma laideur prend un nouveau crédit. Et moi des rougeurs dues à la honte de ma réponse à la fameuse question : "Je crois que j'ai du charme."