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Critiques de Jérôme Ruillier (91)
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Après avoir lu le roman de Yamina Benguigui, Jérôme Ruillier a décidé de l’illustrer. Son œuvre se déploie sur trois parties qui donnent successivement la parole aux pères, aux mères et aux enfants.

Les pères – Ils sont les premiers à avoir quitté le Maghreb et franchi la Méditerranée. Célibataires ou séparés de leurs familles, ils s’entassent dans des foyers Sonacotra. Ils ont pour nom Khémaïs, Abdel ou Ahmed, mais en France, tout le monde les appellent Mohamed. Ils ont répondu à l’appel de la France qui a besoin de main-d’œuvre pour ses usines. Ces hommes sont devenus O.S. dans les usines de Renault-Billancourt ou de Peugeot ou ouvriers dans les mines. Les perspectives d’évolution professionnelles sont faibles voire inexistantes. Et pourtant l’espoir était grand : « Je suis venu en France et j’ai aimé Renault comme on aime une maîtresse. » (p. 28) En dépit de la misère et de conditions de vie déplorables, les hommes veulent croire au rêve français. Les droits des ouvriers immigrés sont bafoués et l’aide au retour de Stoleru est un scandale. Certains hommes ne travaillent en France que pour faire vivre la famille restée au pays. Quand les familles sont enfin réunies, les pères hésitent entre différentes positions pour leurs enfants. Certains les élèvent dans la nostalgie et dans l’espoir du retour au pays. D’autres encouragent leurs enfants à s’intégrer, à devenir de vrais Français. Mais l’intégration n’est pas facile : « Attention, il faut que tu sois meilleur que les autres, parce qu’en cas d’égalité tu ne passeras pas. » (p. 57) Ces hommes sont à la fois victimes et héros de la France d’après 1950.

Les mères – Avec le regroupement familial autorisé par Valéry Giscard d’Estaing, les épouses et les enfants ont rejoint les hommes en France. Yamina, Zorah, Fatma ou encore Djamila découvrent un pays moins beau que celui dont elles rêvaient. « Une cité composée de baraques toutes pareilles où il n’y avait que des Maghrébins. Elles ressemblaient à un village d’Algérien dont on aurait ôté le soleil, les palmiers et le jasmin. » (p. 93) Ces femmes qui ont traversé la Méditerranée refusent de se laisser enfermer. Elles apprennent à lire, elles osent sortir, elles s’entraident et veulent réaliser le rêve des hommes. Alors que la guerre d’Algérie fait rage, que les Maghrébins ne sont pas vus d’un bon œil en France et que les F.L.N. et au M.N.A. terrorisent à tout va, elles élèvent leurs enfants dans des campements sordides ou des cités ghettos, attentives à donner à leurs familles tous les soins possibles.

Les enfants – Nombre d’entre eux ont été élevé dans la « permanence du provisoire » (p. 175) Ils ont grandi à dix dans des chambres minuscules. Leurs pères se sont vus proposer le retour au pays avec la prime de 10 000 francs. Ces enfants ont très vite compris que la France, sous son nom de terre d’accueil, avait un double visage. Entre les promesses et le quotidien, le fossé est grand. Ces mômes-là savent qu’ils ont fort à faire pour honorer la mémoire de leurs pères. « Dans l’Œdipe, il faut tuer le père, mais nous, au contraire, il nous faut le déterrer, il nous faut le faire revivre. Il a été tué socialement par le colonialisme, par les guerres, puis par l’immigration. Au lieu de le tuer, il nous appartient à nous, les enfants, de le faire revivre, de lui faire redresser la tête, qu’il se tienne fier et droit comme quand il se faisait prendre en photo dans son beau costume, pur l’envoyer et rassurer la famille restée au pays. » (p. 209) Ces enfants ont conscience que l’école et l’éducation « à la française » est leur seule chance de réussir leur intégration. Mais contrairement à certains de leurs parents, ils ne veulent pas devoir choisir entre la France et l’Algérie/Maroc/Tunisie. La double nationalité est un trésor, un sésame qui leur ouvre les portes d’un monde double qu’ils tentent de réconcilier. Certaines femmes font le choix volontaire de porter le hidjab, en signe patent de leur foi et de leur ouverture de cœur. C’est parce qu’elles sont musulmanes qu’elles veulent s’intégrer, parce qu’un Français n’est pas nécessairement chrétien. Tous les enfants d’immigrés peuvent prétendre à la reconnaissance. Ils sont les acteurs de la réconciliation et du dialogue.

L’image est crayonnée, on voit la trace et la marque de la mise. Tout n’est que noir et blanc, mais l’image n’est pas étouffante. Parfois, en pleine page, le dessin fait tout paraître gigantesque ou minuscule. On est en présence d’un monde inconnu. Le texte est écrit à la main, d’une graphie très scolaire mais appliquée et régulière. Le dessin lui-même a quelque chose d’enfantin dans sa simplicité. Les personnages sont de petits animaux, mélange de souris, d’ours et de peluche. On ne peut que penser à Maus d’Art Spiegelman, mais ici le récit n’est pas celui d’une personne. Jérôme Ruillier, comme Yamina Benguigui, donne la parole à des immigrés dont les expériences se complètent, se répondent et se dépassent.

Les portraits et les récits sont touchants et les récits poignants. Jérôme Ruillier a su faire ressentir toute la tendresse et le respect qu’il éprouve pour les immigrés qu’il a rencontrés et, plus largement, pour tous les exclus et ceux que l’on considère différents. Il a transcrit les dialogues en respectant les fautes de langage et les expressions idiomatiques de ses interlocuteurs. Sans cliché ni mauvais esprit, il fait entendre la voix et l’accent des immigrés.

Jérôme Ruillier se dessine lisant le roman de Yamina Benguigui, discutant avec son père de cette lecture. Il évoque sa propre famille, son épouse et sa fille trisomique. Il ne tait pas ses doutes, ni ses peurs ou interrogations. Son roman graphique est, outre l’adaptation d’un roman, la mise en image d’une situation complexe qui s’enlise parfois mais n’en finit pas d’évoluer. Les peurs de l’auteur prennent la forme d’une silhouette menaçante qui domine la ville, mais son pendant bénéfique, une sorte de cerf à la ramure feuillue, n’est jamais loin, illustrant que l’espoir d’une cohésion est encore possible.

L’œuvre de Jérôme Ruillier est un magnifique recueil de témoignages, un travail historique sincère et un message d’espoir vibrant. Si la France Black-Blanc-Beur de 1998 a fait long feu, on peut toujours espérer la construction d’une France bigarrée, fière de ses origines diverses et revendiquant le droit à la différence

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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Adapter les "mémoires d'immigrés" de Yamina Benguigui en bande dessinée, peut sembler inutile. Il y avait eu le livre et le film. Mais c'était il y a 14 ans, et depuis, de l'eau à couler sous les ponts et l'image des immigrés a été considérablement déformée par de nombreux discours xénophobes.

Cette adaptation en bande dessinée, par un auteur dont le discours de partage et de tolérance à toujours été au coeur de ses productions, est un magnifique et troublant témoignage de ce qui est un des hontes de notre république.

Comme dans le film, nous partageons les témoignages émouvants et révoltants de ces hommes, de ces femmes, qui ont été parqués dans des zones insalubres, comme des pestiférés, pour la plupart coupés de leur famille, travaillant comme des bêtes de somme pour une misère et sans aucune considération, mais aussi de leurs enfants tiraillés entre un héritage lourd à porter, révolte et fureur de vivre.

Mais ce que Jérôme Ruillier apporte de plus avec son dessin au trait simple, représentant tous ses personnages avec des têtes de nounours, c'est un sentiment d'universalité. Nous sommes tous humains, égaux devant la souffrance, le mépris des autres, la bêtise, la peur et l'incompréhension. En nous proposant cette relecture en 2011, l'auteur continue à faire un acte militant, fort et sensible, dans une période à l'avenir incertain.

"Les Mohamed" appuie là où ça fait mal mais avec générosité et quand Jérôme Ruillier ajoute sa touche très personnelle en faisant un parallèle entre l'intégration (heu... l'exclusion) de tous ces travailleurs et celle de sa fille trisomique dans l'école de son quartier, il nous rappelle que le racisme, l'ignorance, l'intolérance sont nichés partout.

La fin :
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Un roman graphique sobre et profond, digne de Maus et Persepolis

Cette bande dessinée est une adaptation du livre de Yamina Benguigui « Mémoires d'immigrés, l'héritage maghrébin ». Jérôme Ruillier propose une suite de portraits touchants sur trois générations d'immigrés. Des conditions de vie et de travail difficiles aux problèmes d'intégration, chacun d'entre eux confie son mal-être. Les espoirs déçus, les regrets sont parfois illuminés par les petits bonheurs de la vie quotidienne. La sensibilité est omniprésente dans ces morceaux de vie.

Au fil des pages, l'auteur alterne du texte illustré et des cases plus proches du format BD.

Les dessins sont simples et attachants. Ils rappellent fortement l'illustration jeunesse dont l'auteur est issu. La sobriété est accentuée par l'utilisation du noir et blanc.

Jérôme Ruillier n'hésite pas à se mettre lui-même en scène afin d'exprimer ses propres interrogations.

Une oeuvre très réussie qui nous plonge au coeur des enjeux de cette période de l'histoire et qui demeure brûlante d'actualité.
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Alors que les adaptations se font souvent du format écrit au format visuel, Jérôme Ruillier inverse la donne en transposant le livre/documentaire « Mémoires d’immigrés » de Yamina Benguigui en bande dessinée –quoiqu’ici, l’usage du terme « roman graphique » semble particulièrement recommandé en vue de la densité de l’ouvrage.





Dans l’œuvre originale, Yamina Benguigui écoutait et rapportait les témoignages d’immigrés maghrébins installés en France. Jérôme Ruillier s’inscrit tout de suite dans un rapport de subordination et évoque la fascination qu’a provoquée la découverte de cet ouvrage. Celle-ci se mue bientôt en volonté de contribuer à son tour à ce recueil de témoignages. Même si l’on comprend quelles raisons personnelles ont donné envie à Jérôme Ruillier de s’impliquer, la démarche reste tout de même curieuse. En effet, après la parution d’un film et d’un livre de Yamina Benguigui, on peut se demander s’il est bien nécessaire de faire paraître ces témoignages qui n’ont d’original que leur format graphique. Si, en tant que lectrice, la démarche de cette parution m’a permis de découvrir un document que je ne me serais sans doute pas procuré autrement, du point de vue de Jérôme Ruillier, cette même démarche semble supposer une volonté de pallier à un inconvénient majeur de l’œuvre de Yamina Benguigui : son manque d’accessibilité.





Que peut-on trouver dans les Mohamed[b] de Jérôme Ruillier qu’on ne trouvera pas dans le travail de Yamina Benguigui ? Le seul ajout semble être le témoignage du dessinateur rencontrant les [b]Mémoires d’immigrés : celles-ci font écho à son expérience directe alors que sa fille va être scolarisée dans une école comptant 80% d’enfants d’immigrés, ainsi qu’à son passé et à ses rapports avec ses aïeux. Mais ces contributions restent modestes et comptent pour à peine quelques dizaines de pages perdues dans des centaines. Là ne se situe donc pas l’atout majeur de Jérôme Ruillier face à Yamina Benguigui. Pour tenter un comparatif plus hasardeux, on pourrait dire que les Mohamed constituent une version bande dessinée des Mémoires d’immigrés pour les Nuls : résumé, simplifié sans que le discours ne devienne simpliste, revêtant des formes qui paraissent peut-être plus accessibles qu’un texte ou qu’un documentaire, le lectorat sera sans doute plus large et plus diversifié que celui initialement concerné par le travail de Yamina Benguigui.





Laissons donc de côté les questions de l’intérêt de cette adaptation et reconnaissons que les Mohamed de Jérôme Ruillier paraissent aussi vivants et sont aussi troublants que de vrais hommes que l’on aurait pu rencontrer en chair et en os. Aucun type de discours n’est épargné : ni celui qui combat les préjugés racistes, ni celui qui les confirme, faisant de cette somme un recueil de témoignages qui ne semblent pas vouloir utiliser la parole d’hommes déracinés comme le seul moyen de construire une thèse purement intellectuelle. Et du format BD au format texte ou vidéo, il ne reste plus qu’un pas à franchir pour le lecteur qui aura été convaincu par l’adaptation de Jérôme Ruillier. Seul danger : cette-ci semble si réussie qu’on se surprend à se demander ce que l’on pourrait apprendre de plus dans les Mémoires d’immigrés… Comble de l’adaptation : lorsque l’inspiré s’empare du rôle de l’inspirateur !


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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Khémaïs, Yamina, Djamel, Myriem, Abdel, Ahmed, Hamou, Mamoud, Zorah, Fatma… Des pères primo-arrivants, des mères qui ont rejoints leurs maris, des enfants arrivés à 6, 10 ou 14 ans en Métropole ou nés en France. Tous témoignent et partagent leur parcours de vie.



Depuis plus d’un demi-siècle, un quotidien fait d’humiliations et de mépris. Des hommes et des femmes qui se confrontent chaque jour au regard suspicieux et haineux de l’Autre –ce Français pure souche. Quand racisme et ségrégationnisme contraignent des individus à se parquer dans des cités HLM…



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En 1997, Yamina Benguigui réalisait un documentaire, Mémoires d’Immigrés, diffusé par Canal+. Un ouvrage en est tiré est publié la même année aux Éditions Canal Plus (je vous invite à lire cet article très complet sur le travail de la réalisatrice). C’est d’ailleurs Yamina Benguigui qui préface Les Mohamed. On y découvre sa réaction lorsque Jérôme Ruillier est venu lui demander la possibilité d’adapter ses “Mémoires d’Immigrés” ; face à cette adaptation en bande dessinée, l’émotion de la réalisatrice est palpable, il n’y a qu’un pas à faire pour imaginer la justesse du travail de l’auteur.



Jérôme Ruillier s’est totalement approprié la démarche. Il se met en scène, à la fois acteur, spectateur, passeur de témoignages et critique de société. Comment lui est venue l’idée d’adapter le travail de Y. Benguigui ? Comment ce travail fait-il écho à sa propre expérience ? A celle de son père ? Nous trouverons ces réponses, et bien d’autre encore, tout au long de l’album.



Tous dans le même sac. Tous logés à la même enseigne des représentations sociales, des « on dit » et de la peur de la différence. A pas de loup, et tout au long de l’album, nous allons entrer dans ces foyers et aller à la rencontre de ces pères, de ces mères et de ces enfants d’immigrés. Ils nous racontent leurs vies avant la France et leur vie en France, à commencer par le choc vécu à l’arrivée en métropole. Beaucoup d’entre eux viennent du bled, les repères sociaux sont totalement différents ; en France, pas de solidarité, pas de reconnaissance, pas de voile. Par contre, ils découvrent l’ignorance, le racisme, la solitude et l’injustice. Et personne pour les aider dans cette perte de leurs repères identitaires.



(...)
Lien : http://chezmo.wordpress.com/..
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Que sont les travailleurs maghrébins "importés par la France devenus ? Mais aussi leurs épouses et leurs enfants ? Comment ont-ils vécus le déracinement, l'arrivée dans un pays dont ils avaient beaucoup entendu parlé mais complètement différent du leur et pour tout dire, pas toujours très tendre à leur égards ?

C'est à quoi veulent répondre les auteurs, avec des rencontres et des interview qui laissent parler les gens. Certains parlent pour la prelière fois des déboires, des abus dont ils ont été victimes, malgré le profil bas qu'ils ont adopté. Les coutumes, pas faciles à abandonner et qui donnent un cadre. Même si elles sont parfois à 1000 lieux de celles du pays d'accueil. Ce qui ressort des interview toute en douceur c'est le courage et la force morale pour quitter tous ses repères, la volonté de s'intégrer malgré les obstacles et le peu de ressentiment envers les "Français de souche" pourtant pas toujours des modèles d'amabilité et e morale.
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Ce roman graphique, publié avec le soutien d’Amnesty International, adapte l’œuvre de Yamina Benguigui : Mémoires d’immigrés ! À travers les témoignages recueillis par Yamina Benguigui, Jérôme Ruillier apporte un éclairage bienvenu sur l’histoire de l’immigration maghrébine. Divisés en trois parties (les pères, les mères, les enfants), ces témoignages se complètent au fil des pages et offrent une vue d’ensemble sur le ressenti et le vécu de ces gens mal accueillis dans un pays auquel ils se sont finalement attachés.



Les pères, ce sont Khémaïs, Abdel, Ahmed et les autres. Une main-d’œuvre bon marché, appelée en renfort par une France qui accepte volontiers ces bras supplémentaires qui viennent faire tourner ses usines, mais qui n’acceptera leurs différences qu’en de trop rares occasions, tel que la Coupe du Monde 1998. Des gens qui choisissent l’exil dans l’espoir d’une vie meilleure et qui se retrouvent souvent condamnés à exécuter des basses besognes dans des conditions de vie déplorables. Liberté, égalité, fraternité ???



Les mères, ce sont Zorah, Fatma, Yamina, Djamila…et les autres. Des femmes qui « profitent » du regroupement familial autorisé par Valéry Giscard d’Estaing pour rejoindre leurs hommes … dans la misère et l’isolement. Des femmes qui traversent la méditerranée en quelques heures, mais qui ont besoin de beaucoup plus de temps pour franchir le fossé culturel qui sépare les deux pays.



Les enfants, ce sont Farid, Myriem, Naïma… et les autres. Des gosses qui ont vu leurs parents courber l’échine pendant des années, qui veulent relever la tête et affirmer leur identité. Certains ont été élevés dans l’espoir d’un retour au pays, alors que d’autres ont été encouragés à s’intégrer, mais quasi tous se retrouvent le cul entre deux chaises, balancés entre leurs origines et ce pays qui a imposé un parcours du combattant à leurs parents et où « intégration » est un joli mot, mais rarement un fait.



Au niveau du graphisme, Jérôme Ruillier (« Le cœur-enclume »)utilise des formes universelles pour donner corps à ces immigrés, soulignant ainsi que ces récits ne sont pas ceux d’une personne, mais de tout une communauté, celle des Mohamed. Ce dessin d’une grande sobriété, voire même un peu enfantin, permet de ne pas faire d’ombre à ce texte écrit à la main. L’auteur profite également de moments de respiration entre les différentes histoires pour se mettre en scène et partager ses propres pensées. Ces propos tombent malheureusement comme un cheveu dans la soupe et n’apportent absolument rien au récit.



Lisez également « Là où vont nos pères », témoignage muet, mais poignant du parcours des émigrants !
Lien : https://brusselsboy.wordpres..
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Essentiel
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Passionnante, instructive, cette bande dessinée fait réfléchir en nous offrant le témoignage de nombreux immigrés maghrébins venus en France pour y travailler en tant qu'ouvrier, chez Renault notamment.



On y découvre des motivations souvent identiques (motifs économiques) mais des points de vue variés, à propos du retour au pays, de l'attachement à la France, de la question de la nationalité, de l'intégration...



On réalise les conditions de misère extrême dans lesquelles ces hommes et ces femmes ont vécu, des bidonvilles insalubres, entourés de barbelés, la promiscuité avec huit hommes par chambre, le travail harassant. Des années de sacrifice conclues parfois par "l'aide au retour", les quelques milliers de francs pour cacher l'expulsion de ces travailleurs devenus indésirables.



Les pères, les mères, les enfants, tous nous font part de leur vision des choses, de leurs questionnements, de leur détresse, de leur colère. C'est bouleversant, marquant. Le dessin, avec les personnages au visage zoomorphe, est bien adapté au propos. Sobre, efficace.



Un livre indispensable.
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Ce livre présente une suite de portraits d'immigrés et d'enfants d'origine maghrébine.

Il nous fait partager leurs sentiments, de leur arrivée en France à leur stigmatisation par le reste de la population française.

A lire d'urgence pour tous ceux qui ne connaissent des "Mohamed" que leur image au JT de 20h.
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

J' ai trouvé cette BD extrêmement intéressante, j' en suis surprise moi- même n' appréciant pas les BD, malgré quelques efforts pour venir à bout de certains préjugés concernant ce type de littérature. Le graphisme m' a paru trop simple, les dessins de personnages ne m' ont pas plu plus que ça, en particulier les visages censés représenter des maghrébins... mais le fond m' a captivé suffisamment pour que je m' accroche jusqu' à la fin. Je pense que c' est un thème qui n' est pas beaucoup abordé en littérature, encore moins en BD je suppose.







Cette Bd retrace les difficultés qu' a pu recontrer la communauté musulmane en immigrant en France, qu' on résume souvent à la difficulté de "s' intégrer". Venant de Tunisie, d' Algérie, du Maroc, ces hommes, ces femmes, et leurs progénitures pensaient trouver un eldorado en débarquant à Marseille après un pénible voyage qui leur promettait la liberté et la prospérité. Les choses se sont révélées bien plus compliquées en vérité, ils ont souffert, ils se sont battus pour une vie digne de ce nom et en cela ce livre pourrait illustrer l' immigration de façon générale. A la même époque, les portugais, les espagnols ou italiens par exemple fuyaient eux aussi la misère, et ont continué pendant longtemps de la cotoyer en France. Au fond ils ont tous été logés à la même enseigne.



La différence notable est que pour les maghrébins s' ajoutait la question du racisme et aussi le fait que l' histoire de leur propre pays était inextricablement liée à la France.







L' auteur illustre la misère sociale dans laquelle a baigné cette communauté pendant des décennies, l' exploitation subie dans leurs conditions de travail, la difficulté de gravir les marches de ce fameux ascenseur social, la difficulté de garder une tradition culturelle et religieuse dans l' environnement hostile de l' après guerre d' Algérie notamment.



Il met en perspective également le déchirement des aînés , partagés entre la volonté de rentrer au pays et celle de rester en France, pays qui leur apporte malgré tout un certain confort.







Les questionnements des nouvelles générations quand aux valeurs qu' ils ont reçu de leurs aînés et celles qu' ils ont acquis dans cette société occidentale si différente, montrent à quel point les enfants d' immigrés sont partagés entre la volonté de préserver leurs traditions, parfois par respect pour les parents à la façon d' un héritage symbolique, et la nécessité de s' adapter malgré eux à une conception différente de la vie familiale et sociale de façon générale.







C' est avant tout une histoire collective, où prime une certaine incompréhension, où règne un certain silence assourdissant, où chacun a ses propres souffrances, ses doutes, mais n' en parle que très peu, par honte avant tout.







Le regard extérieur de l' auteur jette la lumière sur une histoire bien souvent ignorée pour des motifs d' opportunité politique ou parce que les principaux intéressés ont encore aujourd' hui du mal à sortir de l' ombre. Par honte, par pudeur parfois, ou plus communément parce qu' il est bien souvent difficile de critiquer un système qui nous donne notre gagne-pain...







Une Bd très enrichissante à découvrir!



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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Un ouvrage étonnant qui s’inspire du livre « Mémoires d’immigrés » de Yamina Benguigui, et qui apporte un regard sensible sur l’histoire de l’immigration maghrébine en France.

En trois parties – les pères, les mères, les enfants – Jérôme Ruillier apporte le soutien de son trait à des témoignages d’individus, comme autant de reportages graphiques.

Entrecoupé par des pages occupées par un unique dessin où il met en scène sa propre histoire et ses propres doutes, ce récit – le texte narratif occupe autant de place que le dessin – nous remet en mémoire la réalité brutale et sans retour de toutes ces personnes qui sont nos voisins.

Le dessin en noir et blanc très épuré nous rend proches et très humains ces témoignages.

Une belle réussite, pour un public habitué au roman graphique, et un bel acte d’engagement.

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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Ils vivent parmi nous mais ont peu d'occasions de porter à notre connaissance leurs mémoires d'immigrants, leurs souvenirs d'immigration, leurs espoirs satisfaits, leurs espoirs déçus, leurs voyages, leurs retrouvailles désenchantées avec l'époux (mal) installé, leurs luttes, leurs nouvelles vies, leurs possibles futurs.



Jérôme Rullier adapte le livre "Mémoires d'immigrés" de Yamina Benguigui. Les chapitres se succèdent et l'on suit les témoignages d'hommes, de mères, d'anciens enfants issus de l'immigration algérienne. Souvent amers, nostalgiques, apaisés ou résignés, ils sont toujours dignes et humains.

L'auteur s'est également autorisé à insérer des planches dans lesquelles il nous parle de lui, de ses échanges avec Yamina Benguigui, de sa propre expérience familiale aussi.



Il en ressort un album instructif, pédagogique, sur une histoire qui mêle intimement France et Algérie. Les vagues d'immigration pour pallier la pénurie de main d'oeuvre, la guerre d'Algérie et ses conséquences en France métropolitaine, le massacre de Charonne du 17 octobre 1962, les mariages arrangés pour le plus grand malheur des jeunes épouses, les apprentissages de la langue, de la recherche d'emploi, des us et coutumes. Les discriminations aussi.

Un beau recueil de témoignages, assez émouvant.
Lien : http://chezlorraine.blogspot..
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Le titre "Les Mohamed" évoque cet amalgame dans lequel on peut enfermer sous un seul prénom des individus uniques. Grâce au pouvoir suggestif de l'image, le lecteur est amené à partager une écoute presque intime de ces hommes, ces femmes et ces enfants qui, dans une émouvante modestie, racontent comment il (elle) est arrivé(e) en France, comment il s'y est fait une vie. Ce que je garde surtout présent à l'esprit, après cette première lecture, c'est le courage avec lequel chacun fait face à la réalité pour tenter de construire et choisir son avenir. Merci à Jérôme Ruillier. Merci à Yamina Benguigui. Je vais lire son livre sans tarder.
Lien : http://www.traverseesafricai..
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

"La ville blanche écrasée de soleil

Ou un jour, je suis né

Les rues en pente, le pont sur le Rhummel

Les jardins d'orangers"

Khémaïs, ouvrier spécialisé chez Renault cite Victor Hugo: "Dieu, ouvrez moi les portes des ténèbres, pour que je puisse rencontrer la lumière." C'est comme ça que je voyais la France...

En débarquant, j'ai rencontré l'indifférence (puis le racisme!) Et j'ai pensé que ça allait être dur... très dur!





"Non, je n'ai pas oublié

Bien que ma Vie ait changé

Mais le silence est une façon d'aimer"

Avec le choc pétrolier en 1970, le chômage apparaît... Les Algériens ou Français d'origine algérienne sont les premiers touchés ! Ils subissent l'hostilité de l'opinion.Le gouvernement Messmer décide le "gel" de l'immigration et en 1974, Giscard officialise le regroupement familial.





"Non, non, non

Non, je n'ai pas oublié

Tous ces voyages attristés

Mais, on n'a pas le droit de sacrifier

Le Présent au Passé"

Beaucoup de retraités maghrébins n'arrivent pas à dire : " Je veux mourir dans ce pays...Tu veilleras à ce que mon corps repose en direction de la Mecque ?"





"Mais aujourd'hui vous et moi

Ne pouvons rien changer

Non, non, non

Non, je n'ai pas oublié".

Enrico Macias.





A la recherche de cette difficile identité pour les Maghrébins, certains ont été tentés par l'Islam, d'autres ont été happés par la délinquance, beaucoup d'entre eux ont réussi leur intégration, déclare l'auteure Yamina Benguigui, fille d'immigrée dans les documentaires, tirés de son livre "Mémoires d'immigrés."
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Cette mise en dessin des témoignages d'immigrés maghrébins recueillis par l'auteure Yamina Benguigui il y a plus de 20 ans, que je ne connaissais pas, m'a littéralement bouleversée.



La représentation des personnes avec des visages de chat (ou seraient-ce des souris?!) fait immanquablement penser à la B.D Maus et accentue le propos, je trouve.



Les témoignages sont bouleversants, un ouvrage qui devrait faire partie du programme scolaire. Lisez-le!
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Les Mohamed, mémoires d'immigrés

Une émouvante adaptation en bande dessinée de l'essai Mémoires d'immigrés de Yamina Benguigui, qui donne la parole à ces immigrés maghrébins dont la nationalité changent au gré des aléas politiques de la région ou des choix de leurs parents.



A travers trois chapitres sur les pères, les mères et les enfants, Jérôme Ruillier croque les innombrables ouvriers qui œuvrèrent dans les usines de Renault (jusqu'à 50 000 par année après les accords d'Evian), parqués comme des bêtes de somme dans des baraquements qui leur étaient réservés, à l'écart de la société française. Rejoints par leurs femmes grâce à la politique de regroupement familial, les hommes ne peuvent empêcher leurs enfants de renier leurs rêves d'un retour en Algérie.



Au-delà des nombreux témoignages et précisions historiques qui font de cette bande dessinée un vrai reportage sur l'immigration maghrébine, on retient surtout l'extrême solitude dans lesquels les pères et les mères furent plongés, que ce soit vis à vis de la société française ou de leur propre famille, et leur inaliénable attachement et reconnaissance à une France qui leur offrit du travail, à défaut d'autre chose. Le cynisme de certaines situations attristent, tandis que d'autres, beaucoup plus rares, font sourire.



Une belle lecture.
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Moi, j'attends un bébé

L'arrivée d'un bébé vu par les yeux d'une petite fille... qui en profite pour faire enrager ses parents !!!

Drôle et tellement proche de la réalité !!!

A partir de 6 ans
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Où va Mona ?

J'avais lu beaucoup de critiques très positives sur ce livre, alors quand j'ai vu qu'il était disponible à la médiathèque, je l'ai emprunté. Et clairement pas un coup de cœur.



Alors, oui, niveau graphisme, c'est beau et épuré, niveau fabrication, avec le côté tactile du petit chemin que l'on retrouve sur toutes les pages, c'est très bien fait, et le texte est lui aussi très beau et poétique.

Mais pour moi, il y a un vrai décalage entre l'âge visé par ce livre et l'âge des personnes qui vont vraiment être intéressées.

Des livres où il faut suivre le chemin avec son doigt, il en existe plein pour les petits, certains même avant 2 ans. Celui-ci est trop long et le chemin trop compliqué pour que les enfants de cet âge suivent bien. Ils prennent les raccourcis, partout !

Le texte est également fait pour un enfant plus grand, voir pour un adulte, et l'enfant, focalisé sur le chemin, ne l'écoute pas vraiment...



Du coup on a un texte pour les adultes, un graphisme pour les enfants plus âgés, et un livre vendu pour les petits pour le côté "tactile". On part dans tous les sens, et on me perd dans l'histoire.



Un joli livre, c'est sûr, mais qui ne m'a pas convaincu.
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Où va Mona ?

Le livre est un bel objet carré, un leporello dans lequel chaque pli comporte une action – jouer, courir, escalader –, qui se lit et se déroule du bas vers le haut. Le verso des pages forme une toise de 0 à 2 mètres, de quoi se mesurer et prendre confiance dans le temps qui passe.
Lien : https://www.ricochet-jeunes...
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