L'inspecteur Tony Chu et son collègue John Colby sont en planque devant un magasin abandonné. Celui-ci servirait de couverture à un restaurant de poulet, viande interdite par le gouvernement suite à une grippe aviaire particulièrement virulente. Les deux inspecteurs attendent ceux qui font le marché noir. Mais Mason Savoy de la R.A.S (Répression des Aliments et Stupéfiants) contrecarre leur projet. A la place, il leur permet d'aller déguster "aux frais du gouvernement" du poulet. Alors que Tony prend sa première cuillerée de soupe, il ressent un crime. Car Tony est cibopathe, il est capable de retracer la nature, l'origine voire les émotions de ce qu'il mange...
Tony Chu, détective cannibale est un comic-book à part. Au lieu d'être traité comme une enquête policière routinière, les auteurs ont inventé un monde sous la coupe d'un gouvernement autoritaire, suite à une grippe aviaire. Tony Chu, inspecteur pointilleux, évolue dans ce monde. Son "don" va lui permettre d'être promu à la R.A.S, division des crimes spéciaux. Un don bien particulier puisqu'il est obligé d'ingérer pour remonter la piste. Le scénario aurait pu se répéter ad nauseam, mais au lieu de celà, les histoires se diversifient et permettent de découvrir un monde déjanté. Les situations souvent grand-guignolesques permettent de rire de Tony et de sa peu ragoûtante habitude à toute mettre dans la bouche.
S'il fallait retenir deux personnages, ce serait Tony et Mason Savoy. L'inspecteur Tony Chu est malingre, pointilleux, peu sûr de lui, au point de bafouiller devant une femme. Il accepte mal son don qui le fait mal voir de ses collègues. L'agent Mason Savoy est tout le contraire. Grand et massif, il est toujours bien habillé, porte monocle et s'exprime d'une façon calme et claire. Selon lui, la cibopathie, " est un modeste moyen de défense contre un monde qui peut être abominablement cruel et terriblement violent". Mais sous cette façade se cache un être violent et efficace qui va jusqu'au bout de ses convictions.
Aussi laid soit le monde inventé par John Layman, le dessinateur Rob Guillory l'a dessiné. Un univers où le critère de "beau" n'existe pas. En effet, rien n'est beau ou joli. Tout le dessin est exagéré, permettant de se détacher de cette sombre réalité. Un trait proche de la caricature, mais qui n'oublie pas qu'un personnage de bande dessinée doit s'exprimer. Du côté des cadrages, la cibopathie va permettre quelques originalités comme des gros plans ou cette planche de Tony qui "ressent" les victimes. Le dessin, les cadres, permettent de faciliter la lecture, d'en accentuer l'humour.
Premier tome de Tony Chu, "Goût décès" est un humour corrosif qui vi se aussi bien le gouvernement que les institutions ou les fils à papa. Notre héros essaye d'avancer malgré un don encombrant. Après quelques haussements de sourcils, vous allez rire aux péripéties de notre agent de la R.A.S. Si le livre est recommandé aux lecteurs avertis, il ne vous laissera pas sur votre faim.
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