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Critiques de Joël Pommerat (81)
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Cendrillon

Souvent revisité, le conte "Cendrillon" fait ici l'objet d'une adaptation théâtrale moderne mêlant habilement drame et comédie. Adressée prioritairement à un jeune public, plutôt adolescent, elle est destinée à toucher également les adultes. Les rapports entre les personnages sont assez violents car Pommerat réécrit l'histoire de Cendrillon sous l'angle du deuil et de la culpabilité : "C'est la question de la mort qui m'a donné envie de parler de cette histoire, non pas pour effaroucher les enfants, mais parce que je trouvais que cet angle de vue éclairait les choses d’une nouvelle lumière. Pas seulement une histoire d’ascension sociale conditionnée par une bonne moralité qui fait triompher de toutes les épreuves ou une histoire d’amour idéalisée. Mais plutôt une histoire qui parle du désir au sens large : le désir de vie, opposé à son absence. C’est peut-être aussi parce que comme enfant j’aurais aimé qu’on me parle de la mort qu’aujourd’hui je trouve intéressant d’essayer d’en parler aux enfants."



Sous des apparences simples, la pièce de Pommerat a l'art soulever des questions existentielles complexes et universelles. Sandra, l'héroïne, n'arrive pas à surmonter la perte de sa mère. Elle s'interdit de vivre et d'être heureuse : elle fait sonner sa montre toutes les cinq minutes pour s'obliger à penser à sa mère. Le prince aussi vit dans le souvenir de sa mère disparue et pense sans cesse à elle : il croit qu'elle ne rentre pas à la maison (depuis dix ans) parce qu'elle est coincée dans les embouteillages. Mensonge des adultes, évidemment. Prince et princesse s'aideront mutuellement à avancer dans la vie.



Car rassurez-vous, l'histoire n'est pas si noire qu'elle en a l'air : c'est un conte, et l'on sait comment finissent les contes de fées. Et puis on rit beaucoup. Jeux de mots et décalages parodiques sont incessants. La fée contribue grandement à détendre l'atmosphère par son franc-parler et son refus d'utiliser ses pouvoirs pour faire de la magie. Alors elle s'entraîne à faire des tours comme une vraie magicienne. Le problème est qu'elle les rate systématiquement... Drôle de fée ! Mais elle a plus d'un tour dans son sac. Fée ratée mais un peu psy sur les bords, elle guidera Sandra vers l'acceptation de la mort de sa mère. Et je passe sous silence le père de Sandra, complètement soumis à son acariâtre épouse, ainsi que la belle-famille tortionnaire, dans la plus pure tradition du conte merveilleux. On assiste à des scènes de conflits familiaux aux accents ultra-contemporains.



Si la pièce est savoureuse à lire, c'est qu'elle est rédigée de façon un peu particulière, au fil des répétitions. Joël Pommerat a pour habitude de monter ses propres pièces et de les écrire en compagnie des acteurs, au fur et à mesure qu'ils jouent et que le travail de mise en scène avance. Il en résulte une langue oralisée, à la fois spontanée et moderne. C'est agréable à lire, encore plus à voir, évidemment ! Si jamais vous avez l'occasion de vous procurer la mise en scène de Pommerat lui-même, n'hésitez pas.
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Cendrillon

Le thème de la pièce est extrêmement porteur. Les personnages sont structurés et avec du caractère. Cependant, les liens et cohérences ne sont pas des plus claires selon moi. Cela est probablement du à une écriture que j'ai trouvé fluctuante (notamment dans le type de vocabulaire utilisé)
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Cendrillon

Ici, Cendrillon s'appelle Sandra ou Cendrier, c'est le Prince qui lui donne une chaussure, la Fée fume clopes sur clopes et essaie de réaliser des tours de magie sans utiliser ses dons, mais comme les prestidigitateurs à la télé. Ici, on s'adresse au Roi comme à un copain, les oiseaux s'écrasent sur la maison entièrement en verre de la belle-mère de Cendrillon...Comme on le voit, J. Pommerat s'empare du célèbre conte des Frères Grimm et en dynamite la narration, maintient les enjeux mais inverse les rôles des protagonistes, modernise le propos avec jubilation, dynamite les dialogues. J'ai vu la pièce de théâtre 2 fois et lire le texte m'a procuré aussi beaucoup de plaisir. Jouissif.
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Cendrillon

Cette pièce présentée aux premiers abords, par une narratrice, comme un conte fée , mais qui rapidement devient beaucoup plus complexe notamment par ses personnages nuancés mais aussi par une introduction brillamment réussie de thèmes douloureux et très délicats comme le deuil (et la difficulté à le faire) , la solitude , l’adolescence ou encore des thèmes beaucoup plus d’actualités comme les familles recomposées .

C’est une œuvre sublime et très bien revisitée par Joël Pommerat, loin de celle de Perrault ou encore de Disney, Elle est beaucoup moins féérique et plus rationnelle, elle associe magnifiquement la continuité et les caractéristiques classiques du conte (chaussure , robe , belle-famille, heure/montre …) avec la modernité par les caractères des personnages ou des lieux ( maison en verre , fête au lieu d’un bal…) ce qui fait tout son charme. De plus, en tant qu’adolescent, je trouve que ce roman nous est plus adapté par sa modernité appropriée avec splendeur, cela est agréable. Ensuite le dramaturge réussi à introduire cette aspect avec une grande finesse avec ses personnages comme les sœurs qui sont toujours sur leur téléphone ou la mère qui veut se faire toujours plus belle et plus jeune qu’elle ne l’est déjà , c’est un très bon parallèle avec les « jeunes » de nos jours réalisé aussi par le langage familier utilisé : « débile » , « dégeulasses » qui devient parfois vulgaire avec la fée qui apparait en disant « merde de merde » c’est le personnage le plus drôle racontant sa vie apparemment très ennuyeuse d’une manière peu commune et amusante , elle rate même la plus part de ses tours de magicienne. C’est un livre très bien réussi dans lequel on peut se voir en tant que nouvelle génération, il se lit facilement avec une fin plus réaliste que l’original et des passages plus amusants.



























































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Ça ira, tome 1 : Fin de Louis

L'action de la pièce de Pommerat se déroule entre la réunion des états généraux (mai 1789) et la nationalisation des biens du clergé (novembre 1789). Très fidèle au déroulement de la Révolution française, elle s'en écarte par quelques détails anachroniques (usage du micro, du téléphone) et le recourt à des personnages dont tous les noms ont été changés, sauf Louis XVI. On devine tout de même certains personnages, comme Bailly (Lamy dans la pièce) qui fut tour à tour député du tiers état, président de l'Assemblée puis maire de Paris. Pommerat reconstitue avec talent, et visiblement une connaissance pointue des faits, les débats qui agitent l'Assemblée, le rôle également du peuple et des comités de quartiers dans ces 6 premiers mois de la Révolution.

En ce sens, la pièce est une vraie leçon de révolution : l'usage délibéré d'une langue aux accents contemporains, la présence des femmes dans les gradins de l'Assemblée et pas comme simples tricoteuses donnent à la Révolution une valeur intemporelle. Mais était-il cependant besoin de changer les noms ? Je trouve que le procédé n'apporte rien. Par ailleurs, certaines tirades interminables et les invectives répétées lestées d'injures alourdissent inutilement le propos.
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La réunification des deux Corées

Drôle de titre pour cette pièce de 18 scènes qui parle des fragments de vie du couplé. Couple qui, on le verra, peut auusi bien être une paire d'amis ou simplement de personnes qui se connaissent à peine ou pas du tout..

Les sujets sont aussi variés que le divorce, la prostitution, l'alzheimer, d'argent, de guerre.

C'est direct, concis mais tellement consacré à l'humain.
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Cendrillon

Mon tout premier Joël Pommerat, dont j'entends parler depuis des années via mes ami.e.s théatreuxses !

Cela peut sembler étrange de lire du théâtre, notamment lorsqu'il s'agit d'une pièce contemporaine. La mise en scène et le jeu des acteurices est si important... Mais dans le même temps, j'apprécie pouvoir prendre mon temps pour découvrir le texte, écrit lors du travail des artistes (ce qui rend les répliques si vivantes et familières !) avec leur metteur en scène et l'analyser.

Amateurices de réécritures de mythes, contes et légendes : vous voilà servis ! Joël Pommerat et toute sa troupe proposent ici une relecture toute particulière du conte de Cendrillon en interprétant certains non dits du récit originel. Qu'en est-il du deuil que Cendrillon fait de sa mère ? Comment son père a-t-il pu la laisser subir les atrocités de sa belle famille ? Qu'est-ce qui a poussé sa belle-mère, ses belles-soeurs à la traiter ainsi ? Pourquoi l'a-t-elle accepté, au lieu de se révolter ?

Finalement, l'histoire d'amour se transforme, devient plus que secondaire (si ce n'est quasi inexistante) pour devenir l'histoire d'un deuil : celui d'une enfant un peu perdue, qui ne sait comment aller de l'avant.

A lire et à voir : ça vaut le coup !
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Cendrillon

Une pièce de théâtre que j’avais envie de lire car elle est parfois étudiée (au collège ? au lycée?). Une relecture du conte décapante et assez déroutante, dont je pense qu’il faudrait la voir sur scène, car l’auteur / metteur en scène l’a pensée comme un spectacle assez visuel apparemment. Le texte brut demeure intéressant, centré sur le deuil de Cendrillon et la difficulté de s’en émanciper, sur la culpabilité des orphelins, leur lente reconstruction. Des éléments comiques, un contexte actuel (la montre qui sonne), des clins d’œil à Perrault, (notamment liés aux chaussures), un personnage de fée pas piqué des vers et un prince falot. Amusant, mais sans plus…

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Ça ira, tome 1 : Fin de Louis

Bien que nous soyons plongés au cœur de la Révolution française, ça ira (1) fin de louis séduit par sa nature intemporelle. La mise en scène on ne peut plus contemporaine n’est pas sans référer au conflit des gilets jaunes ou plus généralement aux enjeux politiques que nous traversons actuellement.



Historiquement, le contexte socio-politique est mis en valeur avec un apport d’informations non négligeable. On apprend notamment que la famine touchait alors sévèrement les classes les plus pauvres et que le mouvement révolutionnaire a pu mener à la création d’une police citoyenne.



Le cœur du sujet n’en est pas moins long à venir, n’ayant été captivée qu’à partir du deuxième entracte. J’ai effectivement trouvé la première partie longuement menée et redondante par moment même si ce parti pris a pour but de renforcer l’authenticité historique de la pièce.



Par ailleurs, l’aspect juridique de l’œuvre aurait pu être plus vulgarisé au-delà de la création d’un parlement commun regroupant la noblesse, le clergé et le tiers-état ; à moins que ce ne soit moi qui n’ait pas saisi toutes les subtilités gravitant autour de ce domaine.



La mise en scène de Joël Pommerat rayonne par son originalité se traduisant par son caractère interactif et immersif contrairement aux costumes et décors ancrés dans un style certes contemporain mais tout de même minimaliste et couramment utilisé dans la sphère théâtrale.



L’expérience est encore plus enrichissante lorsque le public interagit avec les acteurs ce qui n’a pas été le cas lors de la représentation à laquelle j’ai assisté. N’hésitez donc pas à vous lever, applaudir et interagir si vous avez l’occasion d’aller voir cette pièce afin de contribuer pleinement à l’ambiance voulue par le metteur en scène.



Quant au jeu d’acteur, il ne s’est pas montré assez homogène à mon goût. Certains comédiens m’ont semblé jouer leur personnage avec beaucoup plus d’intensité et de passion que d’autres mais cela reste un ressenti on ne peut plus subjectif qui peut varier selon les représentations. Je pense notamment à la prestation d’Agnès Berthon, particulièrement puissante bien qu’épisodique.



Divers symboles à la portée des plus observateurs m’ont conquise tels l’allégorie du billard ainsi que les quelques références à la dystopie 1984 de Georges Orwell.
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Cendrillon

Joël Pommerat offre dans cette pièce une interprétation originale et très moderne de la personnalité de Cendrillon. Je l'ai trouvée passionnante et bien plus réaliste que l’image donnée habituellement par les contes et leurs diverses adaptations. Le père, dépassé à l’idée de vivre et d’élever sa fille seul, une autre famille (royale celle-ci) sous le coup d’un énorme tabou qui l’empêche de vivre normalement… Autant de personnages déboussolés et écrasés sous le poids des incompréhensions et des secrets, faisant d’eux des victimes idéales pour les égocentriques et les tyrans. J’ai adoré ce texte dans lequel j’ai retrouvé ce qui m’a tant plu dans la pièce « Contes et légendes » : une langue directe qui ne cherche pas les effets de style et qui bouscule, des situations bouleversantes désamorcées par un élément comique ou incongru (la fée est assez déjantée et pathétique), une humanité déchirante des personnages et une énergie communicative : tout ça est conciliable chez Pommerat.
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Cendrillon

La très belle histoire de la très jeune fille

Il y a les contes pour enfants et les histoires que (se) racontent les grands. Il y a les paroles qu'on dit et celles qu'on entend. Il y a la magie des fées et les mots - les maux - de l'enfance.

Pour sa Cendrillon, Pommerat joue la carte de la figure manquante et place la mère de la très jeune fille, sa vraie mère, au début et à la fin du conte. Au coeur et dans la tête des acteurs de la fable. Imprégnée des dernières paroles captées au chevet de sa mère mourante, Cendrillon se tisse une ligne de conduite où la pensée tient le fil qui évite le gouffre aux défunts. Pour les vivants, Pommerat s'attaque aux préjugés et aux apparences : tendre, humaine et imagée, sa vision enchante et actualise, couve et étire le conte, entre quotidien et poésie, courage et docilité. Enfance et modernité.

Sur scène tous les arts réunis le sont avec brio, sens et sans effet gratuit : la voix off nous dit l'enfant étranger au monde appelé à être l'artisan de celui de demain, avec ses erreurs et ses tatonnements. Le mime avec ses mains pose des mots dans le ciel, interroge ce qui est vrai, ce qui est faux. Le décor, né de rien, du noir et de l'obscurité après chaque scène, ouvre et plante les lieux du conte comme dans un livre ouvert, un écran souple, jusqu'à cette maison de verre qui piège les oiseaux... Les acteurs - la plupart avec deux rôles et tous parfaits - jonglent et se faufilent entre avers et revers, rêve et réalité, vérité et faux-semblant : et si le bal du roi sortait de l'esprit de la famille recomposée ? La musique - celle des mots de Pommerat à elle seule est un délice - porte celle du conte et du vrai monde où l'écho du récit demeurera toujours. Le chant, la danse...

Spectacle total et captivant, à la scénographie magique et au plateau royal, Cendrillon triomphe chaque soir avec une salle comble et c'est justice. Comme la rencontre de la très jeune fille et du prince qui vécurent... heureux comme on l'est après ce spectacle éblouissant pour les petits comme pour les grands.



CENDRILLON



Une création théâtrale de Joël Pommerat



Avec la collaboration de la @Compagnie Louis Brouillard



Avec Alfredo Cañavate (en alternance avec Jean Ruimi ; le père de la très jeune fille

Noémie Carcaud ; la fée, la sœur

Caroline Donnelly ; la seconde sœur, le prince

Catherine Mestoussis ; la belle-mère

Léa Millet (et Déborah Rouach les 5, 6 et 7 juillet) ; la très jeune fille

Damien Ricau ; le narrateur et Marcella Carrara, la voix du narrateur

Julien Desmet

Le rôle de la très jeune fille a été créé par Déborah Rouach

Scénographie et lumière Eric Soyer

Costumes Isabelle Deffin

Son François Leymarie

Vidéo Renaud Rubiano

Musique originale Antonin Leymarie

Collaborateur artistique Philippe Carbonneaux

Assistant mise en scène à la création Pierre-Yves Le Borgne



A la mort de sa mère, une très jeune fille se fait la promesse de ne jamais cesser de penser à elle plus de cinq minutes... Elle suit son père dans une maison de verre où les attend une nouvelle famille. Cette Cendrillon nous parle du deuil, du désir de vivre, du pouvoir de l’imagination et des mensonges des adultes. Avec une délicatesse qui n’exclut pas l’humour, Joël Pommerat aborde encore une fois les questions graves et vitales de toute enfance.



Paris, Théâtre de la Porte Saint-Martin / Petit Saint-Martin, soirée du 24 juin 2022
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Cendrillon



Cette réécriture théâtrale du conte de Cendrillon réalisée par Pommerat en 2011 est une véritable réussite !



Sandra est une jeune fille qui n'accepte pas la mort de sa mère mais surtout, qui interprète mal ses dernières paroles.



Elle se force alors à penser à elle toutes les 5 minutes et se punit si elle oublie. D'ailleurs, son quotidien n'est pas simple, sa marâtre de belle-mère (superficielle et n'acceptant pas de vieillir) lui rend son quotidien bien difficile et la bonne fée est déchue depuis un bon moment...



Pourtant un jour, elle va rencontrer le prince et lui permettra d'accepter sa réalité ... Ce qui l'aidera elle aussi.



Sans tout vous spoiler, cette pièce traite de sujets actuels et fait vraiment écho dans la société. Surtout, elle questionne sur la perception du deuil. Elle se lit rapidement et est une réécriture très moderne du conte, ce que j'ai beaucoup apprécié.
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Cendrillon

Imaginez une scène de théâtre sur laquelle est jouée – Cendrillon -, la pièce de Joël Pommerat.

Dites-vous ensuite que vous avez affaire à un dramaturge qui a pour credo :

" Je n'écris pas des pièces, j'écris des spectacles. Le texte c'est ce qui vient après, c'est ce qui reste après le théâtre. Le théâtre se voit, s'entend, Ça bouge, ça fait du bruit. Le théâtre c'est la représentation."

Et pour mettre en pratique cette profession de foi, Joël Pommerat " métamorphose le plateau " faisant appel à des jeux de lumière nombreux, changeants, stroboscopiques, un bruitage où les voix sont relayées par des micros HF, à la musique, au chant, à la danse.

Des images s'invitent par l'intermédiaire de la vidéo pour "faire fusionner tous les arts de la représentation afin de susciter l'émerveillement soutenu par le rythme du spectacle et sa beauté plastique."



Dites-vous ensuite que Pommerat écrit conjointement texte et mise en scène.

Explication : " Pommerat a développé un processus d'écriture dont la première étape est la scène. Il n'écrit pas le texte avant les répétitions. Il écrit avec la scène " instant par instant ", c'est-à-dire en partant de la présence des acteurs en interaction avec l'espace, la lumière et le son, qui sont simultanément élaborés pour atteindre la plus grande justesse possible.

Les premières notes de - Cendrillon – datent de mai 2010. Le processus de création s'est ensuite étalé de mai à octobre 2011. En mai a eu lieu à Bruxelles un stage-casting afin de choisir la distribution. Pendant ce stage, certains membres de l'équipe artistique ( vidéo, musique ) ont aussi commencé à explorer avec Pommerat, dont ils avaient lu les notes, quelques éléments spectaculaires. Mais l'entrée en écriture s'est vraiment concrétisée lors d'une deuxième étape de travail en juillet avec les acteurs et l'équipe. La recherche a continué pendant une troisième session de répétitions au Théâtre national de Bruxelles en septembre et jusqu'à la première. Ainsi, Pommerat écrit texte et spectacle conjointement. Dans les jours qui suivent la première, il continue d'ailleurs à les modifier à l'épreuve des représentations et du public."



C'est dire si lorsque vous avez le texte entre les mains vous réalisez qu'il vous manque tout ou partie de l'essentiel, et ce même si l'on rassure le lecteur que vous êtes par une phrase du genre " le texte possède cependant une valeur propre qui rend possible sa lecture et son analyse..."



Soit, on n'a pas le choix... place à la découverte du texte.

Pommerat écrit ou réécrit des contes.

Parce que le conte " relève d'une tradition orale et communautaire "

"Un conte, c'est une durée, celle d'un récit, et c'est un état d'être ensemble. Pour être ensemble, si je veux intéresser le spectateur et être avec lui, je vais travailler sur ses représentations. C'est une forme de stratégie. Je suis un conteur, je vais agir avec son imaginaire."

Et chaque spectateur apporte sa part d'imaginaire.

Contrairement aux idées reçues, le conte ne s'adressait pas originellement aux enfants.

Et si Pommerat les a "expérimentés" avec ses propres filles, il a très vite compris que " ces histoires ont imprégné son caractère et influencé des choix importants de son existence."

Ses contes lui permettent de " jouer à retrouver ce que c'est, vraiment, souffrir, éprouver sans subir...Il invite les spectateurs à expérimenter ce qui dans la vie les terrasserait : la peur, le mal, la mort etc."



L'histoire est contée à partir d'un narrateur ; le narrateur étant un guide qui nous invite à entrer dans l'histoire, un accompagnateur éclairé et bienveillant qui aiguise nos appétits et tempère nos tempêtes.



Dans cette version de - Cendrillon – revisitée par Pommerat, le narrateur est une narratrice, dont la voix off est dotée d'un accent italien ( précisé dans les notes ).

Cette version est plus proche de celle des frères Grimm que de celle de Perrault en ce sens que tout part de la mort de la mère de Cendrillon et de ce qui résulte de dette mort.

Cendrillon alias Sandra dite Cendrier ( surnom donné par ses soeurs car Sandra empeste le tabac ; son père fume en cachette de sa future femme et " compromet " sa fille, de même que la fée qui n'arrive pas à se déprendre de cette addiction ) perd sa mère et va être soudain confrontée à la mort et au deuil impossible.

Avant de mourir sa mère lui a murmuré à l'oreille des mots que la " très jeune fille " ( ainsi désignée dans la pièce ) a mal interprétés :

-"Ma petite fille , quand je ne serai plus là il ne faudra jamais que tu cesses de penser à moi. Tant que tu penseras à moi tout le temps sans jamais m'oublier... je resterai en vie quelque part."

Ce à quoi Sandra répond :

-" Maman, je te promets que je penserai à toi à chaque instant. J'ai très bien compris que c'est grâce à ça que tu mourras pas en vrai et que tu resteras en vie dans un endroit secret invisible tenu par des oiseaux.

J'ai très bien compris que si je laissais passer plus de cinq minutes sans penser à toi ça te ferait mourir en vrai. Ne t'inquiète pas maman, je ne te laisserai pas mourir en vrai, tu peux compter sur moi. Tous les jours, à chaque minute et pendant toute ma vie, tu seras dans mes pensées...N'aie pas peur."

Dès lors Sandra s'enferme dans ce processus de deuil impossible que beaucoup connaissent... Lorsque j'ai perdu ma fille aînée et que je courais un semi-marathon, je demandais que le speaker prononce au franchissement de la ligne d'arrivée le nom de ma fille défunte, j'ai pas mal de bouquins qui ont été dédicacés par André Velter, Atiq Rahimi, Chahdortt Djavann etc au nom de ma fille, tous les 1ers décembre moi l'agnostique je faisais dire une messe pour elle qui était athée afin que le prêtre dise son nom... je ne voulais pas la laisser vraiment mourir... et comme la Cendrillon-Sandra de Pommerat, j'aurais très bien pu acquérir une montre qui sonne toutes les cinq minutes nuit et jour pour être sûr de ne pas cesser de penser à elle.

Sandra vit donc son deuil impossible dans la dépréciation d'elle-même et dans la culpabilité, n'étant pas forcément à la hauteur de sa promesse.

Vient très vite le jour où son père lui annonce qu'il veut refaire sa vie.

Tous deux partent vivre dans la maison de verre de celle qui va être la future épouse et la belle-mère, laquelle a deux filles, " soeur la grande " et " soeur la petite ".

On loge Sandra au sous-sol dans une pièce délabrée, sans fenêtre, avec pour tout mobilier un vieux lit, une armoire et une chaise.

On lui confie toutes les tâches domestiques les plus ingrates qu'elle accueille avec la gratitude des pénitentes.

Le temps passe... un beau matin la famille reçoit une invitation du Palais royal pour une réception en l'honneur du " très jeune prince ".

Alors que la belle-mère et les deux soeurs ne se sentent plus de joie, Sandra fait la connaissance de sa fée. Une fée blasée qui, bien qu'immortelle, meurt d'ennui depuis 300 ans et pimente sa vie de fée en troquant la magie magique contre la magie amateur ; l'échec de ses tours de magie pimente sa vie...



Tous les éléments du conte ( la souffrance de Cendrillon, le bal, la rencontre avec le prince, le soulier ) sont là mais repris ou redistribués à la façon Pommerat.

J'ai précédemment évoqué sa vision très personnelle de la fée, le prince n'est pas un prince charmant mais un enfant grassouillet prisonnier lui aussi d'un deuil impossible... Il y a des trouvailles qui mettent en scène la chirurgie esthétique, une vision des oiseaux très " verrière " etc... le tout ponctué par des dialogues écrits dans une langue contemporaine, parfois vulgaire, presque toujours " orale ", mais enlevée, alerte et percutante.

Bien évidemment les interprétations possibles sont multiples et on ne peut manquer de se référer à Freud, à la psychanalyse, à Bettelheim...



J'ai pris beaucoup de plaisir à lire cette pièce, qui m'a touché et fait sourire tout autant.

Ce conte est revisité avec verve, émotion, talent et vous rappelle que les bons contes gardent leurs amis.

Compte tenu de ce que j'ai repris dans ma longue introduction, c'est plus que beaucoup d'autres une pièce à voir sur scène.







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Ça ira, tome 1 : Fin de Louis

Quel ennui!!! Je ne lis que des commentaires dithyrambiques mais comment est ce possible ? Quelle logorrhée! Non pas que le texte soit mal écrit, au contraire, il s ‘agit d’un bel exercice oratoire mais il faut vraiment avoir envie d’écouter des heures durant ces pseudo députés s’écharper au sujet des taxes, des impôts, de l’église etc etc…. Je me suis terriblement ennuyée .Pour moi ce n’est pas du théâtre et encore moins du divertissement.
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Cendrillon

Joël Pommerat propose une réécriture moderne du célèbre conte de Cendrillon, alias Sandra, alias « la très jeune fille ». Si l’on retrouve les étapes incontournables – le travail de la jeune fille et la méchanceté de la marâtre, la fête, la rencontre avec le prince, les histoires de chaussures… –, j’en ai apprécié certaines différences. À commencer par le fait que le mariage n’est ni le but ni la finalité de cette histoire. À la place, c’est la mort de la mère qui acquiert une importance prépondérante. Cette Cendrillon-là nous parle avant tout du deuil, de la culpabilité, de la peur d’oublier les morts : à cause de quelques mots mal compris, la très jeune fille s’empêche de vivre pour ne pas faire mourir sa mère. S’ensuit un comportement quelque peu masochiste qui mettra parfois mal à l’aise, Sandra recherchant ainsi l’inconfort de sa chambre-cave, les tâches ingrates et répugnantes, les insultes et la mise à l’écart, percevant ces abus comme une punition bien méritée.

Cette pièce parle également des enfants, de leur place, de la façon dont les adultes les traitent : on leur ment, on leur dissimule la vérité (parfois pour les protéger), on leur demande de se taire, on ignore ou on minimise leurs peines… Et puis, il y a la jalousie de la belle-mère, envers l’absente trop présente à travers sa fille, envers ses propres descendantes, potentielles rivales à sa beauté. Elle devient insupportable, détestable – comme toute marâtre de conte qui se respecte – mais en même temps, on devine aussi ses fêlures, nées d’un rêve d’une autre vie – un rêve qu’elle refuse d’appeler ainsi pour le faire réalité –, d’une ambition inassouvie, d’une peur de vieillir. Tous les personnages, au-delà des archétypes, sont en même temps très humains. Très imparfaits. Ce qui permet, peut-être, de comprendre la passivité du père face aux maltraitances subies par sa fille. On dépasse la simple dualité entre les méchantes et la douce et bonne jeune fille.

Certaines scènes sont dérangeantes, d’autres absurdes et cocasses, apportant une touche de légèreté, à travers le ridicule fréquent des personnages ou cette fée qui, par ses talents discutables et sa passion pour la fausse magie qui « peut rater », ne ferait pas tache entre le Merlin et la Dame du lac de Kaamelott.



J’ai pu voir une captation et, outre l’excellence des comédiennes et comédien, le rendu était d’autant plus intéressant avec le jeu entre ce que l’on entend et ce que l’on voit (la voix de la narratrice couplée avec la gestuelle d’un homme, la tristesse du texte avec le grotesque de certaines scènes…).

Je dois avouer que je regrette certaines expressions vulgaires qui, certes, modernise le texte, mais ne sont pas forcément celle que j’aime trouver dans une histoire.



Intelligente, décalée, parfois pesante parfois drôle, cette pièce résolument moderne donne un bon coup de plumeau à ce conte. La morale n’est point « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants », mais parle de la nécessité – tout en en reconnaissant la difficulté – de faire son deuil pour avoir des souvenirs plus apaisés de la personne disparue et continuer sa propre vie.

Je pensais avoir aimé sans plus, mais je m’aperçois en écrivant cette chronique que j’ai en réalité passé un bon moment – plus encore en regardant la pièce – et qu’elle a suscité quelques réflexions.
Lien : https://oursebibliophile.wor..
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Cendrillon

J'ai bien aimé la réécriture de Pommerat qui inclue de nouvelles scènes, modifie et change même l'intrigue du conte !

La pièce est vraiment facile à lire puisque ce n'est que de l'oral (dialogues) retranscrit mot pour mot. Pommerat garde des éléments du merveilleux malgré la modernisation du conte.

Cela fera peut-être aimer les contes à certains.



Bonne lecture !
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Cendrillon

Joël Pommerat, dont j'ai tenu à comprendre la démarche dans l'apparat-critique abondant de cette édition, revisite le conte indo-européen de Cendrillon et l'adapte pour le théâtre. Dans une version contemporaine qui fait toutefois des clins d’œil au siècle de Perrault, tout en se fondant essentiellement sur la version des frères Grimm, le dramaturge (qui n'a pas séparé le temps d'écriture de celui de la scénographie) s'attache à répondre aux questions que je me suis toujours posé sur ce qui me paraissait être des incohérentes narratives... Et il y répond bien ! En inscrivant Sandra-Cendrier-Cendrillon dans une démarche de deuil mal fondé, il parvient à expliquer que la fille du maître de maison puisse se retrouver à être la souillon du lieu. Le merveilleux du conte va également être évacué en douceur (la marraine fée est toujours là), de même que la fin traditionnelle du conte, qui sacrifie à la fois à la société d'aujourd'hui et à sa conception d'une fin heureuse.

Difficile de classer cette pièce ailleurs que dans le fourre-tout du drame, bien que tragi-comédie lui irait mieux, en effet, malgré les passages tragiques et les manifestations dérangeantes de cruauté, on sourit, on trouve un quiproquo assez savoureux (mais cruel également et que le personnage le plus odieux de la pièce en soit victime ne le rend pas forcément très très gai).

C'est une découverte très intéressante ! J'ai hâte de voir la mise en scène de Pommerat car le décor est tout à fait exceptionnel !
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Le petit Chaperon rouge

Pas mal pour un conte revisité. Cependant à lire je n'ai pas trouvé ça super exceptionnel. J'avais adoré la pièce de théâtre Cendrillon (au théâtre, pas le livre) et du coup lorsque je suis tombée sur Le petit chaperon rouge je l'ai acheté. Mais lire n'a pas la même saveur...
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Cendrillon

Cette pièce se dévore d’une traite ! C’est drôle, c’est triste, on a aussi bien de l’empathie pour Cendrillon que l’envie de se moquer d’elle. Il faut avouer que contrairement à la version magique de Walt Disney, celle de Joël Pommerat prête davantage à sourire, car oui, il faut l’admettre, Cendrillon est légèrement tarée sur les bords, très très naïve, et parfois même casse-pieds. C’est donc une pièce vraiment plaisante à lire. Le père n’est pas du tout inconsolable, il semble même se remettre assez vite de la mort de sa femme, et même s’il s’entend au départ à merveille avec sa nouvelle épouse, les nuages noirs vont arriver plus rapidement que prévu. Mais ce qui m’a encore plus plu dans cette pièce signée Pommerat, c’est le final.
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Le petit Chaperon rouge

Vous la connaissez tous l’histoire du Petit Chaperon Rouge, cette petite fille emmitouflée dans son manteau rouge, traversant la forêt pour rendre visite à sa grand-mère et lui apporter de bonnes choses à manger. Seulement voilà, sur son chemin, elle croise le Grand Méchant Loup. Naïve, l’enfant va lui indiquer le chemin pour se rendre jusqu’à la maison de sa grand-mère…Il n’en fera qu’une bouchée. Tout comme elle. Une fin tragique qui ne laisse généralement pas le jeune public insensible.
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Cendrillon (pièce de théâtre de Joël Pommerat)

Dans quel type de maison habitent la belle-mère de Sandra et ses deux filles ?

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